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Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER

 
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 Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER

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Hannah Blueberry


Hannah Blueberry
Élève de 6ème année



Féminin
Nombre de messages : 947
Localisation : Oh, partout : je marche, je cours, je sautille, je vole !
Date d'inscription : 23/04/2011

Feuille de personnage
Particularités: Poursuiveuse des Loups des Cîmes & créatrice de fiente mutante (j'excelle en la matière et j'ai des témoins)
Ami(e)s: Aure, Eilyne, Aaron, et patati et patata... et mon Cahyl.
Âme soeur: Toutes les Patacitrouilles de l'univers !

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MessageSujet: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeDim 9 Déc - 18:03

Spoiler:

    Je sens que ça coule, ça coule, ça dévale mes joues, ça s'écrase sur le sol, et ça ne s'arrête pas. Je ne savais pas que nos yeux pouvaient contenir une si grande quantité de larmes – ce n'est pas normal, d'où viennent-elle, ces larmes, d'où tant d'eau se cache dans nos corps, c'est forcément un truc magique aussi, pas vrai ? J'ai l'impression de me noyer dans ces larmes comme dans la mer. Il y a ce même goût salé, cette même impression de panique au moment où l'on commence à couler, et le cœur qui bat fort, qui lutte, et l'effort pour remonter à la surface – mais je ne suis pas sûre de vouloir faire émerger ma tête de l'eau. Retourner sur la terre ferme et continuer comme avant. Les cours, la cuisine, les promenades avec Eilyne, les gribouillis, les nuits paisibles, les pauses dans la salle commune avec Aure – ça me paraît lointain, impossible, c'était avant, tout ça ; maintenant, je veux juste me noyer dans mes larmes, qu'elles coulent jusque dans ma bouche, remplissent mes poumons, et m'étouffent. Je suis déjà en train de suffoquer – peut-être que je vais bientôt pouvoir la rejoindre, tout là-haut. Mon corps est secoué de sanglots qui me font hoqueter, mon nez et ma bouche sont obstrués de ces torrents de larmes – mais où se cache toute cette eau salée qui m'engloutit ? Je veux juste me laisser sombrer, là, sur la paille, sur les petits os de souris qui craquent, sur les déjections volatiles – je m'en fiche, je veux juste tomber et m'endormir. Et puis quand j’ouvrirais les yeux, elle sera partie, cette douleur qui me transperce le cœur, il n'y aura plus rien, je n'aurais plus mal, ce sera comme avant, tout comme avant. Tout bien comme il faut. Comme avant. Tout bien. Tout normal.

    Je réalise que je tremble trop pour me maintenir encore debout. Mon cerveau remet mon organisme en marche, commandant mes bras, mes jambes, mon corps. Je me sens m’asseoir contre le mur, dos à la pierre froide et hostile qui me perce le dos. Mais je reste là, incapable de faire d'autres mouvements. Et les larmes coulent, et mon cœur bat trop fort dans ma poitrine, et le monde continue de s'écrouler même si je suis stable, assise sur le sol. La lettre est déjà dans un état pitoyable, serrée dans mon poing droit, chiffonnée entre mes doigts, écrasée d'avoir été pliée et repliée – pitié, que ce soit un cauchemar, que ce ne soit pas vrai, juste un mauvais rêve, car ça ne peut pas être la vraie réalité. Mais ma prière était restée sans réponse ; et à chaque fois que je dépliais le morceau de parchemin, les mêmes mots y figuraient, penchés et écrits d'une main tremblante. Les mêmes mots, simplement faits d'encre, tracés sur un papier – et ces petits mots détruisaient tout un monde.

    Ma tête tomba en arrière sur le mur de la Volière et je fermais les yeux, écoutant des gémissements lointains qui m'inspiraient une terreur nouvelle, inconnue. Je réalisais soudainement avec effroi que c'était moi qui était à l'origine de ces sons de souffrance qui me glaçait le sang, que c'était ma voix solitaire qui s'élevait dans la tour remplie de chouettes et de hiboux. Souffraient-ils, eux ? Est-ce que leur cœur se fissurait quand quelqu'un qu'ils aimaient... disparaissaient ? La moindre chose me semblait désormais une montagne à gravir ; me relever, parcourir les couloirs, prendre le dîner dans la Grande Salle. Comment, comment j'allais pouvoir faire ça, alors que je voulais vomir, que je voulais mourir, qu'un marteau frappait ma tête et mon ventre, que je ne savais plus comment respirer et comment marcher ? J'allais rester là. Et peut-être que j'allais me désintégrer et devenir de la poussière qui s'envolerait dans le ciel, comme dans un conte que j'avais lu. J'allais la rejoindre tout en haut, comme maman me l'avait expliqué un jour – après notre vie sur terre, nous nous envolions vers un autre pays, au-delà des nuages, où il y avait des torrents de caramel au beurre salé, des arbres en chocolat, et des lits en guimauve.

    Quand j'ouvris les yeux, après un temps indéterminé, je distinguais à travers le reste de mes larmes taries qui m'embuaient le regard que le hibou qui m'avait apporté la lettre était perché en face de moi et me regardait. Je ne le connaissais pas. Il s'agissait sans doute d'un hibou que mes parents avaient trouvé à St Mangouste, là où elle avait passée ses derniers moments. Et je n'étais pas là. Personne ne m'avait dit qu'elle était si mal au point. J'avais naïvement cru que la baisse d'énergie et de dynamisme que j'avais constaté chez elle l'été dernier était simplement due à la fatigue et à son âge avancé. Quatre-vingt-dix-huit ans. Les bras ballants le long de mon corps, incapable de les soulever, je serrais des poignées de paille dans mes mains. Ma respiration était encore courte. Mes yeux et mon nez piquaient. Les joues me chauffaient. La nuit tombait. Je n'avais pas disparu, alors que je le souhaitais de toutes mes forces depuis... depuis combien de temps étais-je assise là ? Mon dos était devenu douloureux à cause des pierres du mur irrégulières, et j'avais mal, un peu, mais qu'était cette souffrance par rapport à celle qu'elle avait du endurer, elle ? Rien. Je le méritais. Je n'avais pas été là. Ils ne m'avaient rien dit et m'avait laissé dans ma stupidité – parce que j'étais stupide, je le savais, je l'avais déjà vu dans le regard des gens qui le pensaient, parce que j'avais dit ou fait quelque chose d'étrange. J'étais maintenant devenue un glaçon immobile. Peut-être allaient-ils être contents, maintenant. Je ne serais plus un parasite pour Coleen, aussi. Plus rien. J'allais rester là et ne faire plus qu'un avec cette paille sèche et aride – comme mon cœur, qui battait de manière mécanique. J'étouffais de nouveaux sanglots à l'idée que j'allais devoir continuer sans elle, sans les retours de Poudlard dans sa petite maison chaleureuse et accueillante qui sentait bon son parfum fleuri, sans les scones faits avec amour tout chauds sortant du four, sans les cours de pâtisseries qu'elle me donnait après m'avoir fait réciter mes leçons, sans qu'elle ne me fasse plus apprendre le nom des nouvelles fleurs qu'elle avait planté dans le jardin, sans danser sur les vieilles chansons qu'elle chantonnait souvent, de sa voix un peu chevrotante et chaude.

    Elle était ma grand-mère, ma meilleure amie, ma confidente, ma famille la plus proche – elle était partie. Et c'était ce hibou aux yeux imperturbablement fixés sur moi qui m'avait apporté la nouvelle – et je le détestais parce qu'il n'était ni mon père, ni ma mère, ni mon frère, ni ma sœur, qu'il me rappelait l'hôpital, où tout le monde s'était rendu sauf moi, parce que personne ne voulait m'inquiéter – c'était ce que maman disait dans la lettre. Elle avait aussi ajouté qu'elle voulait me l'annoncer elle-même par lettre et qu'elle avait donc envoyé ce hibou jusqu'à la volière, attendant mon passage, car elle savait que je m'y rendais tous les jours sans exception ; mais que la directrice allait être prévenue dès demain et que l'en... l'ent... l'ente... était prévu mercredi et que j'allais y être emmenée.

    Je serrais la lettre contre mon cœur que j'imaginais désormais avec un trou béant tant il me semblait transpercé de douleur quand la porte de la Volière s'ouvrit brutalement pour laisser apparaître une jeune fille aux tresses blondes dont l'insigne de Gryffondor brillait sur la poitrine. Son expression figée d'horreur m'alerta – je me redressais immédiatement sur mes pieds en m'aidant du mur, me tint sur mes jambes flageolantes, et traversa la volière en titubant le moins possible et en baissant la tête pour cacher le désastre que devait être devenu mon visage, mes yeux rougis et gonflés, mon teint sans doute pâli, mon pantalon couvert de paille. Mon corps m'était douloureux, mes jambes et mon dos, surtout, mais je continuais à avancer en dévalant les escaliers qui menaient en bas du château, le regard rivé vers le sol. La majeure partie des élèves devait avoir commencé le repas, car les couloirs étaient pratiquement vides, et mes pas seuls résonnaient entre les murs devenus froids et hostiles du château. Tout en marchant, la lettre encore serrée dans mon poing, j'eus un besoin d'air ; il me fallait respirer pour ne pas suffoquer. Je cherchais des yeux une sortie, un balcon, un renfoncement dans le mur muni d'une fenêtre comme on en trouvait souvent ; je tombais sur un de ceux-ci alors que je parcourais le premier étage fébrilement, et m'y engouffrais avant d'ouvrir la fenêtre. Le vent frais de la nuit qui tombe caressa mon visage et les larmes récentes qui avaient tracé un sillon sur mes joues. Je fis de mon mieux pour respirer lentement, doucement, pour que l'air frais parcourt mon corps. La douleur était encore intense et lancinante, mais un peu apaisée. Je levais les yeux vers le ciel, en direction de l'immensité du ciel qui se faisait de plus en plus obscure. La lune se dessinait déjà dans le ciel, ronde et pleine – non, pas tout à fait, elle n'était pas encore entière du côté gauche, il manquait encore un ou deux nuits pour qu'elle soit complète, belle et majestueuse, reine de lumière dans l'obscurité. Je passais ma main gauche, celle qui ne tenait pas la lettre, sur mes joues et mes yeux douloureux. Les poils de mes bras se hérissaient à travers mon pull – un pull rouge tricoté par Mamie, avec des petits motifs blancs en forme de flocons de neige, plus ou moins gros ; il était confortable, mais luttait difficilement contre la fraîcheur d'une nuit d'hiver qui arrivait, parce que la laine était grosse et qu'elle laissait quelques trous entre le maillage. Je décidais de porter son pull toute la vie, pour que Mamie reste avec moi pour toujours – et puis la pensée me vint que ce pull allait en réalité ramener le souvenir de sa... de sa disparition pour le restant de mes jours, et que je devrais l'enfermer immédiatement au fond de mon placard. J'allais quitter la fenêtre pour me réfugier dans mon dortoir et décider du sort de son pull quand une silhouette apparut dans mon champ de vision. Je baissais la tête et vis que quelqu'un venait de sortir du château et demeurait immobile sur les grandes marches. Bien que la nuit était à moitié tombée et mes pensées étaient devenues hermétiques à tout ce qui ne concernait pas Mamie, je le reconnu.

    Je n'étais qu'au premier étage. Je n'avais qu'un escalier à descendre et le Hall à franchir pour atteindre la porte et le perron du château. Je n'hésitais pas et me détournais de la fenêtre avant de mettre à courir du mieux que je le pouvais, la respiration saccadée, le cœur saignant frappant ma poitrine et les jambes courbaturées. A sa simple vue s'était engouffrée une bouffée d'air frais dans ma tête – pas comme celles de l'air frais du soir qui parcourait mon organisme, mais de l'oxygène qui avait subitement allégé le poids qui s'était formé dans ma tête, dans mon cœur, partout. C'était peut-être tout ce dont j'avais besoin, en ce moment même ; de me plonger dans son regard marron, d'entendre sa voix douce et mesurée, de trouver une présence amicale.

