Invisible ; pv Callie

Arizona reposa le roman qu'elle était en train de lire - il était rose foncé avec une tranche dorée, sur la couverture étaient dessinées de petites silhouettes dorées qui dansaient et se mettaient en mouvement dès que l'on posait sa main sur le livre, comme pour inciter le lecteur à s'en saisir. C'était le cinquième tome d'une histoire qu'elle suivait assidument, qui parlait de danse, d'un groupe d'amies reliées par une même passion et qui avaient chacune leur lot de joies et de déboires. Quand elle lisait ce livre, elle avait l'impression de faire partie de ce groupe, d'être amie avec chacune d'entre elles et de pouvoir leur confier le moindre de ses petits secrets. Elle s'imaginait sans problème aller prendre le goûter avec Pia, aller se promener avec Birgite ou bien regarder un filme avec Inge ; le fait qu'en plus cette histoire soit écrite en danois, la langue de sa mère qu'Arizona parlait couramment, lui donnait une impression encore plus chaleureuse et réconfortante. Mais son ventre venait de gargouiller une deuxième fois, très fort, la coupant ainsi dans sa lecture : elle soupira et reposa le livre, laissant son regard errer au dehors, par la grande fenêtre de la salle commune. Très vite, elle détourna le regard, sentant son ventre se tordre un peu plus. C'était tout de même un comble d'avoir été répartie à Serdaigle lorsqu'on avait le vertige ! La petite fille se leva et changea de fauteuil, bien décidée à se rapprocher de la cheminée et à poursuivre sa lecture, et tant pis pour ses gargouillements. Elle n'avait pas déjeuner, et n'irait pas. Certains jours, elle sautait des repas, parce qu'elle n'avait pas spécialement envie de descendre au milieu de tout ce monde, toute seule. La compagnie de Pia, Inge ou Birgite lui suffisait amplement, essaya-t-elle de se convaincre en se pelotonnant dans un autre fauteuil, dos à la fenêtre, et en reprenant sa lecture.

Il n'y avait personne dans la salle commune car le déjeuner venait tout juste de se terminer, et comme c'était samedi, les élèves passaient leur temps dehors (il faisait très beau bien qu'un peu froid) entre amis, travaillaient à la bibliothèque ou se reposaient dans leur dortoir ; en tout cas, d'un commun accord, ils avaient visiblement tous décidés de déserter leur salle commune, laissant Arizona toute seule. Elle était habituée : depuis quelques mois qu'elle était rentrée à Poudlard, elle était toute seule la plupart du temps, incapable de se lier vraiment avec les gens et de s'intégrer à un groupe. Mais elle ne le vivait pas spécialement mal : c'était un peu comme une fatalité, une habitude, après tout elle avait toujours été assez solitaire et s'en était toujours accommodée, alors pourquoi le changer ? Ce n'était pas pour rien qu'elle avait construit sa vie avec les livres, qu'elle avait tout un petit monde dans sa tête et se passionnait pour tout ce qui se rattachait à de la fiction, à des choses impossibles et à de grandes aventures dont elle était parfois l'héroïne, selon ses humeurs. Quelque part, elle avait de toute façon bien trop peur pour oser aller vers les autres au-delà des interactions dont elle était capable, et les autres lui rendaient bien, car si autour d'elle, dans son dortoir ou dans sa classe, ses camarades étaient sympathiques et agréables, personne ne s'était lié plus que cela avec elle.

Sans s'en rendre compte, elle décrocha petit à petit du chapitre qu'elle était en train de lire et s'endormit, tandis que son petit chat roux, Bubbles, venait se coucher à côté d'elle, allongé de tout son long entre sa cuisse et l'accoudoir du fauteuil. Le cerveau d'Arizona l'emmena bien loin, comme à l'habitude, vers un univers étrange peuplé de créatures en neige avec lesquelles elle essayait de communiquer mais qui ne la comprenaient pas, et tandis qu'elle essayait de modéliser ses mots avec des images, un incendie se déclencha de nulle part et enflamma toute la planète en quelques secondes tandis que les personnages fondaient et se ratatinant en hurlant et qu'un grand craquement résonnait du fin fond des entrailles de la Terre - craquement qui la fit se réveiller en sursaut, et son chat aussi. Comme elle le sentit se relever d'un coup, elle comprit que le bruit était bien réel et que quelqu'un était présent, et tout d'un coup son coeur s'emballa irrationnellement, alors qu'elle essayait de se tirer de sa torpeur.

D'un geste de la main, elle rassura son petit chat pour qu'il reste immobile et, s'armant de tout son courage sans oser pour autant regarder derrière le dossier de son fauteuil qui la cachait pour l'instant, elle demanda d'une petite voix :

- Qui est là ?...

