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Les vérités cachées [S.F]

 
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 Les vérités cachées [S.F]

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Taylord Reegan


Taylord Reegan
Élève de 7ème année



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Nombre de messages : 2576
Localisation : Ben regarde, sur ma licorne magique... Ah, tu la vois ? Okay, arrête le jus de citrouille alors, visiblement ça te fait pas que du bien.
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Particularités: J'ai dix doigts. C'est fou hein.
Ami(e)s: C'est comme la poussière d'étoiles. Si t'y prends pas gaffe, elle s'effrite entre tes doigts...
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MessageSujet: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeMer 16 Mai - 20:39

"Il n'y a pas de secrets dans la vie, juste des vérités cachées qui reposent sous la surface."



Les professeurs – à Poudlard en tout cas – ne faisaient jamais ce boulot pour être apprécié, on le savait. Mais Woodley ? Elle remportait le statut haut la main, et ce n'était pas un compliment, même si elle le prenait comme tel. Depuis le début je n'avais jamais apprécié cette bonne femme qui avait des manières et une façon d'enseigner qui se rapprochait de celle du goulag. Alors qu'on soit tombé sur elle pour avoir notre retenue – il ne fallait pas se biler – ça n'arrangeait pas les choses. Évidemment, son manque d'énervement face à mes piques m'agaça d'avantage et me donna encore plus l'envie d'être infernale. Quoi ?! Et elle ?! Elle se gênait peut être ?!

Je n'eus cependant pas le loisir de faire plus. Face à son silence j'allais rajouter une remarque bien désagréable en plus de celle que j'avais faite à peine quelques secondes plus tôt, mais une force invisible nous envoya Stephen et moi, contre le mur où nos corps firent un bruit sourd sous le choc. Je gardai les dents serrées pour ne pas lui montrer la souffrance que je ressentais, puisque nos têtes aussi avaient frappé, et cela sans douceur. Je ne pouvais pas bouger mais ça n'empêcha mes muscles de se tendre sous le coup de la frustration et de l'impuissance, deux sentiments, non seulement que je détestais, mais qui en plus de ça ne faisait pas bon ménage.

- Alors comme ça, c'est là-dedans que Godric Gryffondor plaçait tous ses espoirs? Je n'ai jamais vraiment compris sa subtilité. Suis-je bête! Il n'y en a aucune.

Sans ciller, je mordis l'intérieur de mes joues pour oublier la douleur que me procurait ses ongles sur ma peau, parce que je refusais de lui laisser ce petit plaisir mesquin de crier, gémir, ou que sais-je encore, sous la douleur. C'était insupportable. Insupportable qu'elle me rabaisse, qu'elle nous rabaisse, alors qu'il n'y avait rien à sauver chez elle. Les Serpentard étaient mieux c'est ça? Oh mais oui, c'est tellement fun de faire des coups en douce et de ne pas avoir de tripes, et de chier dans son froc par peur d'assumer les conséquences de ses actes.
Je n'étais pas comme elle, moi.

Mais tout ça ne faisait que commencer.
Comme un cauchemar qui ne se termine jamais. Celui où on se réveille et on pense que c'est fini alors qu'en fait ce n'est qu'un autre rêve tout aussi désagréable dans lequel tout nos membres sont lourds et dur à porter et où il est impossible de crier lorsque le danger approche. Elle siffla encore une fois, pour nous libérer de son emprise quelques instants, dans l'unique sadique but, je le savais, de nous donner l'illusion de goûter à la liberté retrouvée, avant de nous retenir prisonnier comme des chiens. Je ne comprenais pas. Je ne comprenais pas comment on pouvait trouver un quelconque sentiment de jouissance là dedans, et le fait de ne rien pouvoir faire ne fit que qu'augmenter ma colère d'un cran. Je détestais qu'on fasse ce qu'on voulait de moi, comme si je n'étais qu'un jouet sur lequel on s'acharnait, alors que j'avais toujours refusé de me faire dompter par qui que ce soit, dès lors que c'était contraire à ma liberté d'action et mes principes. Woodley ne faisait pas exception. Je soufflai fort pour exprimer mon agacement, en me faisant violence de ne rien dire affin de ne pas aggraver notre cas, parce qu'on s'enfonçait à présent dans les cachots et que ça ne disait rien de bon. La témérité d'accord. L'inconscience ? On en avait eu notre dose pour la soirée.

Je fis exprès cependant de traîner les pieds pour une fois de plus montrer mon exaspération, et son indifférence me faisait l'effet d'un électrochoc, comme tout à l'heure. Elle n'avait pas le droit de faire ça ! Okay, son putain de règlement on y était passé outre, pas de quoi péter plus haut que son cul, parce qu'elle était trop conne et qu'elle ne se sentait plus. On était pas à sa disposition ! Elle n'avait pas le droit.

L'odeur de l'humiliation.
Je toussai à cause de la puanteur lorsque nous pénétrâmes dans la pièce obscure dans laquelle elle nous avait emmené. Un instant plus tard, je sentie ma baguette magique sauter de mes mains sans que je lui ordonne pour atterrir dans les doigts osseux de Woodley. Encore. Mieux. Vraiment. J'étais au bord de la crise de nerfs. Mais non, je devais rester là sans bouger, pour attendre sa sentence, comme un pantin. Ça me rendait complètement folle. J'avais envie de lui sauter dessus pour lui prouver qu'elle pouvait bien prendre autant de baguettes magiques qu'elle le voulait – même si je n'allais pas préciser que je me sentais amputée de quelque chose sans mon bâton – que je savais très bien me servir de mes poings, et que tout comme elle je n'avais aucun scrupules s'il fallait employer la manière forte. J'essayais de me contenir comme je le pouvais en refermant les doigts dans mes paumes, en songeant à Stephen à mes côtés, dans la même galère, qui était un peu comme une sorte de pilier, de soutien. Ah, mais non, c'est vrai. On venait de s'engueuler comme du poisson pourri. D'où l’apparition de Woodley aussi.
J'étais démunie.
Génial.

- Savez-vous pourquoi cette serre se compte parmi les serres désaffectées? La terre utilisée était beaucoup trop caillouteuse et faisait mourir toutes les Mandragores. C'est désolant, n'est-ce pas? Eh bien, ces cailloux? Vous allez me les trier, me les laver, me les compter et me les numéroter et me les ranger par paquets de 100 dans ces seaux vides. Moi aussi j'avais des ongles et je pensais à toutes sortes de tortures à son égard, et il n'y avait franchement qu'un pas à franchir avant que je ne les mette à exécution. De toute façon la situation ne pouvait pas être pire. Oui donc avec mes ongles j'allais lui crever les yeux, et ses petits cailloux de merde j'allais les lui faire manger un par un et la forcer à les croquer pour qu'elle en fasse des miettes, avant de les avaler, et ses dents aussi ne seraient que poussière, puisqu'elles se casseraient dessus. Ah ouais, elle aussi elle allait moins rigoler.. ! Ah! J'oubliais. Inutile d'essayer de sortir, je vous emprisonne à l'aide d'un sortilège bien trop complexe pour vos deux cerveaux réunis. La porte s'ouvrira d'elle-même lorsque vous aurez terminé. Et vous viendrez chercher vos baguettes demain dans mon bureau. A la condition que vous vous soyez lavés au préalable, évidement. Cet endroit est une infection.

Ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase. J'abandonnai le masque que j'avais peint sur le visage pour lui jeter un regard désemparé, la bouche entrouverte, prête à répliquer, mais ne trouvant rien à redire. Ce n'était pas possible, elle ne pouvait pas faire ça. Le dernier coup d’œil qu'elle nous lança me donna envie de hurler, parce que oui, elle avait bien préparé sa petite affaire la sale garce - et la porte se referma sur elle.

Je n'attendis pas qu'on entende ses pas s'éloigner complètement dans le couloir pour me jeter sur la porte, et essayer de l'ouvrir, mais mes mains glissaient sur la poignée et tout mon corps tremblait. Réalisant qu'il n'y avait aucune possibilité pour nous de fuir je commençai à tambouriner contre le bois de la porte et à donner des grands coups de pieds dessus mais cela n'eut même pas le mérite de ma calmer et au contraire, la sensation d'humiliation se faisait elle aussi de plus en plus grande, car j'étais en train de prendre conscience de la charge du travail qu'elle nous demandait de faire. Comment pouvait-elle se regarder dans un miroir sans donner un coup dedans pour ne plus avoir à supporter le reflet de la honte qui habitait ses traits ? C'était parce que cette femme ne ressentait strictement rien ; comment se faisait-il qu'elle soit prof ?! Surtout, pourquoi est-ce que tout le monde la laissait faire sans rien dire ?! Depuis quand on séquestrait les élèves comme ça ?! C'était interdit, je le savais, mais personne n'avait l'air de se soucier de ce genre de choses, tout le monde disait amen à Hazel Woodley et ce comportement me donnait envie de vomir.

Je sentais que c'était en train de venir. Je sentais que ma respiration se faisait courte et de plus en plus hachée, synonyme de la crise de panique qui me guettait depuis tout à l'heure. Je ne pouvais pas. Et ce n'était pas aujourd'hui que ça allait changer ; l'odeur me donnait des haut-le-cœur et j'avais l'impression que j'étais en train d'étouffer alors que le froid venait me glacer jusqu'en dessous de la peau, me faisant frissonner. C'était comme si la pièce pourtant spacieuse était en train de devenir de plus en plus étroite pour m'emmurer vivante. Il faisait noir malgré les bougies dont la flamme dansait timidement. Il faisait noir.
Beaucoup, beaucoup trop noir.