    J'atteignais la porte titanesque du Hall entre-ouverte après avoir dépassé la Grande Salle de laquelle me parvenait le son des élèves mangeant, riant, parlant. Vivant. Je m'engouffrais dans l'ouverture et mon corps entier fût enveloppé de la fraîcheur nocturne lorsque je fis un premier pas sur le perron. Il était là, à quelques mètres de moi.

    - Cahyl !

    Ma voix était faible, éraillée, et il me semblait que je parlais du nez à cause des torrents de larmes qui avaient coulé. Ce n'était pas ma voix. Mais je n'étais plus moi, plus vraiment – pas sans elle. Il se retourna et j'avançais jusqu'à lui, tremblante. Voir son visage familier – beaucoup plus familier depuis que nous nous voyions une fois par semaine pour réviser ensemble, que nous parlions, que j'apprenais à le connaître petit à petit comme je l'avais toujours espéré, qu'il acceptait à chaque fois un peu plus ma main tendue, même si il oscillait régulièrement entre une attitude amicale ou réservée – propagea une légère chaleur dans mon cœur gelé. Mon visage avait beau être dévasté par la tristesse et la douleur, je parvins à redresser mes lèvres de quelques centimètres pour lui adresser l'ombre d'un sourire.

    J'ignorais pourquoi je m'étais précipitée vers lui – que pouvait-il faire ou dire ? – mais cela m'avait semblé naturel, instinctif, normal. Il était une des seules personnes que j'avais envie de voir si je les croisais ; alors, j'avais foncé dans le mur sans hésiter. Je n'étais pas sûre de vouloir l'aborder avec ces mots, mais ils s'échappèrent d'eux-même.

    - Cahyl, je... c'est... ma, ma grand-mère, elle..., commençai-je en sentant mes yeux de nouveau déborder de larmes – prononcer la réalité était trop difficile. Je reniflais et déglutissais, resserrant la lettre de ma mère dans la paume de ma main droite. Je t'ai vu de la fenêtre et...

    Mais j'étais incapable de terminer une quelconque phrase, de parler clairement, d'être intelligible ; j'avais peut-être simplement besoin d'une présence, de chaleur humaine – et il me semblait qu'il en émanait de Cahyl. Il était impossible que mon corps ait été appelé par sa chaleur à la hauteur où je me trouvais, lorsque je l'avais aperçu à travers la fenêtre, sous la lune blanche et presque ronde ; mais un mécanisme s'était déclenché. Et j'étais là, devant lui. Et je ne savais peut-être pas à quoi j'aspirais
    entendre sa voix, recevoir un geste de lui mais sa présence pensait déjà un peu mes plaies béantes.


Dernière édition par Hannah Blueberry le Dim 23 Déc - 18:56, édité 2 fois
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Cahyl Steadworthy


Cahyl Steadworthy
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Particularités: Je ne peux te le dire.
Ami(e)s: Padma et ...Hannah!
Âme soeur: Ais-je seulement le droit d'espérer? Ces sensations qui fleurissent en moi semblent m'indiquer que oui, j'en ai le droit.

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MessageSujet: Re: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeDim 9 Déc - 22:13

J’étais seul, dans le dortoir que je partageais depuis déjà plusieurs années avec quelques camarades. Seul, assis sur les couvertures d’un sombre bleue, ornées de minuscules fils dorés. Les yeux dans le vague, je réfléchissais. Entre mes mains, je tournais et retournais un petit flacon d’une matière transparente qui laissait voir un liquide d’une couleur indéfinissable. Mon cœur battait vite, sans que je puisse ralentir sa cadence. De temps à autre, un léger rictus de douleur devait étirer mes lèvres et déformer mon visage. La Chose se battait. La Chose griffait, se rebellait. Déjà, elle flairait les effluves appétissants de la liberté. Dans deux jours, mon corps serait le siens, et elle pourrait sortir pour assouvir ses besoins. Je la sentais trépigner, se réjouir. Et je tentais avec calme de repousser toutes ces dérangeantes impressions qui tentaient de s’emparer de mon être avec empressement. Je voulais garder le contrôle de moi-même. Je voulais que cette chose ignoble s’en aille. Je baissai les yeux sur la minuscule bouteille de verre que j’avais entre les doigts. Je respirai lentement tandis que les souvenirs se rapportant à ce flacon me revenaient peu à peu en mémoire. Je l’avais reçu le jour précédent ma rentrée à Poudlard. Madame Wayland, la directrice de Poudlard, était alors venue à l’orphelinat pour me voir. J’avais déjà reçu une visite quelques semaines plus tôt pour m’annoncer que j’irais à Poudlard, et que je devais aller chercher les affaires nécessaires à ma scolarité, je ne m’étais donc pas attendu à ce qu’elle revienne. Cependant, lorsque je l’avais vu renter dans le dortoir, majestueuse, éblouissante parmi tous ces lits aux couvertures sombres, j’avais été surpris. Puis, je m’étais attendu à ce qu’elle me dise que tout cela n’avait été qu’une mauvaise blague, et qu’aucune école magique n’existait. Mais, non, c’était pire : elle savait. Elle m’avait annoncée qu’elle savait pour la Chose. J’avais cru, sur le moment, mourir. Puis, elle m’avait donné ce flacon, et d’autre, disant qu’ils contenaient un liquide capable de contrôler la Chose. Je n’y avait pas cru, et borné, n’y avait jamais touché.

Mais, beaucoup de choses avaient changées depuis ce jour-là. Une nouvelle douleur transperça mon corps entier, et je tentais de ne pas gémir, serrant fortement la mâchoire, essayant de rester totalement impassible. Je fis un énorme effort pour ne pas briser la petite bouteille transparente, et lorsque la douleur s’enfuis peu à peu, je respirais plus profondément. Oui, quelque chose avait changé. Un léger sourire vint sur mes lèvres frémissantes de souffrance. Hannah. Voilà ce qui venait briser toutes les choses que j’avais construites, toutes les règles que je m’étais fixées avec force. Mais, je n’arrivais plus. J’avais plongé profondément dans les méandres de… de quoi, au juste ? Je n’arrivais plus à discerner ce que je devais faire, de ce que je ne devais faire. Je ne savais plus, et je me perdais. C’était délicieux, mais dangereux. J’avais réussis avec pas mal de succès à faire taire la voix de la raison qui s’étaient parfois faufilée jusqu’à ma conscience lorsque, durant ses dernières semaines, j’avais vu Hannah plus de fois qu’en ces trois dernières années à Poudlard. J’avais réussis à ne pas penser à la Chose, à ne pas penser à ce qu’elle voulait dire, et à ce mauvais pressentiment, qui pourtant, n’avait fait que grandir insidieusement en mon être. Sauf que ce soir, alors que l’heure de la Chose approchait, je comprenais combien j’avais été stupide. Je m’étais faiblement bercé d’illusions magnifiques, qui s’évaporaient toutes ce soir dans un chuintement qui me donnait envie de détruire le monde entier. Cette douleur, qui se diffusait dans mon être, et que j’avais si bien oublié pendant ces dernières semaines, me rappelaient avec une force inimaginable ce que j’avais voulu oublier. Tout ce que j’avais construit, toutes les pensées les espoirs qui avaient fleuris dans mon être se réduisaient en cendre. Et plus la douleur était vive, plus la peine que je ressentais me broyait le cœur. Tout s’effondrait.

Je me pliais brusquement en deux, le souffle coupé, des larmes dans les yeux. La douleur était supportable, j’avais vécu pire. Et pourtant, c’était tellement douloureux que j’étais certain que si une autre personne supportait la même peine que moi, mourrait sur le champ. J’essayai de reprendre mon souffle avec peine, mais mon abdomen était tellement contracté, dans un instinct de protection contre la douleur, que je n’y parvenais pas. Je suffoquai à moitié, et me forçai à détendre mes muscles. La bouffée d’air qui emplis mes poumons me fis un tel bien que je tombai brusquement sur mes couvertures, des points noirs dansant devant mes yeux vitreux. Je devais sortir, ici l’air me manquait. Et je ne voulais pas que mes camarades de chambre me voient dans un tel état. Jamais. Je me levai avec hâte, voulant sortir à tous prix. Je vacillai légèrement, une fois debout, mais fonçait dans les escaliers. J’avais besoin d’air. Pour oublier, pour comprendre, pour réfléchir, pour souffrir en paix. J’avais besoin d’être dehors, simplement. Je dévalais les marches quatre à quatre, ne m’arrêtant pas une seule fois. Les personnes qui montaient au dortoir s’écartaient, et je reçus quelques regards outrés. Cependant, je ne m’en souciais pas le moins du monde. Le besoin que je ressentais brusquement m’oppressait, et j’étais presque sûr que c’était la Chose qui en était, entre autre, la source. La Chose aimait la nature, les bois dangereux, et j’étais persuadé que c’était une des raisons pour lesquelles il m’arrivait, parfois, d’avoir de subit envie de faire des petites tours en forêt. Toutefois, cet aspect de la Chose, et c’était bien le seul, ne me gênait nullement car j’aimais également la nature et les balades. Malheureusement, il y avait bien plus d’aspects, chez la Chose, que je détestais, et c’était ceux-là qui primaient sur tous les autres.

Lorsque je débouchai dans le hall, j’aperçus que le soleil, déjà, avait disparu derrière les montagnes et que quelques étoiles scintillaient dans le ciel, très sombre. Ma respiration était tellement saccadée, que je dû m’appuyer quelques instants contre le mur de pierre froid pour ne pas m’écrouler à terre. Heureusement, il n’y avait pas grand monde, car la plupart des autres élèves étaient, soit penchés sur leurs devoirs, soit en train de gagner leurs salle commune pour passer un peu de temps ensemble avant de se coucher tranquillement, sans douleur, sans se soucier de grand-chose. Comme je les enviais, toutes ces personnes, qui étaient tellement insouciants, qui ne connaissaient pas réellement la douleur, qui vivaient tout ce que je n’aurais jamais, et qui se plaignaient alors qu’ils avaient tout ce dont je rêvais. Parfois, lorsque je n’en pouvais plus, que la douleur me rongeait et que j’étais terriblement fatigué, il m’arrivait de les détester, tous. Mais, je me reprenais vite, pourquoi les détestais-je, alors que la seule chose que je me devais de détester, était la Chose. Cette chose qui réduisait ma vie à néant et qui me tuait à petit feu. Je sentis que je reprenais mes esprits lorsque tout autour de moi cessa d’être flou et que je pu enfin voir le monde avec netteté. Je respirais profondément, sentant que la nuit profonde et que la Lune, bientôt pleine, m’appelaient. Je mis un pied devant l’autre, et avec difficulté, m’avançait jusqu’à l’immense porte qui ouvrait sur le parc. Je la poussai avec les quelques forces qui me restaient et fit quelques pas dehors, ne prenant pas la peine de refermer derrière moi. Après quoi, je restai là, fermant les yeux, essayant de juguler la douleur qui courait dans mes veines, dans mon corps entier. Parfois, lorsqu’elle devenait trop forte, et que je menaçais de m’écrouler, je serrais les poings et les dents, au point de me faire saigner. Mais cette douleur était bien superficielle face à celle qui me comprimait l’abdomen. Mais alors que j’entrais dans une nouvelle phase de souffrance affreuse, j’entendis une voix. La voix de la personne que j’avais à la fois, le plus envie d’entendre, mais aussi le plus peur d’entendre. Hannah
.

- Cahyl ! Dit-elle d’une voix qui me fit tressaillir.

