Il n'y a pas que du bon dans la révolution - (PV K.)

- Talkin' about a revolution

Ce n'était plus Poudlard, tout simplement.

Tout s'était métamorphosé. Les Mangemorts exerçaient de plus en plus leur régime sévère ou régnait terreur et obéissance. Les visages s'étaient durcis, la lueur dans les yeux des plus jeunes s'était éteinte. Personne n'osait se demander quand sonnerait la fin du chaos, parce que depuis quelques mois, personne n'avait vu une quelconque amélioration. Les cours étaient les mêmes, mais semblaient étranges pour Katie. Elle avait l'impression que les professeurs se disaient qu'ils n'avaient rien à faire là, qu'ils ne savaient plus ce qui les retenaient en salle de classe. Il y avait sans cesse ce sentiment d'impuissance dans le regard de nos mentors, cela faisait froid dans le dos. On avait l'impression qu'ils n'étaient que de vulgaires marionnettes qui regardaient leurs élèves se faire battre sous leurs yeux, incapables de prendre la moindre décision.

Katie était encore trop affaiblie pour pouvoir s'affirmer, à vrai dire ce n'était pas son but pour l'instant. Elle préférait jouer au jeu où elle était le plus forte : se fondre dans la masse. Mais ces temps-ci, elle y arrivait de moins en moins. De nombreuses rumeurs circulaient dans le château sur les otages, mais bien sûr Katie n'y faisait pas attention. Elle avait beaucoup mieux à faire, mais entendre des idioties en temps de guerre était tout de même très éprouvant. Elle s’inquiétait sans cesse, pour ses amis, sa famille... Elle avait sans cesse cette boule au ventre qui parfois la terrorisait, l'empêchait de marcher, la bloquait sur place, quand elle pensait à sa famille. Elle s'imaginait toute sorte de scénarios improbables et avait toujours peur que quelqu'un s'en prenne à ses parents, son frère ou ses sœurs...
Elle pensait à Ulrich, elle se demandait pourquoi il n'était pas venu la voir à l'infirmerie. Pourquoi, lui, d'habitude si gentil et toujours présent pour Katie, n'avait pas pointé le bout de son nez juste cinq minutes pour lui tenir la main ou l'embrasser ? Elle n'arrêtait pas de se demander si il lui était arrivé quelque chose à lui aussi, ou si étrangement, il était lié mystérieusement à cette affaire.
Mais Katie trouvait ça complètement absurde. Elle se trouvait très bête de penser que, comme Ulrich était à Serpentard, il avait un lien quelconque avec les Mangemorts. Katie retrouvait en Ulrich son père mort au combat, ce Serpentard si généreux, qui était Auror malgré les apparences. Cela semblait bizarre aux yeux des autres. Un Serpentard contre les Mangemorts, c'est absurde ! Et pourtant c'était bien vrai, on change avec le temps, avec l'amour, avec la vie.
Elle était tellement fière de sa famille et trop amoureuse d'Ulrich pour se dire que c'était un menteur, elle avait confiance en lui, même si elle était extrêmement inquiète.

Il était vraiment temps d'affirmer notre rébellion, mais comment ? Katie avait beau se creuser la tête, elle n'aimait pas l'idée de s'enfermer définitivement dans un clan. Certes, elle était pour la survie et l'honneur de Poudlard, mais elle ne voulait pas s'attirer d'autres ennuis. Tout cela ne sentait pas bon, elle en était convaincue. Elle préférait réfléchir pour elle-même, émettre ses propres hypothèses et se faire des alliés. Oui... Des alliés. Des amis sur qui compter, des gens qui partageaient son opinion, ses idées et ses projets. Des gens à qui elle ferrait confiance, à qui elle se confierait entièrement. Mais elle savait très bien que ces personnes ne seraient que deux ou trois, mais c'était justement ce qui lui fallait. Elle se voyait très mal intégrer la résistance maintenant, elle voulait d'abord creuser le secret pour découvrir ce qui se cachait en dessous, mais elle avait peur d'être embarquée là-dedans malencontreusement ou de tomber sur quelque chose de grave. Elle n'arrivait plus à prendre la moindre décision...

