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WORST. PLAN. EVER.

 
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 WORST. PLAN. EVER.

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Stephen Fray


Stephen Fray
Élève de 6ème année



Masculin
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Date d'inscription : 24/09/2007

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MessageSujet: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeJeu 10 Nov - 19:16

Depuis la tour de Serdaigle, on avait une vue imprenable sur le parc. Pour nous autres, véritables érudits de Poudlard, c'était fort commode : plus de possibilités d'observer les étoiles, de profiter de la sérénité d'un espace ouvert… Pourtant, si brillants que fussent mes camarades, aucun Serdaigle ne m'avait jusqu'alors fait remarqué l'avantage stratégique de notre position. Oui, ils étaient sages, les aigles dans leur petit nid – trop peut-être : il était temps de cesser de jouer à être intelligent, et mettre une bonne claque à cette bande de bons à rien qui nous entourait. Une bonne raclée aux Serpentard, surtout, qui avaient une fâcheuse tendance à jouer aux petits malins avec leurs plans savants de domination suprême. Ils voulaient un plan ? Parfait. Stephen Fray allait leur en donner.

Et il ne serait pas seul !

… Bon. Pas aussi bien accompagné qu'il l'avait espéré, certes. Voyez-vous, dans sa grande naïveté, il s'était imaginé pouvoir compter sur ses amis pour cette expédition délicate. Il n'avait pas prévu que les amis en question se disputeraient pour de stupides raisons hormonales. Ah ! Pardon ! Désolé, je ne savais pas qu'on pouvait encore se donner des coups de poing, étaler ses soucis conjugaux, et basiquement enquiquiner le monde avec des problèmes personnels au cœur de l'apocalypse généralisée à échelle scolaire (et je ne parle pas de Charles de Gaulle, paix à son âme), probablement nationale, potentiellement intergalactique ! Non mais autant pour moi, vraiment !!

Tant pis pour Scott et Taylord. Ce soir, ce serait seulement Haley Collins et Stephen Fray, unis contre le crime pour faire la fête, et quelle fête ça allait être ! Car ce soir, nous allions risquer le tout pour le tout : pénétrer dans l'antre secrète des Mangemorts pour en apprendre plus sur leurs réelles motivations.

(C'est là où j'aimerais switcher en mode petit résumé classique, vous voyez ? « Précédemment, dans Desesperate Poudard . » Ou alors : « Le petit Mangemort dans la prairie. » Ou peut-être quelque chose de plus héroïque : « Super Stephen. » « Docteur Fray. »
J'
aime ça.)

Donc, où en étais-je ? La tour de Serdaigle ! Rien d'étonnant à cela : je m'y trouvais en ce moment même, figurez-vous. Pourquoi ? Suivez un peu bon sang ! Position stratégique ? Non, personne ? Voyez vous, mes observations m'avait appris –
nos observations, mutuelles, à Haley ET à moi, n'oublions pas Haley, ma partenaire Haley, la SEULE sur qui je puisse compter ! – que les Mangemorts avaient pour habitude de faire leur ronde dans le parc à dix-huit heures heures cinquante pile. Pas tous bien sûr – il en fallait toujours pour garder la place, vous savez, au cas ou quelqu'un déciderait subitement de les enfermer dehors, ce serait quand même franchement stupide.

Depuis mon poste d'observation, j'observai une ombre traversant l'arrière-cour. Powell. C'était le moment. Je me tournai vers Haley, assise avec ses amies un peu plus loin, qui m'observait, et lui adressai un hochement de tête : elle comprit le message et se frappa soudain le front.


– Oh non ! J'ai oublié…
– Ton livre de métamorphose dans la classe de Kelsey !
complétai-je.

Elle m'adressa un regard noir. Je me rappelai alors qu'elle avait tenu à proférer ce mensonge à ma place – j'ignorais pourquoi.


– Je me demandais quand tu allais le remarquer, repris-je promptement. Je suggère que nous allions le chercher ensemble !

Une de ses amies fit remarquer, alors que nous déguerpissions, que le couvre-feu tomberait dans cinq minutes. Nous fîmes semblant de ne pas avoir entendu et disparûmes.

– Bien, fis-je, une fois à l'extérieur.

Inutile de répéter ce qui avait été dit et redit maintes fois : nous savions ce qu'il nous restait à faire. D'abord, descendre. Ensuite… mais non, il vaut mieux que vous ne sachiez rien, pour votre propre sécurité !


– Stop ! chuchotai-je à Haley alors que nous arrivions au niveau du Hall.

J'avais entendu des bruits de pas alors qu'il n'était pas censé y en avoir à cette heure là, à cet endroit. Nous reculâmes dans un coin d'ombre et laissâmes passer, un peu surpris, Meryl Kelsey qui ne nous remarqua même pas tant elle était agitée. Je fronçai les sourcils, mais chassai vite la Directrice de Gryffondor de mon esprit. Nos baguettes parées à tirer, nous allions descendre discrètement les escaliers quand un autre bruit nous força à nous replier précipitamment. Ciel, et maintenant Doherty ! Mais qu'est-ce qu'ils avaient tous, ce soir ? Décidément ces profs étaient virtuellement INUTILES. Et voilà qu'il venait vers nous ! Avant qu'il ait eu le temps de remarquer notre présence, je parvins à pousser Haley dans la porte arrière de la grande salle. Elle aurait dû se faire mal, mais curieusement, la porte céda facilement sous son poids : quelqu'un l'avait laissé ouverte sans la verrouiller.

Je fermai la porte derrière nous et attendit un moment que les pas de Doherty arrivent à notre niveau. Le professeur, à ma grande horreur, s'arrêta juste devant la porte. Nous retînmes notre souffle. Au bout d'un moment qui me sembla très long, le bruit de pas reprit et s'éloigna.

Je vérifiai rapidement qu'Haley allait bien. Elle semblait assez secouée et tentait de reprendre une respiration normale, sa peau plus pâle qu'à l'ordinaire, mais un simple coup d'œil me suffit pour m'assurer qu'elle n'allait pas faire une crise d'angoisse comme Wayland dans le placard. Quelques semaines avaient passé depuis cet accident qui avait failli nous coûter cher, et j'avais évité de penser à la Gryffondor. Ça n'avait pas été facile, cependant : chaque fois que je l'apercevais dans les couloirs, j'éprouvais le besoin urgent d'aller lui parler – je ne savais pas pourquoi, à dire vrai. C'était sans importance, puisque de toute façon chaque fois qu'elle croisait mon regard elle le détournait aussitôt et m'ignorait totalement. Il semblait que les rôles s'étaient inversés, puisqu'auparavant, c'était elle qui me cherchait pour mes jeter ses coups d'œil haineux. Mais je n'éprouvais pas de haine envers Wayland. Plutôt une curieuse aversion, et quelque chose comme de la pitié.

Bon, trêve de futilités : mais que se passait-il, nom d'une pipe ??

Reprenons :
Petit a, Meryl Kelsey nous dépasse l'air agité.
Petit b, Doherty fonce droit sur nous l'air agité.
Petit c, aucun de ces profs ne nous aperçoit, preuve s'il en faut de leur degré d'agitation.
Petit d, la porte arrière de la Grande Salle TOUJOURS FERMEE A CLEF (j'ai vérifié) est… ouverte. Et huilée. Toutes les portes grincent à Poudlard. Toutes.
Petit e, Doherty s'arrête devant la porte suspecte et la rend encore plus suspecte en s'arrêtant devant un long moment. Et par long, je veux dire looooong.

Règle n°17 : Ne jamais ignorer une coïncidence. Alors quoi, autant de petites lettres et il ne se passait rien de suspect ? Evidememnt que si, et d'autant plus que tout ça s'était produit en l'espace d'à peine quelques minutes. J'étais déjà en train de repenser mon plan en conséquence. Ces deux là préparaient quelque chose et ça pouvait être : petit a (d'accord, j'arrête) un rendez-vous galant ; petit… euh… donuts, une rébellion.

Devinez de quel côté je penchais ?


– Haley, fis-je en me tournant brusquement vers elle – et je fis un bond en constatant qu'elle s'était subtilement rapprochée.

Elle sursauta à son tour, surprise par ma réaction.


– Ne fais pas ça. Bien, repris-je. Tu as remarqué ce qui se passe, je suppose. Alors la question est… Qu'est-ce que c'était ? m'interrompis-je en regardant à nouveau la porte qui avait tremblé.

Décidément, ce soir, rien ne se passait comme prévu…
… Peut-être que c'était pour ça que j'étais excité comme une puce !


Dernière édition par Stephen Fray le Mar 10 Avr - 12:56, édité 2 fois
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Haley Collins


Haley Collins
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeLun 19 Déc - 2:28

Je suis folle. Folle, folle, folle, folle à la folie. Follement folle. J'angoisse depuis plusieurs jours. Je dors mal. Je mange mal. Je travaille mal. L'écriture ronde et droite qui ornait mes parchemins est devenue difforme, serrée, et il m'arrive souvent d'écrire penché, ou de ne plus écrire du tout, perdue dans mes pensées.

- Haley ? Haley ? Haleeey ?

- Laisse tomber Rose, elle est encore partie loin, là...

- Franchement Haley, tu pourrais faire un effort ! ...T'es sûre que ça va au moins ? T'es toute rouge ! Haleeeey !


Je retourne brutalement à la réalité dans un sursaut, clignant des yeux et observant nerveusement les alentours. Mes quatre amies me dévisagent d'un air inquiet et perplexe. Étant donné que ma mission est de prétendre à faire comme si rien d'anormal n'allait se passer dans les instants à venir, je suis plutôt mal partie. En fait, il se produit l'effet inverse de ce que je voulais accomplir : afficher un air détendu et un peu ennuyé comme à mon habitude. Prenant conscience que je nous mets en danger, je tente de me reprendre tant bien que mal.

- Oui oui, ça va ! dis-je en essayant d'adopter un air enjoué et naturel. J'ai juste une mauvaise impression, je crois qu'il me manque quelque chose, mais je ne sais pas quoi...

Bien joué ! Ce mensonge tisse le début d'une grande toile qui va bientôt voir le jour. Plutôt fière de cet exploit, je me détends un peu, mais le feu qui brûle mes joues me laisse dans ce sentiment de malaise qui m'envahit depuis le début de la soirée. Car il fait drôlement chaud, ce soir, dans la salle commune. Le brouhaha des conversations alentours semble se distiller dans l'air étouffant de la pièce, et le sens des mots qui s'échappent des bouches de mes camarades ne me parvient déjà plus. Toute ma concentration n'est portée que sur un unique objet : le signal. Notre signal.

Le signal que j'ai attendu, des semaines durant. Le signal dont j'ai cru qu'il ne viendrait jamais. Alors, j'avais baissé les bras. J'avais lutté contre mon inclination, mais la sournoise parvenait à me rattraper malgré tous mes efforts dans les moments où je n'étais plus capable de me battre : les nuits. Mes nuits étaient hantées de lui. Elles me rappelaient que je ne parviendrais jamais à vaincre le désir que je tentais de refouler. J'avais tout de même réussi à gagner une bataille, un soir, en haut de la tour d'astronomie. Si ce moment avec Scott avait été plaisant, il m'avait laissé dans la confusion la plus totale. J'avais presque réussi à ralentir ma fréquence de pensées reliées à Stephen. Et puis, cet idiot, ce merveilleux idiot, le plus beau des idiots, en fait, m'avait enfin tendu la main. Métaphoriquement parlant, j'entends... sinon, je pense que j'y serais toujours accrochée. Enfin, bref ! Les promesses qui étaient nées dans mon esprit, cette fameuse soirée où nous avions évoqué la résistance pour la première fois, les promesses que j'avais laissé se consommer d'amertume et de rancœur pendant les semaines suivantes... ces promesses avaient finalement abouties. Au fond de moi s'était formé l'espoir que Stephen avait tout simplement été trop occupé par des problèmes personnels pour se soucier de nos plans d'aventuriers en herbe après en avoir fait verbalement l'amorce, avant de quitter la salle avec un clin d'oeil qui m'avait laissé tout à fait pantoise et abasourdie, et qu'il ne m'avait donc pas entièrement laissée moisir aux oubliettes. C'était sans doute ce qui avait du se produire puisqu'il était finalement revenu vers moi. Cela avait pris du temps, mais c'était arrivé. Ensemble, tout les deux; je veux dire, lui et moi, avions alors passé de nombreux moments depuis à formuler des hypothèses, approfondir des recherches et échafauder un plan.

Ainsi, depuis les dernières semaines, tout le reste n'a été que broutilles. De toute manière, ce « reste » se réduit à peu de choses, puisque je n'ai pas de réelles amies, mon chat est mort depuis des lustres et je réussis à peu près à me débrouiller en cours en fournissant le minimum d'efforts. Mes notes ont chuté de quelques points, mais rien d'alarmant encore. Oh, et puis, quelle importance ! Ce je-m'en-foutisme qui grandissait en moi était délicieusement grisant. Je me surprenais à répondre de manière narquoise ou ironique à ceux qui m'importunaient, les quelques rayons de soleil qui perçaient ça et là dans le ciel menaçant ne m'angoissaient plus autant, et mon débit de larmes déversées par mes amicaux canaux lacrymaux avait considérablement diminué. En fait, l'amertume dans laquelle mon coeur avait baigné des derniers mois avait laissé sa place à une douce acidité qui me conférait une énergie nouvelle. J'avançais désormais avec des objectifs en vue, un projet, des petits trucs qui, ça et là, me donnaient l'impression d'être utile et de réaliser quelque chose. Sans omettre le fait que je le vivais en compagnie de la seule personne qui m'importait vraiment, pour qui j'aurais été prête à sécher un examen d'histoire de la magie pour le rejoindre sur le champ, si il me l'avait demandé. Mais Stephen devait sans doute savoir que j'accordais une importance incontrôlée aux études, et nos moments d'intimité... je veux dire, nos moments entre résistants n'avaient jamais empiété sur mes cours. Bref, je me sentais vivre, enfin.

La silhouette que je gardais dans le coin de l'oeil depuis le moment où je m'étais posée sur ce fauteuil en compagnie de mes pies de camarades esquissa un mouvement : mon regard qui divaguait dans la salle commune que je percevais dans un flou presque total se régla sur elle. Mouvement de tête. Signal.

Je me frappe le front en composant un air de parfaite idiote qui vient tout juste d'être frappée d'un éclair de lucidité et m'exclame d'un ton paniqué :


- Oh non ! J'ai oublié…

- Ton livre de métamorphose dans la classe de Kelsey !


Je virevolte vers lui et le regarde au premier abord de manière peu amicale, étonnée et frustrée. Je m'étais entraînée des heures durant à proférer ce mensonge, et voilà que monsieur arrive comme un cheveu sur une soupe ! Sa proximité, qui plus est soudaine, me donne de violents coups au coeur. Le contempler quelques secondes suffit à me faire fondre de nouveau et je ne parviens pas à lui en vouloir bien longtemps pour cette mauvaise surprise, mais je reste déstabilisée. Son intervention nous décrédibilise dangereusement : non seulement parce que Stephen est un piètre menteur – il faut bien que je lui reconnaisse quelques défauts et puis, franchement, personne n'est parfait -, mais parce que cette incrustation risque de semer le doute dans l'esprit de mes camarades.

- Je me demandais quand tu allais le remarquer. Je suggère que nous allions le chercher ensemble !


Dieu merci, Stephen semble avoir une excellente capacité d'adaptation. J'adresse un bref salut aux filles qui ne se privent pas de nous faire remarquer que le couvre-feu ne tardera pas à tomber, et suit Stephen hors de la pièce d'un pas pressé, me retenant de sautiller de joie comme une enfant au milieu d'une prairie fleurie dans un monde où des poneys mangeraient des arcs-en-ciel et feraient des caca papillons. De toute manière, je suis trop stressée pour ça, mais l'excitation qui m'anime est trop grande pour que mon angoisse m'empêche de ressentir un sentiment de bonheur et d'ivresse parcourir mon corps. Enfin, nous y sommes.

Alors que nous arrivons dans le Hall après une marche rapide et silencieuse, je savoure sa présence à mes côtés, observant ses cheveux, ses bras qui se balancent le long de son corps, ses jambes qui -


- Stop !