Je ne VOULAIS PAS qu’elle soit là ! Ce n’était pas le bon moment, ni l’endroit, ni… Non, ce n’était pas possible. Je tressaillis à nouveau. Sauf que ce n’était pas moi qui avait réagis, mais la Chose. Elle avait sentis la faiblesse, elle avait sentis l’appel de la chasse, du sang. Je serrais plus encore les poings, jusqu’à faire craquer les jointures de mes doigts. Puis, me retournai, perdu, tremblant de peur. C’est alors que le ton de sa voix prit tout son sens : elle pleurait. La vue de ses yeux gonflés et rouge, des traces encore légèrement visibles des larmes qui avaient dû couler sur ses joues et de sa mine complètement défaite me fit reculer. Non parce que cela me repoussait, ce n’était pas le cas. Mais parce que cela m’avait choqué. Hannah, qui était toujours de bonne humeur, pleurait. Et cela m’avait fait quelque chose, là, vers le cœur. Oubliant la douleur et la Chose, dans un élan incompréhensible, je me rapprochais et tendit ma main vers elle. C’est alors que je sentis quelque chose en moi, qui me lançait brusquement, qui me donnaient des instincts monstrueux et ignobles. J’arrêtai brutalement mon mouvement vers Elle, et reculai de quelques pas, les yeux fous, la respiration totalement saccadée, la mâchoire tellement serrée que je me demandais comment mes dents tenaient encore et ne se fissuraient point
.

- Cahyl, je... c'est... ma, ma grand-mère, elle... Elle déglutit difficilement. Sauf qu’au lieu de la réconforter comme je l’aurais voulu, des élans meurtriers s’emparèrent de moi, et je tremblai, essayant de me contrôler de tout mon être. Je t'ai vu de la fenêtre et...

Et elle s’approchait, ou du moins, elle semblait vouloir s’approcher. Elle ne DEVAIT PAS. Sinon je craquerais, et un meurtre serait commis pour la deuxième fois à Poudlard. Et je ne voulais pas qu’elle telle chose arrive. Je ne VOULAIS pas faire de mal à Hannah. Mais peu à peu, je me rendais compte que ces dernières semaines avaient été de pures erreurs. Je m’étais endormi. Ma raison, ma conscience, elles avaient tentées de me prévenir tant de fois, et je les avais ignoré, jouant l’égoïste sans cœur. J’avais voulu faire, au moins une fois, tout ce que les autres ados faisaient. Et à présent, j’en payais le prix fort. Elle s’était attachée à moi, et pire encore, cela devenait réciproque. Mais il ne FALLAIT pas ! Je ne pouvais pas ! Je devais m’éloigner d’elle avant qu’il ne soit trop tard ! Je savais pourtant que la Chose était dangereuse ! Et dans un sursaut insensé de prétention, j’avais cru pouvoir la contrôler, j’avais cru pouvoir dépasser tout cela. Sauf, que tout me revenait dans la figure, à présent. Je ne pouvais pas la contrôler, je le savais parfaitement bien. C’était Elle qui dirigeait le jeu, c’était Elle qui décidait, et je n’étais qu’un simple esclave, attendant qu’elle prenne mon corps et que cette horrible Chose fasse tous ces actes ignobles qui me torturaient. Même pour Hannah, même pour quelque à qui je… tenais, je ne pouvais retenir la Chose, je ne pouvais la contrôler. J’y avais cru, quelques semaines et puis, la réalité me revenait en pleine face, comme une claque monstrueusement douloureuse. Je n’avais été qu’une égoïste prétentieux ! Et à présent, je la trainais devant moi, l’endroit le plus dangereux du monde pour elle. J’eus envie de me donner des claques, de me tuer, même, tellement j’avais été stupide, tellement je… de colère et de frustration, je serrais à nouveau les poings, les bras tremblants, le cœur palpitant. Je n’étais qu’une pourriture, incapable de se contrôler, incapable de protéger les autres. J’avais faillis à tous les principes que je m’étais donné. Je n’étais qu’un bon à rien. Comment une personne aussi bonne que la jeune poufsouffle avait pu s’approcher de moi ? Je n’aurais jamais dû la laisser venir, je n’aurais jamais dû accepter de la voir, encore et encore. Car à présent, elle était en grand danger. Et le danger, dans cette histoire, c’était moi. Moi, moi, moi, moi, moi… MOI ! J’étais dangereux. Et personne ne devait m’approcher. Personne, non, personne… PERSONNE ! Pas même Hannah ! PERSONNE ! Apparemment, je ne me l’étais pas assez répété, quelque chose m’avait échappé dans ce mot ! Car comme une IDIOT Je l’avais laissée venir à mes côtés ! Mais comment avais-je pu être aussi STUPIDE ?!

Et j’étais tellement partagé. Elle devait partir, loin très loin de moi, me laisser seul. Je devais la laisser, loin, le plus loin possible de moi. J’étais dangereux, et je savais que chaque moment passé avec elle étaient des moments où elle pouvait mourir. Mais… là, de la voir en larme, ayant visiblement besoin de moi me déchirait le cœur d’une façon que je n’avais qu’une seule envie : la prendre dans mes bras. La voir fragile ainsi réveillais quelques instincts protecteurs que je croyais enfouis à jamais en moi. Mais une autre part de moi, que je détestais, ressentait d’autres instincts bien plus horribles et destructeurs. Et ces instincts ignobles prenaient le pas sur tout. Et alors que j’avais encore tenté de m’approcher d’elle, encore, je reculai davantage. Je sentais que la Chose grondait, excitée à l’extrême. C’était si facile. Je n’avais qu’à sauter sur elle, planter mes crocs dans sa gorge, la déchiqueter entière. Il n’y avait personne, et il me serait facile de cacher son corps dans les fin fonds de la forêt… NON ! Fou de douleur et de peur, je perdais plus encore le contrôle de mon corps. La douleur devenait insoutenable, mes sens se tournaient vers elle, et la Chose semblait soudainement prendre plus de place dans mon âme. Paniqué, je me pliai en deux, et, essayant de maîtriser ma voix et ma respiration, et d’une voix rauque, et que j’espérais dure, lançait à Hannah :


-Pars. Puis voyant qu’elle ne faisait pas un geste, je réitérais ma demande, mon ordre. Je te dis de partir !

Ma voix avait pris plus d’ampleur, et je sentais la colère s’incruster brusquement. Je n’avais pas voulu ça. Mais le manque de sommeil, et la douleur qui courait dans mon corps, ne me laissant aucun répit, me laissaient faible et à fleur de peau. Je ne voulais pas la blesser… elle semblait dévastée, elle pleurait… mais peu à peu, je comprenais que cela devenait le seul moyen de la faire partir, qu’elle me laisse, qu’elle me lâche et ne revienne plus jamais vers moi. Qu’elle m’oublie, qu’elle me quitte… que… simplement qu’elle s’en aille. Avec une certaine ironie, les souvenirs de notre première rencontre dans le potager aux citrouilles me revinrent. Déjà à cette époque, sentant que la Chose échappait à mon contrôle en sa présence, je lui avais dit de partir, peut-être un peu plus durement qu’aujourd’hui. Un rire faillit me sortir de la gorge. Il semblait que les mots qui avaient clos notre première rencontre devaient également clore notre dernière. Mais… les choses avaient changées, et malgré mon corps tremblant, mon cœur, lui, restait là, et se déchirait peu à peu tandis que je prenais une décision qui me faisait déjà hurler de frustration. Il fallait qu’elle me lâche. Ce n’était pas pour moi, que je faisais tout cela, c’était pour elle… parce que… parce que je m’attachais à son sourire, et parce que je ne voulais pas qu’elle souffre en restant à mes côtés. Or, c’était ce qui allait irrémédiablement se produire, je le savais parfaitement. Je l’avais déjà vu avant elle. Je devais me défaire d’elle avant que ce ne soit trop tard. Sauf que… c’était horriblement dur. Je baissai les yeux, ne souhaitant pas voir ce qui se passerait dans les siens lorsque je reprendrais les mots exacts que j’avais prononcé quelques années auparavant. Puis, concentrant toute la force et la dureté dont j’étais capable, m'aidant de la douleur insoutenable qui torturait mon corps, je prononçais ce mot qui me déchira, avec une netteté incroyable, le cœur :

- Dégages.
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Hannah Blueberry


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MessageSujet: Re: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeJeu 13 Déc - 17:04

    Je pensais qu'il n'y aurait aucun remède à ma peine. C'était un trou, là, dans mon cœur, dans mon corps, un trou béant impossible à combler parce que c'était un vide éternel. Comment c'était possible... comment c'était possible de disparaître, comme ça, soudainement, comme une quille que l'on renverse et qui ne se redresse jamais. Disparue de la surface de la terre. Mais ce qui était bizarre, c'est ce que ce vide ne relevait pas de la présence physique, parce que je n'avais pas ressenti la disparition au sens propre ; c'était un néant que je ressentais dans tout mon être, qui cognait terriblement fort à chaque battement de mon cœur, qui déclenchait ces torrents de larmes cessant à grand peine de se déverser sur mes joues. C'était chaque parcelle de mon être qui souffrait de cette absence, qui criait la peine qu'elle engendrait, qui ne supportait plus d'exister sans celles de l'être si cher qu'était ma grand-mère. C'était le ciel qui me tombait sur la tête. C'était mon cœur qui voulait s'arracher de mon corps. C'était un poids, sur mes épaules et sur mon esprit : je savais que les débuts du mois de Décembre me rappellerait désormais toujours la disparation de Mamie Moira. Elle me manquait tous les jours où je ne la voyais pas – même si je ne pensais pas quotidiennement à elle, et je m'en voulais soudainement terriblement –, mais ce manque s'était soudainement fait si vif, si douloureux, si transperçant, que je ne voulais rien d'autre que disparaître moi aussi, à mon tour – peut-être pouvait-on mourir de trop pleurer. Mes yeux m'étaient réellement douloureux, tant que j'avais la désagréable impression qu'ils allaient s'échapper de mes orbites ; le haut de ma lèvre supérieure me piquait sérieusement tant je m'étais mouchée – avec son mouchoir, son beau mouchoir, qu'elle m'avait tricoté en plusieurs exemplaires, et que je me jurais de tous garder précieusement, et de ne plus jamais les utiliser, parce que je les voulais beaux, doux, délicats, comme elle – et ce mouchoir, Cahyl en avait un. Je le lui avais donné, lors de notre première rencontre, pour servir de baluchon à quelques objets qui pouvaient lui venir en aide, parce que je l'avais vu souffrant. J'avais été certaine de deux choses, à ce moment là : 1) Mamie Moira aurait été fière de moi, elle qui m'a toujours dit que je travaillerais dans l'humanitaire, plus tard ; 2) l'état de Cahyl allait s’améliorer. Mais Cahyl n'était que rarement allé mieux. Il y avait eu ces moments de trêves, ces moments précieux qui avaient eu lieu dans des petites bulles coupées de tout, au lac, et dans la cuisine ; et ces autres moments, que je détestais, parce qu'ils me faisaient sentir si coupable et si incapable, et que j'avais l'habitude d'appeler des « crises ». Il y avait quelque chose, je n'en doutais plus ; si certains camarades de notre année le considéraient comme un simple solitaire, asocial, rejeté de la société – et oh comme je bouillonnais quand quelqu'un avait le malheur de prononcer son beau prénom associé à ces termes horribles, et comme je les aurais pendu par les pieds avant de les secouer de haut en bas jusqu'à ce qu'ils s'excusent d'être des babouins décérébrés –, je savais, je voyais, qu'il n'y avait pas que ça. Je n'avais jamais su quoi faire, mais j'avais toujours essayé d'être là, d'être bien, d'être une amie parfaite.