C'était comme mes premiers mois à Poudlard, mais en pire. Lorsque à l'époque, j'avais passé mes deux mois d'été à faire ce que je voulais sans demander l'avis de personne et d'aller m'enfuir avec mon cheval dans les grandes plaines qui ne se terminaient jamais, où il faisait beau et chaud et où aucune limites ne m'étaient imposées. Les limites justement, c'était moi qui me les donnait toute seule, c'était moi aussi qui fixait mes propres règles et je me fichais bien des recommandations de ma tante, à son plus grand désespoir d'ailleurs. Puis j'étais arrivée à l'école, où même s'il y avait un parc, comparé à là où j'habitais, il était ridiculement petit, et on avait pas le droit de sortir de l'enceinte du château, ce qui avait été une première chose. Mais en plus on nous imposait des couvres feu et d'autres conneries dans le genre dont je n'avais pas l'habitude, alors forcément le choc avait été un peu rude parce c'était comme si on était parqué dans des enclos à chèvres finalement. Si je m'y étais faite avec le temps, il ne fallait pas trop pousser non plus. Ce soit pourtant, c'était fait.

Les endroits clos comme celui ci, je ne supportais pas ça. Souvent, j'arrivais quand même à gérer, parce que même si une porte était fermée, il y avait souvent des fenêtres, et les fenêtres on pouvait les ouvrir en cas de besoin. Les portes aussi d'ailleurs on pouvait. Lorsqu'il y avait toujours une alternative, ça allait. C'était pour ça que je n'en avais jamais parlé à personne, ah si, à part à Chuck, je m'en souvenais parce que ce jour là justement, ironie du sort, on avait dû récurer la volière – à cause de lui en plus – mais pareil, même si Kelsey avait cru bon de nous menacer avec son gros chien méchant, dans la tour il y avait il y avait des lucarnes. Et puis on ne l'avait même pas faite nous même puisque Chuck avait trouvé une solution pour utiliser la magie alors que ça nous était interdit – il lui arrivait d'avoir des bonnes idées. Tout ça pour dire qu'il n'avait pas eu l'air de me prendre trop au sérieux alors que ce n'était pas des conneries et que ce genre de situation m'affectait vraiment.

Je me laissai finalement lentement glisser par terre, en espérant que ça améliorerait quelque chose, mais ce ne fut pas le cas. Je levai péniblement les yeux vers Stephen.

- Désolée. Je ne peux pas faire ça, dis-je d'une voix décousue en parlant de la tâche qu'il nous était demandé d'accomplir. Ça ne servait à rien, à part pour nous faire tomber dans la folie peut être et je refusais de jouer le petit jeu de Woodley plus longtemps. Là où ça devenait terrible, c'était que si je voulais sortir d'ici, je n'allais pas avoir le choix. J'étais coincée, me sentais misérable, comme une petite souris prise dans un piège.

C'était impossible.
Je ne pouvais pas m'y résoudre. C'était toute ma fierté, tout mon orgueil qui était touché, et me dire que le professeur de sortilèges avait gagné sur toute la ligne me débectait au plus haut point.
Je ramenai mes genoux vers ma poitrine pour les attraper et me cacher dedans. Je voulais fermer très fort les yeux pour les rouvrir ensuite, et voir que j'étais bien au chaud dans la salle commune des Gryffondor.
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Stephen Fray


Stephen Fray
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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeSam 26 Mai - 0:49

Les vérités cachées [S.F] Usbstephentaylord

C'était un fait bien connu : les professeurs de Poudlard étaient recrutés, officiellement, pour leurs aptitudes, officieusement, pour leur degré de folie pure. A commencer par la directrice, le professeur Wayland, qu'on ne voyait pas beaucoup mais croyez-moi, il fallait être dingue pour avoir engendré une telle descendance. Et elle était comme larrons de foire avec le professeur Jones, qui, selon la la légende locale, se nourrissait exclusivement de chocolat et mettait une bonne note à quiconque lui en offrait la veille d'un contrôle. Sans oublier la redoutable Meryl Kelsey, qui ressemblait plus à une mannequin qu'à une prof et captait l'attention de ses élèves en croisant les jambes quand elle s'asseyait sur son bureau (un stratagème d'une efficacité diabolique). Sawyer, son double masculin, était aussi séduisant avec de la terre dans les cheveux qu'en costard-cravate – j'étais sûr qu'il avait été à Poufsouffle, d'ailleurs. MacFarlan buvait du whisky à l'interclasse, Doherty sortait un mot tous les cent ans, et Nakamura… ne parlons pas de Nakamura.

Mais aucun de tous ces névrosés chroniques et autres clowns n'auraient pu rivaliser avec Woodley. Oubliez les Mangemorts, les franc-maçons, George Bush, High School Musical et l'inventeur de la bombe atomique :
Hazel Woodley était le mal. Elle souriait toujours quand quelqu'un trébuchait dans l'escalier, ses longues robes noires semblaient faites de fumée et lui donnaient l'air encore plus effrayant, et elle conservait des têtes réduites dans son bureau (du moins, c'était ce qui se disait). Elle était l'incarnation parfaite de ce professeur qu'on trouve dans chaque école de par le monde, dont la seule, unique et sadique volonté est de torturer ses élèves autant que la loi le permet. Ses méthodes incluaient l'humiliation, le viol de l'esprit, le harcèlement moral, l'emprisonnement, la violence physique dans une moindre mesure et les travaux forcés. Bien sûr, elle aimait les combiner pour obtenir des punitions toujours plus abominables – et sa discipline, les sortilèges, donnait le champ libre à son imagination délirante et maléfique. Peut-être y'avait-il un concours chaque année ? Le prix de la torture la plus originale ? Pour cette idée de nous traîner en laisse par les poignets comme des chiens, je lui aurais remis la palme (ou un bouquet de ciguë).

Hélas, pour l'instant, il n'y avait pas grand-chose à faire. Je n'avais pas vraiment envie de rire. Par-dessus tout, le comportement très “Gryffondor” (sous-entendus : stupide) de Taylord en cet instant précis, s'il m'aurait amusé dans d'autres circonstances, me tapait franchement sur les nerfs, même si la colère que je ressentais envers elle avait plus ou moins disparu, remplacée par la honte et une sorte de malaise diffus qui me donnait des picotements dans les doigts et les orteils. Avait-elle besoin de faire constamment de la résistance ? Ce genre de réaction faisait le jeu de Woodley qui aimait par-dessus tout remuer le couteau dans la plaie – ne le savait-elle pas ? Je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir, cependant. Elle était probablement déboussolée, et c'était en grande partie ma faute.

Woodley nous conduisit à travers les cachots, qui à ce stade s'apparentaient à un véritable labyrinthe. J'avais un bon sens de l'orientation et je connaissais le château comme ma poche, mais cette partie me donnait toujours la chair de poule – je ne pouvais m'empêcher de l'assimiler à Candy. J'étais sûr qu'elle menait des expériences pas nettes dans les profondeurs de Poudlard, à côté desquelles mes propres affaires feraient figure d'amateurisme. De manière générale, il était toujours un peu angoissant pour un Gryffondor ou un Serdaigle de s'aventurer aussi loin dans les sous-sols, le manque d'habitude n'aidant pas. Enfin, Woodley nous conduisit dans un cul-de-sac, et nous arrêta devant une porte qui avait l'air de ne pas avoir été poussé depuis des siècles. Et la salle qui se trouvait derrière n'était pas dans un meilleur état. Le froid me fit frissonner – évidemment, nous étions tous deux seulement vêtus de chemises et de vestes qui ne suffisaient pas à nous protéger de l'humidité qui régnait dans cet endroit.

Elle fit ensuite apparaître bassines, seaux d'eau, brosses et crayons, et sans crier gare, nous priva de nos baguettes. Je m'y étais préparé, mais lorsque sa main crochue se referma sur la mienne, je sentis mon cœur se soulever.

– Savez-vous pourquoi cette serre se compte parmi les serres désaffectées ? La terre utilisée était beaucoup trop caillouteuse et faisait mourir toutes les Mandragores, nous apprit Woodley sur un ton léger, comme si nous étions des touristes dans une grotte préhistorique et elle le guide qui nous racontait la vie des hommes de l'époque. C'est désolant, n'est-ce pas ?

Malgré son ton clairement cynique et le peu d'enthousiasme évident de Taylord, je dus masquer mon intérêt pour la chose – j'étais privé de baguette désormais, mais si quelqu'un savait se servir de son environnement, c'était moi. Les Mandragores mourraient dans cette serre : rien ne disait qu'il n'y avait pas une autre plante qui ait survécu. Et Woodley n'avait pas pris soin de vider mes poches – grossière erreur.

Elle nous expliqua ensuite que nous étions censés faire. Compter des cailloux. Sans magie, bien sûr. Eclairés par quatre bougies.
Classique.

– Ah ! J'oubliais. Inutile d'essayer de sortir, je vous emprisonne à l'aide d'un sortilège bien trop complexe pour vos deux cerveaux réunis. La porte s'ouvrira d'elle-même lorsque vous aurez terminé. Et vous viendrez chercher vos baguettes demain dans mon bureau.

Demain ? Mais bien sûr.

– A la condition que vous vous soyez lavés au préalable, évidement, ajouta-t-elle en fronçant le nez. Cet endroit est une infection.

Je plissai les yeux en la regardant sortir – les infections c'était ma spécialité, et si j'attrapais quoique ce soit en accomplissant cette tâche ingrate, je me ferais un devoir de le lui refiler sans attendre.

– Quelle garce, soufflai-je une fois qu'elle fut sortie. Celle là je te jure que je ne quitterai pas cette école sans lui laisser un petit souvenir de moi… Taylord ?

Je me retournai et réalisai que Taylord s'était laissée choir au sol et avait perdu toute combativité, les genoux repliés devant elle et ses bras les entourant, comme une protection contre une menace invisible. Une boule d'angoisse se forma aussitôt dans ma gorge – ça ne sentait pas bon, pas bon du tout. Face à l'adversité, Taylord Reegan avaient deux réactions classiques. La première, celle qui revenait le plus souvent et qui signifiait qu'elle s'en sortait bien, c'était la colère et le refus de se laisser abattre. C'était la vitesse haute – mais il y avait aussi la vitesse basse, et c'était le mode sur lequel elle était en train de basculer là, maintenant. La Taylord qui ne mange pas. C'était avec ses yeux qu'elle me regardait.