Son interjection fait naître un courant violent de panique dans mon coeur qui tambourine dans ma poitrine. Je n'entends plus que son battement, la respiration de Stephen, et des bruits de pas qui se rapprochent. Nous reculons et observons la directrice de Gryffondor passer devant nous, ne se souciant pas le moins du monde de notre présence. Stephen et moi-mêmes serions en train de danser sur une table au milieu du Hall vêtus d'un jupon de feuilles de palmier et de noix de coco comme seul haut qu'elle ne nous remarquerait pas plus que ça. Mais l'inquiétude qui s'affiche sur son visage ne fait qu'exacerber la mienne, et, même si le fait que nous ne nous fassions pas réprimander pour notre non-respect des règles devrait me réjouir, j'ai la terrible impression que tout ceci n'est que le présage d'évènements bien plus graves. Je sens mon excitation faiblir au profit de la peur mais me ressaisit : Stephen est là. Mes lèvres se tordent un léger sourire à cette pensée – mais il s'évanouit aussitôt quand une étrange apparition se dessine dans mon champ de vision. Je tourne violemment la tête vers la droite, le regard fixé vers l'endroit où je pense l'avoir vu, tandis que mon coeur se contracte à la pensée qui est en train de germer dans mon esprit. Ma bouche s'ouvre, prête à avertir Stephen, mais celui-ci me pousse, un peu brutalement, contre la porte de la Grande Salle qui s'ouvre étonnamment – et heureusement – sous mon poids; puis il la referme, nous laissant tout deux un peu haletants et désemparés par la tournure imprévue que prennent les évènements.

Mais cette réunion improvisée du corps professoral n'est pas la seule source de mon déroutement. Je l'ai vu. Non, mais non, c'est impossible, ça ne se peut pas. Réfléchis Haley, réfléchis. Il y a des professeurs nains à Poudlard, c'est un fait avéré. Des professeurs avec de longs cheveux. Des petits professeurs, un peu maigrichons, avec des longs cheveux. Une longue crinière. Une crinière de lionne sauvage. Non, cette chose, ce truc, cette... personne que j'ai vu ne peut pas être -


- Haley.

Je sursaute quand Stephen prend la parole pour attirer mon attention et m'appelle, un peu brutalement certes, mais je sens le rouge me monter aux joues et la chaleur familière se répandre dans mon corps – celle qui accompagne chacune des fois où il prononce mon prénom. C'est profondément, terriblement stupide mais... j'adore quand il dit mon prénom. J'ai l'impression d'exister... d'exister, vraiment.

- Ne fais pas ça.

Son injonction me fait sourire – heureusement, le noir dans lequel est plongée la Grande Salle doit l'empêcher de le remarquer, et je baisse légèrement la tête au cas où les rayons de lune filtrés par les fenêtres massives de la pièce se feraient trop présents.

- Bien. Tu as remarqué ce qui se passe, je suppose. Alors la question est… Qu'est-ce que c'était ?

J'aimerais illuminer la Grande Salle d'une réponse intelligente qui forcerait l'admiration de mon interlocuteur, mais la vérité est que je n'en sais strictement, foutrement, rien. Qui plus est, l'apparition - ou hallucination - dont j'ai été témoint me perturbe et m'empêche de véritablement repenser au bon déroulement du plan que nous nous efforcions d'établir depuis longtemps. Mais je ne contrôle plus rien - le poison de la haine se répand doucement dans mes veines. Si mon hypothèse se révèle fausse, je passerais pour la dernière des idiotes ; et si elle est vraie... non. NON. Il ne le faut pas. Je tente de me convaincre que tout cela n'est qu'une pure invention de mon esprit quelque peu tordu et soumis aux deux sentiments qui m'animent : l'attirance que j'ai pour Stephen, et l'abjection que je ressens pour la gamine Wayland. Toutes les fois où elle s'immisce dans mon esprit, je sens ma gorge se nouer et ma mâchoire se serrer. Et un sentiment d'aversion inexpliqué qui me possède comme un démon.

Je relève soudainement la tête, consciente que Stephen attend toujours une réponse de ma part. Mais l'idée que Wayland puisse se trouver dans les parages m'obsède et seul le désir de ne pas faire faiblir l'attention que Stephen semble me porter me permet de ne pas répondre d'une voix lasse en m'asseyant par terre pour bouder dans mon coin. Non. Ce n'est certainement pas le moment pour céder et me laisser envahir par mes faiblesses. Certainement pas, ma vieille. Je repense à Wayland. A sa fouge, sa vivacité, son air provocateur, sauvage, décalé. Une lueur nouvelle brille dans mon regard tandis que j'ouvre enfin les lèvres :


- Je ne sais pas, Stephen, dis-je d'une voix posée mais qui laisse sentir l'intensité de la mécanique de mes sentiments. Une chose est sûre : quelque chose se prépare de l'autre côté de cette porte. Bien, nous ne sommes pas plus avancés que ça, mais cette solution d'appuyer ses propos est toujours mieux que celle qui consiste à être muette et faire défiler toutes sortes de scénario dans mon esprit, par exemple, au hasard, celui où Stephen et Wayland se retrouveraient dans le couloir et iraient se réfugier de nouveau dans un placard pour y faire je-ne-sais-quoi.

La petite gerbe d'étincelles rouges que produit ma baguette me tire de mes pensées. Je constate que mon poing droit est serré autour d'elle - en fait, plus que serré, je suis littéralement en train de l'écraser dans ma main. Je desserre mon emprise autour d'elle et reporte mon attention sur Stephen.


Ses yeux. Wayland. Son nez. Wayland. Ses lèvres. Wayland.

C'en est trop. Je veux savoir. Je le veux. Je veux.


- Le seul moyen de savoir ce qui se trame, c'est d'aller voir par nous-même. Ce soir, il est hors de question que les aiglons restent sagement dans leur nid, dis-je d'une voix étrangement assurée.

Et ce soir, les aiglons ne se feront pas manger par les lions. Alors, poussée par cette insatisfaction qui me consume, cet amour et cette haine qui bouillonnent ensemble dans mon coeur, je m'avance un peu et pose ma main gauche sur la poignée de la porte massive de la Grande Salle. Ma main droite, je la tends à Stephen et dit, pour illustrer mes propos, pleine de conviction et adoptant une position de leader que je n'avais jamais effleuré jusqu'à alors :


- Tu me suis ?
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Lizlor Wayland


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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeLun 19 Déc - 14:23

« La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu'il n'existe pas »
- Charles Baudelaire.


________________________




Il soufflait dans mon cœur un vent brûlant de salpêtre et de haine à l'égard de Fray, depuis cet épisode où il avait osé m'abandonner au fin fond de se placard après m'avoir salement et lâchement stupéfixiée. Depuis ce matin, depuis cet instant où je m'étais éveillée courbaturée, un goût amer dans la bouche, pliée en quatre dans le petit réduit, c'en était fini. Le Serdaigle avait filé avec son si mignon petit chat en signant par la même occasion son arrêt de mort. Moi qui n'avais pas vraiment de lien avec la vie du château, si ce n'était pour y grappiller de la nourriture, y dormir, et faire acte de présence afin que ma mère ne se doute de rien, j'avais trouvé une nouvelle cible qui allait me donner du fil à retordre entre les murs de Poudlard.

En sortant du placard j'étais allée directement me recoucher, en boule, au fond de mon lit. Je ne savais pas trop pourquoi, mais cette altercation m'avait complètement vidée, et j'avais eu une soudaine envie de chaud, de silence, de draps remontés au-dessus de ma tête comme quand j'étais petite et que j'allais rejoindre Conrad dans son lit le dimanche matin. Le plus souvent, il dormait encore, je me glissais contre lui et je mettais mes petits pieds toujours froids contre ses jambes et c'était la sensation la plus exquise du monde; je me pelotonnais et je ne bougeais plus. J'entendais au loin le tic-tic de la pendule du salon, je sentais les effluves de toast et de thé, j'entendais les voix feutrées de mes parents depuis la cuisine et ces matins là avaient l'odeur du paradis.

Qu'ils étaient loin, à présent. Conrad était à l'autre bout de la Terre, et ma mère avait le front sans cesse plissé quand je la croisais, comme si plus jamais elle n'avait connu ces matins de béatitude.

J'avais dormi de longues heures, lovée comme un chat entre mes draps pourpres. Personne n'avait osé me réveiller, car dans mon dortoir, je passais pour une marginale, un peu folle, et les élèves préféraient m'éviter plutôt que de s'inquiéter de moi, comme si j'allais les manger. Tant mieux, j'aimais faire peur, j'aimais déranger, j'aimais être celle qu'on n'aimait pas, qu'on craignait, qu'on redoutait. J'aimais qu'on me prenne pour ce que j'étais ou ce que Liz était plutôt, une pauvre fille un peu folle et perdue, mais libre, qui trouvait ce qu'elle n'avait pas là où elle le pouvait. Mon sommeil avait été peuplé de visions floues, rapides, brèves et saccadées, comme la plupart de mes rêves. Ils se passaient en avance rapides, étaient bruyants, violents, mais passaient trop vite pour que je puisse retenir les détails avec exactitude, ou que je puisse même les comprendre. Tout ce que je savais c'est que Fray y avait fait des apparitions, beaucoup, et qu'à chaque fois je l'avais détesté un peu plus. C'est pourquoi à peine réveillée j'avais jailli de mon lit et filé sans demander mon reste. Dans la Grande Salle j'avais trouvé quelques restes sur les tables à me mettre sous la dent, et j'étais remontée comme une flèche en direction de la tour des Serdaigles. Mon reflet dans une vitre au verre inégal m'avait renvoyé une tête à l'expression farouche surmontée d'une masse de cheveux emmêlés, mes habits étaient froissés, trop grands comme d'habitude. Bref, rien d'inhabituel. J'avais suivi deux filles de Serdaigle comme une lionne à l'affût d'un troupeau de gazelles, et je m'étais postée devant leur salle commune. Dès ce jour, l'attente avait fait partie intégrante de ma vie.

Je ne dormais plus, je ne mangeais plus, je ne vivais plus que pour ça : pister Fray. Mon pauvre arbre dans la forêt interdite devait se sentir bien seul, car j'avais déserté mon perchoir et mon territoire pour passer mes journées et mes nuits à l'intérieur du château. Cette filature me préoccupait tellement que je ne sortais plus, du tout, sauf quand il sortait. Ma vie s'était calée sur celle de Fray, j'en apprenais un peu plus chaque jour sur lui, à quelles heures il allait manger, quand il allait se promener, quand il se baladait, ce qu'il faisait une fois les cours terminés. Il était devenu mon obsession, presque ma drogue, et cette aliénation était paradoxalement aussi forte que la haine que je nourrissais à son égard. Pourtant je ne le quittais pas d'une semelle; j'avais appris à faire des micro-siestes dans les positions les plus inconfortables possibles, cachée derrière une statue, j'avais appris à me retenir de manger ou de boire ou d'aller aux toilettes même quand l'envie était trop forte, parce que parfois je ne pouvais pas quitter mon poste. Cette sensation était délicieuse : j'avais l'impression d'être le chef-marionnettiste, Fray était ma poupée et je tirais les fils de sa vie sans qu'il s'en doute un instant. Je savais et il ne savait pas, là était toute la supériorité de mon pouvoir. Lui qui se croyait si malin, je démontais petit à petit ses si belles idées.

Ce soir là, j'étais en train de grignoter un quignon de pain quand il avait jailli de sa salle des Serdaigle en compagnie de... Collins. Aussitôt, j'eus une moue de dégoût. Cette fille m'échappait. Je ne la sentais pas. Elle m'hérissait les poils. Cette immense fragilité qu'elle affichait ouvertement me donnait envie de la briser en deux, de me jeter sur elle à coups de pieds et de poings, et de lui faire mordre la poussière. D'autant plus qu'elle regardait Fray comme s'il était la huitième merveille du monde et je ne concevais pas comment celui puisse être possible, non, non, non. Il était un être abject et détestable, et aveugle de surcroît, car il ne se rendait compte de rien. Collins était le petit chien de Fray, point barre, et Dieu savait comment Fray n'en avait rien à faire de ses animaux de compagnie. Je sentis mes griffes sortir et mon regard se fit plus aiguisé. La filature commençait.

Je sautai dans bruit de mon perchoir. J'étais devenu un félin, des coussinets m'avaient poussé sous les pieds et les mains; j'avais appris à être silencieuse dans mes mouvements en toute occasion. Jouant des ombres, des statues, des recoins, je les suivis à une distance raisonnable, épiant leur conversation - Fray parlait et Collins écoutait, en bon petit chien - essayant de comprendre de quoi il était question, au juste. Il régnait dans le château un silence étrange, comme annonceur d'un grand évènement. Je compris qu'ils descendaient dans le hall et pris au dernier moment, hésitant encore, un passage secret, pour arriver en bas avant eux.

Mauvais timing. Alors que je les vis descendre les escaliers, le temps que je me jette derrière une statue du hall, je crus - je crus seulement, mais le doute était né - voir le regard de Collins s'accrocher à moi. Non! Je ne POUVAIS PAS me faire voir. Jamais. Et je ne pouvais pas me faire voir par cette idiote, cette espèce de fantôme de fille que je trouvais parfaitement inutile. Et qui surtout portait à Fray une attention bien trop exacerbée.

Ils étaient là, tous les deux, à quelques pas de moi, face à la Grande Porte d'où semblait émaner une agitation sourde, et moi j'étais prostrée dans un recoin du mur, les bras enserrés autour de mes genoux repliés, trop occupée à calmer la course folle des battements de mon cœur. Jamais encore ça ne m'était arrivé, et je me sentais mise à nue, démunie. Non! Elle m'avait peut-être vue. Elle m'avait peut-être vue, peut-être vue, vue, elle m'avait, elle m'avait peut-être vue, peut-être, non, non, non, non!

La porte s'ouvrit. Mon regard se braqua vers eux. Ils entrèrent. Je me redressai à demi. Le Chat s'arrêta sur le pas de la porte et miaula en direction de son maître.

...LE CHAT?!

Ce mignon petit chat! Il était tout seul, je ne voyais plus les deux autres, et l'atmosphère s'était soudain électrisée. Je savais, je sentais que quelque chose allait arriver, je n'étais pas sereine, je sentais l'appréhension gronder en moi - que faire? J'avais juste quelques seconde pour me décider, dans la pénombre du hall.

Tant pis. Je bondis hors de ma cachette, fondis sur le petit animal, mais au même instant je notai un mouvement à ma droite - Fray, et Collins derrière. Son regard qui croisa le mien me terrassa, me fit l'effet d'une douche froide et je ne pus retenir un sursaut de crainte et de désespoir, doublé d'une folle envie de me gifler. Mon bras se leva d'instinct, par précaution, en signe de défense, et je reculai d'un pas. Mais très vite je récupérai le contrôle de moi et je redevins Liz, leur lançant un regard de haine, le bouche crispée en un rictus moqueur, prête à me battre.
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Stephen Fray


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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeMer 21 Déc - 1:19

(Suis-je la seule à trouver l'architecture de ce RP de plus en plus confuse ? WORST. PLAN. EVER. 767333 )

-

Vous voyez, c'est pour ça que je n'aime pas m'organiser. Non, je ne tenais pas d'agenda, et non, ce n'était pas de la paresse, bien au contraire ! Mais l'organisation ça ralentit tellement, vous comprenez. Ça peut même être dangereux ! Quand je pense à ces gens qui planifient toute leur semaine. Ils font les courses le lundi de telle heure à telle heure, ensuite ils ont leur rendez-vous chez le Guérisseur, etc. – mais eh ! s'il vous arrive un accident ? Je ne sais pas, le Magicobus vous roule dessus par exemple. Du coup, vous ne pouvez pas aller faire vos courses ! Or, votre famille va mourir de faim si vous ne ramenez pas à manger – ou pire : être condamnée à manger des pâtes pendant une semaine !! Voire plus, si vos blessures sont graves et que vous ne pouvez plus jamais aller faire les courses car vous êtes tétraplégique ! Bien que cela soit peu probable si vous êtes sorcier. Et c'est la chambranle pour décaler tous les rendez-vous de la semaine ! Non, non, décidément, l'organisation, c'est bidon.

Cette sortie était bidon. Pourquoi ? Parce qu'il se produit toujours un truc énorme pour surpasser le truc énorme que vous avez prévu. C'est mathématique, et comment diable n'y avais-je pas penser plus tôt ? Obnubilé par notre réussite à venir, je n'avais pas su repérer les indices qui pourtant auraient dû me frapper tels de gigantesques marteaux volants dotés de pouvoirs psychiques. Heureusement, j'avais un sens de l'adaptation aussi développé que l'était mon sens de l'observation (enfin en temps normal) et je n'avais aucun doute quant à ma capacité à trouver un plan B.