    Ce soir, je m'en savais incapable. Je n'étais plus capable de rien, à part laisser ma peine s'exprimer en larmes. Je refusais de penser à la suite, à ce qui allait se passer, à... à l'enterrement. Comment ça se passait, ces choses là ? Je nous imaginais tous en noir, fondre en larmes, peinant à s'exprimer, le cœur serré de tristesse. Cette prospection me donnait la nausée. Je supportais difficilement la tristesse des autres ; comment allais-je faire avec la mienne – d'ordinaire quasi-inexistante – et celle des gens qui m'étaient les plus chers ? Plus qu'un manque, c'était ça, aussi, qui me rendait incontrôlable : le poids du chagrin. Je voulais me griffer le visage, les bras, le corps, pour le faire disparaître ; je n'avais réussi qu'à m'arracher quelques cheveux, et je ne savais pas quoi faire d'autre pour le supporter.Dans un sens, c'était peut-être un soulagement que maman, papa ou Matthew ne soient pas là. Ils m'auraient annoncé la nouvelle la voix tremblante, entre-coupée de larmes, et je n'aurais pu que m’effondrer dans leur bras. Mais je ne pouvais pas, je ne pouvais pas ; j'étais la pile énergique, celle qui souriait, qui bondissait, qui essayait de voler, qui consolait maman et lui rappelait ses rendez-vous, qui faisait oublier ses problèmes à Matthew, qui embêtait Coleen pour qu'elle redescende sur terre. Le monde s'écroulait – ma famille s'écroulait –, et moi, je ne pouvais pas, je ne voulais pas.

    Si seulement... Mais c'était incontrôlable. J'avais toute cette horreur et cette tristesse et cet amour en suspens dans le vide dirigé vers un néant qui n'en trouverait plus jamais en retour et j'avais ce cœur qui faisait mal, beaucoup trop mal, et ces yeux qui n'étaient plus capable de rien voir, et ce cerveau qui ne pouvais plus fonctionner sans son principal rouage – parti, parti, parti.

    La vue de Cahyl n'avait rien remis en marche, ni rien soigné, mais sa silhouette distinguée dans la nuit tombante avait accéléré de nouveau les battements de mon cœur – mais pas de souffrance, au contraire, c'était là toute la différence.

    Alors, je m'étais précipitée, sans réfléchir. Mes pieds avaient décollés seuls, mes jambes s'étaient élancées, et mon corps avait bougé, vraiment, enfin. J'avais besoin de quelque chose sur lequel je n'avais aucun nom à mettre, et si c'était frustrant, cela m'importait : l'adrénaline de ma course avait correctement fait revivre mon cœur. Il battait, pompait le sang, régulait la circulation. Mon corps, élancé dans une course folle, ré-activé par un étrange mécanisme, volait de nouveau. J'arrivais essoufflée, mais soulagée. Il était là, tout près, et me semblait si... accessible. J'avais toujours eu la conscience de ces barrières qui nous séparaient et qui empêchaient notre amitié de fleurir. Oh, il y avait eu des progrès qui n'étaient non pas des marches à gravir mais des montagnes à franchir ; et nous les avions franchi, même si cela avait pris du temps. Pourtant, je le sentais toujours, ce truc étrange, ce petit cailloux dans la chaussure, cette petite gêne inexplicable ; venait-elle de lui, de moi, de nous deux, ou était-ce une impression...

    Mais là, je n'étais plus moi, plus vraiment, parce que je n'étais plus entière, et les barrières ne s'étaient pas activées. Cahyl était à quelques pas de moi, et les possibilités me semblaient aussi immenses que la peine qui m'engloutissait. Je l'appelais, la voix aussi faible que mon corps tremblotant qui avançait de manière saccadée. Il se retourna ; la luminosité était un peu faible pour que je puisse distinguer ce qu'il y avait dans ses yeux – et j'aimais toujours observer ce qu'ils décelaient. Je savais qu'il me regardait, cependant ; je le sentais. Et je sentais qu'il y avait un problème. Il tremblait. J'avançais, inquiète, et je vis un instant sa main se tendre vers moi ; à peine eus-je penser à l'attraper qu'il la retira avant de se pencher en avant. Pendant un instant, j'oubliais mes propres problèmes. Les siens n'avaient-ils d'ailleurs pas toujours pris le pas ? Ne m'étais-je pas enquiquinée l'esprit deux mois entiers de vacances à tenter à ne pas y penser ?

    Quelques pas encore et j'étais tout près de lui. Son corps était secoué de tremblements, et il était plié de telle manière que j'eus l'étrange pensée que quelque chose essayait de sortir de lui, et qu'il essayait de l'en empêcher. Mais j'avais
    vu trop de films moldus où des monstres possédaient des corps – au grand bonheur d'Oncle Keith qui m'y initiait, au grand malheur de mon père qui constatait l'effet déplorable que cela avait sur mon imagination à son goût trop farfelue. Je voulais parler, m'inquiéter de son état, proposer mon aide ; mais il parla avant, d'une voix qui n'était pas celle que j'aimais – elle était rauque et terrible.

    - Pars.

    Interloquée, je restais immobile. ...Quoi ?

    - Je te dis de partir ! cria t-il.

    Le ton de sa voix était dur, sans appel, déchirant, et pourtant, mes lèvres se tordirent en un léger sourire. Encore... ? Peut-être qu'il ne serait pas lui-même si il ne m'ordonnait pas une fois par mois de partir, de m'en aller. Ça avait marché, déjà.

    Désormais, ça ne marcherait plus. Plus jamais.

    - Mais non ! criai-je d'emblée pour protester – je voulais qu'il sente que ma décision était définitive. Mais mon sourire s'était fané pour rapidement laisser place à une moue de colère. Pourquoi m'infligeait-il ça, encore ? Pourquoi... pourquoi à ce moment même où j'avais ce sentiment terrible d'avoir besoin de lui, pour une fois ? D'accord, je... je ne parle plus de mes problèmes, je ne veux pas t'embêter, mais je peux pas ignorer les tiens, je vois que ça va pas, dis-je en rassemblant l'énergie que j'avais – mais cette injustice, ce nouveau rejet me donnait de la force. Cahyl... ma voix se brisa, là, sur son prénom que j'adorais prononcer parce qu'il était si unique. Et il me répondit ce mot. Ce mot exact.

    - Dégages.

    Je ne souriais plus. Je n'étais plus en colère. Je restais chancelante, bouche bée, les lèvres tordues en une expression d'étonnement, et plus que tout, choquée par la violence de sa voix – et par ce même mot qu'il avait prononcé la première fois que nous nous étions vu. Il me semblait que son ordre résonnait encore dans la fraîcheur du crépuscule et qu'il se faisait échos dans mon cœur gelé. Je sentais les larmes franchir le seuil de mes yeux, je sentais mon cœur tomber et se craqueler, je sentais le froid m'engloutir.

    Soudain, alors que sa présence avait rallumé un feu, tout s’éteignait.

    Je vivais une deuxième disparition, presque aussi terrible que la première – et le poids des deux ensemble me donnait envie de m'écrouler. Moi pour qui les larmes étaient un événement annuel, j'étais en train de muter en tuyau d'arrosage. C'était comme si la disparition de Mamie Moira avait ouvert une écoutille dont pourrait désormais s'écouler des litres d'eau à la moindre contrariété. Je ne voulais pas pleurer ; en fait, je détestais ça, tout simplement. J'avais l'impression de ne plus pouvoir respirer, d'avoir le visage englué dans de l'eau qui m'irritait le visage, et puis il fallait que je me mouche, et je ne voulais plus salir le mouchoir de Mamie Moira. Soudainement, il me semblait insupportable que Cahyl en possède un.

    Mais j'allais tenir ma promesse. Malgré mon cœur dissous comme du sucre dans de l'eau et les larmes qui coulaient sans que je leur ai donné l'autorisation, je restais debout et fit de nouveau un pas vers lui.

    - Eh ben ça marchera pas comme la première fois, figure-toi, dis-je plus amicalement que je l'aurais voulu – parce qu'il était dur et injuste avec moi, et que je ne voulais pas me laisser marcher sur les pieds une nouvelle fois, malgré toute l'affection que je lui portais. Tu penses que tu vas boucler la boucle, là ? Je reste, je t'ai dis, dis-je avec fermeté en essuyant mes larmes avec ma manche et en reniflant. Je vois bien que ça va pas, et c'est pas la première fois, s'il te plaît, dis-moi ce qui se passe, laisse-moi t'aider, c'est insupportable de te voir comme ça, m'exclamai-je, à bout de nerfs.

    J'avais froid, je voulais m'écrouler sous ma couette, au chaud, que tout mon chagrin et ma colère s'arrête, que tout recommence comme avant, que Mamie Moira soit là, que je cuisine pour Cahyl après nos révisions. Que tout soit bien. Comme avant. Si tout était perdu pour Mamie Moira, je refusais de laisser Cahyl s'échapper aussi, encore, une nouvelle fois.

    - Je reste, répétai-je pour qu'il s’imprègne de ma décision. Cahyl, dis-moi, je suis là, dis-je le plus doucement possible.

    Un frisson me parcourut le corps au moment où je posais mes mains sur ses avant-bras, repliés sous lui, parce qu'il émanait une douce chaleur de son corps qui contrastait avec l'air frais du crépuscule. Je fis glisser mes mains jusqu'à ses poignets que j'attrapais fermement, délicatement ; pour ne pas nous briser, ni lui qui était si susceptible, ni moi que je sentais si inhabituellement fébrile. Je désirais qu'il relève sa tête pour me regarder et m'expliquer, enfin. Mes larmes s'étaient taries alors que j'espérais.

    Regarde-moi et dis-moi.

    Regarde-moi et dis-moi.

    S'il te plaît. Regarde-moi et dis-moi.
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Cahyl Steadworthy


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Âme soeur: Ais-je seulement le droit d'espérer? Ces sensations qui fleurissent en moi semblent m'indiquer que oui, j'en ai le droit.

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MessageSujet: Re: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeSam 15 Déc - 0:28

Jamais je n’avais autant haï la Chose. Jamais je n’avais ressentis une telle haine pour quoi que ce soit. Ce sentiment, cette rage qui croissait dangereusement en moi me donnait envie de détruire la planète entière. J’avais envie de me griffer, de me frapper jusque cette ignoble Chose sorte de mon corps. Qu’enfin, elle me laisse, qu’elle me quitte, et qu’elle ne revienne plus jamais. Si j’avais pu, je me serais arraché le cœur, dans l’espoir vain de la sortir de mon corps. Cette Chose… cette… horreur qui me torturait depuis tellement d’années, cette Chose que je détestais de tout mon être, pour m’arracher à toute les personnes que j’appréciais et avec qui je me liais. Elle m’arrachait de tous les rêves douillets que je m’étais formé. Impitoyable et impartiale, elle déchirait mon âme et mon cœur, m’obligeant à rejeter tous ceux qui m’appréciaient également et dont j’aurais pu devenir l’ami. Je n’avais eu aucun ami, à cause d’elle. Elle était tout ce que j’avais, et j’étais tout ce qu’elle avait. Nous étions une entité déchirée en deux parties qui luttait, avec acharnement et constamment pour prendre le dessus. Très vite, une guerre effroyable s’était installée. Nous étions rivaux, et le premier qui arrivait à blesser l’autre était le vainqueur. Sauf que j’étais terriblement faible, et la Chose, probablement furieuse de ne prendre le dessus qu’une seule fois par mois, me faisait souffrir de bien d’autres manières.