Le mois de Septembre et la rentrée dominaient paisiblement Poudlard. Cela faisait sept ans à présent, sept ans qu'elle franchissait une nouvelle fois l'école et ça pour la dernière fois. Cette année serait sûrement décisive, dans ses études et dans son cœur. Poudlard était sa deuxième maison et un vent de nostalgie soufflait dans les esprits de tous les septième années...
Katie marchait tranquillement dans les couloirs, prenant le chemin de la Grande Salle. Elle essayait tant bien que de mal de ne pas se faire remarquer dans la foule, elle ne parlait à personne. Pourtant, tout le monde lui lançait des regards en coins ou se retournait sur son passage. A force elle s'obligeait à ne plus faire attention, mais pour elle, c'était très dur de se retrouver une nouvelle fois comparée à une bestiole de foire.
Elle s'assit en soupirant à la table des Serdaigle et s'aperçut que personne n'osait s'asseoir près d'elle. Elle jeta un coup d’œil au-dessus de sa tête. Ce soir, le ciel commençait à s'assombrir, la nuit arrivait. Les nuages étaient très épais, il faisait un temps affreux à vrai dire.

Devant elle, des tonnes de plateaux, de soupières et d'assiettes en or étaient remplis d'aliments aux fumets délicieux qui mettait l'eau à la bouche de Katie. Depuis son séjour à l'infirmerie, elle avait constamment faim. Elle devait reprendre des forces c'était normal. Elle se servit d'un peu de tout : cuisses de poulets, spaghettis, légumes sautés, pain complet, part de quiche et de nombreux verres de jus de citrouille.
Rassasiée, elle sortit de la Grande Salle seule, comme d'habitude et prit le chemin de son dortoir. En grimpant les marches, elle se rendit compte que son sac était affreusement lourd et qu'elle ferrait ses recherches à la bibliothèque une autre fois car elle préférait se reposer après ce très copieux repas.
Une fois arrivée dans la tour de Serdaigle, elle déposa son sac au pied de son lit et s'approcha du miroir de la salle de bain. Elle eu du mal à se reconnaître, comme chaque matin après s'être levée. Elle avait la nette impression d'avoir changée. Bien sûr, elle portait un énorme pansement à l'arcade sourcilière droite depuis la lutte contre le Mangemort qui l'avait envoyée valser d'un coup de baguette et où sa tête était retombée violemment sur le sol, heurtant de plein fouet son œil. Ce dernier était gonflé, d'une affreuse couleur qui tirait sur le violet et qui changeait de jour en jour. Le pansement blanc recouvrait presque l'intégralité de sa tempe et était très voyant. Katie avait renoncer à le cacher à travers sa frange car c'était encore plus ridicule de cacher une chose aussi grosse et voyante.
Elle se retira de la salle de bain, voyant que l'hématome ne s'était toujours pas atténué. Elle descendit tranquillement les marches, les mains dans les poches. Aujourd'hui, elle portait un jean troué aux genoux et un pull épais, assez court ainsi que de simples Converse noires qu'elle avait depuis ses treize ans. Ses cheveux étaient décoiffés, comme d'habitude et elle ne portait aucune trace de maquillage, ni de bijoux. C'était étrange, car en temps normal Katie portait très peu d'importance à son apparence, sauf en présence d'Ulrich où elle faisait toujours un effort. Cela faisait un mois qu'elle ne l'avait pas vu, c'est pourquoi elle reprenait ses vieilles habitudes d'adolescente.
Ce soir, les couloirs étaient déserts ou souvent habités par des bandes d'élèves qui traînaient avant le couvre-feu. Katie n'avait envie de rien, juste de flâner dans les couloirs, comme elle aimait souvent faire quand elle s'ennuyait. Soudain, alors qu'elle atteignait les dernières marches de l'escalier du sixième étage, elle entendit plusieurs voix entremêlées qui ne semblait pas très sympathiques. Elle commença à accélérer l'allure, espérant ne pas trouver encore une fois un jeune élève se faire martyriser par des Serpentard. Mais cette fois-ci, c'était très différent, c'était le contraire même ! Katie ne vit pas très bien ce qui s'était passé, cependant, elle avait bien vu une jeune fille se faire brutaliser par quatre gosses de Gryffondors qui bousculèrent Katie lorsqu'ils passèrent près d'elle en ricanant. La jeune fille en face d'elle ramassa précipitamment ses affaires et tête-baissée, s'en alla en courant vers la salle de classe vide la plus proche en fermant brutalement la porte.
La jeune Serdaigle augmenta l'allure de ses pas tout en se demandant bien ce qui s'était passé. Une longue flaque d'encre noire s'étaient répandue sur le sol après la lutte et une plume avait été oubliée. Katie coinça la plume dans l'une de ses poches et passa un rapide coup de baguette sur la tâche noire sur le carrelage pour qu'elle disparaisse histoire que le concierge ne trouve pas ça trop suspect.