Par ce temps merveilleux -même si un peu frisquet à cause du vent qui soufflait, Callie avait décidé d'aller s'entraîner un peu au Quidditch en fin de matinée. Bien sûr elle ne fut pas la seule à avoir cette idée. Heureusement aucune équipe n’avait réservé le terrain ou prévu de jouer ce matin-là. La plupart des élèves avaient cours alors qu'elle avait bien 3 heures à tuer ; en comptant l'heure du déjeuner. Le terrain était occupé mais elle n'eut qu'à patienter quelques minutes qu'il se libère. Et elle n'empêcha personne de prendre place. Elle s’entraînait dans son coin, sans déranger qui que ce soit. Un groupe de trois personnes avaient fini par l'inviter à jouer avec eux. Elle accepta volontiers : même une fille bourrue dans son genre trouvait cela plus agréable d'échanger des balles et de voler avec d'autres personnes de temps en temps. Mais cela ne dura pas très longtemps. Très gentils, ces jeunes gens plus âgés devaient retourner à leur cours puis aller manger. Et cela ne tarderait pas à être son cas aussi.

La rousse venue du grand froid canadien s’entraîna deux heures durant. Le vent lui glaçait la peau, déchirait ses os mais ce n'est rien comparé à une tempête de neige au pays des caribous. Elle voulait faire partie d'une équipe de Quidditch de l'école, du moins, elle se permettait d'en rêver. Pour faire de cela une réalité, l'entraînement était de rigueur. Surtout qu'elle n'était qu'en deuxième année : elle devait faire ses preuves. Les jeunes élèves n'intégraient que très rarement les équipes officielles de l'école mais Callie s'y risquerait. Au moins pour être certaine d'être complètement nulle ou au contraire, d'avoir un peu d'espoir d'être à la hauteur. Son père lui avait transmit cette passion du Quidditch et également celle de la musique. Autant les faire perdurer ! Mais à Poudlard, Callie n'avait malheureusement pas sa guitare, alors elle se rabattait sur le violent sport de balais. Cela avait le mérite de l'occuper un minimum en dehors des cours. Elle adorait la magie et les cours mais travailler non-stop, même pour la tête d’ampoule qu'elle était, c'était inconcevable. Elle était une gamine plutôt équilibrée dans son genre. Un peu brusque par moment et terre à terre, peut-être était-ce pour cela qu'elle n'avait pas encore de véritables amis ici. Elle était sympathique et les autres étaient sympathiques avec elle en retour, mais elle n'avait personne avec qui s'entraîner régulièrement ou bien même sortir prendre le soleil de temps en temps en papotant. Électron libre, la jeune Marshall ne s'intégrait à aucun groupes d'amis, elle voguait de l'un à l'autre sans s'attacher. Mais cela ne l'embêtait pas pour autant. Trop mature pour son âge, la jeune fille savait relativiser et ne s’apitoyait jamais sur son sort.

Elle quitta alors le terrain, gelée. Il était temps d'aller manger avant que les cours ne reprennent ! Et si elle voulait avoir le temps de se changer, manger et récupérer ses affaires de cours, elle allait devoir se dépêcher. Elle traversa le parc du château en courant, son balais en main. C'était vraiment ridicule : elle avait un balais et ne pouvait s'en servir hors du terrain de Quidditch. Cela lui aurait pourtant tellement facilité les choses ! Et il y avait tous ces escaliers à grimper, toute cette tour. Elle adorait être en hauteur pourtant, mais cette fois-ci, elle aurait apprécié être à Serpentard ou Poufsouffle. Grimpant les escaliers deux par deux, Callie avait peur de se mettre en retard. Elle ne faisait habituellement qu'étudier, faire ses devoirs, ce serait dommage que l'une des fois où elle décide de faire autre chose, cela lui retombe sur le coin du nez. Non, c'était hors de question. Arrivée enfin devant la porte de la salle commune, Callie prononça le mot de passe. La porte s'ouvrit alors bien gentiment. Lorsqu'on a les bras chargés, il faut avouer que c'est plutôt pratique. Elle fut surprise de trouver la salle commune déserte. Ils devaient tous être en train de manger dans la grande salle en bas. Stressée et fatiguée par toute cette course, la sorcière décida de se poser néanmoins pour enlever ses chaussures. Elle déposa son balais en appui sur le côté d'un fauteuil avant de s'y installer. Le silence qui régnait était étrange et la gamine semblait être une tornade parmi ce calme. Assise, elle leva son pieds droit et vint le poser sur son genou gauche. Puis tira fermement sur sa chaussure. Cette dernière s'enleva d'un geste brusque. Callie tapa de son coude son balais qui tomba. Le bois résonna un court instant. Puis la rouquine faillit faire une crise cardiaque en entendant un « Qui est là ?... » inquiet, sortit de nul part. La jeune fille se figea un instant. Puis tourna sa tête vers le fauteuil face à la cheminée mais qui faisait complètement dos à la salle entière.