Pour une fois dans ma vie, ce mois-ci, j’avais cru être le plus fort. J’avais envie de hurler tant cela avait été une méprise incroyable. J’avais été si stupide, si borné à croire que j’étais le plus fort, que bien sûr, je pouvais maîtriser cet animal et ces instincts qui grouillaient vicieusement en moi. Mais ces instincts était tellement fort, lorsque la lune prenant ses douces rondeurs habituelles, et j’avais tant de mal à comprendre comment les atténuer, que j’en étais devenu l’esclave. Sans que je ne m’en rende compte, et que je le veuille, la Chose m’avait perfidement asservie. J’étais son esclave. Je n’étais pas un esclave, un simple corps qui me laissait faire, heureusement et malheureusement à la fois, car j’en subissais les affreuses conséquences : ses punitions. Vous croyez connaître le mot punition, lorsque vos parents vous en donne, mais ce n’est que punition de surface, supportable en tout point. L’égo seul est touché, et dans le pire des cas, la joue. Cependant, les punitions de la Chose étaient à des myriades de ces petites choses à peine douloureuses. C’était un véritable calvaire tel que vous n’en aviez jamais vécu. Les jours d’avant le changement : j’étais transpercé de toute part, et à toute heure par d’horrible pique de douleur qui me laissait pantelant, et au bord de l’évanouissement. J’avais l’impression que la Chose plantait ses griffes crasseux entre mes côtés afin d’en perforer la peau et les poumons. Je dormais si peu, pendant ces périodes-là, que d’affreux cernes bleuâtres s’étendaient sous mes yeux, malgré mes vains efforts pour les camoufler. Puis, le fameux soir venait. Et là, c’était la pire de toutes les punitions que je recevais : je perdais connaissance, mon moi s’effilochait jusqu’à ne plus être. Et j’étais quelqu’un d’autre… non, si ça n’avait été que cela. Mon corps prenait vie, avec quelqu’un d’autre, en moi ! Une Chose en qui je n’avais pas confiance, et que je craignais de tout mon être. C’est instant étaient si douloureux que je me demandais encore comment je pouvais y survivre.

J’avais l’impression d’être un pantin. Si je vivais, ce n’était que pour la Chose… ou alors seulement parce qu’elle décidait que je devais vivre encore… car malgré tout, je lui étais utile. J’étais sa seule façon d’être de ce monde. Car si je mourrais, elle mourrait avec moi. Elle connaissait mes limites, et savait quand il fallait arrêter, quand est-ce que mon pauvre corps ne supportait plus. Elle savait tout de moi, et cela m’effrayait à un tel point que j’en faisais parfois des crises d’angoisses. Elle faisait partie de moi. Mais cela, je ne pouvais l’accepter. Je n’étais pas cette chose infâme qui tuait pour le plaisir. Oh, ça non. J’étais seulement son jouet. Elle me tenait en vie simplement parce qu’elle en avait envie, et elle me faisait souffrir. Parfois je me demandais si ce n’était pas moi qui délirais, et si elle voulait simplement m’aider. Puis, la douleur revenait, plus forte, et ces pensées s’effaçaient aussi vite qu’elles étaient apparues. Non, cette Chose était maléfique, et ne souhaitait qu’une chose : se nourrir, se gorger du sang, de la chair de ces victimes. Et pour cela, n’ayant d’autre moyen de survivre, elle m’utilisait égoïstement. Ruinant ma vie, ruinant mes rêves, ruinant toutes les choses auxquelles j’avais un jour aspiré. Je désespérais. Voudrait-elle un jour partir ? Au fond de moi, je ne pouvais cesser d’espérer une telle chose. Mais ma raison, plus forte que toute me rappelais sans cesse, et je le savais pertinemment, que j’avais la Chose en moi, pour la vie. Je mourrais avec elle, de vieillesse probablement. Car la Chose me refusait même la dernière de mes libertés : la mort. Je ne pouvais ni décider comment, ni quand j’allais mourir. Et cela était également un supplice. Si au moins, j’avais pu choisir quand je voulais quitter ce monde, faire partir cette chose ignoble en moi… mais non, ce serait elle qui aurait le dernier mot, et je ne le supportais pas.

Mais ce que je supportais le moins, c’était qu’elle m’arrachait à tous ceux auxquels je m’attachais. Il y avait eu cette petite fille, il y a bien longtemps, à l’orphelinat. Et puis, aujourd’hui, depuis peu, il y avait Hannah. Hannah, Hannah, Hannah. Ce dernier mois avait probablement été le plus paisible de ma pauvre vie. Toujours, j’avais eu de sombres pensées, plus encore depuis que la Chose était entrée en moi. Et puis, il y avait eu Hannah, qui avait voulu panser mes blessures, Hannah, qui, plus surprenant encore, souhaitait passer du temps avec moi, alors que j’avais été désagréable avec elle et Hannah, partout autour de moi, avec moi, ces derniers temps. Mes piètres efforts pour la repousser semblait au contraire l’avoir motivé à m’approcher davantage. J’avais ressentis cette envie de me connaître si fort en moi, qu’à mon tour, j’avais voulu l’approcher, bien malgré ma raison qui m’avais avertie dès le début de la dangerosité de cette relation, autant sur le plan de la sécurité de la jeune poufsouffle, que sur celui de la survie de mon cœur, déjà bien malmené. J’avais accepté. J’avais malheureusement accepté de la voir plus souvent, de faire quelques devoirs avec elle, de réviser quelques contrôles, et de fil en aiguille, j’étais venu à réellement apprécier ces moments avec elle. Paradoxalement, en ce moment, je haïssais autant que j’adorais cette décision que j’avais prise un mois plus tôt. Comment pouvais-je ressentir des émotions si contradictoires ? Comment pouvais-je à ce point être en désaccord sur moi-même ! Tout aurait été tellement simple si je l’avais dés la première fois trouvée particulièrement désagréable et que je n’avais pas eu la moindre envie de la voir… sauf que c’était tout le contraire, et peu à peu, je m’étais rendu compte que j’avais envie d’aller à ces rendez-vous, et même que j’en étais plus ou moins devenu dépendant. Car c’était la première fois que je me sentais aussi bien avec quelqu’un. Elle me faisait oublier l’horrible personne que j’étais, elle me faisait oublier la souffrance du monde pour me concentrer sur le bon côté de la vie.

Elle était mon pur opposé. Elle était le jour, et moi la nuit. Un soleil qui réchauffait son monde et brillant, éclaboussant son entourage de sourire et de chaleur, tandis que j’aspirais toute forme de joie pour diffuser une noirceur et un mal-être que peu de personnes appréciaient. Sauf que… sa chaleur déteignait sur moi. Bien que je reste prostré dans mon enveloppe de protection contre le monde, elle me rendait plus léger, m’aidait à aller mieux… d’une certaine façon. Je m’étais accroché comme un fou, trouvant une sorte de moyen de rédemption en elle. La désillusion n’en avait été que pire. Je n’étais pas mieux. La Chose faisait toujours autant mal, si ce n’est plus, car à la douleur physique s’ajoutais à présent la douleur du cœur : je ne pourrais plus jamais faire mes devoirs avec elle, la voir sourire, la toucher accidentellement… la voir et lui parler. Car j’étais dangereux, terriblement dangereux pour elle, et puis, je ne la méritais pas. Elle était trop bien pour moi, cette joie, elle devait la donner à quelqu’un qui serait capable de lui rendre. Or, je ne serais jamais capable d’une telle chose. Mon âme était tellement emplie de noirceur et torturée par la Chose, que je ne pouvais lui convenir. Simplement. D’ailleurs, pourquoi y pensais-je ? Je savais que cela était impossible. Je devais couper court les ponts. Elle ne devait plus me chercher, plus jamais. Elle devait partir. Sauf que je savais qu’elle n’allait pas se laisser faire, et cela me fit si mal lorsqu’elle réagit vivement après mon ordre
.

- Mais non ! Comme je l’avais fait précédemment, elle criait. J’en aurais presque souris si l’instant n’était pas si dramatique. Comme je l’avais pensé, elle s’accrochait, fort, à moi. D'accord, je... je ne parle plus de mes problèmes, je ne veux pas t'embêter, mais je peux pas ignorer les tiens, je vois que ça va pas. Cela me fendit le cœur en deux. Elle était tellement courageuse… mais comment faisait-elle. Elle venait visiblement de vivre un évènement dur : si j’avais bien compris, sa grand-mère devait être morte. C’était, d’après ses mots, une personne qu’elle aimait énormément, et même si je ne comprenais pas totalement l’amour qu’elle lui portait, je comprenais combien cela devait faire mal. Et elle choisissait d’oublier cela pour se concentrer sur moi, sur mon problème à moi. Non, vraiment, je ne la méritais pas. Je ne méritais AUCUNE de ces intentions, je ne méritais aucun de ses regards, de ses sourires et de ses mots. Quel être pitoyable je faisais à côté d’elle. Et le pire, c’est qu’au fond de moi, la Chose tressautait de joie, voulant à tout prix la prendre comme dîner. Cahyl... Dit-elle alors d’une voix, presque suppliante qui m’arracha de nouveau frisson.

Je fis tous les efforts du monde pour ne pas me précipiter vers elle, et… la prendre dans mes bras. La consoler, peut-être ? bien que ce ne soit probablement pas une chose dans laquelle j’étais doué puisque je ne l’avais jamais fait réellement. Mais cette voix… il y avait un tel besoin, de réconfort, de chaleur, de… de moi, que je ne pus la regarder plus longtemps. Que pouvais-je faire qui la faisait partir ? Je me pliais légèrement en deux, essayant de garder la face devant elle. La Chose grondait, trépignait, rageait, me coupant le souffle, griffant douloureusement mon âme. J’avais si mal, et pourtant, pour une fois, j’arrivais à garder l’esprit légèrement hors de l’eau. Assez pour savoir ce que j’avais à dire. L’une des choses qui me répugnait le plus, l’une des choses que je ne voulais pas dire. Mais, je le devais, pour son bien à elle, parce qu’il ne fallait pas qu’elle sache, parce qu’elle était en danger, parce que je ne la méritais pas. Je me devais de l’éloigner de moi. Je me devais de faire la bonne chose. J’avais parfois fait de mauvaise chose, et de la mauvaise façon, dans ma vie. Mais avec elle, je me devais de faire le bon choix : je devais lui dire de partir, loin de moi. Ce n’était pas ce que je voulais, mais c’était la décision la plus sage. Et, j’avais fait mon choix : je devais m’éloigner, l’éloigner, que plus jamais elle ne revienne vers moi. J’étais un danger, un si grand danger, moi-même je ne me rendais pas compte de tout le mal que je pouvais lui faire subir. D’un simple geste, je pouvais l’envoyer s’écraser quelques mètres plus loin, d’une simple pression mal contrôlée, je pouvais la faire mourir entre mes doigts, d’un simple coup, je pouvais la faire tomber dans le coma. Non, non, NON ! Il fallait qu’elle parte… que je la fasse partir. Deux mots. Deux mots me vinrent alors en tête, entre deux élancements de douleur absolue. Et je les prononçais, souhaitant me noyer dans le lac tant cela me blessait, et devait la blesser, elle. Un bruit se fit entendre, par terre. Je relevais mes yeux où clignotaient des points noirs pour apercevoir une tâche plus sombre sur le sol. Je m’interdis de renifler, de peur que la Chose ne sorte réellement de moi, mais je n’avais pas besoin de cela pour savoir ce que c’était : une larme. Ne pas la regarder. Ne pas la regarder. Ne pas la regarder. Surtout, ne pas la regarder. J’avais trop peur de céder, et dans la continuité, que la Chose ne saute sur l’occasion pour lui faire du mal, car en sa présence, j’étais horriblement et délicieusement faible. Sauf qu’elle ne réagit pas comme je l’attendais, cette fois-ci
.

- Eh ben ça marchera pas comme la première fois, figure-toi ! Tu penses que tu vas boucler la boucle, là ? Je reste, je t'ai dis ! Dit-elle en reniflant légèrement. Pourquoi, nom de Merlin, fallait-il qu’elle soit si têtue ? Pressentant le pire, j’eus un léger mouvement de recul, tandis que je comprimais ma cage thoracique, essayant de garder la Chose en moi. L’emprisonnant, pour qu’elle n’en sorte jamais. Je vois bien que ça va pas, et c'est pas la première fois, s'il te plaît, dis-moi ce qui se passe, laisse-moi t'aider, c'est insupportable de te voir comme ça.