Enfin, un autre plan, oui, pardon, j'arrête avec les lettres.

Honnêtement, je vous le dis, j'étais près à tout. TOUT. Sauf ce qui allait suivre.

Tout à mes réflexions, je perçus distraitement ce que me disait Haley, qui répondait à l'interrogation que j'avais soumise oralement et qu'elle avait mal interprété – en réalité c'était plus rhétorique qu'autre chose, à savoir : quel était ce bruit ? Ce bruit que j'étais sûr à quatre-vingt-dix-sept pour cents trois quarts d'avoir entendu quelques secondes auparavant. Un bruit très léger, oh, à peine perceptible et pourtant…


– Le seul moyen de savoir ce qui se trame, c'est d'aller voir par nous-mêmes. Ce soir, il est hors de question que les aiglons restent sagement dans leur nid ! déclama Haley, sa voix soudain plus forte me rappelant à la réalité.

Oh bon sang, Haley. Elle m'apparaissait si fragile soudain. Il était en train de se passer quelque chose de grave, probablement une rébellion, et ça allait tourner au roussi, et elle allait se retrouver au plein milieu de l'apocalypse par ma faute. Je devais empêcher ça. Je m'apprêtai à lui dire de ficher le camp tant qu'elle le pouvait, de se mettre à l'abri et de ne pas se soucier de moi – héroïque que j'étais ! – quand je croisai son regard déterminé. Ce qui me coupa net dans mon élan, car je n'avais encore jamais vu une telle expres​sion(dure) sur son petit visage de poupon aux traits délicats.


– Tu me suis ?

Sa main droite était tendue vers moi, la gauche posée sur la poignée de la porte. Ok, donc Haley s'apprêtait à agir, quoique j'en dise. Cette soudaine prise de confiance en elle me laissa, à l'opposé, pantois et brusquement hésitant. Alors qu'une seconde auparavant j'élaborais des stratégies de replis, j'étais incapable de penser et contemplai bêtement cette petite main toute fine qui attendait que je la saisisse.

Je la pris.

… Bon, alors maintenant je dois vous prévenir. Ce qui va suivre est complètement… dingue. Parce que derrière cette porte – derrière cette porte se tenait… se tenait… Le Chat.

Oui. Le Chat. Et Lizlor Wayland. Toute ébouriffée, tendue comme une tigresse, bref, WAYLAND, sous son aspect habituel, zéro doute possible. Et – oui, OUI – Le Chat.

C'en était trop. Kelsey et son Doherty forniquaient une rébellion dans le couloir, Haley me remettait à ma place, Wayland surgissait de nulle part et maintenant ÇA ? Woh woh woh – WOH ! On se calme !! D'abord, régler cette histoire.


– Qu'est-ce que tu fais encore dehors à cette heure ??? éclatai-je en direction du Chat, ignorant totalement Wayland qui se trouvait à un cran légèrement supérieur – dans mon champ visuel, entendons-nous BIEN. Je ne te nourris pas assez, c'est ça, tu as voulu aller chasser la souris ?

Je fis une pause, inspirant profondément pour me calmer. Je me passai une main sur le visage et tint pendant quelques secondes l'arrête de mon long nez entre mes doigts.

– Nous avions un arrangement, Le Chat. Tu m'aides, je te nourris. Tu sais ce que font les Mangemorts aux animaux errants ? S'il t'arrivait quelque chose ?? Tu sais que Candy ne me le pardonnerait jamais ! Honnêtement, je ne sais plus quoi faire. Je suis déçu, Le Chat, très déçu.

L'animal ne bougea pas et, pour la première fois depuis que je le connaissais, me tint tête en refusant de baisser le regard. Au contraire, il me toisa avec le plus grand mépris, comme un gosse qui défie ses parents. Merlin !! J'étais pire que déçu, j'étais trahi ! Le choc me fit presque perdre les pédales – ç'eût été dramatique, un cerveau comme le mien. Du coup, furieux, je levai les yeux vers Wayland.

– Tu as réussi à le dresser contre moi ! fulminai-je. Tu es satisfaite, je suppose ? Ah bravo, félicitations, tu peux être fière de toi ! N'est-ce pas qu'elle peut être fière Haley ?

J'applaudissais même des deux mains pour bien montrer à quel point sa brillance me transperçait.

– Donc, qu'est-ce que vous maniganciez ? J'exige de savoir ! Vous nous suiviez peut-être ?

J'étais particulièrement soupçonneux sur ce point, dans la mesure où j'avais, ces derniers temps, régulièrement aperçu ou cru apercevoir Wayland en des endroits particulièrement incongrus. Ou, trois ou quatre fois peut-être, seulement, mais c'était déjà suffisant pour éveiller ma curiosité. Jusqu'à présent, je m'étais persuadé que ce n'était qu'un effet de mon imagination, qu'il n'y avait aucune raison pour que Wayland me prenne en filature après ce qui s'était passé cette fameuse nuit dans le placard. Mais maintenant, mes doutes revenaient au grand galop. Après tout, cette petite était complètement cinglée ! Elle était bien capable de me poursuivre pour me punir ou que sais-je ? C'était ça. Elle voulait ma peau !!
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeJeu 22 Déc - 2:10

Sa main était comme je me l'avais imaginé. Un peu hésitante et ferme, vigoureuse mais douce, de par la finesse de ses doigts. Moite aussi, ce qui était inévitable vu les circonstances dans lesquelles nous étions. Depuis le moment où nous avions quitté la salle commune, l'idée du danger ne m'avait pas une seule seconde traversée l'esprit. Transgresser les règles, plonger tête baissée dans les ennuis, franchir les interdits... ces expressions n'avaient actuellement aucun sens pour moi. Mon coeur battait, une légère pellicule de sueur s'était formée sur mon front et j'étais parfois secouée par des légers tremblements, mais ces manifestations corporelles étaient indépendantes de la peur engendrée par l'évidence suivante, dont je n'avais pourtant pas encore pleinement conscience : j'étais, pour la première fois de ma vie, une hors-la-loi. Susceptible d'être punie, et pas de la manière la plus tendre, vue les pratiques des actuels dirigeants. Tiens, c'est vrai ! Les Mangemorts. Leurs regards haineux dénués de tout sentiment humain. Maîtres et inconsciemment esclaves. Qu'ils bondissent à l'instant même devant nos yeux, menaçants et pourris jusqu'à la moelle : ça me faisait une belle jambe.

Non, l'idée qu'il puisse m'arriver quelque chose de grave ne m'avait pas arrêté puisque je ne l'avais purement pas envisagé. De toutes les choses dont je me fichais royalement – et il y en avait un bon nombre, ces temps ci -, c'était sans doute la première. Si ma devise avait un jour été « réfléchir avant d'agir », elle n'était désormais plus valable. Avec le recul, je m'apercevrais peut-être que cela était totalement stupide, inutile, puéril ; que je n'aurais jamais du m'enfoncer toujours un peu plus chaque jour dans les niveaux toujours plus profonds de la débilité. Alors j'étais peut-être une idiote. Une bonne à rien. La plus niaise des niaises. Mais le bonheur de sentir la main de Stephen dans la mienne était incommensurable. Au diable les décisions raisonnables et les bonnes résolutions. Au milieu de l'obscurité palpable, de l'immensité de la Salle, des évènements graves qui se préparaient certainement, de la terreur dont le château entier frémissait, j'avais été heureuse pendant un instant fugace, aussi éphémère que délicieux. Ses doigts s'étaient liés autour de ma main. J'imaginais la couleur un peu basanée de sa peau sur la blancheur exaspérante de la mienne, et je souriais ; je souriais comme une abrutie née de la dernière pluie. J'aurais aimé ne pas ouvrir cette porte et nous garder bien à l'abri de toutes contrariétés pour s'enivrer plus longtemps de la chaleur qui se propageait docilement à l'intérieur de mon corps, des papillons multicolores qui chatouillaient mon coeur et des rubans de soie rose qui se nouaient dans mon ventre.

Pourquoi ? Pourquoi Stephen ? Pourquoi était-ce lui qui me causait tant de tourments et dont le seul contact de sa peau parvenait à balayer le reste du monde en quelques instants ? Je m'étais beaucoup posée la question. Aucune véritable réponse n'avait réussi à s'imposer. J'avais douté, ce soir là, sur la tour d'astronomie, quand les douces lèvres de Scott s'étaient posées contre les miennes. J'avais senti nos coeurs blessés battre ensemble, et notre baiser avait été un pansement sur mes plaies, sur les siennes, aussi. J'aimais Scott d'une affection intime, particulière, sur laquelle je ne pouvais pas mettre de mots, mais seulement des sensations : celui du vent frais sur mon visage et de la chaleur de nos corps. Revoir Stephen, discuter avec lui, l'observer, me sentir vivre à l'idée que je puisse capter son attention, et enfin, tenir sa main ne m'avait pas fait oublier la douceur de ma nuit avec Scott. J'avais simplement compris qu'il y avait différentes sortes d'inclinations et d'amour. Je m'étais surprise à penser que ce désir qui m'embrasait aurait dû être pour Scott, et non pour Stephen. Mais ce n'était pas le cas et je ne pouvais rien y changer, même en luttant de toutes mes forces.

J'aurais pu me retourner, entourer son cou de mes bras et l'embrasser. Ou tout simplement me détourner de la porte et continuer à proposer des plans plus improbables les uns que les autres, juste pour avoir le plaisir de prolonger ce moment d'intimité et de partager un peu plus longtemps la moiteur de nos mains. Mais j'avais ouvert la porte. J'avais tourné la poignée de cette foutue porte. Je n'avais pas eu le choix : je nous avais fait la promesse d'être forte pour prétendre à la réussite de notre ô combien merveilleux plan. Encore une fois, j'étais tombée dans mes propres pièges. Je m'aperçois trop tard que d'autres alternatives, tellement d'autres, s'étaient offertes à moi et qu'aveuglée par l'envie d'impressionner Stephen, emportée par je-ne-sais-quel élan inutilement courageux, je n'y avais pas songé. Fidèle à moi-même, j'aurais pu m'évanouir, ou proclamer que j'avais trop peur pour continuer. Non. J'avais foncé tête baissée.

J'avais ouvert la porte et il me fallût un effort surhumain pour empêcher le cri de s'échapper de ma bouche. Je n'avais émis qu'un son d'oiseau étouffé par la surprise. Cette surprise qui me donne un coup d'une violence inouïe au coeur. Cette surprise qui a pour nom Lizlor Wayland.

D'abord, je ne ressens rien, paralysée de stupeur. Ma bouche, entre-ouverte, mes yeux, agrandis par la frayeur de cette apparition, qui marque la concrétisation de mes angoisses. Mon coeur, que je sens battre, mais ses coups me paraissent lointain et assourdissants – le plus vital de mes organes doit se situer aux alentours de mes chevilles. Je n'avais donc pas rêvé. C'était elle. Elle était là. Elle était venue tout gâcher.

- Qu'est-ce que tu fais encore dehors à cette heure ?? Je ne te nourris pas assez, c'est ça, tu as voulu aller chasser la souris ?

Les paroles de Stephen, qui elles aussi me parviennent comme si il les prononçait d'un autre monde, m'interpellent. Seule l'incompréhension qui m'envahit me fait détourner le regard de la gamine Wayland. De sa crinière de lionne ébouriffée. De son air tellement insolent, qui fait naître en moi des idées meurtrières. De ses vêtements, toujours trop grands pour elle. Je ne sais comment elle perçoit ma manière de la regarder, mais nul doute que mes yeux doivent parfaitement exprimer ce que je ressens vis à vis d'elle – et je n'ai pas encore assez bien digéré sa présence pour avoir la présence d'esprit de le contrôler. Je me tourne donc vers Stephen, le front plissé : la mépriserait-il assez pour s'adresser à elle comme à un animal ?

- Nous avions un arrangement, Le Chat. Tu m'aides, je te nourris. Tu sais ce que font les Mangemorts aux animaux errants ? S'il t'arrivait quelque chose ?? Tu sais que Candy ne me le pardonnerait jamais ! Honnêtement, je ne sais plus quoi faire. Je suis déçu, Le Chat, très déçu.

Et puis, c'est là que je l'aperçois. Le Chat. C'était donc ça, Le Chat. C'était un chat. Pertinent. Intelligent. A l'opposé de Stephen, en ce moment même. Mais que diable est-il en train de le faire ? Mes yeux ne peuvent plus se détacher de lui. Je le regarde, près de moi, s'égosiller contre un stupide animal. Est-il vraiment sérieux ? Dispute-il véritablement ce chat, cet idiot de chat ? Des images se glissent sournoisement dans mon esprit. Je nous vois, Stephen et moi, confortablement installés dans les fauteuils de la salle commune, près de l'imposante cheminée. Je vois nos mains entrelacées. Le chat qui arrive. Stephen qui se lève, qui s'échauffe progressivement contre son animal et le réprimande, comme il vient de le faire à l'instant. Je ris aux éclats. La situation est comique. Je me moque de lui, pour le taquiner. Je le trouve fou, tout à fou, et ça me plaît, ça me plaît tellement que je me lève, que je m'approche de lui et entoure sa taille de mes bras pour le calmer.

La fulgurante douleur qui traverse mon coeur quand je réalise que cette vision ne se réalisera jamais me ramène à la réalité. Pas de feu de cheminée qui ronronne dans l'âtre. Pas de mains liées. Pas d'embrassades. Juste le Hall du château, froid et sinistre, Stephen que j'ai perdu et qui s'énerve contre son chat, et Lizlor Wayland, l'air défiant et plus affreuse que jamais. Dans les circonstances actuelles, l'envie de faire réaliser à Stephen qu'il est parfaitement ridicule remplace l'envie d'en rire.


- Tu as réussi à le dresser contre moi ! Tu es satisfaite, je suppose ? Ah bravo, félicitations, tu peux être fière de toi ! N'est-ce pas qu'elle peut être fière Haley ?

J'ai mal. J'ai mal, j'ai tellement mal, que je me sens incapable de prononcer un seul mot. Stephen a retrouvé la raison et ses paroles visent désormais la gamine Wayland. Son incitation à me faire prendre la parole ne fait qu'accentuer ma souffrance ; cette souffrance qui grandit en moi, qui se propage comme du poison dans mes veines et qui fait naître un léger sourire, d'une amertume totale, sur mes lèvres. Et la haine, qui elle aussi se diffuse lentement dans mon esprit et mon corps. Une haine immense et infinie, qui me fait même détester Stephen un court instant, de m'inciter à prendre part aux reproches qu'il adresse à Lizlor, et d'être aussi puéril. Tout ça pour un chat. Je me reprends un bref instant, et examine brièvement la situation – mon instant observateur de petite élève modèle reprenant le dessus. Non, ce n'est pas une canular. La situation est bien réelle. Mon cauchemar n'en est pas un. Car les cauchemars ne sont qu'un produit de l'imagination.

La nausée me prend soudainement en même temps que les larmes. Le bruit des applaudissements incongrus de Stephen dissimule celui du sanglot que j'étouffe. Je déglutis et me pince les lèvres pour définitivement le refouler. Mon attention toute entière est portée sur Wayland, qui me semble prête à se battre. Sans doute contre Stephen, à première vue, au sujet du chat. Peut-être contre moi aussi, ensuite, quand elle percevra clairement les sentiments haineux qui s'agitent dans mon âme et qui se reflètent sans aucun doute dans mon regard. En une seconde, elle a fait éclater les frêles fondations d'un bonheur qui s'épanouissait en moi, de la présence rassurante de Stephen à mes côtés, de notre plan complètement tordu – délicieusement tordu, comme lui. Un Mangemort aurait été préférable. Un Doloris aurait été préférable à cette douleur que je sens fluctuer dans mon coeur et qui engendre des émotions et des envies inavouables, terriblement sombres, dont je ne mesure pas la gravité. J'ai simplement envie de la faire disparaître de la surface de la terre. C'est la seule pensée claire et lucide qui se distingue dans la noirceur qui envahit mon esprit.


- Donc, qu'est-ce que vous maniganciez ? J'exige de savoir ! Vous nous suiviez peut-être ?


C'est cette même noirceur qui déclenche les mots qui sortent ensuite de ma bouche, insolents, provocateurs et acides. Comme celle que je défie du regard.