Katie s'arrêta alors devant la porte. Devait-elle l'ouvrir ? Elle hésitait, car elle ne savait pas qui se trouvait derrière l'entrée. Elle prit une grande bouffée d'air et posa sa main presque tremblante sur la poignée de la porte qu'elle ouvrit doucement.
C'était une vieille salle poussiéreuse que les professeurs utilisaient rarement. Elle servait pour les travaux pratiques, mais n'était pas très adaptée. Elle était souvent libre et accessible, mais pourtant personne n'osait y aller de peur de se faire gronder. Il y avait un grand tableau noir et plusieurs tables taguées d'encre et d'inscriptions. De gros rideaux sablonneux d'un rouge foncé délavé pendaient lamentablement aux fenêtres et donnaient un air sinistre à la pièce.
Au fond de la salle, la jeune fille en question, aux cheveux roux flamboyants étaient assise sur le sol. Sa tête était enfouie dans son visage et son corps était ponctué de petits tremblements qui signifiait qu'elle pleurait. Katie hésita une nouvelle fois à se rapprocher. Elle referma la porte derrière elle d'un bruit sec et s'approcha d'un pas. Le cœur battant, elle semblait néanmoins connaître cette jeune fille. Elle paraissait grande et âgée, ses cheveux étaient communs à Katie ainsi que son style de vêtements et la forme, la couleur de son sac que Katie connaissait bien.

- Heather ? demanda Katie d'une voix apeurée.

Cette fois-ci, aucuns doutes possibles, c'était bien son amie qui pleurait de tout son cœur devant Katie. Elle se précipita sur elle en posant brutalement ses genoux sur le sol pour être à sa hauteur et lui prit doucement les coudes d'un geste qui se voulait réconfortant.
Katie se rappela soudain des jeunes garçons qu'elle avait vus dans le couloir et qui se foutait sans scrupule de la tête d'Heather. Katie fronça les sourcils. Mais dans quel monde vivait-on ! Katie trouvait ça de plus en plus bizarre, illogique. Heather allait mal, mais pourquoi ? Katie devait bien se douter que la vert et argent souffrait également des regards moqueurs ou interrogateurs de l'école entière, mais contrairement à la Serdaigle, la jeune fille était beaucoup plus affirmée et ne s'était jamais laissée marcher dessus.
Katie ne savait pas quoi faire pour qu'elle arrêter de pleurer. Elle n'avait pas envie de faire de gaffes, c'est pourquoi elle préférait attendre qu'Heather se calme et puisse trouver le courage de parler à Katie. Il fallait qu'elle sache que son amie était là pour elle et que c'était le moment de lui parler et de vider son cœur, car Katie le voyait bien, ça n'allait pas du tout.
En même temps, c'était compréhensible et Heather était loin d'être la seule dans cet état. Mais Katie, elle, n'avait aucun sentiment de chagrin, mais plutôt un énorme stress inconnu qui l'empêchait de dormir la nuit.
Tout en se tâtant doucement son sourcil recouvert de l'énorme pansement, Katie essayait de trouver quelque chose à lui dire. Après quelques longues minutes de silence où l'on entendait que les sanglots déchirants de la Serpentard, Katie lui caressa doucement le bras en signe de réconfort et d'une voix plutôt triste, sinistre même, Katie marmonna :