-Tu ne peux pas m’aider… Je ne veux pas de ton aide. Dis-je d’une voix où quelques zestes de méchancetés se faisaient sentir. Ca y est, c’était parti. Je me devais de l’être. Il fallait dire que la Chose me facilitait le travail, pour une fois. Sa colère et sa rage déteignaient dangereusement sur mon humeur. Et plus le temps passait, plus sa colère grondait en moi, et plus la mienne grandissait. Je devenais doucement elle, et ses pensées étaient les miennes. Ma colère grandissait, si bien qu’un grondement léger s’échappa de ma poitrine. Paniqué, je reculai encore. Je ne me contrôlais plus. Elle s’infiltrait dans la faille qu’Hannah ouvrait dans ma carapace, dans mon âme. Je serrais les poings si forts que les muscles de mes avant-bras tétanisèrent, et que les jointures de mes doigts craquèrent. Je respirais, essayant de retenir le monstre en moi. Cet animal qui essayait de prendre possession de moi et qui détruisait tout sur son passage. Je sentis mes pupilles rétrécir, et me mordit les lèvres, que par la douleur je puisse revenir à moi, mon vrai moi. Car si je laissais la Chose s’emparer de moi, même de quelques centièmes de mon être –car nous n’étions pas Le soir, donc elle ne pouvait pas prendre complètement possession de moi-, elle ferait le plus de mal possible à Hannah. Elle était la proie la plus proche, et mieux encore, je me sentais lié à elle. Dans le brouillard de douleur dans lequel j’étais plongé, j’entendis la voix de la jeune fille porter jusqu’à mon cerveau :

- Je reste. Cahyl, dis-moi, je suis là. Dit-elle ensuite doucement.

Sauf qu’elle ne prit pas la bonne décision. Je sentis sa main sur mon avant-bras. Elle fit ensuite glisser ses doigts jusqu’à mon poignet, contracté à l’extrême. Je luttais, vaillamment, durement, repoussant un à un les assauts de la Chose, infatigable. Mais, la main d’Hannah sur moi me fit frissonner. La Chose l’avait sentie, et de ses yeux perfides devait saliver devant cette pauvre proie, qui s’approchait innocemment de moi, sans même savoir qu’est-ce que j’étais… le monstre que j’étais. J’aimais ce contact. La Chose également l’aimait, et bien trop pour que cela soit normal. Un nouveau grondement monta en moi tandis que je sentis quelques partie de mon corps muter doucement, sans trop de craquement, pour une fois. Je sentis par exemple mes ongles s’allonger très légèrement, s’effilant, comme pour se transformer en abominables griffes, qui transperçaient toute matière. Alors, je décidai de bouger, sentant le danger et la transformation devenir bien trop importante. Je ne respirais plus, la douleur faisait partie intégrante de mon être. Je sentais à peine la main de Hannah sur mon bras, trop occuper à essayant de garder cette horrible, ignoble, monstrueuse Chose en moi. NON ! NON ! Elle ne pouvait pas sortir comme ça, maintenant. Terriblement en colère, fatigué, j’attrapais avec violence l’avant-bras d’Hannah et le serrais de toutes mes forces, puis je l’éjectais quelques mètres plus loin, loin de moi. Je l’entendis trébucher légèrement. Voilà. Elle avait là la preuve que je n’étais qu’un monstre horrible. Elle devait partir, absolument, je me devais de couper le moindre petit filament qui la reliait à moi. Maintenant
.

-Ne me touche pas ! Hurlais-je, dans une colère noire qui ne venait surement pas de moi. Dégages, je ne veux plus te voir, plus te parler… JAMAIS !

Je me retins de crier à nouveau, un cri de loup blessé, de loup déchiré qui perdait ce soir, tout ce à quoi il tenait. Qui perdait le peu de vie qu’il n’avait jamais eue. Qui perdait tout.
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Hannah Blueberry


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MessageSujet: Re: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeSam 15 Déc - 23:42

    J'aurais aimé pouvoir croire à l'hypothèse de la farce. Genre, que tout à coup, il me fasse un sourire, un de ses rares sourires un peu timides, et qu'il s'exclame « Poisson de Décembre ! Allez je blague, on va faire des sablés de Nöel, c'est parti... » ...Non, Cahyl ne disait pas « c'est parti mon kiki », même dans mon imagination la plus folle. Mais, en tout cas, il ne m'y était pas hostile, car j'avais classé nos faux pas du début bien loin derrière moi depuis longtemps. Notre première rencontre, dans le potager aux citrouilles, aussi houleuse qu'une mer en pleine tempête, avait été réduit au rang de « lointain souvenir » dans mon esprit. J'avais décidé que c'était une erreur, que nous nous étions mal compris, à ce moment là, qu'il avait été méfiant – ce qui était normal, et que j'avais tout de même fait preuve de gentillesse – ce qui était aussi normal, parce que j'étais comme ça, et puis voilà. J'avais accepté qu'un garçon puisse avoir ses mauvaises périodes, comme les filles – je pense que vous voyez à quoi je fais allusion. Pour expliquer le premier et violent rejet de Cahyl, j'avais supposé qu'il était dans de mauvaises dispositions à ce moment là, que quelque chose de grave était arrivé à son entourage – et puis j'avais appris qu'il était orphelin, révélation qui m'avait autant attristée que révoltée. J'avais alors mieux compris son hostilité à l'égard des étrangers, et ça aussi, encore, je l'avais accepté. J'avais essayé de le connaître et de le comprendre du mieux que je le pouvais, parce que le nuage de mystère qui entourait Cahyl avait bien trop attisé ma curiosité pour que je laisse l'énigme irrésolue ; et faute de pouvoir expliquer son comportement bissextile, j'avais remis le mien en question, pour la première fois : et si je n'étais qu'une pauvre relou qui mettait son nez de fouine dans les affaires des autres ? Et si je me montrais indécente envers lui ? Et si c'était sur moi que je devais m'interroger, et non sur lui ? La faute était peut-être en partie mienne, mais il y avait quelque chose qui ne clochait pas non plus chez lui, j'en avais été progressivement convaincue. Je l'avais également accepté, parce que je tenais aux esquisses d'amitié que nous avions dessiné ensemble, je voyais qu'il souriait un peu plus souvent, qu'il discutait un peu plus facilement, que j'avais gagné un peu de terrain – et c'était peut-être terriblement orgueilleux, mais j'en étais terriblement, vachement satisfaite. Il y avait quelque chose de fascinant chez Cahyl, parce qu'il cachait bien son jeu : il était intelligent et intéressant, qualités accentuées par le fait qu'il n'en avait pas conscience. Et ça, ce n'est pas quelque chose dont tout le monde pouvait se vanter – et surtout, surtout pas moi. J'avais l'impression d'apprendre quand j'étais à ses côtés, sauf en cuisine ; dans ce domaine, c'était moi la maîtresse qui enseignait à l'élève – et même si l'élève ne se contentait que de dévorer le résultat du cours, ça me procurait déjà une joie immense.

    Il y avait donc eu ce mieux qui m'avait fait espérer qu'un jour, je puisse l'emmener à Glasgow, avec Aure et Eilyne, rendre visite à ma grand-mère et visiter les merveilles dont recelait la ville – ce souhait de voyage en amis était désormais réduit à néant. A force de voir mes rêves s'émietter, j'en venais à douter : étais-je si... stupide et naïve ? Il me semblait que je croyais dans du possible, du probablement concret, du réalisable ; que c'était bien d'espérer et de ne pas se laisser abattre, ce que j'avais toujours refusé. Quand je voyais une lueur d'espoir se dessiner dans l'obscurité, je m'en saisissais immédiatement, parce que c'était trop malsain et dangereux de se laisser sombrer – j'en avais vu les désastres chez Coleen. Ce soir, je m'étais raccrochée à Cahyl, la seule lumière que j'avais entrevue de la journée, et je faisais les frais de ma naïveté : je ne pouvais pas fermer les yeux sur ses côtés négatifs pour n'entrevoir que le meilleur ; je ne pouvais plus, car ce rejet là était impossible à digérer – il semblait que mon cœur avait atteint sa capacité d'acceptation, car je le sentais se fissurer à chaque nouveau mot horrible qu'il prononçait.

    - Tu ne peux pas m’aider… Je ne veux pas de ton aide.

    Il rugissait, ou grognait, difficile de déterminer la nature du ton insupportable sur lequel il prononça ces mots, tous plus terribles les uns que les autres ; je n'entrevoyais qu'une seule chose : son refus net, catégorique, vif, tranchant. Incompréhensible. La lettre que j'avais reçu et qui gisait sur le sol - à quel moment l'avais-je lâchée - m'avait trop fragilisée pour que je puisse résister aux attaques de Cahyl, impitoyables et dévastatrices.

    J'étais à sa merci, et il semblait en profiter ; plus je m'offrais à lui et plus sa violence était virulente ; comme si il s'agissait d'un jeu et que cette amitié que j'avais entrevue ces dernières semaines n'était qu'un mirage. Peut-être avais-je rêvé les bons moments passés ensemble, peut-être que nous ne étions jamais réellement bien entendus, qu'il avait tout dissimulé pour avoir la paix ; une paix que je ne lui avais jamais donné l'occasion d'avoir. Peut-être étais-je trop envahissante ; mais lui était trop violent. Alors que j'avais tout accepté, tout pardonné, les failles de notre amitié me paraissaient désormais aussi énormes qu'un éléphant rose dans un couloir du château.

    Il me prouvait ce soir que le soleil et la pluie ne formaient aucun arc-en-ciel : ils étaient définitivement deux entités distinctes dont la réunion était infertile. Incapable de fixer Cahyl tremblant de haine, je réfugiais mon regard embué de larmes vers la lune, majestueuse ; j'aurais aimé qu'elle m'accueille en son sein pour m'y reposer et ré-apprendre à rêver. En se montrant inexplicablement violent, en détruisant les illusions qui s'étaient formées dans mon esprit stupidement puéril – un esprit de bébé qui vient au monde et qui croit être sorti d'une rose qui sent bon le bonheur, songeais-je avec colère –, Cahyl ouvrait la voie aux pires des pensées qui tourbillonnaient désormais dans mon esprit. Je voulais les chasser, comme j'en avais l'habitude, me raccrocher au beau, au bon, au bien ; mais tous mes piliers s'étaient effondrés, et je ne pouvais rien faire d'autre que m'écrouler.

    Et pourtant, je me raccrochais encore faiblement aux ruines, désespérément bornée. Le sang palpitait dans mon cœur ; la douleur de la perte était telle que je tenais encore debout, le choc de la violence me maintenant dans un état d'ébahissement. J'étais si incapable de croire à la disparition de ma grand-mère et l'anéantissement de toute bonté chez Cahyl qui piétinait sauvagement la toile que nous avions tissé dans la même journée – mais il était la seule araignée et j'étais la mouche, il me dévorait, là, toute entière, sur ce perron – que je croyais encore à la possibilité de l'hallucination ou du mirage. Peut-être que, lorsque j'allais le toucher, il allait disparaître et j'allais me réveiller dans les couvertures moelleuses de mon lit à baldaquin, et rien ne serait jamais arrivé. J'allais le revoir l'après-midi même, et nous allions discuter et rire ; et j'enverrais une lettre à Mamie Moira pour lui dire que les Elfes ont de nouveau réalisé des scones mais qu'ils ne parviennent jamais à égaliser les siens – et que je l'aime, que je l'aime, que je l'aime tellement.

    Quand Cahyl prononce les mots terribles, j'ai encore l'espoir d'un cauchemar : le ton de sa voix est presque le même, l'ordre est identique ; seul le lieu est différent. Il ne peut que s'agir d'un mauvais rêve créé par mon esprit hanté par ce tout premier rejet – si j'avais su qu'il était le premier d'une longue lignée, peut-être n'aurais-je pas autant persévéré. Mais en constatant que ses paroles résonnent dans la nuit tombante et dans mes oreilles et dans mon cœur paralysé et fatigué de courir vers l'impossible, que les poils de mes bras se hérissent, que mon visage possède encore les vestiges de mes larmes séchées, que la douleur est toujours là, partout dans mon corps, je cesse de croire.