- Laisse, dis-je doucement en posant brièvement ma main sur son bras pour le calmer - encore aurait-il fallu que je sois moi-même calme pour y parvenir - elle traîne avec ses semblables, les seules créatures qui peuvent la supporter, j'imagine, continuai-je la mâchoire serrée et le regard toujours rivé sur Wayland, la jaugeant outrageusement.

- Enfin, sans vouloir insulter ton chat, ajoutai-je à l'adresse Stephen d'une voix ironique que jamais encore je n'avais entendu. Était-ce vraiment moi qui prononçait ces mots ? Impossible de le savoir. Aveuglée par la haine, la souffrance, la tristesse, de frustration, aussi, je me laissais emporter par le tourbillon des émotions qui me submergeaient et me privaient définitivement de toute capacité à raisonner. Je pris conscience que mon tout mon corps était raidi et que mes mains tremblaient. Ma gorge et mes lèvres étaient asséchées et me retenir de déverser les larmes qui se bousculaient derrière mes paupières me les rendaient douloureuses. Je ne m'arrêtais pas, cependant, emportée par l'adrénaline que me fournissait cette haine dont je m'enivrais.

- Il n'y pas de place pour les enfants ici, Wayland. Tu gênes, finissais-je en insistant lourdement sur le dernier mot.

Je n'avais plus qu'elle dans mon champ de vision. Tous mes sens étaient en éveil et un instinct comme animal s'agitait quelque part au fond de moi. J'enfonçais mes ongles dans les paumes de mes poings serrés. Cela m'était une nouvelle source de douleur, mais quelque chose me disait qu'il fallait mieux qu'ils soient là plutôt qu'à lacérer le visage de Wayland. J'avais même, pour la première fois depuis longtemps, réussi à faire abstraction de Stephen, dont j'avais momentanément oublié la présence. Qu'importe, maintenant qu'
elle était là ? Peut-être allaient-ils régler de nouveau leur compte dans un placard, tous les deux. D'ailleurs, pourquoi s'inquiéter alors qu'ils semblaient se haïr ? Cet éclair de lucidité me frappa de plein fouet, et aurait du me ramener à la raison. Mais tout me paraissait tellement sombre et sournois, que je restais convaincue que ma haine était justifiée. J'avais un mauvais pressentiment.
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeMer 28 Déc - 2:00

J'avais trouvé dans mes longues périodes d'observation une curieuse... sérénité. Une façon de voir la vie d'un autre oeil. Elle ne m'était jamais vraiment joliment apparu, à part peut-être dans mes souvenirs d'enfance. Qui comme leurs noms l'indiquaient n'étaient plus que des souvenirs, des bribes de ma mémoire, des odeurs dans ma tête, des images, des sons. La réalité était toute autre. La réalité c'était cet éloignement, c'était Poudlard, c'était la maladie de Papa, la rudesse de ma mère, c'était cet environnement dans lequel je ne me sentais pas bien, c'était tous ces étrangers et moi au milieu. Ces périodes de calme avaient écloses comme des bulles dans la violence de mon quotidien. Moi qui ne vivais que pour respirer l'air du dehors, que perchée sur mon arbre à éviter tout contact avec les autres et à étudier chaque plante et chaque animal de la forêt interdite, contre toutes attentes, me retrouver murée dans le château n'avait pas été un calvaire. La majorité du temps, quand je n'étais pas en cours, j'étais seule, immobile, planquée. Et je pensais. Je voyais la vie des autres défiler, je pouvais presque sentir les secondes s'égrener, les murs respirer pendant que passait le temps. Je faisais des concours avec moi-même pour savoir combien de temps je pouvais rester parfaitement statique. J'avais tenu bon quatre heures, un jour, sans bouger d'un pouce, blottie derrière une statue face à la salle commune des Serdaigle. J'avais de moins en moins faim, de moins en moins envie de dormir. Je calais ma vie sur celle de Fray sans qu'il le sache et petit à petit je me muais en ces statues de pierres qui m'abritaient. Je devenais une sorte de caméléon, une sorte de lézard au sang froid. En vérité, jamais je ne m'étais sentie aussi animale pendant ces heures de planque, bien plus que quand je me prenais pour une aventurière en pleine forêt interdite.

Où était donc passée Liz? C'était bien la fureur qui animait mes desseins, mais devenir une observatrice et rien que ça avait anesthésié la bête qui sommeillait en moi. Je n'étais pas redevenue Lizlor pour autant. Lizlor était perdue à jamais dans la brume, et je me rappelais d'elle parfois lors des matins gris, comme on se souvient d'un ami aimé et disparu. J'étais devenue.. rien. L'ombre de Fray. Je n'étais plus personne et pourtant jamais je ne m'étais sentie aussi vivante que lorsque je sentais les battements calmes de mon coeur et le bruit de ma respiration alors que seul le silence ponctuait la vie de couloirs de Poudlard.

Et pourtant Liz était là et bien là; elle sommeillait à l'abri, dans l'ombre, à l'affût.


– Qu'est-ce que tu fais encore dehors à cette heure ??? Je ne te nourris pas assez, c'est ça, tu as voulu aller chasser la souris ?

La voix de Fray, forte, hautaine et autoritaire résonna en moi comme si on avait sonné un gigantesque gong à mes côtés. Je me sentis vibrer, trembler, et j'eus presque un haut-le-coeur de le voir là, face à moi, me démasquant. Comme toujours il provoquait une réaction physique chez moi, une sorte de répulsion inexplicable. Mes poings se serraient d'eux-mêmes et je sentis mes ongles s'incruster dans ma peau tandis que je me redressai un peu, comme une lionne qui se préparait à l'attaque.

Je jetai un coup d'oeil à son chat. Je ne voulais même pas imaginer comment il le traitait, si il le nourrissait assez ou pas, et comment il se faisait que Le Chat se soit échappé. Moi qui depuis toujours crevait d'envie d'avoir un simple petit animal comme compagnon, moi qui avais essayé par tous les moyens des plus timides aux plus radicaux d'amadouer ma mère, rien. Je n'avais jamais eu cette joie et ce... ce garçon LUI y avait droit, et bien pire encore, il s'en occupait comme si cet animal n'avait aucune importance, comme s'il ne mesurait pas sa chance, comme si ce chat n'était rien! Rien que pour ça j'aurais pu me jeter toutes griffes dehors sur lui et sur ce visage de pierre. Les beaux airs qu'ils se donnaient faisaient naître chez moi une forte envie de vomir.


– Nous avions un arrangement, Le Chat. Tu m'aides, je te nourris. Tu sais ce que font les Mangemorts aux animaux errants ? S'il t'arrivait quelque chose ?? Tu sais que Candy ne me le pardonnerait jamais ! Honnêtement, je ne sais plus quoi faire. Je suis déçu, Le Chat, très déçu.

- Tssssssssss.
Je sifflai entre mes dents d'un air dédaigneux, je feulai, presque. Mon nez s'était plissé et mes sourcils s'étaient fronçés, imprimant sur mon visage une impression hostile et boudeuse. Surtout, je jaugeai Fray de haut en bas - même si il me dépassait largement - pour bien lui montrer à quel point il me dégoûtait.

Liz s'était sortie de sa torpeur - le seul son irritant de la voix du Serdaigle avait suffi - et s'étirait avec agacement. Elle avait déployé ses griffes, sorti ses crocs, et elle respirait de manière puissante et posée, prête à bondir. Elle n'avait jamais été bien loin, au fond. Elle avait juste assisté à toute cette petite mascarade sans broncher, comme si elle prenait un peu de repos. Mais sa langue de vipère et son venin étaient prêts à servir. Lorsqu'elle regardait Stephen Fray, elle rêvait de le mordre à la gorge, là où la veine vitale palpitait. Une seule morsure aurait suffi.


– Tu as réussi à le dresser contre moi ! Tu es satisfaite, je suppose ? Ah bravo, félicitations, tu peux être fière de toi ! N'est-ce pas qu'elle peut être fière Haley ?

Liz tourna la tête vers Haley Collins au moment même où Stephen Fray prononça son nom. Il avait l'air d'un clown qui menait à bien son petit numéro, et qui demandait maintenant à l'assistance de reporter son attention sur son chien savant, car celui-ci allait faire son tour. Mais le pauvre chien n'avait que des yeux larmoyants, une expression de crainte figée sur ses traits et l'envie visible de disparaître six pieds sous terre. Liz ricana en regardant le petit chien bien droit dans les yeux. Liz savait ce qui se tramait dans la tête du petit chien. Il voulait que Stephen Fray lui accorde autant d'attention qu'il pouvait en accorder au Chat ou bien à Lizlor Wayland. Mais ce n'était pas le cas.

Au fond de moi, j'avais tellement peur. Je sursautai quand Fray tapa dans ses mains et défiai Collins de répondre quoi que ce soit aux imbécilités que Fray prenait un visible et malin plaisir à déballer. Il était détestable. Au plus haut point. Je le fustigeai du regard puis fis un pas vers Le Chat, qui lui ne bougeait pas. Pourtant c'était bien de lui dont il était question. Je n'avais pas l'intention de le laisser seul quoi qu'il arrive, et me mis en position de défense.

- Donc, qu'est-ce que vous maniganciez ? J'exige de savoir ! Vous nous suiviez peut-être ?

Je regardai Le Chat comme s'il allait répondre à ma place. Je fulminai, j'avais envie de lui arracher les yeux et de l'insulter avec tous les gros mots que Conrad m'avait appris, mais j'étais tétanisée qu'il m'ait découvert, et qu'il est prononcé le mot "suivre". Soudain je pris peur qu'il se soit rendu compte de quelque chose - et cette simple idée ruinait presque tous les efforts que j'avais pu accomplir.

Liz grogna à cette idée, et se dressa un peu plus sur ses pattes, mécontente.


- Laisse, elle traîne avec ses semblables, les seules créatures qui peuvent la supporter, j'imagine. Enfin, sans vouloir insulter ton chat.

C'était Haley qui avait parlé. Surprise, je la regardai fixement. Ah tiens, le porte-manteau avait donc une voix? Et une langue? Drôle. Son effort de suivre Fray partout où il allait même dans les chemins les plus pathétiques et vaniteux relança un peu plus la nausée qui me tenaillait les entrailles. Elle comme lui me faisaient vomir. Et elle, avec cette timidité maladive, c'était comme si elle s'était écrit en gros sur le front "frappez-moi", j'en mourrais d'envie!! Je savais que lui tirer les cheveux et la balancer à terre serait simple comme bonjour, et je savais exactement quel attitude elle aurait à terre si on la rouait de coups. J'avais envie de la secouer comme un prunier. Tu vis, ma grande, tu vas t'en rendre compte un jour ou l'autre?!

Liz retroussa ses lèvres sur ses dents et fit un pas en direction d'Haley Collins. Elle la regardait sournoisement, un petit sourire aux lèvres.


- Toi, la potiche, ne t'en mêle pas, c'est clair? Et puis, je ne t'ai pas permis de me parler. Mon ton était autoritaire et sans appel.

- Il n'y pas de place pour les enfants ici, Wayland. Tu gênes.

Cette fois Liz éclata de rire, rejetant la tête en arrière. Ses longs cheveux couleur de feu dessinèrent une grande vague dans son dos, comme un éclair doré qui zébra la pénombre de la salle.

- Mais moi, au moins, on me remarque! Tu n'en pas marre de faire la tapisserie dans le moindre couloir où il - je jetai un coup d'oeil dédaigneux vers Fray - passe? Ça n'échappe à personne, tu sais. Sauf à toi.

Liz enroula une de ses longues mèches autour de son doigt et jeta un regard apitoyé à Haley Collins.

J'avais envie de l'étriper. Sans plus attendre. A part être niaise elle ne m'avait rien fait, pourtant. Mais elle dégageait quelque chose qui me gênait, qui me faisait horreur. Alors que je levai une main pour attraper ses cheveux et lui tirer, il y eut un bruit derrière nous, et tout se passa très vite. Je reconnus la voix de Winch et de Powell. J'entendis leurs pas se rapprocher de nous. Je croisai le regard de Fray. Je sus. Ils arrivaient. Ils allaient se réunir dans la grande salle, sans doute. Je me baissai, attrapai Le Chat, comme je le faisais à chaque fois que mes pas croisaient ceux de Fray. Il était déjà parti sans bruit vers une petite porte, celle à laquelle j'avais pensé. Je me précipitai à pas de loup vers la petite pièce pour m'y camoufler - c'était ça ou nous nous faisions prendre.

Profitant du moment, je donnais un grand coup dans le dos de Collins pour l'intimer à avancer et je la saisis sans ménagement par un bout de ses vêtements avant de la tirer violemment dans la salle. J'avais envie qu'elle tombe. Cette garce.
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Stephen Fray


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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeVen 30 Déc - 2:33

Quelle était donc cette situation parfaitement irréaliste ? Tandis que les cris aigus retentissaient dans le hall ainsi que dans mes oreilles, j'étais proprement incapable de participer à la joyeuse cacophonie ambiante. Sans doute était-ce un pouvoir spécial de Haley Collins de me couper la chique ainsi – que Merlin me garde à l'avenir de lui poser des questions rhétoriques ! Car pour peu que je l'implique, Haley me suivait. Impliquée jusqu'aux coudes. Elle y allait – mais alors, vraiment ! « A fond la caisse ! »

– Laisse… elle traîne avec ses semblables – les seules créatures qui peuvent la supporter, j'imagine.

Laissez-moi vous dire que c'était un choc : moi qui la croyait si gentille, si angélique… Il s'avérait qu'un démon sommeillait dans les profondeurs de ses grands yeux bleus d'innocente enfant, et Lizlor Wayland, par ses frasques, l'avait visiblement réveillé. Et sa main sur mon bras – la même que j'avais saisie quelques secondes plus tôt – cette main dis-je était légère mais l'influence qu'elle avait sur mon corps, elle, ne l'était pas, légère. Non, pas du tout : en fait, chaque contact entre nos peaux me surprenait tellement que je m'en trouvai muet – sans doute parce que je n'avais pas l'habitude que l'on me touche, volontairement j'entends. Aux yeux de la plupart des gens, j'étais une aberration, une abjecte anomalie dont il fallait se tenir éloignée. Ce que je comprenais. Après tout, je pouvais définitivement devenir un danger pour les autres. J'attirais les ennuis avec mes expériences et je n'étais pas… sécurisant. Loin de là.

– Toi, la potiche, ne t'en mêle pas, c'est clair ?

Oui, bon. Haley avait apparemment de la poigne. Mais Wayland… eh bien, je savais de quoi était capable cette furie. Mordre, griffer, pincer, arracher les vêtements, et même rapporter à maman : les armes féminines de ma tigresse préférée étaient toutes parfaitement fonctionnelles. Dans un sens, j'étais impressionné (elle ne s'arrêtait donc jamais !). Mais il est vrai que, depuis notre aventure, j'avais commencé à l'éviter. Premièrement, j'en avais assez de me disputer avec elle. Deuxièmement, j'avais réalisé qu'elle était malade, que c'était là la raison de son comportement sauvage, et je savais que cette révélation m'empêcherait, en cas de confrontation, de me battre sans aucune pitié. Je savais aussi que ma compassion la mettrait hors d'elle-même. Je le savais, parce que je préférais encore qu'on me traite de monstre que l'on me prenne en pitié. La pitié est la forme de méchanceté la plus cruelle que l'on puisse imaginer. Il n'y a aucune réponse, aucune réplique bien trempée, aucun commentaire sarcastique à donner à quelqu'un qui vous lance à la dérobée ce regard empreint d'une curiosité sordide, un peu gêné et vaguement dégoûté.

– Et puis, je ne t'ai pas permis de me parler.

C'était drôle, on retrouvait soudain beaucoup de sa mère dans sa posture et sa façon de parler.

Et ce Chat qui ne m'aidait pas ! Depuis le début de leur échange… musclé, j'avais reporté mon attention sur lui mais l'animal, au lieu de m'apporter le soutien dont j'avais à l'instant besoin, et qu'en qualité de fidèle compagnon poilu il aurait DÛ me fournir, l'animal disais-je se contentait de m'observer avec ce même air d'assurance tranquille qui m'agaçait. D'où tenait-il ces manières ? J'avais vraiment l'impression de faire face à un jeune play-boy fortuné. Comment ce chat, que j'avais assommé de manière répétitive avec mes sédatifs faits maison, pouvait-il montrer tant de lucidité ? Le hibou de ma tante, lui, n'avait pas fait tant d'histoires. Je revoyais encore Candy saisir l'oiseau entre ses petites mains, ouvrir la fenêtre et le jeter au-dehors. « Vole ! » avait-elle lancé (avec cet enthousiasme que nous lui connaissons). « Oups » avait-elle ajouté quand il s'était bêtement écrasé au sol. Mais Le Chat, lui, suivait la conversation avec l'intérêt poli de quelqu'un suivant un match de tennis – un coup à gauche… un coup à droite ! – et si les chats avaient pu sourire…

… Bref. Je me sentais seul.