- Drôle de rentrée, hein...

C'était tellement étrange à expliquer, trop bizarre pour le penser ou pour en parler. Cette sensation de vide qui nous entourait, cette incompréhension totale qui nous rendait fou. Tous ces risques pour rien au final, ainsi que tous ces regards du coin de l’œil. C'était vraiment maintenant que Katie remarquait que les gens étaient réellement de sales hypocrites. Ils gâchaient toujours tout, et ça pour n'importe quoi. Katie ne comptait plus le nombre de fois où elle était tombée amoureuse et tout était tombé en miette à cause d'une copine trop curieuse ou trop jalouse. Et bien sûr, il y avait les rumeurs aussi invraisemblables les unes que les autres qui se déformaient au fil des jours. Normalement, plus on prenait de l'âge plus on mûrissait, mais malheureusement, ce n'était pas toujours ça dans tous les esprits. A seize ans, Katie commençait déjà à devenir une vraie femme et était plutôt mature pour son âge, elle arrivait donc plutôt facilement à ne plus se laisser avoir par les mauvaises langues, elle était beaucoup plus forte qu'avant et c'est pourquoi elle ne se faisait plus trop importuner.
Heather, elle, semblait au contraire abattue. Katie semblait lire dans ses larmes la détresse qui roulait sur ses joues à présent. Cela lui serrait le cœur et sa gorge se serra douloureusement. Elle avait du mal à poser son regard ailleurs tandis qu'Heather reprenait son calme. Son corps tremblait sous le coup de l'émotion et son visage était enfoui dans ses mains qui étaient complètement crispées.
Dans un soupir triste, Katie se rapprocha d'Heather et se plaça près de son flanc gauche. Elle se colla contre son corps et plaça son bras contre son épaule. La jeune Serpentard essayait d'étouffer ses sanglots, mais elle n'y arrivait pas. Katie se contentait de lui soutenir l'épaule en lui frottant vigoureusement la peau pour la réconforter et la réchauffer.

Après plusieurs minutes où l'on entendait juste les reniflements d'Heather, cette dernière se redressa tout doucement. Elle essuya d'un revers de main ses larmes qui ruisselaient sur ses joues. Katie se pencha sur son visage et lui sourit doucement. La jeune fille plongea ses yeux marrons dans ceux d'Heather. Katie espérait qu'Heather pourrait lire un message de confiance et d'amitié, car elle en avait besoin c'était clair et net. C'était très dur de voir l'une de ses amies en plein désespoir. Katie comprenait très bien, car son amie appartenait à la maison des serpents et elle savait très bien qu'en matière d'honneur et de pureté de sang, ils étaient intransigeants. Ce qui était déplorable, c'était leur manque de compassion envers les autres et leur égoïsme sans fin. Katie se demandait de plus en plus souvent ce qu'Heather faisait vraiment dans la maison de Salazar Serpentard. C'était tellement bizarre comme situation, mais c'était sûrement la maison qui correspondait le mieux à la jolie rousse en raison de son caractère très fort.

- C'est la première fois que je regrette de ne pas être restée chez moi...