« Ca-Callie. Marshall ? Je suis désolée, je pensais que la salle était vide. » S'empressa-t-elle de s'excuser. C'est vrai que cela l'avait étonné lors de son entrée, elle ne s'était pas posée la moindre question et avait immédiatement vaqué à ses affaires, pensant être seule. Elle se doutait aussi que l'évocation de son nom n'avancerait certainement pas la personne qu'elle venait de déranger.

« Tout était si calme. Pardon, encore. Pour le boucan. » La sorcière se leva et alla ramasser son balais, le posant cette fois-ci contre le mur. Avant de venir se rasseoir dans un silence lourd.

Figés tous les deux, le petit chat et la petite fille attendaient un geste ou un mot de l'intrus comme si quelque chose d'important en dépendait. L'intruse, en l'occurrence, finit heureusement par s'exprimer :

- Ca-Callie. Marshall ? Je suis désolée, je pensais que la salle était vide.

Ces quelques secondes de stress passées, Arizona relâcha la légère pression de sa main sur le pelage du chat et se détendit. En soufflant, elle se dit combien sa réaction était bête, encore une fois - elle avait peur de tout - et elle se dit aussi que, malheureusement, elle ne voyait pas du tout comment se débarrasser de ces mauvaises habitudes. Elle savait que sa mère comptait sur Poudlard et son univers pour l'aider en ce sens, parce qu'ici il fallait apprendre à se débrouiller tout seul au milieu de plein d'autres enfants, dans un château capricieux et facétieux garni de fantômes, de tableaux qui parlaient et d'escaliers qui bougeaient. Mais pour l'instant, ce n'était pas très probant : elle sursautait dès que quelque chose d'inhabituel arrivait et se méfiait comme de la peste des couloirs où Peeves adorait se promener, elle priait lorsqu'elle montait un escalier qu'il ne décide pas de changer de forme et passait la tête baissée le long des tableaux si jamais ils leur arrivaient de la prendre à partie. Elle était bien, dans son monde ; être discrète et transparente était ce qu'elle savait le mieux faire, et elle ne tenait pas trop à le changer, n'en déplaise à sa mère - qui n'était pas là, de toute façon, pour vérifier. Arizona se retourna alors sur son fauteuil, émergeant de derrière le grand dossier, pour fixer de ses yeux ronds la personne qui venait de parler. C'était une fille un peu plus âgée qu'elle, aux cheveux très roux, qu'elle avait déjà remarqué car elle avait l'air très gentille. Callie Marshall - le nom lui était familier.

- Tout était si calme. Pardon, encore. Pour le boucan.

Il y avait à côté d'elle un balai - sûrement à l'origine du bruit - et elle était en tenue de Quidditch ; elle devait probablement rentrer de son entraînement. Arizona n'avait jamais beaucoup aimé ce sport, bien que dès qu'elle avait été en âge de monter sur un balai sa mère avait essayé de la faire monter sur des balais jouets. Elle avait bien aimé, mais n'avait jamais à poursuivre vraiment - et puis, elle avait découvert qu'elle avait le vertige, et si voler sur un objet était un peu différent, l'idée de flotter dans les hauteurs ne l'enchantait jamais vraiment. Comme sport, elle préférait la danse - heureusement que pour l'instant, les cours de Vol restaient très simples et qu'elle n'était pas obligée de monter très haut.

Son chat choisit ce moment pour sauter du fauteuil, visiblement rassuré et pas effrayé pour un sou de la présence de Callie ; il s'étira de tout son long en baillant et avança un peu pour se trouver à égale distance entre les deux Serdaigle, et se mit à faire sa toilette.

Encouragée par ce mouvement, Arizona comprit qu'il lui fallait agir : ce silence ne pouvait pas s'éterniser et sa réaction avait déjà été assez étrange pour en rajouter. Elle devait faire ce qu'elle savait faire le mieux : parler pour dévier l'attention d'elle-même, dire quelques mots pour paraître gentille et normale mais pas non plus extraordinaire, ce qui faisait que les gens se détournaient rapidement elle sans en garder non plus une mauvaise impression et, par conséquent, finissait par l'oublier, pas par méchanceté, mais parce qu'elle n'avait rien de spécial et qu'elle n'était pas plus intéressante que ça.