– Il n'y a pas de place pour les enfants ici, Wayland. Tu gênes.

Ça commençait à sentir le roussi et j'aurais dû m'interposer mais en fait… je n'avais pas tellement envie d'intervenir parce qu'elles étaient toutes les deux sacrement remontées, voyez-vous. Je n'avais jamais vu Haley dans cet état, et je n'avais jamais vu Lizlor ainsi non plus – même moi, elle ne semblait pas me haïr à ce point ! Ce qui était quand même totalement fou, parce que je vous pris de croire que nous nous détestions cordialement. De manière parfaitement mutuelle, réciproque, et égalitaire.

J'essayais d'imaginer de ce que quelqu'un d'autre aurait fait à ma place. Taylord… Taylord aurait fait exactement ce que j'aurais dû être en train de faire, à savoir : gueuler un coup, les saisir par le dos de leur chemise, ou t-shirt, ou quelque soit cette chose beaucoup trop légère que portait Wayland, et les envoyer se coucher dans leur chambre – leur DORTOIR. Na.

Oui… mais non.

Non, ce qu'il me fallait, c'était une réaction masculine ! Scott… n'aurait pas tenu dix secondes. Il avait été le petit ami de Taylord, et je lui accordais volontiers qu'il fallait une certaine force de caractère, car même si elle n'en avait pas l'air, mon amie avait du ressort. Mais Wayland ? Soyons réalistes, elle en aurait fait son quatre heures avant d'avoir eu le temps de dire « paix ». Quant à Carlton…

Non. Je n'allais pas demander conseil, même dans ma tête, à
Chuck Carlton. HORS de question.

– Mais moi, au moins, on me remarque !

Voilà, maintenant j'avais à l'esprit une vision de Chuck surgissant de derrière les escaliers en criant « COMBAT DE BOUE !! » et en se léchant les babines. Très désagréable.

– T'en as pas marre de faire tapisserie dans le moindre couloir où il (mouvement de tête méprisant dans ma direction pour me désigner en tant que « il ») passe ? Ça n'échappe à personne, tu sais. Sauf à toi.

… Quelqu'un avait parlé de tapisserie ? Hello !

– Hurrm… osai-je en levant la main pour signaler ma présence.

Avant que j'ai eu le temps de demander à Lizlor ce qu'elle sous-entendait exactement par « ça n'échappe à personne » – quelque chose visible pour tout le monde m'aurait échappé à moi ? MÔA ? – des bruits interrompirent ce charmant échange. Je fus presque soulagé de reconnaître les voix de Winch et Powell. Enfin, de l'action ! Enfin, un domaine dans laquelle je serais utile, enfin une chose que je saurais mener à bien. Ne pas mourir, sauver le jour. Simple.

Pour commencer, se sauver soi-même.

Direction : la petite salle au fond de la grande ! Je croisai le regard de Wayland, inquiet à l'idée qu'elle en profite pour nous faire repérer, mais n'était pas dans de telles dispositions pour mon grand bonheur. Elle avait elle aussi perçu les bruits de pas venant vers nous, et compris de quoi il s'agissait (je ne l'aurais admis sous aucun prétexte mais cette fille avait quelque chose en commun avec moi – les cinq sens hyper développés, sans doute un résultat de ses errances). Elle attrapa Le Chat – oh,
Merlin. – et poussa Haley dans le dos avant de l'attraper par le dos de la chemise – décidément, tout le monde s'y mettait sauf moi !

Lizlor projeta Haley devant elle pour la forcer à entrer dans la salle, l'envoyant valser directement dans ma direction. Je la rattrapai avant qu'elle ne tombe et, sentant qu'elle allait riposter à cette manifestation de violence, la fis passer derrière moi avec fermeté, m'interposant entre les deux filles enragées.


– Allons mesdemoiselles, du cal…

Un miaulement m'interrompit – c'était Le Chat qui, à sa manière, nous avertissait de l'arrivée imminente des Mangemorts. Sans lâcher Haley, je reculai vers le fond de la salle, cherchant un endroit où nous dissimuler au cas où nos ennemis viendraient à pénétrer notre refuge. Il y avait bien une armoire, mais il n'était évidemment pas la peine d'espérer y faire rentrer les filles avec moi – ce qui aurait plu à plus d'un spécimen masculin de cette école, je n'en doute pas une seconde – sans compter Le Chat. Je m'aperçu alors que Lizlor n'avait pas bougé : elle avait même sorti sa baguette et faisait face à la porte, comme prête à affronter le danger.

– Wayland ! chuchotai-je. Viens ici !!

J'avalai ma salive, nerveux. De quoi avais-je peur, au juste ? Que m'importait qu'il arrive quelque chose à cette sauvageonne ?
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeVen 13 Jan - 18:21

C'était le pire plan du monde.

En fait... tout ce qui se rapportait à Stephen relevait du meilleur comme du pire. La première soirée où nous avions évoqué la résistance, qui avait aussi marqué ma première audace – elle m'avait paru alors une montagne à gravir à ce moment là –, de simplement me lever de mon siège initial pour m'installer dans celui qui était tout près du sien, le prétexte d'aborder un sujet tabou aidant, avait été une des plus merveilleuses depuis ces dernières semaines. Je m'étais sentie vivante, placée sous les projecteurs de son attention. Mais le plaisir que j'avais ressenti de discuter avec lui s'était parallèlement mêlé à la colère et à la jalousie qu'avait engendré ses propos. Une drôle d'histoire, où lui et Wayland finissaient dans un placard.

Depuis, elle m'avait obsédé, cette gamine nomade qui errait comme un chat perdu. Un chat de gouttière, tout ce qu'il y a de plus abandonné et de plus laid. Les soirs où je retrouvais Stephen pour élaborer notre plan de résistance indépendante, j'avais éprouvé une intense satisfaction à me l'imaginer dans la solitude la plus totale, sans rien, ni personne ; elle était un monstre, un fantôme, une aberration de la nature, une enfant impossible – comment sa mère, créature la plus douce qui soit, avait pu engendrer une telle chose ? A sa place, je me serais déjà pendue. Elle hantait mes cauchemars, dans lesquels la forêt interdite m'engloutissait ; de longs fils grisâtres et cotonneux qui lui appartenaient m'agrippaient les bras et les jambes, ils me traînaient à terre et m'emportaient en son coeur ; je griffais le sol verdâtre et humide pour m'accrocher à la vie, pendant qu'au loin, Wayland et Stephen se dirigeaient vers le château, ensemble.

Je n'avais pas été préparée à ça : aimer et haïr si intensément. Ma vie, monotone, mon coeur, vide et sans relief ; tout ce qui bouillonnait en moi et me faisait mijoter à petit feu leur offrait un élan nouveau, plaisant, mais incontrôlable. Je me perdais, je le sentais, je crois, mais cette impression était si lointaine que je n'avais ni la force ni l'envie de me redresser pour la saisir. Alors, je m'engouffrais toujours un peu plus profondément dans ce qui me paraissait être de la folie, folie qui m'offrait une vue nouvelle : le calme plat et le silence du monde avait cédé leur place à une foule de sentiments et d'émotions qui me transportaient, m'entaillaient, me le faisaient appréhender sous un jour nouveau où les désirs amoureux côtoyaient les ressentiments haineux.

Il ne me semble pas, dans ma vie antérieure, avoir détesté Wayland. Les rares fois où nos chemins s'étaient croisés, c'était de la curiosité et de l'inquiétude qui m'avaient envahi, ainsi qu'un peu de peur et de compassion pour cette enfant de directrice dont les épaules devaient être écrasées sous le poids de la pression et des attentes maternelles. Aujourd'hui, la situation est un peu moins compliquée : qu'elle crève, et tout sera pour le mieux dans le meilleur des mondes. Sauf qu'en attendant ce moment de délivrance, c'est moi qui crève de jalousie.

Elle avait été l'origine de ma haine, le sujet de mes cauchemars, et maintenant, elle se trouvait à quelques pas de moi. Je m'infligeais moi-même la souffrance d'imaginer ce que tout cela aurait été sans elle. Si elle n'avait jamais existé. Qu'en aurait-il été de Stephen et de moi ? Si son attention n'avait pas été portée sur elle, aurais-je été l'objet de son intérêt ? Aurais-je pu garder sa main dans la mienne avant d'ouvrir la porte ? Serait-ce uniquement nos deux personnes qui auraient été enfermées dans un placard ?
Si je pouvais accorder une chose à Wayland, c'était d'animer en moi des puissances cachées qui m'insufflaient de la vie, la vraie, celle dont mes camarades étaient constamment animées, et plus encore, elle me donnait de la force ; force que j'aurais bien usé pour lui arracher les cheveux de la tête. Ses beaux cheveux blonds sauvages. Haïr Wayland m'avait fait haïr les blondes. A chaque fois qu'une chevelure épaisse aux couleurs du blé apparaissait dans mon champ de vision, mon coeur tressaillait dans ma poitrine – de peur, de tristesse, de colère.

Lizlor Wayland ne m'avait jamais plus paru aussi réelle qu'en cet instant, et étrangement, alors que je ne lui avais rien fais – contrairement à elle
, son regard semblait exprimer les mêmes ressentiments que ceux qui s'épanouissaient en moi.

- Toi, la potiche, ne t'en mêle pas, c'est clair? Et puis, je ne t'ai pas permis de me parler.

- Ohoh, mais c'est qu'elle se prend pour sa mère ! m'exclamai-je d'une voix moqueuse, ma bouche tordue en un sourire mauvais.

Le terme de « potiche » n'avait provoqué qu'une petite éraflure sur mon coeur ; une minuscule rayure sur sa surface déjà entaillée de toute part, desquelles s'échappaient des ruisseaux de sangs mêlés aux larmes que je refoulais.

Sur ses lèvres s'était aussi durablement installé un sourire qui m'apparaissait semblable au mien ; mais il muta bientôt en un rire diabolique qui secoua sa tête puis ses cheveux. Ses cheveux. Je me languissais de les lui arracher un par un, parce qu'ils étaient trop beaux, et que sa propriétaire m'était trop insupportable.


- Mais moi, au moins, on me remarque! Tu n'en pas marre de faire la tapisserie dans le moindre couloir où ilcoup d'oeil vers Stephen, tellement méprisant que j'en fus passablement choquée - passe? Ça n'échappe à personne, tu sais. Sauf à toi.

Elle vient de s'emparer de la réalité et de l'envoyer dans ma direction avec la force d'un boulet de canon qui frappe mon coeur, aussi fragile qu'un verre déjà abîmé et fissuré, d'une telle force qu'aucune chance de survie n'est envisageable : je le sens exploser dans ma poitrine avec une douleur fulgurante, je sens chacun de ses morceaux de verre tranchants descendre dans tout mon corps. Je sens mes poings se serrer à leur passage, je sens mes pieds s'avancer, commandés par une autorité invisible. L'attentat sentimental que l'ennemie a commis m'a rendue sourde et aveugle de souffrance, de honte et de hargne.

Plus de sourire sur mes lèvres, plus une once de raison pour contrôler mes gestes : je renoue avec le néant, tout juste habité par l'envie de la briser en milles morceaux. Ma main se lève en même temps que la sienne quand un bruit se fait entendre et attire notre attention toute entière. Je reste aux aguets, la réalité dans laquelle nous nous trouvons tous les trois m'éclairant l'esprit d'une lumière nouvelle. Alors que seule la volonté de détruire Wayland et de construire quelque chose avec Stephen m'obsède, le château est toujours dominé par les Mangemorts, nous rappelant que l'entreprise du plus sombre des sorciers n'est toujours pas terminée et que des innocents meurent sans doute tous les jours pour défendre notre cause. Pour mener une vie tranquille, dénuée d'angoisse et de peur, où le racisme dont sont victimes les sorciers de né-moldus ou de sang-mêlés n'existerait pas. Je commence tout juste à prendre réellement conscience de notre ridicule et regarde tour à tour Lizlor et Stephen, qui – tiens donc – se regardent entre eux, leurs regards comme liés par un pont invisible sur lequel circulent leurs pensées communes. Mon instinct de survie n'est pas encore totalement rétabli, encore entravé par l'humiliation et la fureur ; aussi, si Stephen n'avait pas réagi, peut-être serais-je encore plantée devant la porte, toutes griffes dehors, à attendre les Mangemorts qui arrivent à notre rencontre. Nous ont-ils vus ou leur rendez-vous ici était-il déjà prévu d'avance ?

Tandis qu'en suivant Stephen j'aperçois à mon tour la petite salle non loin de nous qui semble désormais constituer notre seul refuge et notre seule chance d'échapper à des souffrances certaines – bien différentes de celles qui me submergent, mais sont-elles seulement pires ? – je réalise deux choses : j'ai réellement peur, un vent de panique s'engouffrant soudainement en moi, et je m'aperçois que quelqu'un me pousse volontairement tandis que nous nous précipitons vers la petite salle. Je me retourne violemment pour faire face à cette peste que j'aurais le grand plaisir de défigurer une fois que l'angoisse liée à la présence des Mangemorts m'aura quitté, mais je perds l'équilibre à cause des coups qu'elle m'assène sans ménagements, me tirant et me poussant à la fois et j'envisage la solution de l'entraîner dans ma chute et de lui régler son sort une fois à terre quand Stephen me rattrape – mon coeur qui bat la chamade marque une pause, comme si il avait été contrôlé par une télécommande invisible. Il m'empoigne fermement le bras et clame avec une volonté flagrante d'autorité :


– Allons mesdemoiselles, du cal…

Le contact de Stephen qui aurait du m'émoustiller et me ravir ne fait pourtant que raviver en moi la flamme de la haine, ses vaines paroles m'irritant plus que déclenchant en moi le plaisir de voir Wayland être réprimandée – car ce n'est elle qu'il tente de ramener à la raison, mais nous deux, ensemble, mises dans le même paquet sous ce joli mot qu'est «mesdemoiselles ». Obligée de me détourner de Lizlor et de suivre Stephen qui me retient toujours pour m'emmener au fond de la salle, je prends conscience de notre situation : enfermés, tous les trois, dans un endroit étroit annexé au lieu de réunion des Mangemorts. A leur merci. Enfermés. Avec Stephen. Mais avec Wayland.

L'emprise physique de Stephen sur mon corps aurait pu me servir de remède et soulager mes effluves d'animosité et de peur, mais il parle de nouveau, comme un professeur à ses élèves, comme un maître à son chat – comme quelqu'un qui craint pour la vie d'autrui :


- Wayland ! Viens ici !!

Je me retourne à ses mots et constate que Wayland ne nous suit pas mais reste à l'affût sur le pas de la porte. L'envie de répondre à Stephen qu'elle ne mérite pas qu'on s'occupe d'elle, et qu'il nous serait fortement bénéfique de nous cacher tandis que les Mangemorts l'illuminerait d'un petit éclair vert ou d'une autre couleur tout à fait charmante me traverse l'esprit... mais cela ne lui plairait sans doute pas.

Amère et frustrée de l'intérêt constant qu'il lui porte, je me dégage de son emprise – un peu violemment, ce dont je me félicite – me dirige vers Wayland et lui rend la monnaie de sa pièce avec une grande jubilation intérieure en l'attrapant par l'épaule et la tirant jusqu'au fond de la pièce, aux côtés de Stephen, puis ferme la porte, le tout en quelques secondes. La mâchoire serrée, le regard courroucé et le corps raidi, je lui lance, avec toute l'ironie dont je suis capable :


- Désolée d'avoir été brusque Wayland, mais ça aurait été une si grosse perte de te perdre, en proie aux Mangemorts...