– Désolée, dit-elle. Je ne peux pas faire ça.

C'était sans appel.

Je m'accroupis maladroitement, ne sachant que dire – je n'étais décidément pas doué pour ce genre de choses. J'avais du mal à soutenir son regard et baissai les yeux sur son éternel chemisier à carreaux. Je m'aperçus qu'elle tremblait – le froid, la pression ? – et eus l'idée de retirer ma veste pour l'en couvrir. C'était une de ces vestes à épaulettes que j'affectionnais parce qu'elle me donnait l'air plus carré (je n'aimais pas les rondeurs). Taylord, toute menue qu'elle était, avait l'air de flotter dans le vêtement qui lui donnait une carrure de militaire, tandis que je faisais passer ses bras dans les manches et fermai les boutons un à un jusqu'au cou, écartant sans un mot les mèches de cheveux bruns qui me barraient la route. Etrange comme ses cheveux différaient de ceux de Wayland tout en me les rappelant – ses boucles dorés m'évoquaient toujours une éruption solaire ; ceux de Taylord étaient d'un brun chaud qui rappelait le bois des feux de cheminées. Je les fis passer à l'intérieur du col pour protéger son cou, mes gestes secs, précis et efficaces comme toujours. J'étais désormais concentré sur cette nouvelle tâche bien concrète que j'avais dors et déjà baptisée « opération : maintenance de température corporelle de Taylord Reegan ». Voyons, qu'est-ce que je pouvais faire de plus… lui passer ma chemise ? Non, j'avais suffisamment fait tomber la chemise ces derniers temps comme ça…

– Tu as déjà songé a te faire un carré ? Ça t'irait bien, tentai-je de plaisanter en indiquant l'angle bizarre que prenaient ses cheveux rentrés dans la veste.

J'avais voulu détendre l'atmosphère mais ni elle ni moi n'avions le cœur à rire. Nous étions seuls, perdus dans les bas fonds de l'école, dans une quasi-obscurité, il faisait un froid glacial, l'odeur était infecte, les murs couverts de moisissures, et j'étais convaincu que dans dix ans nous serions encore là à compter des cailloux si personne ne venait par miracle nous tirer de là. Et par-dessus tout, une barrière s'était installée entre nous et de loin ce qu'il y avait de pire.

– Taylord, je vais être honnête : je ne supporte pas de te voir dans cet état, soupirai-je en m'asseyant face à elle. Ne t'inquiète pas pour ça. (J'indiquai d'un geste las le tas d'objets que nous avait fourni Woodley.) Si tu ne peux pas, je m'en chargerai seul. Après tout, c'est ma faute si nous sommes ici, ajoutai-je, résolu.

Ça m'apprendra à me laisser dominer par mes hormones.

– Dis-moi juste ce qu'il faut que je fasse pour t'aider.
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Taylord Reegan


Taylord Reegan
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Localisation : Ben regarde, sur ma licorne magique... Ah, tu la vois ? Okay, arrête le jus de citrouille alors, visiblement ça te fait pas que du bien.
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Particularités: J'ai dix doigts. C'est fou hein.
Ami(e)s: C'est comme la poussière d'étoiles. Si t'y prends pas gaffe, elle s'effrite entre tes doigts...
Âme soeur: Il a un petit faible pour les cow-girls.

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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeLun 28 Mai - 14:40

Je manquais d'oxygène, j'en étais sûre. Et puis, l'air qu'on respirait dans ces serres n'en était même pas, tellement il était humide, lourd et vous remplissait les poumons d'une substance douteuse dont on ne pourrait pas se débarrasser. Comment pouvait-on avoir à l'idée de faire pousser des mandragores ici ? Pas étonnant qu'elles n'aient pas fait long feu, car même s'il était question de terrain, comment pouvaient-elles grandir puisqu'il n'y avait pas un minimum de lumière afin de les entretenir ? C'était comme une punition. Comme si c'était de la vermine qu'on avait voulu abandonner ici parce qu'on ne savait pas quoi en faire d'autre parce qu'elles prenaient trop de place.
Un peu comme nous.

C'était comme si on me mettait des élastiques autour des bras, du ventre, des jambes, du cou, que ça se resserrait petit à petit, que ça me coupait la circulation du sang, que ça me montait à la tête, me donnait le tournis et m'empêchait de respirer. Et c'était encore pire quand je me disais que quand bien même nous arrivions à sortir d'ici un jour, il y aurait tout les cachots à traverser, éclairés seulement par la lumière des torches – quand il y en avait d'accroché au mur – et qu'il y avait peu de chance qu'on retrouve la clarté du soleil un jour. Pris dans le profond trou d'un puits et où il n'y avait aucune corde pour nous permettre de remonter.

J'inspirai fort à chaque fois, mais avait toujours le sentiment que ce n'était pas assez, malgré l'odeur pestilentielle qui me donnait l'impression que j'allais renvoyer mon repas du soir sans plus tarder. Ce que j'allais pourtant tenter de me retenir de faire, car déjà qu'ici, tout était désagréable, rajouter un désagrément de plus n'était pas nécessaire... J'arrivais tout juste à dire que faire mumuse avec des cailloux, c'était trop me demander, que je préférais encore les manger tous un par un, que de devoir faire des comptes d'apothicaire, et faire entendre raison à Woodley... C'était une sensation qui me faisait contracter les muscles bien plus encore, jusqu'aux poils de mes avants bras qui se hérissaient eux aussi de dégoût. Je regardais sans le voir Stephen qui s'installait devant moi et voulus protester lorsqu'il enleva sa veste pour me la mettre sur les épaules, mais je sentais que la moindre parole trop haute, le moindre geste trop brusque me ferait perdre mes moyens d'un moment à l'autre. Parce que je connaissais le processus pour l'avoir déjà vécu et je préférais encore me recroqueviller en boule et attendre le déluge, qu'exploser dans le vide.
Qui nous entendrait de toute façon ?

Alors je me laissais faire comme une poupée, tressaillant de temps à autre, sous le contact fin de ses doigts longs. J'étais ramollie, mes os étaient lourds, trop lourds pour que je puisse les porter, et pourtant je savais que j'étais capable de bondir, de me tendre à la moindre contrariété. Dans ce passage d'un état à un autre, il n'y avait qu'un pas, comme si j'étais sur une corde raide sur laquelle il fallait marcher avec précision et que si je ne prenais pas garde, j'allais plonger un bout de pied dans le vide, entraînant ma chute.


– Tu as déjà songé a te faire un carré ? Ça t'irait bien.


Je secouai la tête doucement, en signe de négation, et je me voûtai un peu plus, car ça me laissait croire, qu'ainsi, je gagnais une défense en plus.

- Je les aime bien comme ça... répliquai-je faiblement, mes yeux s'arrondissant légèrement, comme si Stephen allait me sortir une paire de ciseaux géants de nul part – ce qui n'était pas si improbable que ça puisque qu'il devait bien y avoir un sécateur, des trucs comme ça dans des serres – pour faire un sort à mes cheveux, sans plus attendre.

Tout ça, en plus du reste, je ne le supportais pas. Je pouvais être presque sûre que si je tendais le bras dans sa direction, qu'il y aurait un barrage invisible, mais puissant, qui m'empêcherait d'aller plus loin, parce que pour la première fois, nos chemins divergeaient complètement. Pourquoi tellement de choses avaient-elles changé ? Quand cela avait-il vraiment commencé ? Là dessus, j'avais ma petite idée, et elle me déplaisait – je voulais qu'elle soit fausse. Je continuais de croire qu'il était tout à fait possible de réunir toutes les personnes que j’appréciais un peu plus que de raison autour de moi, comme un cercle protecteur qui ne tombait jamais, et non pas qu'il soit obligatoire de perdre un être cher pour en gagner un autre. Ce n'était même pas un échange équivalent d'ailleurs parce que même si j'avais Chuck à mes côtés, tout les autres s'évaporaient un à un, faisant donc franchement basculer la balance d'un seul côté. Et je ne voulais vraiment pas que Stephen la fasse pencher un peu plus.


– Taylord, je vais être honnête : je ne supporte pas de te voir dans cet état.


Je baissai les yeux résignés. Il n'y avait rien à faire.
Rien à faire.


- Ne t'inquiète pas pour ça. Si tu ne peux pas, je m'en chargerai seul. Après tout, c'est ma faute si nous sommes ici.

Ce n'était sûrement pas voulu, cependant, j'étais encore plus mal à l'aise si c'était possible. Stephen avait peut être envoyé pêter le tonneau dans un grand bruit, ce qui avait dû causer en partie notre perte, mais nous avions élevé la voix tout les deux. Et puis pour couronner le tout, ça n'avait pas dû arranger les choses que je me frotte délibérément à Woodley, avec les derniers morceaux de fierté et d'orgueil qu'il me restait.
Maintenant, c'était plutôt de la poussière...


– Dis-moi juste ce qu'il faut que je fasse pour t'aider.

- Je veux sortir d'ici
, appris-je alors que ma lèvre inférieure tremblait, même si ce n'était pas une grande nouvelle.

Mais après tout, la bêtise avait l'air d'être le thème de la soirée, et ce n'était pas totalement incohérent ce que je lui disais – il n'y avait rien qui puisse plus m'aider en cet instant que de me faire respirer à l'air libre dans le parc de l'école. C'était tout ce que je voulais. Je jetai un nouveau coup d’œil à la porte qui n'avait toutefois pas voulu céder sous mes intimidations. Rien ne semblait pouvoir la faire sortir de ses gongs.