Katie leva les yeux vers elle, surprise. Elle s'était redressée et parlait d'une voix rauque, dure. Katie regardait Heather avec insistance, observant le moindre de ses gestes. C'est alors que Katie se rendit compte qu'elle avait une magnifique jeune femme devant elle. Son visage aux multiples tâches de rousseur possédait de grands yeux verts ainsi qu'un sourire aux lèvres beiges. Heather avait un corps parfait, très fin et plutôt sec et ses cheveux étaient d'un roux vif étonnamment flamboyant.
La Serdaigle baissa les yeux vers ses chaussures sales en pensant que son amie avait raison. Katie aurait tant voulu rejoindre sa famille après la bataille, elle ne l'avait que quelques jours, même si c'était normal et avait fait semblant d'aller bien alors que ses bleus et ses cris étouffés dans son oreiller la nuit démontraient son mal-être qui la rongeait petit à petit.

- Si tu savais comme tout me manque. Ma famille surtout... fit Katie, le regard toujours fixé sur ses pieds, baissant un peu la tête. Les longs cheveux bruns de la jeune fille coulèrent alors doucement vers ses yeux, cachant son visage de ses longues mèches abîmées.

- Je ne pensais pas que les gens seraient aussi bêtes. Et toi, ça se passe comment? demanda Heather, d'un ton rude.

Katie bascula sa tête vers l'arrière, la posant contre le mur derrière elles. Elle regardait le plafond aussi poussiéreux que le reste de la salle. Soudain, sa main vint se placer automatiquement dans celle d'Heather, comme le jour de la bataille. La main d'Heather était très fine et glacée. Celle de Katie, au contraire était brûlante et beaucoup plus sèche que celle de son amie. Les phalanges de la Serpentard étaient blessées, elles étaient marqués de profondes marques de dents qui maintenant formaient d'affreuses cicatrices qui ne s'étaient pas encore refermées entièrement. Katie elle, avait le majeur et l'annulaire enroulés dans un bandage qui ne tenait plus très bien.
C'était dur, très dur pour Katie. Une vague d'émotion l'inonda, car Katie savait où Heather voulait en venir ou du moins, la Serdaigle se doutait bien que son amie était plus au moins "au courant" ou qu'elle se doutait de quelque chose vis-à-vis d'Ulrich. Katie essayait d'avaler le sanglot qui se formait dans sa gorge, mais celle-ci était tellement nouée qu'elle lui faisait mal. Dans un calme absolu, elle répondit à Heather en articulant sur chaque mots :

- Les gens sont bêtes, cela fait longtemps que je le sais Heather.

Elle leva la tête une nouvelle fois vers le plafond, les lèvres tremblantes et serrant encore un peu plus sa main dans celle de son amie. Après un long silence, elle posa sa main libre contre ses yeux, puis se prit le front dans les mains qui étaient de plus en plus frémissantes.

- Moi, je crois que ça va, reprit Katie d'une voix mal-contrôlée. J'ai l'impression d'être traitée comme une bête de foire, comme une merde en fait...

Katie fermait les yeux à présent. Elle entendait encore les reniflements d'Heather et aurait bien voulu pleurer, mais c'était plus fort qu'elle. Elle se sentait obligée de se retenir de pleurer car elle savait bien que ce n'était pas la solution, en tout cas, pas maintenant.

- Je ne comprends pas ce qui nous arrive Heather. Je n'arrive pas à m'y faire. Pourquoi ? Pourquoi nous ?

Pourquoi. Ce mot résonnait dans l'esprit de Katie depuis la lutte et tant que les Mangemorts seraient les rois, "pourquoi" resterait toujours le fin mot de l'histoire, la question que l'on se poserait ou se pose tous au moins une fois à Poudlard...