- C'est ton balai ? demanda-t-elle en pointant le balai en question du doigt. Tu es dans une équipe de Quidditch ?

Elle tourna alors légèrement son gros fauteuil pour pouvoir s'assoir un peu mieux et voir son interlocutrice, tout en reposant son livre fermé sur ses genoux.

- Ce n'est pas grave pour le bruit, j'ai juste été surprise, j'étais en train de faire la sieste, expliqua-t-elle avec un petit sourire, ses longs cheveux blonds lâchés tout autour de son visage la cachant toujours un peu.

Avec une chaussure en moins, Callie s'était rassise après avoir été ramassé son balais, fait tomber un peu plus tôt dans un vacarme sans nom. Ce qui avait eu au moins pour mérite de révéler la présence d'une autre personne se trouvant dans la pièce. Callie aurait pourtant jurée être seule. Cette dernière c'était alors excusée d'avoir tranché le silence paisible qui semblait régner en son absence. L'autre Serdaigle qui se trouvait dans la pièce décida alors enfin de se montrer. Une jeune blondinette, oui, elle l'avait déjà croisée à plusieurs reprises. Une première année si elle ne disait pas de bêtises. Callie se permit alors de reprendre son activité première : se déchausser. Cela faisait un bien fou d'avoir les pieds à l'air après avoir couru autant. Se poser cinq petites minutes c'était tout de même appréciable. Le Serdaigle cadette en profita alors pour observer sa camarade de loin, à moitié cachée derrière son fauteuil. Callie déposa sa chaussure à ses pieds, à côté de l'autre et s'enfonça dans le siège confortable de la salle commune. Il y faisait bon, agréablement chaud, rien à voir avec le froid de l'extérieur.

Un bruit sourd se fit ensuite entendre avant l'apparition d'un chat au milieu de la pièce. Ses pas ne faisaient aucun bruit sur le sol lorsqu'il avançait. Il se mit ensuite à se lécher de partout, semblant être très à l'aise, comme chez lui. Callie esquissa alors un sourire en le regardant, elle se dit immédiatement que sa Quinn était bien en sécurité dans le dortoir. Bien qu'il ne paraissait aucunement agressif, ce chat pourrait tout de même ne faire qu'une bouchée de sa chère petite ratte. Elle ne se sentait absolument pas obligé de parler. Elle ne le faisait que lorsqu'elle y était invitée à vrai dire et ne cherchait jamais à lancer la conversation avec des gens; elle aurait trop l'impression de les déranger ou de les forcer à parler. Le silence ne la dérangeait donc pas le moins du monde.

« C'est ton balai ? Tu es dans une équipe de Quidditch ? » Oh, qu'elle aurait aimé faire partie d'une équipe. Mais malheureusement le sort n'en avait pas encore décidé ainsi. Si elle n'était pas prise cette année elle retenterait sa chance l'année prochaine. Et les années suivantes sans exceptions. La jeune fille décida enfin à se montrer plus : elle tourna son fauteuil de manière à voir correctement la Callie. Cela invitait au dialogue en tout cas. Ma foi, pourquoi pas. « Ce n'est pas grave pour le bruit, j'ai juste été surprise, j'étais en train de faire la sieste » Ah flûte ! Par Merlin, elle venait de la réveiller ! La rousse se sentait alors encore plus coupable d'avoir fait tout ce bruit. Mais elle n'allait pas s'étendre là dessus, ses excuses avaient déjà été présentées. Callie aperçut également le livre posé sur ses genoux. S'endormir au coin du feu en lisant, cela ne devait pas arriver souvent dans les Salles Communes des différentes maisons.

« Oui c'est bien mon balais. » Dit-elle en jetant un regard en biais au dit balais posé contre le mur juste à côté d'elle. « Je ne joue dans aucune équipe par contre. Malheureusement. J'aimerai bien passer les sélections pour en faire partie en tout cas. » La canadienne sourit à sa camarade. La faim commençait à se faire sentir, après tout ce sport. Mais elle était trop bien installée ici. Elle se redressa et vint plier ses jambes en tailleur. « Qu'étais-tu en train de lire ? » Demanda-t-elle à son tour en faisant un geste du menton vers le livre refermé sur les genoux de sa camarade. Callie n'avait pour habitude de lire de la fiction. Elle se contentait de l'histoire de la magie, des histoires réelles, des articles de journaux, s'intéressant beaucoup aux différentes découvertes effectuées dans le monde magique comme moldu. La plupart des élèves trouvaient cela barbant, ce n'était pas son cas. Elle aimait apprendre sur ce monde. « Tu n'as pas faim ? » S'inquiéta alors Marshall en se rappelant de l'heure qu'il était et qui continuait de tourner. Quoique, si elle s'était endormie ici, c'est qu'elle avait peut-être déjà mangé en fait. « On est trop bien ici, ce serait le paradis de pouvoir se faire apporter notre repas. » Dit-elle avant de s'enfoncer à nouveau dans son siège immense. Les elfes de maison avaient déjà beaucoup à faire, puis Poudlard n'était pas un hotel. Tout était si tranquille ici lorsque tous les autres étaient absents. Eux devaient certainement festoyer dans la Grande Salle en bas, dans le brouhaha constant.