- Comment on va faire ? demandai-je alors, parce que je n'arrivais décidément pas à me résoudre à cette simple perspective de trier des pierres que Woodley prendrait à malin plaisir à mélanger de nouveau pour un prochain élève qu'elle enverrait en retenue ici.

L’abattement laissait progressivement la place à la panique, la vraie. On appuyait fort avec une brique sur ma cage thoracique pour que je ne respire plus, alors j'essayais de prendre l'air plus rapidement, mais c'était encore pire car ce n'était jamais assez, parce qu'on on allait rester enfermés ici pour toujours et on finirait par se faire bouffer par les rats qui se cachaient dans les recoins de la serre mais qui n'osaient pour le moment pas encore se montrer à cause de la lumière des bougies. Cette fois ci, c'en fut trop, et je ressentis le même désir, comme avant que la professeur de Sortilèges ne vienne interrompre notre échange dans la réserve de potions. Lorsque la branche avait été prête à se plier pour se briser et me laisser rejoindre Stephen, parce qu'il n'y avait plus d'accrochages pour nous boucher la vue à tout les deux. Je voulais seulement un peu de chaleur corporelle contre la mienne, juste sentir un peu de vie pour ne pas perdre complètement la boule, pour me rassurer, pour me dire qu'il y avait toujours une porte de sortie.

- Tu vas pas me laisser toute seule ici ?
Questionnai-je, effrayée et tremblotante de me dire qu'il pouvait mettre ces menaces à exécution.

Je n'attendis pas et me blottis contre Stephen en passant mon bras sous le sien et m'agrippant à son poignet, comme ça, je pouvais enfin me raccrocher à quelque chose qui existait vraiment, qui m'obligeait à ne plus trébucher, qui ne deviendrait pas cendre sous mes doigts. Je posai ma tête sur son épaule.

- Ça me rend folle d'être enfermée, lui avouai-je à demi mots. Je fermai les yeux. J'avais toujours l'espoir que lorsque je les rouvrirai, je verrai les grands champs du ranch de ma tante aux Etats Unis. Puisque c'était le moment de faire des confessions, je rajoutai, pendant que j'en avais encore l'audace ; Je voulais faire de la peine à personne, tu sais... sans évidemment évoquer directement le sujet sensible Chuck.

Je ne voulais faire de la peine à personne.
Pas à Lilian, pas à Scott, pas à Stephen...
A personne.
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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeMer 30 Mai - 16:10


Bien des philosophes ont écrit sur la notion de point de vue et la manière dont chaque individu, selon sa culture, son éducation, sa propre nature, son héritage biologique, etc., aborde et traverse une expérience différemment de ses pairs. Au risque de passer pour un hurluberlu de première (même si je crois que le mal est fait depuis longtemps), j'admets que la situation ne m'inquiétait pas plus que cela. Contrairement à la plupart des gens je n'avais jamais eu à affronter la peur irrationnelle du noir ou de la solitude. Tout juste avais-je connu quelques angoisses enfantines. Cela n'avait rien d'étonnant : outre ma singulière capacité à rationaliser les phénomènes de la vie courante depuis mon plus jeune âge, il fallait prendre en compte le fait que j'avais grandi entouré de ces phénomènes. La solitude ? Ce n'était pas tous les jours très agréable, mais on s'y faisait. C'était loin d'être une épreuve insurmontable. Le noir ? La maison y était systématiquement plongée, nuit et jour ; même quand les rideaux étaient ouverts (ce qui n'était pas souvent le cas ; la lumière trop vive dérangeait ma mère quand elle se reflétait sur le poste de télévision), les fenêtres trop petites peinaient à laisser entrer quelques rayons de soleil, et la grisaille de Londres, mélange des nuages de pluie et des nuages de fumées qui semblaient inévitablement liées à toute invention Moldue, achevait de plonger les lieux dans l'ombre. Et même sans cela, la maison elle-même semblait rejeter toute lueur extérieure… Comme si elle était habitée depuis trop longtemps – non par le noir, mais par le gris délavé de la poussière qui, malgré les efforts de Candy, revenait sans cesse à la charge, adversaire paresseuse et implacable, pénétrant les meubles, les murs et, si l'on n'y prenait pas garde, les hommes – ôtant les couleurs et les remplaçant toutes par la sienne, ce gris uni, sans passion, jusqu'à ce que tout autour de vous ait un goût de rien. Pire que le noir (et ce qui est censé s'y cacher), était ce vide, cette fatigue de l'âme qui vous prenait un jour et vous rongeait lentement, jusqu'à faire de vous quelque chose de ni vraiment vivant, ni vraiment mort.

Maintenant, cette serre était peut-être lugubre, et dans les coins sombres on trouverait sans nulle doute ce qui, selon les critères humains, doit naturellement provoquer horreur et répugnance. Mais je n'étais pas plus effrayé que si je m'étais rendu à la bibliothèque. Nous étions prisonniers de ce monde miniature, qui avait progressé à sa manière dans le temps, évoluant pour survivre. La présence de rats signifiait seulement qu'ils avaient de quoi se nourrir. Les plantes grimpantes aux murs, qu'il y avait de l'eau (évidemment, nous étions sous le lac, me direz-vous). Mais ce que je veux dire, c'est que cet endroit, aussi sale et puant et humide et froid soit-il, n'était pas vide. Pour ce qui était de la peur de rester enfermé ici à tout jamais, elle était bien sûr irrationnelle – Woodley pouvait bien essayer de nous faire croire ce qu'elle voulait, si au matin, on constatait notre disparition, elle devrait en répondre si elle tenait à conserver son emploi (et elle y tenait, bien sûr ! quel meilleur poste que celui de professeur pour torturer des enfants ?). Quant aux bougies, elles ne risquaient pas de s'éteindre, Woodley tenant à ce que nous accomplissions notre travail, ce qui aurait été impossible dans le noir. Le plus inquiétant était peut-être les rats, mais il devait y en avoir bien moins que ce que nos esprits échauffés pourraient s'imaginer – Poudlard n'était pas une école de sorcellerie pour rien après tout.

– Je veux sortir d'ici.

Malheureusement, Taylord ne semblait pas partager cette logique. J'aurais voulu la rassurer, partager avec elle ma façon de voir les choses dans l'espoir qu'elle parviendrait à dominer ses vieilles terreurs. Le moi de l'année dernière l'aurait peut-être fait – le moi de notre rencontre encore plus certainement. Mais à présent, je m'en sentais incapable et je cherchais mes mots. J'avais l'impression d'avoir perdu ce lien privilégié avec Taylord, qui m'avait toujours donné le sentiment de lui être utile, de lui changer les idées, d'être cette personne un peu spéciale qu'elle allait voir si elle avait eu une dure journée, une baisse de régime, une dispute, pour rire un bon coup et oublier ses tracas. Juste un ami sur qui on peut compter. Cette illusion avait volé en éclats en même temps que ma main avait envoyé valser le tonneau tout à l'heure et plus aucun mot de réconfort ne me venait à l'esprit. Seule m'habitait, désormais, la sensation affreuse de n'être d'aucune utilité. Peu importe ce qui sortirait de ma bouche, ce serait forcément déplacé, et il s'en suivrait ce long silence tendu des mauvaises blagues faites entre deux étrangers lors des cocktails mondains.

– Comment on va faire ?

Le tremblement de ses lèvres et de ses mains ; sa voix plus aiguë que d'ordinaire ; ses yeux grand ouverts – tout semblait annoncer la crise de panique. Et j'étais censé avoir peur de quelques rats qui se cachaient dans un coin ??? Taylord était en train de lâcher prise et alors que j'avais attendu des années ce jour où elle me laisserait enfin accéder à une infime part d'elle-même, à présent, j'étais terrifié. Tout compte fait, je n'étais vraiment pas la bonne personne – si seulement une de ces copines avait été là, ou même Scott ! Scott était la preuve vivante qu'on pouvait être à la fois brillant, sain d'esprit et humain. Il aurait été parfait dans cette position. Sans ma baguette, je me sentais encore plus impuissant et il fallu que j'ailler puiser dans toute ma force de volonté pour ne pas céder à cette panique contagieuse.

– D'abord, nous allons faire en sorte que tu te calmes, répondis-je enfin, le plus posément qu'il m'était possible, tandis que j'essayais de capter son regard. D'accord ? Respire à fond…
– Tu ne vas pas me laisser toute seule ici ?

Si elle m'avait mis une gifle, je crois que je n'aurais pas réagi différemment.
Le masque de sérénité que je m'étais forcé à afficher s'écroula comme un château de cartes, ne laissant que stupeur. Comment pouvait-elle penser cela une seule seconde ?? Trop secoué pour bouger, je la laissai s'approcher sans faire un geste. Elle me surprit encore en se blottissant contre moi, une main se refermant autour de mon poignet et le serrant si fort que j'aurais eu de quoi m'inquiéter au sujet de ma circulation sanguine. Mais j'étais bien trop hébété pour penser à de telles bêtises.

– Jamais, soufflai-je, détendant finalement mes muscles raidis par le choc.

J'avais envie de lui dire que c'était complètement idiot, et comment pouvait-elle croire que je la laisserai, comment aurais-je pu d'ailleurs, qui pensait-elle que j'étais, et – mais non. Taylord était peut-être bien la seule personne avec qui je prenais toujours le temps de peser mes mots. Je la serrai contre moi à mon tour, afin qu'elle comprenne bien qu'il était hors de question pour moi de la lâcher, ici ou ailleurs.

– Ça me rend folle d'être enfermée, l'entendis-je murmurer, sa tête reposant sur mon épaule.

Je hochai la tête, sans oser faire un mouvement de plus. Je n'en revenais pas d'être soudain aussi peu sûr de mes gestes. Même pour un homme, j'étais quelqu'un de corporel. Avec Wayland, tout était si facile – en fait c'était comme si mon corps agissait de lui-même, mon cerveau s'éteignant pour lui laisser le champ libre. Comment Taylord pouvait-elle être si différente ?