    La chute est si brutale que je ne peux plus plus me rattacher à l'abstrait ; j'ai besoin de concret, d'être rassurée et de le rassurer ; alors je m'empare de ses poignets et m'y appuie, les dernières cendres d'espoir encore allumées. Sa chaleur en contact avec mes mains gelées me met un peu de baume au cœur -

    Et puis une douleur aiguë à l'avant-bras provoque une deuxième chute, fatale. Je titube en arrière, surprise par le choc, ne comprenant pas ce qui vient de se passer. Quand je réalise, ébahie, que Cahyl m'a jetée en arrière comme une poupée de chiffon, je cesse de me battre et m'écroule sur mes genoux flageolants qui viennent frapper la pierre dure et froide du perron.

    - Ne me touche pas !

    Il hurle, ce qui ravive de nouveau mes larmes que je n'essaie plus d'arrêter. Je plonge mon visage dans mes mains dont les ongles pénètrent la peau de mon front.

    Je veux que tout s'arrête.

    Je ferme fort les yeux et déplace mes mains sur mes oreilles pour effacer le monde entier, mais je l'entends encore. Il crie.

    - Dégages, je ne veux plus te voir, plus te parler… JAMAIS !

    Je veux disparaître dans la pierre froide, rejoindre Mamie Moira tout là-haut, où il fait beau, chaud, et où les lits sont en guimauve et les rivières en chocolat, voir Matthew, qu'il me prenne dans ses bras solides de grand-frère protecteur. Je ne veux plus sentir le vent froid sur ma peau, mes genoux qui ont trop brutalement heurtés la marche, les larmes dans lesquelles je me noie, la voix de Cahyl qui me transperce les tympans et ses mots qui me secouent de sanglots, interminablement.

    Seul le sentiment de révolte et de colère que je ressens envers lui m'empêche de m'écrouler un peu plus et de me rouler en boule sur le perron du château. A force d'accepter ses torts, ses défauts, ses moments éphémères de refus – ce dernier que je subis semble être pour le dernier pour toujours – je me suis rendue faible face à lui. J'en prends conscience, là, alors que je suis dévastée pour la première fois de ma vie, le cœur en friche, les rêves mutilés, la peau arrachée... la peau arrachée ? J'ouvre un peu plus les yeux pour apercevoir distinctement trois légers filaments rougeâtres d'une demi-douzaine de centimètres qui s'étendent sur mon avant-bras droit.

    Il m'a griffé le bras comme il m'a poignardé le cœur, et maintenant, les deux saignent.

    La panique me prend soudainement alors que je réalise la portée de son acte. Il me déteste véritablement. Le fait s'affirme dans mon esprit, la vérité douloureuse distillant son poison dans mes veines, et je trouve le courage de le regarder une dernière fois à travers les larmes qui coulent de mes yeux gonflés et endoloris – maintenant que j'ai si froid, je suis presque contente qu'elles soient là, car elles sont chaudes et effleurent mes joues comme une caresse avant de s'écraser sur le sol et d'exploser. Mortes. Crevées.

    Il est toujours à moitié plié à deux, et les seuls mots qui me viennent pour le décrire appartiennent au vocabulaire animal – mais sa violence est si féroce que je m'y accommode. Son échine est courbée, son visage crispé, une expression étrange affichée sur ses traits que j'avais trouvé si doux et beaux. C'est le rejet que je lis, le rejet pur et simple.

    Les choses ne peuvent être plus simples. C'est une démolition, un saccagement et un adieu.

    Je réprime un haut-le-corps et lève bien haut la tête pour le fixer. Pas une once de pitié ne fait battre mon cœur. Il bat tout juste parce qu'il ne peut pas s'arrêter, et je l'entends, faiblement, résonner dans mon organisme. C'est la douleur de la trahison et de l'injustice qui me donne la force d'ouvrir ma bouche, pâteuse et mouillée de larmes.

    - Donc...donc on oublie tout ? demandai-je, la voix tremblante. Qu'est-ce que j'ai fais ? P...parce que si j'ai fais quelque chose de mal, si c'est de ma faute, je veux savoir.

    Face à son silence, la colère prend le dessus, grondant dans ma gorge.

    - Alors c'était un mensonge... tout ça ? Je t'ai jamais forcé, j'étais peut-être... peut-être lourde, mais je t'ai jamais forcé ! Tu te rends compte de ce que tu fais ? Je sens les larmes se presser un peu plus sur mes joues. J'étais sincère, je voulais t'aider, j'ai cru que... que... Les mots restent coincés dans ma gorge. Je comprends pas pourquoi tu te comportes comme... comme ça, comme un monstre. J'ai toujours contredit les gens qui le disaient, parce que c'est faux, et là... t’écrabouilles tout, j'sais pas si tu te rends compte de comment tu... tu...

    Ma vois s'affaiblit mais je persiste pour lui dire les toutes dernières choses que j'ai à lui adresser.

    - Je voulais être ton amie et t'aider. Je sais qu'il y a un truc qui va pas. Tu sais quoi, tant pis. Vas-y, va t-en !, articulai-je finalement la mâchoire serrée et la voix entre-coupée de sanglots.

    Je baisse la tête, replie mes genoux contre ma poitrine et enfouie ma tête. Je tente d'avoir le dernier mot en lui ordonnant de partir mais je sais c'est lui qui m'a déchiqueté la poitrine en prononçant ces mots qui tournent en boucle dans mon esprit. J'ai tout juste conscience de dire des choses que je ne pense pas entièrement ; mais ma force est partie avec Mamie Moira, et il ne me reste plus que l'amertume et la violence que je ressens face à ce que je subis comme une perte de plus. Je n'avais pas espéré à ce qu'il me console, ou me rassure, car je savais pertinemment que c'était impossible. Mais je ne m'attendant ni à ce rejet, cette violence, ce dégoût qui émanait de lui et qui me consumait et détruisait ce en quoi j'avais mis tant d'espoirs vains cette dernière année. Il avait définitivement bouclé la boucle ; après tout, nous n'avions fait que tourner en rond. Je renforçais l'emprise de mes bras autour de mes genoux et laisse aller mes larmes, recroquevillée sur moi-même. Comme une enfant qui naît et à qui l'on annonce qu'elle n'est pas née dans une rose qui sent bon le bonheur – mais qui pue l'abandon, l'injustice et la mort.
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Cahyl Steadworthy


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Âme soeur: Ais-je seulement le droit d'espérer? Ces sensations qui fleurissent en moi semblent m'indiquer que oui, j'en ai le droit.

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MessageSujet: Re: Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER   Crippled heart running towards nothing [C.] - OVER Icon_minitimeDim 16 Déc - 20:37

Aviez-vous déjà eu l’impression de n’être qu’un simple spectateur impuissant, devant des évènements déchirants ? Aviez-vous déjà ressentis cette douleur abominable qui vous déchirait le cœur tandis que vous vous voyiez en train de prononcer des paroles que vous regretteriez toute votre vie ? Vous étiez-vous déjà haï à un tel point que vous aviez eu envie de vous enterrer vivant pour que personne, non, plus personne ne vous regarde et que vous puissiez mourir sans ne plus rien ressentir ? J’étais perdu, emplis d’effrois devant les mots qui étaient sortis de ma bouche, d’entre mes lèvres restées pourtant si souvent close, contenant le flot bouillonnant qui grouillait en moi. J’avais prononcé des paroles qui avaient été inspirées par les instincts bestiaux et ignobles de la Chose, par la colère et la fureur animale qui m’habitait depuis bientôt la moitié de ma vie. Encore grondant, je ne mesurais pas encore les impacts qu’auraient ces mots sur la jeune fille. Cette jeune fille, qui avait réussis à me faire rire, là où tous avaient échoués. Cette fille qui avait couru vers moi, et m’avais soutenu et défendu devant tous alors que la plupart m’avaient simplement tourné le dos. Sauf, que je n’étais pas fréquentable. J’avais cru pouvoir avoir une vie normale, des amis… une amie. Mais tout cela m’était à présent sauvagement arraché, et c’était moi le seul fautif. Tout était de ma faute. J’avais accepté de me rapprocher d’elle dans un élan d’espoir, en recherche d’affection. Mais cette effroyable… Chose en moi me ramenait plus durement que jamais à la réalité : j’étais irrémédiablement fait pour être seul. Pire, j’étais condamné à passer ma vie entière sans compagnie, terriblement seul. C’était une malédiction, et je ne pouvais rien en faire, rien décider. Tout ce que je tentais de faire afin de remédier à cela tombait en poussière à l’instant où la Chose s’en mêlait. Et, il fallait que je sois réaliste : la Chose s’en mêlerait toujours. Elle serait toujours là, en moi, profondément ancrée, accrochée aux parois de mon âme, n’attendant que la nuit J pour sortir, attendant que la lune soit à son apogée, et qu’elle éclipse fièrement, dans le ciel, toutes ses adversaires.

Mais ce soir, je détestais la Chose plus que tout au monde, car elle me faisait perdre la seule amie que je n’avais jamais eue. La première, et la seule véritable personne qui m’avait acceptée telle qu’elle me voyait. Bien sûr, il y avait Padma, mais ce n’était pas la même chose, elle était comme ma petite sœur, une petite fille de mon espèce. Alors qu’Hannah… était Hannah. C’était autre chose, une chose indéfinissable. Et, là, à cet instant, j’avais l’impression de tout perdre en quelques secondes. Ce dernier mois, elle avait été comme un nouveau souffle, j’avais redécouvert la vie sous des aspects que je n’avais jamais connus. Elle m’avait fait voir une parcelle de bonheur, et ces heures passées ensemble resteraient gravées dans mon cœur. Ce serait un doux souvenir à me remémorer lorsque mon espoir s’envolerait loin de moi. Cependant, j’étais allé bien trop loin. J’avais cru pouvoir la tenir à distance que par quelques mots, et voilà qu’elle s’était approchée, trop près, de moi, et que j’avais perdu toute trace d’humanité en quelques secondes. La Chose avait surgit, balayant mon esprit comme un fétu de paille aurait été balayé par le vent. Et j’avais été si apeuré qu’elle ne fasse quelque chose à Hannah que j’avais préféré, dans mon effroi, reprendre partiellement conscience et l’éloigner de moi, au sens propre du terme. Je l’avais rejetée loin de moi, attrapant son avant-bras et d’un simple petite pression, la fit trébucher.

C’est alors que je me rendis compte que j’avais été trop loin.

Presque choqué, je m’étais stoppé dans mon geste, observant la jeune fille perdre l’équilibre, puis tomber à genou, comme si elle abandonnait. Et c’était le cas, elle arrêtait de s’accrocher sur moi. Et même si cela avait été mon choix, j’en fus tellement choqué que je sentis mes jambes se dérober faiblement sous moi. Je tombais accroupis, l’une de mes mains plaquées au sol : mon seul rempart fiable contre la chute totale. Puis, me vint à l’esprit ce que je venais d’accomplir : j’avais porté la main sur Hannah. La Chose sembla refluer, sentant la colère dévastatrice qui grondait en moi, plus forte encore que la sienne. J’étais en colère contre elle, et contre moi. J’ouvris bêtement la bouche, essayant de prononcer des paroles, qui ne seraient que vaine. Puis, je la regardai, et vis les larmes coulant sur ses joues. Des larmes de désespoir pures qui me broient le cœur. C’est MOI qui ai voulu cela. C’est moi le responsable de ces larmes, des tremblements qui traversent ses épaules, cette tête penchée, incapable de se redresser sous le poids de la douleur. Douleur que mon cœur semble ressentir également, et qui fait probablement écho au sien. A mon tour, j’ai l’impression que mes yeux s’emplissent d’un liquide que je ne connais pas très bien : des larmes menacent de couler. Sauf que pour une fois, ce ne sont pas des larmes de douleur, mais d’amertume et de frustration. Une frustration telle qu’elle me ronge le cœur d’une façon insupportable.