Arizona ne se faisait jamais remarquer, mais elle adorait remarquer les petites choses chez les autres. Les détails des yeux, du visage, les cheveux, les mains, les habits, les manières d'être ; c'était amusant de voir comme on pouvait tous avoir l'air semblable et être en réalité tous extrêmement différents quand on s'attachait aux détails ! Par exemple, quand elle se regardait parfois dans la glace, longtemps, elle finissait par remarquer le reflet presque violet de ses yeux gris, le rose particulier de sa bouche et la texture de ses cheveux qui donnaient l'impression d'être à la fois lissés et légèrement ondulés à la perfection, en tout moment. Pourtant, ce n'était pas ça que l'on voyait en la regardant normalement : si on la remarquait au milieu d'autres enfants, on remarquait seulement ses cheveux longs, sa silhouette toute gracile et ses yeux clairs, peut-être, mais rien de plus. Les gens n'étaient extraordinaires que si on se posait la question « Pourquoi cette personne là est-elle extraordinaire ? ». Toujours installée dans son fauteuil, après avoir alternativement regardé Callie et son balai, elle chercha alors pour s'amuser ce qu'il y avait d'extraordinaire chez la Serdaigle. La première réponse était facile : les cheveux, aux reflets roux foncés hypnotisants. La forme du visage aussi, un peu carrée aux bords arrondis qui lui donnait un air très aimable - et surtout, et Arizona décida que c'était là son atout le plus fort, un sourire tout calme et tout doux qui donnait envie de sourire en retour et illuminait Callie d'une aura particulièrement sympathique.

- Oui c'est bien mon balais. Je ne joue dans aucune équipe par contre. Malheureusement. J'aimerai bien passer les sélections pour en faire partie en tout cas.

Elle semblait déçue - mais Arizona n'osa pas lui demander pourquoi, et à vrai dire, formuler cette question ne lui vint même pas à l'esprit, tant elle n'était pas habituée à discuter ainsi avec les autres. Elle ne put que lui lancer un regard admiratif et craintif à la fois :

- Wow, murmura-t-elle, incapable de s'imaginer formuler une telle volonté à l'égard du Quidditch. Elle savait que son vertige lui rendait la chose terrible, bien plus terrible que la normale, mais tout de même, n'y avait-il pas de toute façon quelque chose de formidablement effrayant dans ce sport en suspension dans les airs ?! Tu n'as jamais eu peur ? s'entendit-elle demander d'une petite voix.

Elle s'enhardissait presque - et sa camarade de maison ne sembla pas vouloir aller autre part, pour le moment. Dans son coin, Bubbles continuait sa toilette comme s'il ne l'avait pas faite depuis un an au moins.

- Qu'étais-tu en train de lire ?

Prise de court et si peu habituée que l'on s'adresse si ouvertement à elle, Arizona leva bêtement les mains de son livre pour le montrer à Callie, tout en balbutiant :

- Ça... C'est une histoire sur la danse... C'est écrit en danois, conclut-elle, se sentant stupide sur tous les points : stupide de réagir comme si on lui demandait la lune, stupide de se sentir buter sur les mots, stupide d'avoir envie de disparaître six pieds sous terre, stupide de se dire que Callie devait sûrement penser qu'elle était bête, stupide parce que les histoires de danse n'intéressaient personne à part elle, stupide d'être si stupide. Elle soupira, et replaça ses mains sur la couverture magique sur laquelle les silhouettes dorées ne bougeaient plus que très faiblement.

- Tu n'as pas faim ? Arizona secoua négativement la tête. On est trop bien ici, ce serait le paradis de pouvoir se faire apporter notre repas.

À cette idée, la petite fille se demanda si c'était une ouverture, une question voilée : Callie avait-elle faim et lui faisait-elle comprendre qu'elle en avait assez de parler avec elle, et qu'elle voulait aller manger ? Ou bien demandait-elle des informations, qui échappaient pour le moment à Arizona ? Elle réfléchit un instant et repensa à des paroles de sa mère, quand elle partait dans une tirade amère contre les gens qui avaient de l'argent et qui en abusaient, contre les sorciers qui en exploitaient d'autres, contre les familles au sang pur qui pratiquaient l'esclavage avec leurs elfes de maisons, etc. Les gens disaient qu'à Poudlard, il y avait des elfes de maison... Quand Arizona avait entendu ça, elle avait été horrifiée, puis perplexe. Poudlard ne correspondait pas à toutes les horreurs que disait sa mère à propos des personnes qui exploitaient les elfes de maison.