Je ne souris pas, je ne pleure pas : mon coeur n'est plus. Depuis que Wayland a avoué tout haut ce qui pesait tout bas dans l'âme, j'ai la sensation de flotter dans un état étrange où tout n'est que haine. Je hais Wayland d'avoir dérobé mes sentiments intimes, je hais Stephen de n'avoir rien dit, de ne pas avoir su réagir, d'avoir manifesté l'attention qu'il lui porte ; il ne me reste même plus assez de haine pour me détester moi-même comme j'en ai tant l'habitude. Alors je les regarde et je dis, d'une voix dure mais plate, le regard toujours fixé sur Lizlor, préparée à une éventuelle revanche, et ne me souciant plus de l'avis de Stephen à mon propos - tout est terminé, désormais, il ne me reste plus rien, plus l'ombre d'une chance :

- Et maintenant ? Vous devriez savoir quoi faire à présent, vous qui êtes des habitués des petits endroits exigus.

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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeSam 14 Jan - 14:58

- Ohoh, mais c'est qu'elle se prend pour sa mère !

Dans la masse des scenarii les plus catastrophes, Collins avait choisi le pire. Évoquer ma mère était sans doute ce qu'elle pouvait faire en dernier recours si elle voulait que je la haïsse de tout mon corps, plus encore que maintenant, si elle voulait que mon but soit dorénavant de faire de sa vie en enfer. Sa plate vie, sa vie de pauvre fille inutile et transparente que personne ne remarquait, pas même le garçon qu'elle suivait sans relâche comme un bon petit cocker bien dressé. Elle me donnait envie de rire à m'en irriter la gorge, à m'en crever les poumons. Je n'étais plus qu'aléatoirement une boule de nerfs ou une coquille vide en attente du retour de sa propriétaire, et tout en moi prenait des proportions énormes, décuplées, un simple battement d'ailes de papillon qui faisait naître une tornade. J'étais cette tornade qui se préparait avec hâte à tout dévaster, Collins était le faible petite papillon qui avait battu des ailes une fois de trop. Pour sa propre perte.

Liz était éveillée et bien prête à agir, maintenant.

De l'autre côté du ring, Fray restait pour le moins absent, pour une fois, et si je ne m'en étais pas apperçue sur le champ, trop occupé par cette haine tangible qui me coulait dans les veines comme un venin que j'attendais de verser sur cette pauvre idiote d'Haley, quand un bruit vint perturber notre combat, je notai alors que Fray contrairement à ses petites manies n'avait rien dit, pour le coup, et qu'il regardait la scène et Le Chat, alternativement, comme s'il se demandait ce qu'il faisait ici. Tiens, tiens. S'il m'était resté un tant soit peu d'esprit analytique, j'aurais compris d'avantage à cette étrangeté de la nature qu'était le Serdaigle... Qu'il n'était pas si plein de cette assurance supérieure et détestable. Que des choses pouvaient échapper à sa compréhension. Qu'il n'était finalement qu'un garçon parmi les autres, ce qui l'aurait tué de l'admettre. Je souris en dévoilant le bout de mes dents, comme une panthère. Petit à petit, on me donnait d'avantage d'armes, d'avantage de clés. Liz grandissait de jour un jour, comme un monstre que l'on nourrit pour rendre plus fort.

Mais, sur la défensive, quand les Mangemorts arrivèrent au loin - c'était eux, à n'en pas douter - je bondis sans plus attendre, remettant à plus tard mes plans de guerre. Pour l'heure il fallait nous mettre à l'abri, car si je prenais part plutôt de loin que de près à cette invasion du château par les Mangemorts, je ne tenais pas à pourrir dans un cachot à cause de Fray et Collins. J'avais hésité, comme la fois avec Fray, où je m'étais dit que si je me faisais prendre il se faisait prendre avec moi et ça valait toutes les retenues du monde; mais j'avais trop envie de liberté dorénavant pour me sacrifier. J'allais trouver d'autres moyens, ce n'était pas ça qui manquait à Liz. Je lui faisais confiance. Et puis, il y avait Le Chat, Le Chat qui maintenait éveillées en moins les dernières petites parcelles de tendresse qui emplissaient mon pauvre petit corps, et je ne pouvais me résoudre à l'abandonner là, ou pire encore. Les Mangemorts, comme Fray, étaient de ce genre de personnes qui se fichent bien des petits animaux, aussi mignons soient-ils. Je pris le petit chat dans mes bras et filai avec les autres, ne manquant pas de faire comprendre à Collins tout ce que je pensais d'elle en la malmenant comme si elle avait été une vulgaire poubelle que je poussais devant moi. Cette idiote trébucha à l'arrivée dans la salle, je lui donnai un dernier coup violent dans l'omoplate pour la faire avancer, elle manqua de s'étaler et Fray la rattrapa, tandis que je déposai Le Chat délicatement au sol et que je me postai à l'entrée de la petite salle. Les deux autres reculèrent un peu plus dans l'ombre.


– Allons mesdemoiselles, du cal…

Je ne lui accordai même pas un regard. Il avait tout d'un coup perdu sa saveur : l'affront d'Haley, les Mangemorts, tout ce tourbillon m'avait étrangement ôté Fray et sa désagréable compagnie de l'esprit. Cela faisait des moi que je vivais dans ses pas, dans son ombre, sans son dos, et pour la première fois, j'avais l'impression de l'avoir assez... possédé pour m'intéresser à autre chose. Haley était ma cible, pas lui, et il ne prenait part en rien au duel secret que nous nous étions lancé.

Mais tout d'un coup, comme une pièce où la pression redevient normale, comme un bouchon qui remonte dans un tube, je sentis que j'étais à nouveau moi, Liz. L'adrénaline avait comme envahi tout mon corps et mes sens, un à un éveillés, stimulés, m'offraient des possibilités supplémentaires. Cela me faisait penser à Conrad et à nos jeux, dans la maison de ma grand-mère, immense et sinueuse. Nous y trouvions tout un tas de cachettes secrètes pour y trouver aux gangsters et je me rappelai des émotions que cela éveillait chez moi : les mêmes que maintenant. Le cœur qui bat fort, la respiration plus difficile, la peur, mais l'excitation aussi, l'envie de survivre, de gagner, d'aller chercher le danger dans l'ombre.


- Wayland ! Viens ici !!

Je lui fis un signe vague de la main pour lui indiquer de se taire, qu'il allait nous faire repérer. Dans l’espace de la porte-entrouverte, Liz faisait le guet, sa baguette à la main. Des ombres passèrent, pénétrèrent dans la Grande Salle. Liz retint son souffle. Que manigançaient-ils? Ils parlaient peu fort, semblaient préoccupés. Mais le plus étonnant, le plus curieux, c'est que le regard de Liz, habitué au noir, et voyait dans le fond du Hall des silhouettes qui bougeaient imperceptiblement. Que les Mangemorts ne remarquaient pas. Que se passait-il? Liz se pencha un peu plus, elle n'avait pas peur. J'avais peur mais je n'osai l'avouer, et puis, Liz était la plus forte. Le Hall m'attirait comme un aimant; il se tramait quelque chose, je le savais, je le sentais! Conrad aurait été avec moi il m'aurait pris la main et, sans même me questionner du regard parce que nous nous comprenions l'un l'autre, m'aurait attiré dans la pénombre, et nous aurions percé à jour le mystère de ces ombres mouvantes.

Mais une main m'agrippa, me faisant sursauter tant ma concentration était grande. Les prunelles m'en brulaient tellement je scrutai le noir du Hall - qui donc venait m'en empêcher?! Fray sûrement, et je me retournai avec une expression de profond agacement et un rictus mauvais sur le visage, prête à l'envoyer paître. La surprise m'empêcha de faire quoi que ce soit l'espace d'un instant : c'était Collins! Ma bouche s'ouvrit mais je me retins, ne voulant pas nous faire repérer. Mes yeux lancèrent des éclairs et je sentis la colère rejaillir en moi à l'égard de cette fille que tout me donnait envie de réduire en miettes; le temps que je fasse un mouvement, elle referma la porte et m'attira vers le fond de la salle. Je me débattis, elle lâcha prise, et je frottai mes vêtements là où elle les avait tenus, comme si elle les avait salis, mécontente.


- Désolée d'avoir été brusque Wayland, mais ça aurait été une si grosse perte de te perdre, en proie aux Mangemorts...


- Ferme ta gueule, lâchai-je violemment, sans me retenir, bien malgré moi, comme j'aurais vomi une insulte qui gardée en moi m'aurait rendue malade. Ces mots-là je n'en disais pas beaucoup, parce que je voyais alors surgir devant moi le visage courroucé de ma mère, j'entendais sa voix pleine de reproches "on ne dit pas des choses vulgaires comme ça, Lizlor!". Et cette vision me laissait aussi faible et pantelante qu'un petit chiot abandonné, j'avais envie de me recroqueviller sur moi-même et de pleurer.

Mais cette fois, non. Je dardai de mon regard farouche et hostile le regard d'Haley. Je n'avais plus peur. J'étais Liz.


- Et maintenant ? Vous devriez savoir quoi faire à présent, vous qui êtes des habitués des petits endroits exigus.


L'expression clairement explicite qui se dessinait sur ses traits m'emplit d'une satisfaction glorieuse, écrasante. Collins n'avait aucune estime d'elle-même, pour le coup, à l'inverse de Stephen, et elle était bien trop facile à écraser du talon. Je jubilai, m'approchant tout près d'eux. Le souvenir du placard me revint comme un boomerang et alors que j'avais failli céder aux nausées qui m'avaient envahies, à ce moment, là je me sentis étrangement pleine d'assurance, comme si j'avais pompé toute celle de la Serdaigle. Elle était tout ce que je n'étais pas et inversement, et loin de me fragiliser, en cet instant, c'était là perspective d'une intense réussite pour Liz et moi.

- C'est vrai; je t'ai raconté comment il en a profité pour me peloter, dans le placard? susurra Liz d'une voix à la fois chaude et basse, envoûtante. Elle regarda Haley de par-dessous ses cils, la tête un peu penchée, les lèvres souriant en coin. Si je détestais les contacts physiques, Liz n'en avait pas peur. Liz se rapprocha tout doucement de Stephen Fray, posa sa tête contre lui, passa sa main sur son torse, sans quitter Haley Collins des yeux. Son petit sourire provocateur et presque diabolique ne la quittait plus et semblait rayonner dans la salle : elle avait quelque chose d'effrayant et me maintenait prisonnière, immobile, condamnée à assister à la scène comme une vulgaire spectatrice.
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeMer 18 Jan - 22:57

Les filles sont décidément toutes pareilles. Brillantes la plupart du temps, souvent plus que les garçons d'ailleurs. Mais alors dès que les émotions entrent en jeu… terminé ! A croire que leur intelligence varie en fonction de leurs états d'âmes. J'aimerais s'il vous plaît faire un point récapitulatif de la situation : nous étions enfermés dans une pièce adjacente à la Grande Salle, même pas complètement fermée, alors qu'une bonne douzaine de Mangemorts se faisaient une petite réunion entre confrères du mal. Rien à voir avec les trois-quatre que Wayland et moi avions su évité quelques semaines plus tôt. Nous étions faits comme des rats, et si par malheur l'un ou l'une d'entre eux songeait à ouvrir la porte, c'était la mort assurée. Ou alors la pendaison par les pouces, et le fouet, comme au bon vieux temps. Nu, cela va de soit. Et devant tout le monde pour donner l'exemple.

Et ces péronnelles, là, ne songeaient pas à autre chose que de s'injurier parce que pour une raison ou une autre elles ne pouvaient pas se voir en peinture, et avaient choisi ce moment PRECIS pour régler leurs comptes. Je vous explique :


– Désolée d'avoir été brusque Wayland, mais ça aurait été une si grosse perte de te perdre, en proie aux Mangemorts…
– Ferme ta gueule !

… Non mais bonjour.

A part les assommer à coup de sortilèges de stupéfaction – et à mon avis, ni l'une ni l'autre n'apprécierait, surtout pas Wayland, vu comment elle avait réagi la fois précédente – je ne voyais pas trop comment intervenir à ce stade. Je veux dire, elles en venait aux mains – la bousculade de Wayland de toute à l'heure, maintenant Haley qui la tirait en arrière sans ménagement ! Et si elles commençaient à dire des gros mots, alors là je ne répondais plus de rien. Non, la seule chose à faire, c'était de se tourner vers la seule présence féminine dont j'aimais m'entourer dans les moments difficiles : la magie.


– Muffliato, chuchotai-je en pointant ma baguette sur la porte tandis que les deux filles continuaient de se jeter des regards haineux.

J'espérais que ce serait suffisant pour camoufler leur querelle stupide – oui oui voilà
STUPIDE, idiotes, bande d'idiotes, j'étais énervé, ça m'énervait ce manque de contrôle flagrant, manque de discipline, est-ce qu'elles réfléchissaient deux secondes ??? – mais j'en doutais, parce que ça ne servirait qu'à produire un bourdonnement dans l'oreille de quiconque s'approchant. Ça risquait aussi d'éveiller leur suspicion. D'accord, la plupart des Mangemorts avaient une intelligence de faible à moyenne, mais ce n'était pas le cas de tous. Nottingham était toujours à l'affut, Powell rusée comme un renard. Quant à Winch, n'en parlons pas, ce type me donnait froid dans le dos – rien que d'imaginer qu'il nous surprenne dans une telle posture…

Une fois la porte sécurisée, je me tournai à nouveau vers les filles. J'étais déstabilisé par le peu d'attention qu'elles me portaient, je dois dire. D'habitude, chaque fois que j'entrais dans une pièce où se trouvait Haley, celle-ci se redressait aussitôt, avec un petit sourire et de grands yeux illuminés. Elle ne courrait pas vers moi mais attendait que je vienne vers elle – car je venais toujours vers elle pour la saluer, même quand il ne semblait y avoir aucune raison. Ces dernières semaines, j'avais appris à mieux la connaître, et même s'il y avait encore pas mal de choses que j'ignorais sur son compte (outre ce que ma perspicacité naturelle me permettait de deviner bien sûr… c'est à dire beaucoup), je l'appréciais suffisamment pour avoir envie de lui parler dès que je la voyais. Haley était plus… simple, que Taylord et Scott. Surtout en ce moment. Scott semblait m'en vouloir un peu, comme je vous l'ai dit, et Taylord… eh bien Taylord, malgré mes efforts, semblait toujours un peu inaccessible. Il n'y avait qu'une personne avec qui elle se dévoilait vraiment.

Mais pas Haley. Haley était différente. Elle n'avait pas, pour commencer, beaucoup d'autres amis qui encombraient sa tête avec leurs histoires de cœur – oh elle en avait, mais je soupçonnais qu'elle ne les écoutait pas vraiment. Elle était toujours là au moment où je ne m'y attendais pas. Elle avait, en fait, le don d'être là quand personne n'y était.

Sauf maintenant. Là, je ne la reconnaissais plus. Je ne l'avais vu avec ce regard. Du coup, je m'efforçais de ne pas la regarder, pas plus que Wayland d'ailleurs.


– Et maintenant ? cracha-t-elle presque (je ne pouvais pas lui en vouloir, en même temps, d'avoir mal réagi à la vicieuse injonction employée par la Rouge et Or). Vous devriez savoir quoi faire à présent, vous qui êtes des habitués des petits endroits exigus.

Cette ironie dans sa voix, qui d'habitude, lorsqu'elle surgissait, donnait un peu de piquant à son caractère et me plaisait particulièrement, me mit dans ce cas précis un peu mal à l'aise, sans que je comprenne vraiment pourquoi – en fait j'étais un peu stressé par la présence des Mangemorts au dehors et ne prêtai que peu d'attention à leur dispute, ne voulant pas me laisser déconcentrer.

– C'est vrai ; je t'ai raconté comment il en a profité pour me peloter, dans le placard ?

– Pour commencer, commençai-je distraitement en réponse à Haley, vous feriez mieux de vous t–Wayland ?

Mais la Gryffondor m'ignora : et cette même furie effarouchée qui avait failli faire une crise d'angoisse quand j'avais posé une main sur sa bouche pour l'empêcher de nous faire repérer par ses cris – la même vous dis-je ! – s'avança soudain vers moi, d'un pas qui me donna envie de reculer moi-même. Ce que je ne fis pas, parce que voyez vous… j'ai honte de le dire mais j'étais bloqué. Ses yeux. Ils avaient ce pouvoir sur moi, depuis le début. La première fois que je l'avais vue, ils m'avaient hypnotisé – ils m'avaient arrêté dans ce placard, et maintenant ils me tenaient une fois de plus sous leur contrôle.

Elle n'était pas si petite. C'est drôle – je m'en rendais compte seulement maintenant qu'elle posait sa tête contre mon cœur.