C'était tellement agréable de pouvoir se confier à une personne comme Heather. Tout devenait clair, simple avec elle. Les mots coulaient tout seuls, les idées ne se mélangeaient pas les unes aux autres. C'était tellement bien de s'asseoir sur un sol poussiéreux, n'en avoir rien à faire de sa tenue, de ses cheveux et parler. Parler de ses inquiétudes, de ne pas se sentir jugée et sentir à travers la chaleur de la paume d'Heather, un réconfort maternel, amical que Katie n'avait pas eu depuis très longtemps.
C'était étrange à quel point les deux filles s'étaient rapprochées en aussi peu de temps et d'une manière aussi singulière. A croire que le sang et la douleur liaient réellement. C'était vraiment sinistre en fin de compte. On aurait pu penser à une amitié rayonnante, à deux grands sourires que rien n'ébranleraient, mais la vie ne fonctionnait décidement pas de cette manière, surtout à Poudlard. Katie réalisait à quel point c'était dur de devenir une femme et surtout une sorcière. Il lui arrivait parfois de regretter ce trop plein de responsabilités qui lui inondait le cerveau. Elle voulait devenir quelqu'un, devenir enfin elle-même et Poudlard devenait oppressant à force. Katie voulait plier bagages et voyager, découvrir de nouveaux horizons, cottoyer les cultures d'autres sorciers du monde entier, jouer du Quidditch en Australie et rencontrer l'amour de sa vie entre deux rizières.
Soudain, elle se mit à penser à Ulrich, ce grand blond qu'elle aimait. Bizarrement, Katie se mit à avoir peur de ce qu'elle venait de s'imaginer...
L'amour de sa vie ? Elle avait toujours pensé que c'était lui, l'homme avec qui elle aurait vécu après Poudlard. Pourquoi est-ce qu'elle se remettait en question maintenant ? Etait-il trop tard pour changer ? Pour renoncer à ses rêves d'enfant et changer de cap ?
Et maintenant elle avait honte, elle se sentait trahir son bien-aimé. Elle aurait voulu enfoncer ses ongles dans la main d'Heather et hurler, crier son désespoir. Comment avait-elle pu penser à un nouvel amour alors qu'Ulrich avait toujours été là pour elle ? Elle se sentait tellement infidèle de tout cet amour, mais elle se sentait tellement asphyxiée. Une fois encore, Katie ne savait plus comment résonner, c'était devenu un cercle vicieux.

- J'avais essayé de me persuader du contraire, mais je crois que tu as raison.

Un long soupir sortit de la gorge de Katie. Heather était tellement entêtée, il lui avait fallu tout ce temps pour pouvoir enfin comprendre que les gens étaient égoïstes, même au sein de Poudlard.
Mais Katie se sentait soulagée que Heather soit sur la même longueur d'onde qu'elle. Elle avait les mêmes buts finalement et Katie commençait vraiment à penser que les Serpentard n'était pas tous aussi hautains qu'elle le pensait. En prenant l'exemple d'Ulrich et d'Heather, elle commençait à penser qu'elle avait vraiment jugé cette maison trop vite.

- On était au mauvais endroit au mauvais moment, j'imagine, répondit Heather en souriant légèrement. Et puis, on ne peut pas changer le cours des choses. L'important, c'est de rester unis, hein?

Après plusieurs secondes de silence, Katie tourna sa tête amochée vers celle d'Heather et l'ombre d'un sourire se dessina sur son visage, sur ses lèvres gercées par le froid de l'automne. Katie aimait son optimiste, sa façon de voir les choses, sans Heather tout aurait été différent.
La Serdaigle inspira une grande bouffée d'air pour réguler les battements de son cœur, et tout en plongeant ses yeux brillants dans ceux de l'Irlandaise elle murmura :

- Pourquoi est-ce que je te connais seulement maintenant ? Tu es apparue comme une éclaircie sur ma vie remplie de nuages sombres et tu me réchauffes tellement. J'ai l'impression que tu es un peu comme un nouveau soleil...