- C'est vrai qu'il y a des elfes de maison, ici ? demanda-t-elle après un silence, un peu gênée de s'exprimer encore, mais enhardie par une curiosité qu'elle osait tout d'un coup exprimer.

Ayant vécu dans une famille sorcière toute sa vie, du moins avec son père en tout cas, Callie ne trouvait pas que savoir voler sur un balais ou jouer au Quidditch était exceptionnel. On lui avait appris, elle imaginait que cela revenait au même avec un père moldu apprenant à jouer au base-ball à son fils ou un quelconque autre sport. Mais c'est lorsqu'elle reçut sa lettre pour Poudlard que la rousse se mit vraiment à s'intéresser au monde magique. Pour elle avant, il n'y avait pas de différenciation entre monde magique et monde moldu. Chez elle c'était magique, puis son école était moldue. Maintenant qu'elle y pensait, c'était certainement pour cela qu'elle n'avait pas le droit d'inviter ses petits camarades chez elle, lorsqu'elle était encore au Canada. Cela faisait sens, si le monde des sorciers devait rester secret et qu'avec son père ils vivaient comme tels … Alors elle esquissa un mince sourire lorsque sa camarade s’ébahit en entendant ses paroles. Cela n'était rien. Franchement. « Tu n'as jamais eu peur ? » Callie fit simplement non de la tête. Elle n'allait pas se vanter de ses prouesses sur tous les toits, ce n'était pas son genre. Plutôt humble la gamine se pensait même trop nulle pour pouvoir intégrer une équipe … Ce qui ne l'empêcherai pas d'essayer quand même !

Ce petit moment était agréable en fait. Assises dans de confortables fauteuils, bavardant tranquillement. De temps en temps, cela faisait du bien. Callie ne savait pas si sa camarade appréciait cela, peut-être préférerait-elle être plus tranquille, comme elle l'était avant l'arrivée de la tornade rousse. « Ça... C'est une histoire sur la danse... C'est écrit en danois » Callie afficha une expression de surprise. Du danois ? Elle aussi était étrangère ? Savoir parler et surtout comprendre plusieurs langue, la deuxième année trouvait cela impressionnant et pour le coup vraiment utile. C'était mieux que de savoir voler sur un balais pour sûr. L'anglais était sa langue maternelle, mais dans les écoles au Canada, ils enseignaient également le français. Alors Callie connaissait un peu ce langage mais ne se risquerait pas à discuter avec un vrai français, elle serait complètement ridicule, elle n'était pas très douée pour ça.

« Tu viens du Danemark ? Tu n'es pas anglaise ? » Demanda alors la canadienne très intéressée et plutôt étonnée. Elle avait toujours été surprise par le nombre d'étrangers qui se trouvaient à faire leur scolarité à Poudlard, école pourtant anglaise. Chacun avaient ses raisons certes, mais Poudlard n'était certainement pas la seule école de sorcellerie du monde. Callie avait déménagé au Royaume-Uni avec son père deux ans avant son admission à Poudlard, c'était sa raison.

À part la musique et le Quidditch, Callie ne pouvait prétendre connaître quoi que ce soit à propos de la danse. Mais elle se dit que si Arizona lisait un bouquin là-dessus, c'est que cela devait la toucher de près. « C'est vrai qu'il y a des elfes de maison, ici ? » Demanda alors la blondinette après que Callie se soit plainte du service d'étage inexistant. Elle ne pensait pas aux sous-entendus ou aux questions cachées. Elle se contentait de dire ouvertement et franchement ce qu'elle pensait sur le moment. Cela elle le tenait de sa mère à ce que disait son père … Jamais elle ne put s'en rendre compte de toutes façons, elle ne l'avait jamais connue ni même rencontrée. « Bien oui, ils s'occupent de la cuisine, du ménage … La jeune fille réfléchit un instant avant de reprendre. Et je ne sais quoi d'autres. » Certainement du linge peut-être aussi ? Elle n'en savait rien. Mais pour la cuisine et le ménage oui, c'était certain !