Je la regardai, bouche bée, incapable de proférer la moindre réponse. J'aurais dû protester, me défendre. Mais non, j'en étais incapable. Parce que pour la première fois de ma vie, j'avais envie de me taire et de ne rien faire, sinon toucher ses longs cheveux blonds…

Mais, me rendis-je compte soudain, elle ne me regardait pas. Elle fixait Haley. Et Haley ? Elle me dédiait le même regard qu'elle avait adressé à Wayland depuis le début de cette charmante aventure. Dégoût. Mépris. Haine. Tout ça d'un coup, comme une vague. Je la sentis déferler sur moi, arrachant toutes mes certitudes à son sujet. Et je commençais à penser qu'on pouvait m'apprécier comme ça, simplement, pour ce que j'étais… Balayées, les illusions. Haley Collins me détestait autant qu'elle détestait Wayland. Wayland, dont la tête sur mon épaule était la seule chose qui me permettait de conserver mon équilibre dans cette tempête, comme une ancre amarre un vaisseau.

Wayland. Sa proximité, radicalement opposée à ce à quoi elle m'avait habitué… et ses regards équivoques à Haley… Je ne comprenais pas – je refusais de comprendre, de toute façon tout ça était trop compliqué et puis ça ne pouvait pas m'arriver à moi. Mais je savais juste que ce n'était pas réel. C'était un jeu, un jeu dont j'étais l'instrument.

Sa main frôla mon torse et je me dégageai brutalement, comme si elle m'avait envoyé une décharge électrique.


– Arrête, fus-je tout juste capable de dire, tournant la tête vers le sol pour ne plus risquer d'être confronté à son visage ou un autre.

Je me sentais mal, maintenant. J'avais la nausée et la tête me tournait, et j'avais envie de – non, ne pas y penser. J'étais en train de découvrir qu'il y avait pire que d'être ignoré, humilié, rabaissé en permanence ; c'était cette sensation de n'être qu'un objet. Je me sentais utilisé. Et ça me donnait envie de vomir.

– Arrêtez toutes les deux, maintenant, s'il vous plaît, haletai-je en plaquant une main contre mon front pour tenter d'en chasser la douleur.

Ma tête faisait des siennes à nouveau. Ce n'était vraiment pas le moment.

A ce moment là, je sentis une frottement contre ma jambe. Ôtant la main de devant mes yeux, je m'aperçus que c'était Le Chat qui était venu entortiller son corps flexible entre mes jambes. L'animal poussa un miaulement que j'aurais pu avec un peu d'imagination qualifier d'interrogatif. Bien sûr ce n'était qu'un chat, il ne pouvait véritablement comprendre ce qui se passait… mais quand même. Après tout, Le Chat n'était pas un chat ordinaire, enfin j'aimais à le croire. Il avait subi tant d'opérations magiques, il ne pouvait pas être comme les autres, il devait forcément avoir quelque chose de spécial en lui à force d'être soumis à mes expériences farfelues. Je résolus de lui offrir une vie plus tranquille à compter de ce jour. Comme s'il avait compris, mon compagnon miaula à nouveau et je m'accroupis avec un sourire pour le caresser.

– Il n'y a rien à faire, sinon se taire et attendre, déclarai-je simplement à l'adresse des filles, sans regarder ni l'une ni l'autre, ma voix dénuée de toute émotion.

Je ne voulais pas être mêlée à cette bataille, et je ne voulais surtout pas en être le centre. Même si je comprenais difficilement comment cela était possible.

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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeDim 12 Fév - 15:09

J'étais en plein naufrage. J'avais entamé notre expédition commune sur une petite mais solide barque de fortune, prête à affronter les périls qui m'attendaient ; désormais, je m'accrochais à une unique planche de bois pour m'empêcher de sombrer dans les eaux sombres des évènements et des sentiments fâcheux qui avaient attaqué mon embarcation. La vague Wayland avait tout englouti, m'entraînant dans une noyade longue et douloureuse, de laquelle je sortirais sans doute vivante, mais pas indemne. Je tentais de reprendre ma respiration mais l'ambiance était saturée de violence et de haine : je suffoquais, au bord des larmes que j'envisageais comme la seule délivrance possible. Je n'avais jamais eu aucune fierté, aussi, si je l'évitais au mieux, pleurer en public ne me paraissait pas comme la plus grande des hontes. Mais Wayland avait déjà gagné beaucoup trop de terrain. Je le savais, elle maîtrisait la situation. Pleurer reviendrait à abdiquer. J'orientais donc mes pensées vers des idées plus heureuses – mettre ma main dans la figure de Wayland, lui arracher les cheveux ; toutes sortes de jouissances nouvelles qui m'apparaissaient toutes plus tentantes les unes que les autres. Toute notion de moralité m'avait abandonné, balayée par l'hostilité de Wayland. Son « ferme ta gueule » avait officiellement ouvert la trappe des choses sombres qui étaient nées en moi. A moins qu'elles n'y sommeillaient en fait depuis toujours ; peut-être que cette Haley sombre et mauvaise qui prenait soudainement possession de mon corps avait depuis toujours existé, qu'elle bâtissait la véritable nature de mon être. Cette chose tranquille, fragile, effacée en laquelle je me reconnaissais depuis mon enfance n'était peut-être qu'un camouflage, une étape éphémère, un cocon duquel je m'échappais à présent pour muter en un papillon qui n'avait rien de bon, ni de sage.

Wayland ne détruit pas seulement les maigres liens que j'avais réussi à tisser avec l'unique personne qui m'attire comme un amant, dont chacun des contacts visuels et corporels m'envoûtent ; elle démolit pierre par pierre, la personne que je suis – ou que je crois être.

Comme une mauvaise bactérie, elle avait su dès le départ repérer la faille qui fissurait mon coeur ; désormais bien logée, elle s'épanouissait, se développait confortablement, se propageait comme de la moisissure. Ses expressions et ses mots en avaient la saleté et la puanteur ; elle-même ne m'inspirait plus que du dégoût et de la répulsion. Face à cette invasion, je me défendais comme je le pouvais, avec mes faibles moyens de défense : m'empêcher de pleurer, et toucher ses points faibles, de la même manière qu'elle visait les miens un par un. J'avais réussi en évoquant sa pauvre mère ; comme je m'y attendais, sa réaction avait été des plus violentes. D'habitude, face aux insultes, une seule réaction : les larmes. C'était ainsi depuis mon enfance, notamment dans les petites classes de maternelles et de primaire moldues dans lesquelles mes parents m'avaient inscrit : si un élève se faisait réprimander, ce n'était pas le vilain petit bougre qui s'en effrayait, mais moi. Un jour, de rage face à un de ses élèves, notre institutrice avait lancé la craie qu'elle tenait à la main au fond de la classe – elle n'essayait de viser personne et la craie n'avait fait que frapper le fond de la classe, mais le mécanisme de mes canaux lacrymaux s'était automatiquement déclenché, simplement parce que je craignais la violence et les réprimandes. Dès que des insultes fusaient, je me recroquevillais dans ma coquille. J'avais été le petit cygne blanc de mes institutrices et le vilain petit canard des élèves – cette chose si fragile et sensible, tellement facile à écraser... pourquoi s'en seraient-ils privés ?

Je pensais réussir à ne pas craquer face à Wayland, qui s'adressait à moi comme si elle ne faisait que cracher sa salive au sol, mais son jeu ne s'arrêtait pas. Je connaissais mes limites et espérait bientôt déceler les siennes, sauf qu'elles me semblaient de plus en plus inexistantes. Elle me provoquait de plus en plus ; je me rétractais proportionnellement à ses attaques. Et je savais qu'elle en jubilait, oh oui, elle s'extasiait à la possibilité de me réduire en cendre. De gagner. Pas de règles du jeu. Tous les coups sont permis. Que la plus démoniaque l'emporte.

– C'est vrai ; je t'ai raconté comment il en a profité pour me peloter, dans le placard ?

– Pour commencer, vous feriez mieux de vous t–Wayland ?

Son corps s'approche du sien pendant que mon coeur s'arrête. Elle dépose sa tête conte son épaule. Ses longs cheveux blonds chatouillent sa nuque nue. L'énormité qu'elle a proféré ne me frappe pas l'esprit ; ce sont mes yeux qui sont bombardés par les images douloureuses qui se dessinent devant eux. Mes cauchemars semblent se matérialiser devant mes yeux : mais tout cela ne relève que du rêve, je suis simplement endormie, ou morte. Mais pas vivante. Comment le pourrais-je... comment... comment pourrais-je encore être en vie ? C'est irréel.

Mais mon coeur qui bat si fort dans ma poitrine, la pellicule de sueur qui s'est formée sur mon front, la moiteur de mes mains dans lesquelles glisse ma baguette magique : tout ça n'a rien d'imaginaire. La main de Wayland remonte jusqu'au torse de Fray, toujours identique à lui-même, immobile et passif. J'aurais aimé vomir ; mais mon corps réagit indépendamment de ma volonté : je sens ma bouche s'entr'ouvrir légèrement de stupeur et ma baguette tomber sur le sol, le choc de son contact contre le sol de pierre froide faisait retentir durant quelques instants un son sec et mat.

L'impuissance. L'échec. L'écœurement.

La voix de Stephen.

– Arrête.

Ma tête pivote légèrement, commandée par une force invisible qui régit le pantin que je suis devenu, pour le regarder. Il semble gêné, mais est-il énervé ? Je ne décèle aucune rage dans son expression fuyante. Je me sens comme anesthésiée, incapable d'un seul mouvement et d'un seul mot. Je n'ai pas la présence d'esprit d'aller frapper Wayland, de lui griffer le visage, et de lui infliger tous les supplices qui bouillonnent dans la marmite des mes pensées. Elle a gagné. Frappé au plus fort, au plus osé. She's the winner. Psychological recovery : 6 months.

Désemparée, démunie, déshumanisée ; je n'ai même pas la présence d'esprit de me baisser pour ramasser ma baguette. Si je venais à toucher le sol, je risquerais de ne plus m'en relever, de m'y coucher et de m'enterrer sous les pierres du château. Une nouvelle fois, la voix de Stephen vint éveiller mon attention. Pendant que je dépérissais et que Lizlor était plus vivante que jamais, lui semblait reprendre peu à peu ses esprits.


– Arrêtez toutes les deux, maintenant, s'il vous plaît.

Mon cerveau se remit lui aussi lentement en marche, réalisant qu'au beau milieu de notre numéro, Stephen devait être perdu et mal à l'aise. La main qu'il porta à sa tête me fit froncer les sourcils et un élan d’inquiétude vint se loger dans mon coeur... avant de subitement disparaître. Je n'avais eu d'yeux que pour lui durant les derniers jours, de manière folle, indécente, déraisonnable, quitte à devenir presque obsédée de sa personne, portée par l'espoir que, peut-être... Mais maintenant, il n'y avait plus de « peut-être ». L'espoir qui m'avait porté s'était violemment brisé par cette image qui, je le savais, me hanterait toujours : le contact de leur corps. L'audace de Wayland, et la résistance inexistante de Stephen. J'avais le malheureux don de remarquer la présence – ou l'absence – des gestes et des mots, en toute circonstance ; une capacité à analyser tout, sans cesse, des choses les plus inutiles, et d'en tirer des conclusions souvent farfelues mais que je portais au statut de « vérité ». Stephen avait tardé à repousser Wayland. Cela m'avait suffit pour tirer mes propres conclusions.

Nous ignorant – nous l'avions apparemment vexé –, il se baissa pour s'intéresser à son chat. Son chat, que lui et Wayland se disputaient. Oh maintenant, avec le mariage en vu, il suffirait de conclure à une garde partagée, et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes pour le pauvre animal. Pff. Quelle débilité. Je l'aurais bien pulvérisé, son chat, le problème aurait vite été réglé. Je leur aurais même ainsi permis de partir en lune de miel l'esprit tranquille, dénué de toute pré-occupation au sujet de leur progéniture poilue.


– Il n'y a rien à faire, sinon se taire et attendre.

- Ouais, articulai-je dans un soupir, d'une voix sèche et rude. (Qu'était devenue la Haley douce et agréable ?)

Milles méchancetés me vinrent à l'esprit, envers lui, Wayland, et eux deux réunis ; mais tourner le couteau dans la plaie est inutile – bien que j'en serais sans aucun doute soulagée. De nous trois ici présents, Stephen était bien le seul dont le sort m'importait. Je me sentais responsable du danger qu'il courait. C'était moi la première qui avait verbalement formé la naissance de cette escapade maudite, des semaines auparavant, qui me semblaient maintenant si lointaines. Désormais, il savait ce que j'avais pris tant de mal à cacher. Wayland n'avait pas fait que le révéler, elle l'avait aussi gâché et sali. Il ne me restait plus qu'une chose à faire : prendre la défense de Stephen. Être là. Me contenter simplement d'être présente, puis disparaître. Je lui en voulais, à lui aussi, mais il était innocent face aux reproches que je lui adressais. Si nous sortions du pétrin dans lequel nous étions embourbés jusqu'au cou... qu'adviendrait-il de notre... amitié, si nous avions un jour été des amis ? Je refoulais cette douloureuse question pour me concentrer – difficilement - sur la situation présente.

Je me courbai d'un mouvement rapide pour reprendre possession de ma baguette et vint me placer devant la porte, leur tournant le dos. Les observer se regarder, comme la spectatrice impuissante de la lente atomisation de mes désirs, m'était impossible. Je reprenais tranquillement une respiration posée en fixant le visage boisé de la porte qui me faisait face. Je me sentais meurtrie, mentalement, mais aussi physiquement. Courir et être essoufflée n'était pas dans mes habitudes, sans compter la brutalité que Wayland avait eu à mon égard en pénétrant dans la pièce, devenue cage et prison, et les picotements dans mes yeux qui souffraient de ne pas déverser les larmes qui s'y précipitaient. Je profitais de ce bref moment de répit pour en laisser échapper quelques unes dans un silence maîtrisé. Sentir simplement le douce chaleur des traînées salées sur mes joues m'apporta un réconfort étrange mais apaisant. Sans les voix étouffées des Mangemorts que nous parvenions à percevoir de notre cachette d'infortune, la situation aurait été insupportable, le silence qui régnait étant de plus en plus étouffant. Je plissais – inutilement – les yeux et collait mon oreille pour tenter de comprendre quelques bribes de conversation, en vain.
J'aurais aimé pouvoir me fondre dans l'encadrement de la porte qui me faisait face, ne faire plus qu'un avec le bois, disparaître de la surface de la terre. Les secondes s'écoulaient, lentes et insoutenables. Se taire et attendre. Ordre simple à l'exécution insupportable.

Et puis, soudainement – quelques minutes après l'intervention de Stephen, peut-être trois, quatre, cinq ? - la délivrance vint. Pas comme je l'avais imaginé cependant, par la disparition des Mangemorts qui nous auraient laissé la possibilité de quitter les lieux. Non. C'était des cris, des hurlements, des objets que je supposais renversés ou cassés par le vacarme prodigieux qu'ils produisaient. Je me retournais, affolée ; je ne songeais déjà plus à Lizlor, seule la panique me guidait vers Stephen. Mes yeux humides l'emprisonnèrent et mes pieds s'apprêtaient à se diriger dans sa direction quand je réalisais que je ne pouvais
pas. Mon coeur qui battait à tout rompre de peur dans ma poitrine subtilisait les pensées raisonnables dont mon cerveau aurait du s'emparer. Au lieu de me préparer à ce qui nous attendait derrière cette porte, de vérifier mes acquis en sortilèges et en duels, de récapituler les sorts de premier secours qui pourraient nous être utiles si un combat avait lieu, comme je le supposais, mon corps ne demandait qu'à être réfugié contre le sien, ma tête logée dans son cou, mes mains appelant les siennes.

Je ne veux pas ouvrir cette porte et savoir quel cauchemar se déroule derrière. Je veux simplement une étreinte rassurante, une douce caresse pour me réveiller de ce mauvais rêve.

Je m'arrête à temps dans ma lancée pour me planter comme un piquet devant eux, les regardant à peine, la nausée au bord des lèvres, énonçant simplement ce qu'il faut énoncer :


– On... on y va ?

Ma voix est couverte par un cri terrible suivi d'un choc affreux contre la porte de notre pièce – le projectile est-il un objet ou un corps ? Le vacarme est inouï et ma peur grandissante ; pourtant, je n'ai plus le choix. Je sens Stephen et Lizlor se presser dans mon dos tandis que je pose ma main tremblante sur la poignée de la porte. En étant la plus proche, la charge de l'ouvrir m'en incombe. Je ferme un instant les yeux, prenant ma respiration, resserrant l'emprise de ma main droite sur ma baguette. Un. Deux. Trois.