Mais là encore, question stupide. Bien sûr que Taylord était différente – n'était-ce pas pour cela qu'elle m'avait intrigué dès la première seconde ? « Je suis différent, tu es différente : soyons amis ! » Ce n'était pas juste ses goûts ou ses réactions qui la distinguaient des autres filles (même si elle était effectivement plus terre à terre, plus naturelle que la plupart d'entre elles) ; c'était quelque chose qu'elle dégageait en dépit de sa volonté, ce quelque chose qui faisait que Carlton, Scott, moi et sûrement d'autres, gravitions autour d'elle, tels des électrons autour d'un noyau, happés par cette force qui nous dépassait tous et surtout elle-même.

– Je voulais faire de la peine à personne, tu sais… ajouta-t-elle d'une toute petite voix, et je souris à demi en constatant qu'elle faisait écho à mes pensées.
– Je sais, Taylord, répondis-je tristement.

Rarement les gens, même plus médiocres que Taylord (et il n'y avait pas de honte à cela), se rendaient compte à temps qu'ils blessaient leurs amis ; mais une fois que le mal était fait, il était souvent trop tard, et tous les regrets du monde n'y changeraient rien.

Je l'écartai un peu, en douceur, suffisamment pour pouvoir la regarder dans les yeux.

– Et cependant, si tu pouvais revenir en arrière, à cette seconde précise où ta vie a pris un chemin plutôt qu'un autre… repris-je. Le ferais-tu ?

Nous connaissions tous deux la réponse à cela. Ce qu'elle comprendrait par « cette seconde précise » la regardait, mais personnellement, j'avais ma petite idée sur la question.
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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeSam 2 Juin - 19:46

– D'abord, nous allons faire en sorte que tu te calmes.

Cela me contraria, parce que cela ne répondait pas à ma question, ce qui me laissait également penser, que Stephen, qui trouvait toujours une solution à tout d'habitude... Et bien que cette fois, il n'en avait pas, et tout de suite, quand on voyait les choses sous cet angle, c'était loin d'être vraiment très rassurant.

- D'accord ? Respire à fond…

Je répondis à cette question par une autre mais m'exécutai quand même. C'était de loin la meilleure idée que nous avions eu jusqu'à maintenant, avec cette soirée qui, même en nous laissant prise au piège, était pleine de rebondissements. Être contre Stephen et sentir son corps se soulever au même rythme que le mien m'apaisa un peu – mais pas complètement, parce que je sentais ses muscles aussi raides que les miens, comme si en fin de compte, j'étais de trop dans son espace vital. Au lieu de m'éloigner sans un mot, je resserrai ma prise et l'interrogeai encore.

On venait parfois me demander conseil, parce ce qu'on me disait que j'étais raisonnable et que je réfléchissais avec suffisamment de logique pour trouver des solutions. Et puis évidemment, comme ça ne me dérangeait pas de donner mon avis avec un plus ou moins de tact, à force, c'était presque devenu une habitude. Mais aussi, c'était tellement simple d'avoir un œil extérieur sur les choses ! Ne pas se sentir concerné permettait de trouver la réponse au problème en moins de temps qu'il n'en fallait, tout le monde était content, et on en parlait plus. A part quand ça me concernait directement, parce que je n'étais plus bonne à rien, m'imaginant très souvent tout un tas de théories qui ne tenaient pas la route, qui avait pour seul mérite la plupart du temps de m'effrayer encore plus, et le pire, c'était que je me confortais dans ces élucubrations. Je me rendais compte à quel point c'était stupide lorsque assez de temps était passé pour que les émotions laissent place à l'objectivité, ça ne m'empêchait pourtant pas de me faire avoir à chaque fois. La raison, comme elle aimait si bien s'appeler, lorsque j'avais peur, que j'étais triste, ou alors énervée... Je n'avais pas besoin d'elle, elle ne m'était d'aucune utilité et ne m'aidait pas à sortir de situations périlleuses.


– Jamais.

J'avais juste besoin d'entendre ce que je voulais entendre, ce que fis Stephen, et ma tête s’alourdit sur son épaule, comme mon esprit se raccrochait à ce mot. Au fond, je pensais suffisamment le connaître pour deviner cette réponse avant même qu'il ne la prononce. Mais bien souvent, dans ces cas là, savoir, ça ne suffisait plus, et je voulais du concret, car tout dans cette pièce me paraissait obscur... Il n'y avait presque plus aucune raison de s'inquiéter à présent, parce que je savais que quoi qu'il arrive, il était là – de toutes manières il était bloqué ici lui aussi. On pouvait presque sentir la sérénité qui essayait elle aussi de s'infiltrer entre les murs froids de cette serre désaffectée. Presque.

C'était de ça dont nous avions besoin : de parler. Ça aussi, nous ne savions tout les deux, c'était sûr et certain, le truc, c'était de faire le premier pas. Même pour ça, même avec toute la meilleure volonté du monde, je restais maladroite. Jusqu'à l'épisode de la réserve – il faisait froid, mais je pouvais presque deviner mes pommettes en train de rosir à cette pensée – je ne m'étais jamais sentie véritablement mal à l'aise avec Stephen. Il y avait bien ces fois où j'avais eu l'impression de passer à la sonde sous son regard, mais ce n'était pas pareil, car même s'il faisait cela – il n'en avait lui même pas pleinement conscience, j'en étais sûre – il n'y avait jamais aucun jugement derrière, aucune critique. Certains diront que c'était parce qu'il avait l'esprit trop étriqué, dans le sens où il n'y avait aucune sensibilité derrière, aucun sentiment, qu(il était aussi froid qu'un informaticien à qui l'on aurait demandé de faire des calculs sur ordinateur.
Ce n'était pas vrai.

Je restais persuadée que c'était une façon d'agir comme une autre – ne pas montrer ce qu'on ressentait ne voulait pas pour autant dire qu'il n'y avait que de l'air sous la cage thoracique. D'ailleurs, quand on y prêtait un peu attention quand on tapait dessus, il y avait ce même bruit sourd qui sonnait un peu creux pour tout le monde, ça ne voulait pas dire pour autant qu'on était tous aussi fades que des troncs d'arbre. Et si Stephen était comme ça, c'est parce qu'il ne savait pas comment faire autrement, parce qu'on lui avais appris une façon de faire et qu'il s'en était tenu à celle là. Peut être que lui même ne savait pas que cette facette de sa personnalité existait, alors forcément, elle restait inexploitée. Lorsqu'il l'utilisait, c'était inconsciemment, ce qui lui conférait quand même la part d'humanité dont tout le monde croyait qu'il en était démuni.

Parler donc, c'était tout ce qu'il nous restait à faire, et je préférais encore ça, que de virer folle dingue en comptant des pierres. Ça ne voulait pas pour autant dire que c'était une activité anodine – au contraire, nous n'avions plus aucun moyen de fuir.


– Je sais, Taylord.


Je poussai un profond soupir pour appuyer sa phrase. On avait beau faire tout ce qu'on voulait pour que tout ce passe comme on le voulait, la réalité elle, décidait toujours qu'il devait en être autrement.


– Et cependant, si tu pouvais revenir en arrière, à cette seconde précise où ta vie a pris un chemin plutôt qu'un autre… Le ferais-tu ?

Merde.
Je pouvais éluder la question – pour ça, j'étais plutôt douée. Mais après ce qu'il venait de se passer... une telle éventualité me semblait être impossible. C'était comme si j'avais gaspillé tout mes jokers ; et ils n'étaient utilisables qu'une fois.

C'était beaucoup plus complexe qu'il n'y paraissait, parce que cela signifiait qu'il fallait tout remettre en cause ; et cela depuis le début. C'était un véritable dilemme et tout résidait là dedans : est-ce que j'avais le droit de choisir mon propre bonheur en dépit de celui des autres ? Je m'étais toujours dévouée pour ma famille et mes amis, comme pour chaque personne qui m'était chère : et puis j'étais arrivée à ce fameux carrefour, où moi aussi, j'avais le droit d'accéder à cette part de lumière qui m'attirait tant, mais dont je m'étais fait un devoir d'ignorer. Et si je la choisissais, je devais m'attendre à ne recevoir aucun soutient, car personne ni voyait d'un mauvais œil, pour preuve seuls Chuck et moi n'avaient pas été blessés puisque c'était ce que nous voulions tout les deux. Et j'avais eu assez d'audace pour avoir envie d'être égoïste. Est-ce que je devais avoir honte de cela ? Quand on est heureux une fois, même si un jour tout s'échappe, si l'occasion de se présente, elle est trop tentante pour la laisser filer.
Et je n'étais sûrement pas la seule.

- Oui. Pourquoi mentir ? Regretter, ce n'était pas mon genre. Nous nous dévisagions et ses prunelles brillaient de façon presque inquiétante sous la faible lumière des bougies. Quoi qu'on fasse... quels que soient nos choix... Il y en aura toujours que ne seront pas d'accord. Ce n'était pas une critique. C'était juste que c'était comme ça. Nous étions tous trop différents pour tous nous diriger dans le même sens. J'hésitai à reprendre. Je suis bien comme ça... J'ai pas le droit ? Interrogeai-je, timidement. Ce n'était pas par désir de faire volontairement du mal aux personnes qui, indirectement, s'étaient retrouvées concernées. J'avais juste pris la direction qui m'avait attiré le plus.

Ce que je voulais, ce que je désirais, cela voulait-il dire que c'était moins important que ce que voulait les autres ?

- Je sais ce que je fais, repris-je. C'est ce que je veux. Mais ça veut pas dire que je suis différente... je passais pour une traîtresse, mais je n'avais intrigué dans le dos de personne, me disputer avec Lilian, ne plus parler à Scott, ce n'était jamais ce que j'avais voulu et pourtant je ne comprenais pas pourquoi ils m'attribuaient ce rôle. Qu'est-ce qu'on me reprochait au juste ? Mes sentiments, mon honnêteté ? Je n'avais jamais voulu laisser tomber mes amis, et pourtant, ça ne les empêchait pas de se détourner de moi...