(Je suis désolée pour le retard !! Invisible ; pv Callie 2176505670

)

Souvent Arizona se servait de ses héros et de ses livres pour essayer de réagir - ou pour s'imaginer une réaction. Elle était très forte à cela : s'imaginer répondre à quelqu'un, s'imaginer réagir, s'imaginer rire à une blague et y répondre avec une autre, inventer un dialogue entre les deux personnages, elle et quelqu'un de son âge. Il pouvait y avoir toutes sortes d'issue, bien sûr, mais généralement elles étaient agréables et ouvraient potentiellement sur une suite assez trépidante, et sur une amitié naissante. Bien souvent, ces scénarios s'accompagnaient aussi d'un peu de regret : elle savait qu'elle n'aurait pas été capable de les interpréter, et c'était comme le rappel d'un échec qu'on ne parvenait jamais à oublier.

Alors que les deux jeunes filles étaient toujours tranquillement en train de deviser dans la vaste salle commune des Serdaigles, lumineuse et pleine de sérénité, Arizona, pour tenter de tromper sa nervosité, s'imagina la réaction de ses meilleures amies du moment : Pia l'intrépide aurait bondi, enjouée, sur cette histoire de Quidditch et aurait discuté sport avec Callie ; Birgitte, très à l'aise, aurait détendu l'atmosphère d'un sourire et les auraient lancées toutes les deux sur diverses discussions ; Inge aurait été un peu timide, oui, mais elle n'aurait pas été coincée et stupide, et elle aurait tout de même réussi à entamer une conversation ou à parler de son livre, car elle lisait énormément de livres et savait beaucoup, beaucoup de choses. Mais voilà : chaque configuration était tentante et plaisante à imaginer, mais chaque configuration lui était impossible. Elle se sentait comme figée dans une enveloppe de marbre, s'en voulant un peu plus à chaque instant. Elle n'avait même pas été capable de se présenter, de dire son prénom...

- Tu viens du Danemark ? Tu n'es pas anglaise ?

Elle aurait pu se mettre à pleurer en entendant cette question, non pas à cause de la question en elle-même mais parce que Callie était gentille et s'intéressait à elle et elle était incapable de lui retourner la chose. Les doigts crispés sur la couverture de son livre (sur laquelle les silhouettes étaient complètement figées à présent), elle se força à respirer et se rattacha à une chose : au sourire de Callie qui mettait de la lumière dans son visage - un sourire comme ça ne pouvait pas être faux ou menteur, un sourire comme ça était sincère, il fallait qu'elle y croit.

- N-n-non, répondit-elle en se forçant, ma mère est danoise. C'est mon père qui est anglais. Moi... Je suis entre les deux, je parle les deux langues, et j'ai vécu là-bas jusqu'à mes 8 ans...

- il lui sembla qu'elle n'avait jamais pris la parole aussi longtemps -

- ... Voilà.

Bubbles, en écoutant la voix de sa maîtresse, s'était sagement couché sur l'un des tapis bleu foncé, et avait les yeux mi-clos, comme lorsqu'il se plongeait dans une petite sieste réparatrice. Néanmoins, ses oreilles dressées prouvaient qu'il restait tout de même attentif à la situation.

- ... Et... Et toi ?

Dans un dernier souffle, elle avait retourné la question à son interlocutrice, ce qui lui causa un effort suprême - Arizona songea qu'elle aurait aimé, par-dessus tout, même par-dessus le merveilleux chocolat viennois de son enfance dans lequel sa mère plongeaient des petits bonbons au caramel qui y fondaient doucement, disparaître sous terre, loin loin loin, s'enfoncer dans son fauteuil puis dans le sol puis dans la tour puis dans les cachots du château puis dans la terre jusqu'au fond de ses entrailles, et ne jamais réapparaître.

- Bien oui, ils s'occupent de la cuisine, du ménage… Et je ne sais quoi d'autres.

La petite Serdaigle songea à sa mère qui aurait pesté, sa mère qui pestait contre tout de toute façon, surtout dès que les gens étaient un peu trop opprimés. Elle se demanda si elle était au courant que sa fille était dans une école où l'on employait des elfes de maison. Comme elle n'était pas capable de faire plus, comme elle avait déjà tellement parlé et s'était tellement mise en avant si l'on comparait à l'habitude, elle se sentit tout d'un coup pressée par sa coque de pierre, poussée vers l'intérieur et donc incapable d'émettre un son ou de réagir d'avantage, si bien qu'elle se contenta de hocher la tête après les mots de son aînée, toute honteuse en même temps d'être à tel point hors du monde quand elle en avait un bien différent dans la tête.