J'ouvre la porte dans un grand mouvement et m'immobilise après quelques pas seulement. Paralysée de peur. Le bras qui enserre ma baguette est mollement et bêtement allongé contre mon corps. Bouche-bée, j'ai un court moment l'impression de revenir en arrière, quelques mois auparavant, lors de la prise du château par les Mangemorts. Des sortilèges fusent dans tous les sens en éclairs lumineux aveuglants, des corps courent, tombent, crient, souffrent. Que s'est-il passé ? Que se passe t-il ? L'interrogation à peine formulée, je suis bousculée à terre par un élève qui tentait d'échapper à un sortilège lancé par une figure que je reconnais comme appartenant à un des Mangemorts. Tout recommence. Je me relève avec difficulté, perdue, désorientée, les larmes aux yeux, la vue saturée de lumières et de silhouettes inconnues, l'ouïe agressée par les ordres et les cris, les paumes éraflées par la pierre dure du sol. Toute forme de raison m'a quitté : la peur me gouverne toute entière. J'ai assez de lucidité pour récupérer ma baguette tombée dans ma chute ; puis tout n'est plus que brouillard dans mon esprit, désormais uniquement guidé par le visage de Stephen qui s'y matérialise. Je le cherche des yeux et tente de me frayer un passage au milieu des corps qui se bousculent les uns contre les autres. Alors que je l'aperçois à quelques mètres de moi, titubante et hébétée, un cri déchiré s'échappe de ma bouche, concentré de toutes mes angoisses et de tout mes désirs :


– STEPHEN !
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeVen 17 Fév - 15:07

Cela durait depuis longtemps, trop longtemps. Il fallait que je me débarrasse de ce carcan qui me retenait prisonnière, qui enchaînait mes chevilles au sol avec des lourdes chaînes. Fray avait toujours cru, et j'en étais certaine, qu'il était le plus fort de nous deux. A vrai dire, peut-être l'avait-il été. Sauf que Liz avait vu le jour au plus profond de mes entrailles et s'était nourrie de ma chair, ma propre chair; aujourd'hui elle en était devenue invincible, abreuvée en son sein d'un nectar précieux. Dorénavant j'étais la plus forte, et cela je le lus sur le visage d'Haley Collins, clairement décomposé face au petit spectacle que je lui imposais. Seul l'impact de sa baguette sur le sol, qui lui glissa des doigts, ponctua mon petit sourire satisfait. Je le savais : elle voulait Stephen aussi fort qu'il l'ignorait, et moi je n'avais qu'à faire un geste pour avoir Stephen à ma merci. Finalement... Ce n'était pas si difficile que ça. Liz la tigresse n'avait eu qu'à fermer ses griffes autour de sa proie. Ma main sur son torse sentait son sang pulser dans ses veines et mon oreille tout près de son coeur l'entendait battre bien vite, et contrairement à l'habitude, il reste un long instant immobile et muet.

J'avais gagné.

– Arrête.

Il se dégagea mollement détournant la tête, fuyant mon regard flamboyant braqué sur lui. J'aurais pu le retenir, mais n'en fis rien, et revins à ma place, les bras fièrement croisés, la tête légèrement penchée de côté, les observant l'un l'autre avec la ferme sensation que je les avais tous les deux mis au tapis.

– Arrêtez toutes les deux, maintenant, s'il vous plaît.

Son ton était suppliant, presque, et il se passa la main sur le visage. Je n'y croyais pas mes yeux : vraiment?! Celui qui m'avait tant causé de tort, celui qui avait été le cauchemar de mes nuits, celui qui m'avait enfermée dans un placard et laissée stupéfixiée toute une nuit? Celui-là même que je venais de piétiner? Bien cachée en moi, Liz se délectait. Mes petits stratagèmes n'avaient pas été vain; j'avais vécu dans son ombre pour une bonne raison. Il me semblait que j'avais toutes les clefs en main, que je savais où faire mal et où blesser, et c'était un coup double que d'entraîner Haley Collins dans sa chute, qui m'avait récemment trop prouvée combien elle ne valait pas plus que lui, et qu'elle n'était qu'une sotte, une pauvre idiote amourachée d'un garçon détestable et aveugle, de surcroît.

De cette victoire je m'en gargarisai et il me parut tout naturel de continuer dans mon rôle, alors que le silence retombait entre nous, que les grands yeux d'Haley paraissaient s'embuer d'une seconde à l'autre et que Stephen ne savait tellement pas quoi faire qu'il se baissa pour... caresser Le Chat. Ce qui, lorsqu'on le connaissait, relevait de l'improbable. Je soupirai légèrement, jouant avec une des mes mèches de cheveux, que je tirais de sa masse après m'être passé les doigts dedans pour tenter de la démêler un peu.


- Dommage, je commençai juste à m'amuser! Pas toi, Haley?...

Grand sourire moqueur que je lui adressai avec ravissement : plus rien ne pouvait m'arrêter. Cette pente savonneuse et dangereuse, il y avait quelques temps que je m'y étais laissée glisser, et maintenant j'avais pris trop de vitesse et une énergie cinétique telle que plus rien ne me faisait peur. Je pouvais, si je le décidais, tout dévaster sur mon passage.

Je fis la moue lorsqu'ils s'accordèrent pour patienter là, alors que mes pieds me démangeaient, je voulais aller inspecter dehors, je voulais sonder le hall comme une aventurière, je voulais espionner les Mangemorts comme j'avais si bien appris à le faire. Aux prochaines vacances, Conrad allait être étonner : je ne serais plus celle qui se laisserait la première attrapée à cache-cache parce que je pouffais dans ma main ou bien que je n'avais pas une assez bonne technique de camouflage. Maintenant je savais exactement comment me fondre dans le noir, comment calquer ma respiration sur les bruits et les silences d'une pièce, comment attendre le moment idéal pour faire un mouvement dans l'ombre. Je n'avais pas peur - ou plutôt, si, j'avais peur, j'avais toujours peur, mais j'apprenais à la gérer - et si eux préférait croupir là c'était leur problème, mais je n'avais pas envie qu'on reste là à se regarder dans le coin des yeux alors que la situation avait atteint son paroxysme et que je ne pouvais plus trop rien en tirer.

Et puis, après que Collins ait mollement récupéré sa baguette, pour se donner une contenance j'imagine, quelque chose vint brutalement perturber l'équilibre précaire dans lequel nous nous trouvions. Au même moment je croisai le regard de Fray et j'eus l'impression de le regarder en vrai, pour la première fois depuis longtemps. Avait-il compris ce qui s'était passé quelques instants plus tôt? Si la victoire m'avait envahie et laissée pleine d'une joie sans bornes, je n'étais pas sûre de saisir le sens de tout cela et c'était un peu ce que voulait dire mon regard interrogatif, dénué de toute haine ou de toute provocation cette fois. C'était étrange, mais quand j'enlevais tout cela, que nous restait-il?... Je soutins son regard quelques instants, ne ressentant aucune gêne, et cela encore était une première.

Et puis d'un seul homme nous nous précipitâmes vers la porte que Haley - je crois - ouvrit; sous nos yeux le même spectacle que quelques mois auparavant, comme si le temps avait stagné. Je sentis ma respiration se faire hachée et mon coeur rata un battement alors que je scrutai la foule : des profs, des élèves, des mangemorts, des aurors apparemment, tous s'étaient retrouvés-là, à quelques pas de nous, pour donner cet assaut qui devait être celui de la fin.

La fin.

La fin pour moi n'avait aucune importance, et d'ailleurs, je n'avais pas pris part un seul instant à ce combat, trop perdue sur mon propre chemin pour oser emprunter celui des autres.

Mais
sa fin à elle...

Je poussai un cri strident et m'éjectai comme une furie de la petite salle, bousculant je ne sais qui sur mon passage, me lançant dans la masse des gens après avoir tiré ma baguette de ma poche sans penser à rien d'autre qu'à elle.

- Maman!!! m'égosillai-je, happée de droite à gauche, prenant des coups de coude, d'épaules, mais progressant tant bien que mal au cœur de ce nœud de vipères.

Il y avait comme un voile de peur qui battait devant mes paupières et je transpirais d'appréhension, de terreur : où était-elle? Que faisait-elle? Mon cœur battait à l'unisson du sien, je le savais, car malgré tout elle était ma mère et ma chair était la sienne, et j'avais un besoin vital de la retrouver et de m'assurer qu'elle allait bien. Je ne cessai de hurler dans la cacophonie, sans pouvoir me retenir, comme un enfant abandonné qui criait au désespoir :


- Maman!! MAMAN!!...

J'étais prête à me jeter comme une hyène sur n'importe qui, le pire des Mangemorts, qu'importe, si il comptait lui faire du mal. Je ne voyais rien d'autre que les visages que je reconnaissais - Kelsey, Lance,... - mais aucun ne m'intéressait.

Et puis, je l’aperçus. Près de l'entrée, elle se battait furieusement aux côtés d'un Auror, contre deux Mangemorts, et les sortilèges fusaient de toutes parts et m'éblouissaient. Prise d'un regain d'énergie je me jetai contre les gens pour me diriger vers elle mais fus poussée, je trébuchai, me rattrapai comme je pus... dans le dos d'un Mangemort qui, surpris, grommela et me visa mais je déviai son bras dans un ultime geste de défense, et il m'envoya bouler au loin d'un grand coup d'épaule. Je me cognai sur le sol, roulai un peu, sentis qu'on me piétinait, mais ne lâchai pas ma baguette : mes doigts étaient crispés autour d'elle, à un tel point qu'ils étaient figés. Hors d'haleine, je me remis sur pieds tant bien que mal, le regard tourné vers le même endroit, murmurant ces mêmes mots en boucle, comme s'ils m'étaient salvateurs :


- Maman, Maman, Maman...

J'en avais oublié Fray, Collins, et même Le Chat; seule m’apparaissait l'unique personne qui comptait réellement à mes yeux, malgré tous nos différends.
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Stephen Fray


Stephen Fray
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MessageSujet: Re: WORST. PLAN. EVER.   WORST. PLAN. EVER. Icon_minitimeDim 4 Mar - 1:43

« Je hais, et pourtant j'aime. Pourquoi ce dur partage, demanderas-tu peut-être ?
Je l'ignore ; mais je sens son étreinte, et je suis écartelé. »


Catullus.



Dans quelques instants le monde allait s'écrouler autour de nous mais à cette seconde précise, j'étais bien. J'avais passé mes doigts dans les poils du Chat, compté jusqu'à quatre, respiré un bon coup, et voilà. Comment expliquer cela… Voilà : j'avoue que ma connaissance dans le domaine de ce que les Moldus appellent “technologie” est assez limitée, mais je savais sur quel principe fonctionnait ce qu'ils nommaient un ordinateur – c'était tout bêtement un cerveau humain simplifié, de manière à pouvoir fonctionner de manière automatique. Parfois, un ordinateur se mettait à dérailler, alors il fallait simplement l'éteindre un moment et le rallumer, et tout fonctionnait à nouveau comme sur des roulettes. C'était précisément ce que je venais de faire. Chez moi, pas de grand "DONG" annonçant le démarrage, voilà tout – mais la machine repartirait quand même.

Il était temps d'ailleurs : car soudain, à l'extérieur de notre refuge, il y eut un grand cri, suivi de plusieurs autres qui exprimaient au choix la surprise, la colère ou l'horreur totale. Pas le moins du monde surpris, je me redressai sur mes deux pieds, le regard froid et déterminé. Bien. La rébellion fomentée par le corps enseignant – car vous vous doutez bien que Kelsey et Doherty, tous bons sorciers soient-ils, n'auraient pu organiser une attaque de cette ampleur seuls – arrivait enfin. Comme ils étaient bien moins nombreux que les Mangemorts, et à en juger par les sons qui nous parvenaient, je pouvais affirmer sans trop risquer de me tromper qu'ils étaient accompagnés de quelques Aurors qu'ils avaient dû réussir à faire pénétrer dans l'école (pas trop tôt).

Je savais ce que j'avais à faire. Premièrement, mettre Le Chat hors de danger – un petit sort très simple y suffit amplement. Deuxièmement : mettre le plus de Mangemorts au tapis.

Il était heureux que j'ai fait le vide avant que les événements ne commencent à s'enchaîner car j'avais laissé Haley Collins et Lizlor Wayland dominer ma raison pendant les minutes qui avaient précédé, et si j'avais été sous leur influence, mes réflexes en auraient été amoindris. Si bataille il devait avoir, alors il n'était pas question que je sois, comme à la précédente, envoyé au tapis au bout de quelques secondes. Tout ça parce que j'avais été trop lent, tout ça parce qu'au lieu de réagir avec ma tête, j'avais laissé les hurlements, et la panique qu'ils engendraient, paralyser mes muscles et plus important encore, mes neurones.

J'évacuai donc très rapidement et Collins et Wayland de mon esprit pour ne me concentrer que sur une chose : l'image de Taylord, torturée à quelques mètres de moi. La colère m'envahit immédiatement, cette même colère que j'avais ressentie – trop tard, bien trop tard – quand je l'avais aperçue dans son lit à l'infirmerie, si frêle, si meurtrie. Taylord n'était peut-être pas une enfant candide mais pressée au fond de ce lit, enfoncée sous les couvertures comme pour se cacher du monde, elle n'était rien de moins que l'image même de l'innocence frappée en plein cœur. Non, je ne laisserais pas ça se reproduire, et si jamais cette situation s'imposait, je l'arrêterais. Je ne me laisserais pas ralentir par des inquiétudes stupides, parce que ces filles me perturbaient l'esprit mais c'était sur Taylord et elle seule que je me concentrais à présent et Taylord me rendait fort…

… Mais soudain un bruit sourd retentit et m'arracha momentanément au calme fragile que j'avais peiné à reconstituer. Car voyez-vous, ce n'était pas un bruit ordinaire : c'était celui d'un corps projeté contre une porte. Et soudain cette porte se métamorphosa sous mes yeux en une autre ; Nottingham, que Winch avait fait valsé, l'enfonçait de tout son poids et ma main plaqué sur la bouche de Wayland étouffait son cri d'horreur tandis que je me mordais la langue pour ne pas céder à la panique à mon tour.

Comme si j'essayais de me remémorer un mauvais rêve, mon regard se porta machinalement sur Wayland et je croisai le sien – déjà vu, ne pus-je m'empêcher de penser en voyant ses yeux briller de ce même éclat que je lui connaissais à présent.

Non ! hurlèrent à l'unisson toutes les cellules qui composaient ma matière grise, c'est sur Taylord que tu dois te concentrer, sur ta rage ! Pas sur la pitié que t'inspire cette fille insignifiante ! N'avais-je donc pas vu ce qu'elle m'avait fait, quelques minutes plus tôt ? Comment étais-je censé veiller sur quiconque si elle…

Mais trop tard, Haley avait ouvert la porte, et mus par l'automatisme, nous avions suivi, et c'était comme si la bataille qui grondait à l'extérieur de notre petit abri nous avaient aspiré. Mais j'avais perdu ma concentration. J'hésitais. Non, non, non, il ne fallait pas ! Je savais ce qu'elle allait vouloir faire – et c'était du suicide – et je ne pouvais rien pour elle – et que je sois damné si je n'allais pas essayer quand même.


– MAMAN !!!
– Wayland, attend ! hurlai-je en repoussant les mains qui menaçaient de m'éloigner d'elle.

J'aperçus un Mangemort lever sa baguette pour lui lancer un sort, mais je fus plus rapide et l'assommai en pleine course.

(elle ne peut pas elle ne peut pas elle ne peut pas)


– STEPHEN !

Mon attention détournée – une fois de plus – je me retournai pour voir si Haley nous suivait. La panique me serra le cœur quand je me rendis compte qu'elle avait disparu – de quel côté ? Impossible à dire. Je m'arrêtai pour scruter la foule.

– Haley ! appelai-je, mais c'était sans espoir.

Il me restait encore une chance de rattraper Wayland mais en me retournant je vis que sa chevelure flamboyante était déjà très éloignée. J'étais pris entre deux feux. J'avais peur pour l'une comme pour l'autre et je ne savais pas laquelle avait le plus besoin de moi.
Qui choisir, celle qui avait peur de tout ou celle qui n'avait peur de rien ?











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