Il y eu un petit moment de silence durant lequel je dessinai des petits cercles sur le sol, à l'aide de la terre. Puis je finis par relever la tête, le fil de ma réflexion se stoppant soudain.

- Tu voulais faire quoi comme potion ? Après tout, il ne m'avait mis qu'à moitié dans le coup, parce que si je l'avais accompagné sans broncher dans la réserve, il ne m'avait pas pour autant expliqué ce qu'il avait en tête. Je fronçai le nez, surtout avec ce truc.

Non parce que je ne risquais plus de voir Nakamura du même œil, à présent que j'avais vu ce que contenait son tonneau magique.
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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeVen 8 Juin - 2:23

Miracle : j'avais prononcé les mots justes. C'était une première – comme vous vous en doutez, la psychiatrie n'était pas mon domaine de compétence. Les gens, à mon humble avis, et les jeunes gens en particulier tendaient à se laisser abattre par la plus infime contrariété qui survenait dans leur trop paisible existence. Une dispute avec les parents, une mauvaise note, un commentaire déplacé, une critique. Ces soucis là étaient sans danger, et je suppose que quelques mots rassurants les auraient fait fuir aussitôt ; mais ils n'avaient rien à voir avec ce par quoi Taylord était passée. A notre première rencontre, elle devait tout juste atteindre le un mètre cinquante, et peser moins de trente-cinq kilos (aisément). Et elle avait continué à maigrir. Au point que, finalement, plus personne n'y prêtait attention – les gens assumaient qu'elle devait simplement être maigre de nature, voilà tout. Personne ne posait de question, et si certains osaient, ils n'obtenaient que des réponses évasives. Le message était clair de toute façon : il n'était pas question d'en parler. Ainsi était-elle et, par une étrange coïncidence, ainsi fonctionnais-je moi-même. Oui, enfants, Taylord et moi avions certaines choses en commun. Elle était différente des filles de son âge ; j'étais différent de la plupart des garçons, tous âges confondus. Elle refusait de se nourrir ; j'oubliais souvent de le faire. Et elle venait d'un autre pays, et moi, d'une autre planète ou presque.

Pour nous il n'y avait pas de petits tracas ; juste de mauvais souvenirs qu'il valait mieux enterrer. Alors, de temps en temps, nous allions les enterrer ensemble. J'aidais Taylord en lui occupant l'esprit – difficile de ressasser ses malheurs quand on est occupé à verser une potion urticante dans les verres des Serpentard ! Plus généralement, me concentrer sur un travail était la seule méthode que je connaissais pour aller bien, et l'ennui, la meilleure façon de déprimer. Fort de cette conviction, j'avais fait mon possible pour la partager avec Taylord. Mais j'avais, volontairement je crois, oublié que même si nous partagions certains traits de caractère, Taylord Reegan et moi restions aussi différents que le jour et la nuit. Et ce soir, cette réalité, que j'avais toujours su mais que j'avais sans cesse repoussé, me frappait plus durement que jamais. Tout comme la lune tourne autour de la terre qui tourne elle-même autour du soleil, je gravitais autour de Taylord. Et elle…

Elle avait son propre soleil autour duquel tourner.

– Oui, répondit-elle à ma question, et je compris ce qu'elle voulait dire par là – oui, elle avait pris la bonne décision en suivant ce que lui dictait son instinct. Quoiqu'on fasse… quelques soient nos choix… Il y en aura toujours qui ne seront pas d'accord.

C'était si proche de ma propre pensée que je faillis lui répliquer, pour son propre bien, qu'elle se trompait. Mais le silence hésitant qui s'en suivit, et le tremblement de sa voix lorsqu'elle reprit la parole, m'arrêtèrent.

– Je suis bien comme ça… J'ai pas le droit ?

Cette seule et simple question, faiblement murmurée dans le noir, contenait sans doute toute la souffrance qu'elle avait pu ressentir ces derniers mois, ces dernières années, sans jamais oser l'exprimer pour de bon. Ils disaient que je n'avais pas de cœur, eh bien, j'aurais voulu que ce fût le cas à cet instant ; ne rien ressentir du tout en la voyant ainsi, si désemparée, si… affreusement…
fragile. Elle ne demandait qu'à vivre – n'était-ce pas ce que tout le monde souhaitait ? Mais les gens étaient trop compliqués. Ils ne s'aimaient pas aux mêmes degrés, ils attendaient toujours trop des uns ce qu'ils refusaient aux autres. La vie était comme un éternel circuit de voitures où personne ne rattrapait jamais personne. Pas de ligne d'arrivée. Aucun gagnant. Oh, on pouvait bien essayer de se rentrer dedans mais qu'est-ce que cela apportait ? Je songeai à Wayland. Violence. Douleur. Destruction.

– Au contraire, répliquai-je, fermement. Tu ne peux pas laisser les autres t'interdire d'être heureuse. Ton bonheur, c'est tout ce que j'ai toujours voulu, et ce, quoique tu décides, conclus-je avec assurance.

Oui, ça l'était, et oui, j'aurais tout donné pour être certain qu'elle aille bien. J'étais prêt à la laisser aller avec n'importe qui, du moment qu'elle fût comblée ; que ce soit Scott, Chuck, n'importe quel autre, peu m'importait. Il y avait une raison, je suppose, à ce phénomène – c'est que j'étais si peu à l'aise avec tout ceci, les sentiments, l'amitié, l'amour, que je ne voulais pas me laisser embourber en m'attachant à plus d'une seule personne. Je ne voulais pas avoir à subir ces conflits internes, c'était trop compliqué, je ne m'en sortirais jamais.

– Je sais ce que je fais, reprit-elle avec plus de conviction. C'est ce que je veux. Mais ça ne veut pas dire que je suis différente…
– Bien sûr que non, approuvai-je. Tu n'as jamais laissé personne te dicter ta conduite, pourquoi commencerais-tu aujourd'hui ?

Je lui lançai un clin d'œil complice. C'est vrai qu'elle était une vraie tête de mule quand elle s'y mettait ! Je m'étirais, faisant craquer mes poignets, détendant mes bras ankylosés de l'avoir serrée si fort, tandis qu'elle se murait dans un silence songeur, traçant à l'aide de ses doigts des petits cercles dans la terre meuble.

– Tu voulais faire quoi comme potion ? Surtout avec ce truc, finit-elle par demander en fronçant le nez.

Comprenant que la conversation sérieuse touchait à sa fin, je lui adressai un sourire effronté, ce sourire qui signifiait : « ahaa ! », synonyme d'aventures et de folies en tous genres. En réalité, c'était une question un peu sensible – « ce truc » comme elle l'appelait était censé me servir à confectionner une potion qui m'aurait été utile, quand Wayland et moi étions occupés à… enfin, vous voyez. Pas que j'eus de gros problèmes de ce point de vue là, merci bien – c'était
ELLE qui n'était pas normale !!

Evidemment, je n'allais pas donné cette explication à Taylord (c'eût été une façon bien grossière de l'informer de mes récentes activités).

– Oh, rien de particulier tu sais, j'ai pris un peu de tout, répondis-je innocemment. Même si on ne l'utilise pas pour les potions, ce genre de chose peut toujours servir… Ça fait son petit effet dans une assiette, ajoutai-je, l'air de rien.

La pensée d'un Serpentard trouvant un testicule de dragon dans son bol de céréales était irrésistible – pas très original, mais efficace.

– Quoiqu'il en soit, Woodley aurait mieux fait de vérifier mes poches avant de nous enfermer ici, poursuivis-je. Certes, elle a nos baguettes mais… Excuse-moi… je me penchai sur elle et passai mes mains dans les poches de ma veste, qu'elle portait toujours ; je leur avais jeté un sort d'Extension indétectable pour pouvoir transporter du matériel en toute tranquillité. Voilà, je l'ai ! Ceci devrait nous aider à isoler les pierres, pour commencer.

Je secouai la petite bouteille que j'avais extraite de ma poche droite pour la montrer à Taylord, puis me hissai sur mes jambes.

– Tu vois cette masse sombre sur les murs ? C'est une espèce de champignon, l'auriscalpium fantasticus – inoffensif, mais il a tendance à envahir les espaces saturées de magie, comme ici à Poudlard. On n'en voit jamais parce que les Elfes font du bon travail, mais j'imagine qu'ils ne doivent pas descendre ici très souvent, commentai-je. Il a la particularité de s'accrocher à la pierre… Maintenant devine ce que fait ce produit miracle ? ajoutai-je avec excitation.

Coupant court à ses éventuelles interrogations, je me mis à arpenter la salle de long en large, versant un peu de liquide ici et là. Je vidai la bouteille, essayant de ne gaspiller aucune goutte – fort heureusement, la serre n'était pas grande, et je savais qu'une fois dispersé, il allait se répandre et toucher ce qui n'avait pas été directement arrosé.

Quelques instants plus tard, à ma plus grande joie, les effets se manifestèrent : bientôt, chaque pierre qui était en contact avec ces moisissures se mit à rougeoyer, donnant l'impression que nous ne nous tenions pas sur de la terre mais sur un tapis de braises. En un instant, l'endroit était devenu, pour ainsi dire, nettement plus chaleureux.

– C'est juste du désherbant, achevai-je, littéralement émerveillé par une telle simplicité. Rien de plus !