Hors RP:

La journée poursuivait son court, bien tranquillement. Les deux jeunes serdaigles discutaient alors sagement. Callie n'avait aucune idée des tourments qu'elle faisait ainsi subir à sa camarade, rien qu'en lui parlant simplement. Elle avait toujours été plutôt sociable. Rajouter à cela un franc parler sans limites et vous obtenez une Callie Marshall flambant neuve ! Alors forcément elle paraissait plutôt sûre d'elle d'un premier abord et elle l'était, jusqu'à un certain point. Mais cela avait certainement tendance à effrayer la plupart des gens. Elle semblait n'avoir besoin de personne … C'était ce dont elle essayait de se convaincre tous les jours dans ce château, même si son père était visiblement l'exception. Elle n'était qu'une gamine après tout, c'est bien normal d'avoir besoin de ses parents à cet âge. Et ça devait en être de même pour tout les jeunes enfants de cette école.

Arizona répondit alors à la question que lui avait posé la joueuse de Quidditch en herbe quelques secondes auparavant. La première année hésita alors dans sa réponse, bégayant un « Non » puis précisa sa pensée : « Ma mère est danoise. C'est mon père qui est anglais. Moi... Je suis entre les deux, je parle les deux langues, et j'ai vécu là-bas jusqu'à mes 8 ans... » Callie acquiesça alors, comprenant enfin pourquoi ce livre sur la danse était écrit en danois. Bien sûr, c'était logique qu'elle parle et sache lire cette langue, sinon elle n'aurait pas d'intérêt à lire ce livre ! Puis elle conclut par un « ... Voilà. » peu assuré avant de retourner cette question à Callie. Cette dernière jeta un coup d’œil à la fenêtre, observant le ciel un instant. Le ciel était le même partout soit disant. Mais ici en Angleterre, il fallait l'avouer, il était le plus souvent plus gris que partout ailleurs ! La sorcière reposa ensuite son attention sur l'autre Serdaigle pour répondre à sa question : « Je suis née au Canada mais mon père est anglais. » Dit-elle avec un sourire en regardant Arizona directement. Elle était née là-bas, avait fait toutes sa vie dans le pays du grand froid. Son père était né lui en Angleterre et était allé à Poudlard. Callie le soupçonnait même d'avoir prétexté vouloir emménager au Royaume-Uni pour son travail juste pour que sa fille aille dans la même école que lui. Ce Grégory Marshall … Elle marqua une courte pause puis reprit. « Nous avons déménagé en Angleterre pour le travail de mon père il y a 3 ans maintenant. Il était alors normal que je fasse ma scolarité ici. » Conclut-elle à son tour sobrement. Le père de Callie avait quitté l'Angleterre peut après avoir terminé ses études à Poudlard. Le destin l'avait amener jusqu'au Canada et l'y fit rester pour élever sa fille, seul. Avant qu'elle ne soit assez grande pour rentrer au pays avec lui.

Elle se serait retrouvée dans l'école de magie canadienne sinon. Ou bien celle des États-Unis. Dans tous les cas, que ce soit ici ou ailleurs, cela amenait un gros changement de vie. Sa mère était elle américaine, mais la rousse ne jugea pas intéressant de la préciser. Surtout parce qu'elle ne la connaissait pas, ne l'avait même jamais rencontré. Du sang américain et anglais cohabitait donc dans ses gênes. Pourtant elle se considérait plus canadienne qu'anglaise. Elle ne connaissait rien de ce pays et encore moins de l'Amérique. « Je baragouine donc un peu le français. » Confia-t-elle alors un peu amusée. Jamais Callie n'oserait se vanter de son français, il était plutôt terrible et elle n'était pas du genre vantarde de toutes façons. En Ontario ils parlent tous couramment anglais mais le français est tout de même la langue la plus enseignée dans les écoles. Tout comme les français apprennent très tôt l'anglais, les canadiens anglo-saxons de leur côté apprennent très tôt le français. Un héritage important paraîtrait-il ... Mais bon, la grammaire française était d'une telle difficulté, un vrai enfer ! Apprendre la magie était plus simple trouvait la deuxième année.

La rouquine se redressa alors sur son fauteuil avant de se lever et de venir attraper le manche de son balais. « Je vais ranger mes affaires et me changer puis je descendrai manger un morceau avant de retourner en cours. » Annonça-t-elle simplement. Un cours de Métamorphose l'attendait après la pause déjeuner il lui semblait. C'était l'un de ses cours préférés, avec celui sur les sortilèges puis d'autres cours certainement. Elle demanda alors un peu inquiète : « Tu es sûre de ne pas vouloir venir manger ? » C'était également une invitation. Cela était toujours dommage de rater un repas à Poudlard. Les elfes de maison se donnaient tellement de mal et ce qu'ils préparaient était toujours délicieux à souhait. Il y en avait vraiment pour tout les goûts sur les tables de cette école.