Katie n'attendit pas de réponse, elle tourna la tête et ferma les yeux. C'était une drôle de déclaration après tout, mais ça faisait du bien. Katie espérait que son amie ne s'inquiète pas, la jeune fille n'avait jamais été très à l'aise avec ce genre de choses, mais Katie était très à cheval là-dessus. La fidélité était sûrement la meilleure de ses qualités, mais pour Heather elle ne voulait pas devenir un fardeau. Elle voulait cultiver cette plante rare qui avait creusé ses racines entre les deux adolescentes et l'arroser chaque jour, l'aimer pour toujours.

- Parle moi d'Ulrich. Ça se passe bien? Comment vous gérez la situation?

C'était normal que ce sujet tombe sur la table, mais pourquoi Katie avait essayé de repousser ce sujet ? Elle commençait à avoir peur de ses sentiments vis-à-vis d'Ulrich. L'aimait-elle toujours autant ? Comme au premier jour, sur le pont le jour du bal de Noël ? Et pourquoi remettait-elle son amour en question ?
Jamais elle ne s'était sentie aussi bête et perdue. L'amour était une chose dont elle ne connaissait pas grand-chose au final et même en essayant de comprendre Ulrich, elle n'arrivait pas à prendre une décision.

- Je ne sais pas. J'ai l'impression qu'il m'évite, il n'est même pas venu me voir à l'infirmerie. Il me cache quelque chose, mais je ne veux pas m'interposer dans tout ça, je me sens tellement faible psychologiquement, je crois que je l'ai toujours été en fin de compte... Je ne veux pas que ça se finisse sur cette note, mais je ne peux m'empêcher de penser le pire...

Sa voix s'était brisée sur la dernière phrase et le sanglot dans sa gorge l'étranglait. Elle n'arrivait plus à prononcer un mot, elle se concentrait sur les larmes qui débordaient sur le coin de ses yeux, mais soudain elle ne put s'y résoudre et poussa un long gémissement. Les larmes coulèrent en cascade et frotta ses yeux pour les essuyer. Katie se sentait tellement nulle de pleurer maintenant à côté d'Heather. Elle était venue à sa rescousse et pas pour se faire réconforter. La Serdaigle se trouvait tellement égocentrique qu'elle se remit à pleurer de plus belle, en murmurant des "pardon" chaques secondes. Elle aurait voulu se lever et envoyer d'un coup de pied une chaise à l'autre bout de la pièce, hurler et se déchaîner contre le mur, mais elle se contenta de frapper le sol de son pied, les fesses toujours posée par terre.

On aurait dit une petite fille de huit ans qui piquait un caprice parce qu'elle était en colère. Katie avait l'impression d'être totalement ridicule, c'était nul de pleurer comme ça alors qu'Heather ne se sentait pas bien. Elle serra les poings et la main de son amie se crispa. Katie essaya de respirer bruyamment et de calmer ses hoquets.
Pourquoi pleurait-elle ? Elle n'en avait aucune idée, mais elle aurait voulu se cacher, partir très loin. Alors qu'elle pensait qu'elle avait enfin un semblant de confiance en elle, elle était déboussolée mais ne voulait pas que Heather aie pitié d'elle. Alors elle essuya ses larmes d'un revers de manche et après plusieurs minutes de silence elle s’apaisa enfin.
Son sourcil endommagé lui faisait mal, elle avait l'impression qu'il s'était rouvert. Elle soupira à nouveau. Que pensait Heather à présent ? Elle devait sûrement se dire que Katie était folle. Des larmes continuèrent de rouler sur ses joues, mais elle les laissait couler le long de son menton.
Katie s'approcha un peu plus de son amie et posa sa tête contre son épaule, elle comprit que tant que ses amis étaient là elle ne devait pas s'en faire. Tant pis si elle n'avait rien compris à l'amour, ce n'était pas le moment de se compliquer la vie après tout...

- Continues de briller, Heather...

Et c'est dans ce murmure qu'elle ferma les yeux et fit un léger sourire. Elle était ridicule, mais ça l'a faisait rire. Elle était tellement bien.

[FIN]