Comme je voulais courir vers elle, la prendre dans mes bras et lui dire que tout ce que je venais de faire, ce n’était que pour sa sécurité, et sa sécurité seulement, mais également pour la mienne. Comme je voulais, tout lui dévoiler ! Qu’elle sache enfin tout et qu’elle arrête de souffrir. Comme je voulais sentir son corps chaud contre le mien, et que je puisse, de quelques mots doux, la réconforter, qu’elle arrête de pense au chagrin et à la douleur, et que je puisse simplement essuyer ses larmes qui coulaient, bien trop nombreuses. Comme je voulais effacer tout cela, enlever cette ignoble Chose de moi, et que tout redevienne comme avant, comme ce dernier mois passé, qui avait été l’une des périodes les plus heureuses de ma vie. Comme je voulais… Cependant, tout cela m’était impossible. Je ne pouvais, à mon grand regret, pas revenir en arrière. Je ne pouvais rien faire. J’étais là, impuissant, assistant à mon effroyable œuvre. Elle était détruite, et de la voir ainsi, j’avais l’impression que cela me détruisait dans un même temps. Je m’en voulais tellement, accroupis sur ce sol de pierre, le cœur saignant, la Chose refluant tout doucement, sachant qu’elle avait gagné, dans les tréfonds de mon âme et le corps en miette. Je n’étais plus qu’une épave, une épave qui avait longtemps essayé de s’accrocher, mais qui coulait brutalement ce soir. Toutes mes illusions étaient tombées, découvrant la réalité. Et mes mots avaient fusés. Trop horrible, trop dévastateurs. J’avais envie de me frapper la tête contre la pierre, de pleurer de toute mon âme et de m’allonger dans le froid, et mourir, peut-être, si la Chose le permettait.

C’était la pire soirée de ma vie. J’en avais pourtant vécu beaucoup, d’horribles soirées. Mais celle-ci était probablement celle qui m’avait le plus dévasté. Je n’étais plus rien. Je n’osais même plus lever la tête pour croiser son regard, où je trouverais probablement incompréhension et abandon. Des sentiments auxquels je ne voulais pas me confronter, car ils détruiraient le peu qui me restait. A présent, et je le savais, il n’y avait que la Chose qui me ferait tenir debout. Je comprenais que je perdais presque tout ce soir. Et c’était ma faute. Tout avait toujours été de ma faute. Si mes parents m’avaient laissés, c’était de ma faute, si j’avais eu la Chose, c’était de ma faute, et si je devais laisser partir Hannah avec un tel désespoir en elle ce soir, c’était également de ma faute. Je n’étais qu’un raté, une abomination, une créature qui ne méritais simplement pas de vivre. Comment avaient-ils pu me laisser entrer à Poudlard ? Comment Hannah avait-elle fait pour me laisser entrer si facilement dans sa vie.

Mes pensées dérivaient contre mon gré. Ressassant toutes ces plaies que je voulais garder secrètes, fouillant dans ma mémoire et dans mes sentiments. La Chose s’était tue, elle ne me gênait même plus. Je sentais seulement sa présence au bord de ma conscience. Comme si elle restait tout de même ici, pour me surveiller, prête à revenir à l’assaut si je décidais de faire marche arrière. Sauf que je ne le ferais pas. J’étais dans un tel état d’abattement que mes forces s’étaient enfuies, s’éparpillant au gré du vent glacial qui se levait. Que le vent m’engloutisse, qu’il m’emporte loin d’ici, qu’il m’enlève la Chose et tout ce qui se rapportait à elle dans ma vie. Je fermai les paupières. Tout cela n’était que vaines pensées, car je savais que jamais elle ne s’en irait. Elle était mon fardeau, un fardeau bien trop lourd que je devrais porter ma vie entière. Elle serait toujours là. Comme cela semblait long et douloureux. Et pourtant, ce serait le cas. Un tel calvaire n’aurait dû être créé. Je relevais la tête, et couvant Hannah du regard, toujours à genoux, me sentis trembler plus encore. Surtout si ce calvaire devait nous séparer des seules choses auxquelles nous nous attachions.

Puis, la portée de mon acte me vient subitement en tête. Jusqu’alors, je n’avais pas compris. Mais ce n’est que lorsque je respire profondément, que je comprends que quelque chose ne va pas. A nouveau, je prends une courte respiration, et sentant la Chose se mouvoir en moi, la contient avec une rage indescriptible. Du sang. Il y a du sang, là, quelque part. Quelqu’un s’est-il blessé ? Et lorsque je lève les yeux, la vérité s’impose à moi, m’écrasant d’un poids tel que je crus mourir. La personne blessée, c’était Hannah. Et celle qui l’avait blessée, c’était moi. Cette révélation s’imposa avec une force phénoménale dans mon esprit, et je dû me retenir de toutes mes forces pour ne pas m’écrouler : je l’avais blessée. Moi ! Je l’avais blessée elle ! J’avais osé porter la main sur elle ! Complètement choqué, je restai quelques instants ébahi, regardant seulement les fines traces rougeâtres qui tranchaient sur sa peau pâle. La Chose elle-même ne semblait pas trouver le moment adéquat pour manifester sa faim grandissante. Pour une fois, une seule fois, elle me laissait tranquille. Son boulot était fait. J’avais fait, ce soir, tout ce que j’avais toujours craint. Dévasté, je baissai à nouveau la tête, des tremblements de rage terrible me secouant. Je l’avais BLESSÉE ! Comment cela était-il possible ? Comme AVAIS-JE pu faire une telle CHOSE ?

QUI étais-je pour oser lui faire du MAL ?

Cette terrible envie de m'exploser la tête contre le sol me revint avec tant de force, que je dû me retenir pour ne pas l’appliquer vivement. Voilà, ce que j’avais toujours crains : blesser quelqu’un. Lorsque la Chose prenait mon corps, cela était encore excusable, bien que je n’en trouve aucune excuse réellement valable, mais à cet instant, elle n’était pas là. Pas réellement là. C’était Moi. Cahyl. Qui l’avait blessée. Et je m’en voulais terriblement. Qu’y avait-il de pire sur Terre, que de faire souffrir les gens que vous aimiez ? Rien. Rien n’était pire, et ce soir, pour la première fois, je le découvrais. La seule personne qui avait su m’aimer rien qu’un peu, malgré mes sauts d’humeur, je venais de la blesser, de la rejeter avec force. Et je comprenais désormais ce que cela impliquait : un trou béant et ineffaçable en moi. Jamais je ne pourrais remplacer le vide qui s’était brutalement créé en moi, emportant loin tout ce que j’avais construit, le peu que j’avais construit avec elle. Il me semblait que tous les sentiments que j’avais pu éprouver jusqu’ici s’en étaient allé. Me laissant seul avec la douleur comme seule amie. Elle l’avait toujours été. Mais aujourd’hui, c’était une autre sorte de douleur qui s’associait à celle-ci. Ma vie n’était plus que douleur et peine. Mais je le méritais. Je faisais souffrir Hannah. Je faisais souffrir les gens autour de moi, alors, ma punition, c’était que je souffre également, et ce pour l’éternité. Je ne méritais rien. Sauf la douleur. J’avais pensé rester ainsi, seul face à mon désespoir. Seulement, sa voix s’éleva dans la fraîcheur du soir. Me ramenant sur Terre :


-Donc...donc on oublie tout ? Qu'est-ce que j'ai fais ? P...parce que si j'ai fais quelque chose de mal, si c'est de ma faute, je veux savoir. Dit-elle d’une voix tremblante qui me laissa à court de mot.

Oh, Hannah, si tu savais. Ce n’était pas toi, le problème, et ça ne l’avait jamais été, bien que tu croies le contraire. C’est Moi et moi seul le problème. C’est moi, qui ne tourne pas rond, c’est moi qui est l’auteur de tout cela, de tous ces maux. Et je m’en veux tellement. Mais, tu ne peux pas savoir. Non, elle ne pouvait le savoir, malgré l’envie irrépressible que j’avais de tout lui avouer, maintenant. Mais j’y avais déjà assez réfléchis. Je ne voulais pas… plus que tout, je ne pouvais pas. Je restai de marbre. Tout du moins, feignit de rester de marbre tandis que mon être entier hurlait à la Lune ma souffrance de la voir ainsi, et de ne pouvoir rien faire, rien dire. Cela était le pire de tous les supplices. J’ose à peine la regarder, ne souhaitant pas voir mes résolutions faiblir devant son visage, et devant les lueurs qu’abritent ses yeux. Mais mon silence ne lui convient pas, évidemment. Si j’avais été à sa place, j’aurais probablement réagis de la même manière. Je sens sa colère se répandre autour d’elle et m’englober tout entier. A son tour de me haïr, et tant mieux. Elle m’oublierait ainsi plus vite, elle pourrait refaire sa vie sans moi, loin de moi, sans être constamment en danger. Qu’elle me haïsse, qu’elle me déteste, qu’elle me voit comme un monstre, qu’elle m’oublie…


- Alors c'était un mensonge... tout ça ? Je t'ai jamais forcé, j'étais peut-être... peut-être lourde, mais je t'ai jamais forcé ! Tu te rends compte de ce que tu fais ? J'étais sincère, je voulais t'aider, j'ai cru que... que... Comment puis-je supporter pareille chose ? Je me met à trembler de tout mon corps. Je ne peux pas rester ici. Cela m’est tellement insupportable que je sens les larmes se presser au bord de mes cils. Ce n’est pas possible, je ne le SUPPORTE PAS ! Je me lève brusquement, et m’éloigne de quelques pas. Incapable de rester, incapable de partir. J’entends ses larmes s’écraser sur le sol, et dos à elle laisse couler les larmes qui me brûlent les joues. La gorge trop nouée, douloureuse, je reste coi. Plus les mots sortent de sa bouche, plus le flot de mes larmes s’intensifie. Quelle douleur ! Jamais je n’aurais cru avoir autant mal. J’avais toujours pensé que la douleur physique était la pire, à cause de la Chose, mais c’était celle du cœur, la plus dévastatrice, je le savais, à présent. Mon cœur était réduit en centre, plus rien ne subsistait. Et ces cendres, elle les consumait par ces dernières paroles qui me poignardaient, me tuaient plus surement que toute autre arme.

-Je comprends pas pourquoi tu te comportes comme... comme ça, comme un monstre. J'ai toujours contredit les gens qui le disaient, parce que c'est faux, et là... t’écrabouilles tout, j'sais pas si tu te rends compte de comment tu... tu...

Qu’elle en finisse, je mourrais.

- Je voulais être ton amie et t'aider. Je sais qu'il y a un truc qui va pas. Tu sais quoi, tant pis. Vas-y, va t-en !

C’est là, à cet instant, que je mourus. Tout autour de moi, ne fut que bourdonnement désagréable. Ma vue sembla se voiler et je sentis un froid terrible envahir mon corps entier. Je levai légèrement le visage, l’offrant à la lune, la seule qui parviendrait désormais à me sortir de l’état de douleur permanente que je devenais. Car elle serait la seule capable de me faire oublier qui j’étais. A présent, elle devenait mon alliée, mon amie. De nouvelles larmes coulèrent le long de mes joues, tandis que je sentais la honte et le désespoir enfler en moi. Je fis quelques pas chancelants, puis, me mis à courir de toutes mes forces, loin, très loin. Bientôt, les sanglots d’Hannah ne furent plus perceptibles, et je m’écroulais à mon tour, face contre terre. La frustration que je ressentais atteignis alors un tel degré, que de rage, je me levais et frappai tout ce qui se trouvait à ma portée. Cette branche, cet arbre, cette pierre. Je m’en brisais les doigts, les poignets. Puis, au bout d’un temps indéterminé, épuisé, je tombais.


Ce soir, j’étais un loup blessé, un loup mourant.




~Terminé
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