Fray : un ; Woodley : zéro.
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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeSam 9 Juin - 20:44

A cet instant, je me demandais où se trouvait Chuck. S'il m'avait attendu, s'il s'était rendu dans notre salle pour que je l'y retrouve, ou tout simplement allé se coucher. J'avais perdu toute notion du temps et n'avait aucune idée de l'heure qu'il était exactement. Tout s'était d'abord enchaîné si vite, puis ensuite dès lors que nous avions franchi cette porte, tellement plus lentement... C'était presque surréaliste, et je ne savais pas trop si je devais être agacée de cet imprévu, parque ce que du coup, j'étais enfermée dans cet endroit clos, et même si je tentais de penser à autre chose, mon attention était principalement focalisée sur le fait que c'était quatre murs et qu'il n'y avait aucune issue. Ou au contraire, si je devais m'en réjouir parce que finalement c'était ce qui nous permettait en ce moment même d'avoir une conversation à peu près clair et sans sous entendus (bon plus ou moins, on allait pas chipoter) – une grande première. Mais au moins, je n'étais pas seule, et j'étais contente que cette personne qui m'accompagnait soit Stephen. Malgré l'oppression, il y avait cette sensation moins désagréable qui me faisait sentir, que quoi qu'il en pense – et je savais bien que ses à priori sur Chuck ne changeraient pas de sitôt – il me suivrait quand même. L'un comme l'autre, nous n'étions pas dupes et avons deviné que c'était là le véritable sujet de conversation et je voulais lui expliquer plus en détails ce que je ressentais... mais c'était impossible. Car même si j'en avais très envie, je n'avais qu'une parole, et me résoudre à aller au delà de ce que nous avions convenu avec Chuck sans même lui en parler ni avoir son accord, j'avais conscience qu'à sa place, ça ne m'aurait pas plu, et je ne pouvais que le respecter. Alors à la place je me raccrochais à ce sentiment rassurant que m'offrait mon ami.

– Au contraire. Tu ne peux pas laisser les autres t'interdire d'être heureuse. Ton bonheur, c'est tout ce que j'ai toujours voulu, et ce, quoique tu décides.

Comme lors de ma discussion avec Haruhi à la bibliothèque, je voulus lui dire de me faire confiance – en réalité, je ne demandais que ça, qu'on me fasse confiance, ne serait-ce qu'un tout petit peu. Chuck était un gars bien et je n'en démordais pas, c'était juste que... Qu'il avait une bien drôle de façon de le montrer, mais bon. Tôt ou tard, ils allaient bien se rendre compte que j'avais raison et qu'il n'y avait eu aucune raison de s'inquiéter, non ?

Je le lui fis donc comprendre d'une autre manière – là encore il ne pouvait qu'avoir saisi. C'était ça aussi qui était simple avec Stephen, car même si nous n'utilisions pas le mot « chat » pour appeler un chat, un chat, ce n'était pas grave le message passait quand même. Enfin... Jusqu'à présent, il était passé, et avec ce qu'il s'était passé dans la réserve de Nakamura, même si là, tout de suite, ça allait mieux, je ne sais pas, au fond, j'avais peur que cet événement rende tout différent, et... et tout était justement tellement différent avec Scott, ensuite il y avait eu Lilian... Je n'étais pas sûre d'accepter très facilement que ce soit également le cas avec Stephen.


– Bien sûr que non. Tu n'as jamais laissé personne te dicter ta conduite, pourquoi commencerais-tu aujourd'hui ?


J'eus un sourire en réponse à son clin d’œil sans préciser toutefois que je faisais des efforts, mais... Là encore, ça concernait Chuck et entre nous, je n'étais pas certaine qu'il ait vraiment envie de parler de lui surtout en ce moment.

- Hmm, je sais pas, commençai-je sur le ton de la plaisanterie, peut être que si tu trouves un moyen de nous sortir d'ici, ça peut s'arranger...

Je n'avais pas perdu le nord, comme je l'avais déjà précisé, et même si je faisais des efforts pour tenter de ne pas trop lui montrer, je n'en menais pas large pour autant. C'était comme d'être face à sa plus grosse faiblesse et de ne rien pouvoir faire pour pouvoir s'en protéger... je fixai Stephen pendant encore quelques secondes avant de décréter que c'était le bon moment, et je lâchai :

- Par contre, je suis sûre qu'il n'y en a pas deux comme toi, je marquai un temps de silence, et rajoutai, de peur qu'il prenne ça comme un reproche, et non un compliment, dans le bon sens du terme.Il ne faut pas que tu laisses les autres te dire le contraire.

Parce que les mots avaient ce pouvoir déflagrateur, qui utilisés à mauvais escient... Nous en avions eu l'exemple même un peu plus tôt lors de l'épisode qu'on pouvait nommer « renversage – ce terme n'existe pas, on est bien d'accord – inappropriée d'un tonneau au contenu douteux... » d'ailleurs, à penser à ça, j'enchaînais dessus ; être aussi intime comme je venais de le faire n'était pas dans mes habitudes, et je ne voulais pas qu'il repère mon trouble – ou alors le moins possible.


– Oh, rien de particulier tu sais, j'ai pris un peu de tout.

Mouais... à d'autres. Il avait cet air que je ne lui connaissais que trop bien. Mais bon élève, je prêtais une oreille attentive.

- Même si on ne l'utilise pas pour les potions, ce genre de chose peut toujours servir… Ça fait son petit effet dans une assiette.

Là aussi j'étais un peu sceptique, parce que de son côté ma logique me disais que si Nakamura entreposait des testicules dans sa réserve, ce n'était pas pour en prévoir une plantation, et je ne voyais pas à quoi d'autre celui pouvait lui servir mis à part pour ses potions et... et j'allais arrêter d'imaginer maintenant, parce que quelle que soit la nature de mes pensées, y inclure Nakamura, dans tout les cas, ça donnait un cocktail chelou. Je fermai fort les yeux avant de les rouvrir pour chasser ces dernières images.

- Ne m'en parle pas, je vais toujours avoir envie de vérifier maintenant !
Je levai les yeux au plafond en faisant mine de réfléchir, alors... de qui on pourrait bien se venger... et de nous voir incorporer ça dans n'importe quelle assiette de quelqu'un qu'on aimait pas tout les deux me donna presque l'envie de rire.

Presque. Parce que même si on voulait faire ça, encore fallait-il qu'on puisse encore s'échapper des griffes de Woodley. Là encore, Stephen sembla deviner le fond de ma pensée.


– Quoiqu'il en soit, Woodley aurait mieux fait de vérifier mes poches avant de nous enfermer ici. Certes, elle a nos baguettes mais… Excuse-moi…

Je levai les bras pour le laisser un peu chercher dans ses poches, il devait y avoir un fouillis pas possible là dedans, vu le bruit des objets qui s'entrechoquent que provoquait sa main qui avançait à tâtons.


- Voilà, je l'ai ! Ceci devrait nous aider à isoler les pierres, pour commencer.

Je l'interrogeai du regard tandis qu'il se relevai. La réponse vint instantanément comme s'il n'attendait que ça pour se lancer dans le top départ.


– Tu vois cette masse sombre sur les murs ? C'est une espèce de champignon, l'auriscalpium fantasticus – inoffensif, mais il a tendance à envahir les espaces saturées de magie, comme ici à Poudlard. On n'en voit jamais parce que les Elfes font du bon travail, mais j'imagine qu'ils ne doivent pas descendre ici très souvent. Il a la particularité de s'accrocher à la pierre… Maintenant devine ce que fait ce produit miracle ?


Je l'observai s'affairer pendant qu'à mon tour je fourrai mes doigts dans l'une des poches pour essayer de voir ce qu'il y avait un peu à l'intérieur, ce que je n'avais pas remarqué jusqu'à présent. Ce n'était pas très poli, parce que c'était comme de fouiller dans le sac à mains d'une fille – ça d'ailleurs je n'avais jamais compris, déjà parce que je ne me baladais pas avec un sac à mains, et puis même, quel secret d'état pouvait-il donc y avoir à ce point à l'intérieur ?! Des trucs de filles certes, mais comme c'était des trucs de filles qu'avaient donc toutes les filles... enfin, c'était ce genre de choses qui demeureraient pour toujours être un mystère pour moi – mais la curiosité l'emporta.

J’écarquillai un peu les yeux, surprise de voir la réaction que provoqua le liquide qu'il administrait les champignons ; c'était peut être bête mais c'était dans des moments comme celui là, surtout parce que je n'avais pas ma baguette magique, que je me sentais encore comme une moldue qui ne connaissait absolument rien à la magie.


– C'est juste du désherbant. Rien de plus !

Au moins, je pouvais constater que c'était partagé. Ce qui montrait bien que nous avions encore des choses en commun...

- Évidemment, Woodley avait omis ce détail... je repris, et tu n'as pas un truc d'assez puissant pour brûler les gonds de la porte.. ? Miracle, je m'étais remise à réfléchir presque convenablement, en fourrageant frénétiquement dans la poche dans l'espoir que la réponse viendrait d'elle même. Mais c'était tout bête, non ? Magie ou pas si la porte disparaissait... Ce n'était plus un problème... Il fallait juste une substance assez forte et acide qui désintégrerait au moins le métal déjà bien entamé par la rouille qui permettait à la porte de s'ouvrir. Et le tour serait joué !

Restait plus qu'à espérer que ma Mary Poppins des temps modernes alias Stephen Fray, ait ça en stock, et vu la chance dont nous avions hérité ce soir, je ne voulais pas crier victoire trop vite...
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Stephen Fray


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MessageSujet: Re: Les vérités cachées [S.F]   Les vérités cachées [S.F] Icon_minitimeVen 3 Aoû - 23:48


« While we've been chatting away, I forgot to tell you…




Au demeurant, j'avais beau affiché l'air optimiste qui s'imposait systématiquement à moi en présence de Taylord (spécialement dans ces moments où elle n'était pas au mieux de sa forme), toute cette aventure me laissait un peu frustré. Mais je crois que j'avais fini par accepter que jamais je ne cesserais vraiment de me soucier d'elle, de son bien-être. Même en la sachant entre de bonnes mains (ce qui n'était pas le cas pour l'instant à mon avis), je ne pourrais m'empêcher de m'inquiéter. C'était ça, l'amitié, non ? Je découvrais seulement maintenant toute l'étendue, tout le sens caché de ce mot qui jusque là en avait toujours sonné si étrangement dénué à mes oreilles. C'était comme une vieille rengaine dont je ne pouvais me défaire : et je me rendais compte qu'elle ne concernait pas que Taylord, malgré mes efforts pour la contenir à elle seule et personne d'autre – même si elle avait incontestablement la plus belle part dans cet espace un peu moins dominé par les lois mécaniques qui gouvernaient le reste de mon cerveau. Tous les gens que j'avais rencontré et apprécié à un moment ou un autre y étaient rangés, bien alignés ; certains dans un ordre précis, d'autres classés en catégories aussi strictes que délirantes, selon des critères que j'avais seul déterminé, sans y avoir réfléchi consciemment, dans le flot ininterrompu de pensées qui s'enchaînaient, hétéroclites, géniales ou inutiles – toujours prêtes à céder leur place à l'idée suivante.


Il y avait là Scott, sur qui je pouvais toujours compter ; Katie, dont le sourire illuminait encore souvent mes journées à la table de Serdaigle pendant les repas. Candy faisait aussi partie du casting, mais une version plus jeune d'elle-même – et mes parents aussi, arrachés à une époque désormais révolue. Haley avait cette place très particulière qu'elle n'avait pas encore prise, comme un trône délaissé. Lizlor et Wayland étaient deux personnes distinctes même dans mon propre esprit, alors que je la soupçonnais fortement d'être un peu bipolaire (si ce n'est plus). Carlton… N'était pas là, merci bien.

Mais même sans lui, ça faisait trop de personnes, et je ne pouvais pas les ignorer indéfiniment. Il allait falloir que je vive avec ça. Cette… chose qu'on appelle le cœur. Je pouvais le faire, seulement je refusais de le laisser me contrôler. Comme cette terreur qui m'avait empêché d'agir le soir de l'attaque des Mangemorts, me pétrifiant au moment même où on aurait eu le plus besoin de mes compétences.

Taylord semblait un peu plus sereine à présent, je le lisais dans son regard. J'étais parvenu à la détendre avec mes idioties, c'était une bonne chose. Elle me prouva sa reconnaissance à sa manière.

– Par contre, je suis sûre qu'il n'y en a pas deux comme toi, déclara-t-elle d'un air sérieux.

J'esquissai un sourire sans joie. Ça, moi aussi j'en étais bien certain, et je n'étais pas le seul.

– Dans le bon sens du terme, ajouta Taylord, comme si elle devinait mes pensées. Il ne faut pas que tu laisses les autres te dire le contraire.

Ces mots étaient un réconfort mais je ne pouvais la laisser me déconcentrer. J'acceptai néanmoins le compliment d'un hochement de tête gêné.

– C'est… bon à entendre, marmonnai-je avec un petit rire, baissant les yeux en priant pour que la pénombre soit de mon côté et qu'elle n'aie pas eu le temps de les voir s'humidifier.

Ce dont Taylord avait besoin, là, maintenant, tout de suite, c'était de sortir d'ici. Pas que je fasse le pitre pour lui faire passer le temps. Ça, d'autres pouvaient s'en charger, en temps voulu. Qu'étais-je ? Brillant. Le moment était venu de le prouver. Je commençai par le désherbant – je l'avais eu en tête depuis le début et attendais seulement le bon moment pour l'essayer. Taylord ouvrait de grands yeux surpris où je commençais à distinguer une lueur d'espoir. Mais c'était tout ce que c'était vraiment, ces petits points rouges : de la lumière. Pas une porte de sortie.

– Evidemment, Woodley avait omis ce détail… constata mon amie. Et tu n'as pas un truc d'assez puissant pour brûler les gonds de la porte… ?

J'étais déjà parti loin dans les méandres de mes réflexions et pris à peine le temps de chasser sa suggestion d'un geste impatient de la main. Peu aimable ni poli, mais l'heure n'était pas à la politesse, l'heure était à l'efficacité, et je n'étais plus « Stephen, l'ami » pour l'instant mais « Fray, la machine à penser. »

– Impossible, c'est de Woodley dont on parle, sa magie est bien trop complexe.

J'approchai la porte à pas mesurés. Les rouages de ma cervelle tournaient à pleine vitesse, retournant le problème, cherchant des solutions. Même pour moi, la magie de Hazel Woodley, experte en sortilèges, constituait un défi. D'une part, je n'avais pas son âge et donc pas son expérience. D'autre part, même si j'excellais en sortilèges, ce n'était pas ce que je préférais et j'étais bien plus dans mon élément devant un chaudron bouillonnant à petit feu. Ma seule chance de briser le maléfice était de comprendre comment elle s'y était prise pour le réaliser… Voyez-vous, la magie, c'est un peu comme… comme les legos, vous savez, ce jeu qu'affectionnent les enfants Moldus. Chaque sort est une pièce de lego potentiellement imbriquable – c'est un mot ça ? disons que c'en est un – avec une autre pièce de lego qui peut elle-même s'assembler avec une autre. A force d'associer les legos, on obtient une maison en lego, ou bien je ne sais, un poulet en lego. Sauf que chaque lego a une forme bien personnelle alors il ne peut pas s'imbriquer n'importe comment, et au lieu d'un poulet on finit par se retrouver avec une tortue si on y prend pas garde. Et puis on doit d'abord maîtriser tous les petits legos pour constituer un gros lego… Non, oubliez le lego, ça ressemble plutôt à un tetris. Un tetris magique, donc pas informatique… Bon, oubliez le tetris, ça n'a rien à voir avec le tetris – mais si ça aide à comprendre…

Bref. Les sorts, c'est compliqué.

Et sans baguette, difficile de rompre la magie de Woodley. Mais justement, les potions étaient souvent complémentaires des sorts, et j'avais pas mal de trucs dans mes poches. Que Taylord était d'ailleurs en train de fouiller.

… FOUILLER ?! Noon non non j'avais peut-être laisser un truc compromettant là-dedans.

– Attend, attend, Taylord, passe-moi la veste !! lançai-je précipitamment.

Elle la retira et me la tendis, et je la récupérai avec un peu trop d'agitation pour ne pas paraître suspect. La poussée d'adrénaline avait au moins eu le mérite de me rafraîchir les idées. Voyons. La porte ne s'ouvrirait que si nous avions compté tous les cailloux, c'était bien ça ? Et numéroté, avait précisé Woodley. Le tetris commençait à s'imbriquer dans ma tête. En fait, c'était un peu comme les potions les sorts, en cela que c'était lié à la chimie. Chaque sortilège était comme un nouvel élément chimique dont il fallait deviner la formule. Qu'est-ce qu'il y avait dans son maléfice ? De la magie d'emprisonnement, ça c'était bien certain, mais après ? Qu'avait-elle dit ? Me les ranger par paquets de cent…

… Bingo.

Attrapant un des seaux que nous avait laissé Woodley, je commençai à ramasser tous les cailloux. C'était plus facile de les localiser, maintenant qu'ils brillaient comme des feux rouges sur une voie publique. Je ne cherchai pas à les compter et rempli le seau. Puis un autre. Je ne m'abaissai pas à compter – je n'en aurai pas besoin. Taylord finit par se lever pour m'aider, l'air curieux. A nous deux, nous en remplîmes six comme ça. Les pierres rouges brillaient désormais dans les bacs, comme des joyaux – pour ce qui était de les laver, au moins, ça c'était fait.

– Bien.

Ma veste ne m'avait pas quitté. Je commençai à fouiller les poches, dénichant un par un les ingrédients qu'il me fallait, soupirant à chaque fois car je n'étais pas sûr de les avoir emportés avec moi. Ce sort d'agrandissement indétectable était une vraie bénédiction ! Désormais, sans aucun doute, je conserverais tout mon nécessaire sur moi… Mais pour cela il me faudrait sans doute autre chose qu'une veste, quelque chose de plus maniable, un portefeuille peut-être… Bon, voilà, j'avais tout. Bien sûr, je ne pouvais pas être certain à cent pour cent que ça allait marcher et nulle part je n'avais encore lu qu'une telle chose fut possible mais… Je ne sais pas pourquoi, j'avais bon espoir que ça fonctionne. Je préparai le mélange dans un bol que j'avais extirpé avec le reste. La mixture enfin prête, je la déversai dans chacun des seaux. Pendant quelques secondes, il ne se passa rien. Puis, à ma grande satisfaction, les cailloux commencèrent à perdre de leur éclat et frémir. Sous nos yeux attentifs, ils se décomposèrent d'abord lentement en plus grains. J'ajoutai alors un deuxième mélange au premier, et ce qui ressemblait désormais plus à du sable qu'à de la pierre passa de l'état solide à une espèce de pâte granuleuse, peu appétissante mais suffisamment malléable. Avec un petit sourire, je mis pour ainsi dire les mains à la pâte et rassemblait les six blocs à côté des seaux désormais vides.

Je n'étais pas un artiste, mais je dois avouer que le chiffre « 100 » que je parvins à modeler avait… comment dire… ça avait de la gueule, oui, je crois que c'est le terme approprié.

Le « clic » sec de la porte se déverrouillant pour nous laisser sortir était bien le son le plus agréable que j'eus entendu depuis longtemps. Et bien que rien ne m'aurait fait plus plaisir d'aller réveiller Woodley qui devait sans doute s'être couchée, persuadée qu'elle ne nous reverrait pas avant au moins quarante-huit heures, je crois que Taylord et moi allions aller nous mettre au lit sans plus attendre. Entre les évasions nocturnes, les châtiments impossibles, les disputes et les embrassades, je crois que nous avions bien mérité un peu de repos.




… I'm brillant. »


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