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Everything is so fragile - pv Ruby ♥

 
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 Everything is so fragile - pv Ruby ♥

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Lizlor Wayland


Lizlor Wayland
Apprentie dans le domaine des Créatures Magiques



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Nombre de messages : 2188
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MessageSujet: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeVen 8 Fév - 18:13



Tell me the truth, remember that? We used to live by it.
And you know what's so good about the truth?
Everyone knows what it is however long they've lived without it.
No one forgets the truth, they just get better at lying.



Une peur panique et sans nom s'était emparée de moi et sur mon fauteuil je tremblais, et Merlin que j'avais froid, alors qu'il brûlait dans l'âtre un feu crépitant et que le bureau sobre mais chaleureux de Maman reflétait à l'infini les petites flammes qui dansaient sous mes yeux!

Ces flammes, je ne les voyais pas, parce que j'étais trop préoccupée par toutes les pensées qui tournoyaient dans ma tête comme un véritable balai endiablé. Parfois il surgissait des étincelles plus claires, j'avais des moments de lucidité et je me disais - mais oui, c'est bien sûr, comment ai-je pu ne rien voir. Comment ai-je pu ne rien voir! C'était cela sans doute le pire, au-delà du sentiment de trahison, au-delà de cette inquiétude dévastatrice, de la peur de perdre : c'était ce sentiment de culpabilité étouffant, et je me détestais d'avoir été si bête et si aveugle, une bien mauvaise meilleure amie en vérité! J'avais envie de pleurer, mais la voix rassurante de Maman me maintenait sur le fil. Il ne fallait pas que je cède, il ne fallait pas... En la regardant me sourire et me prendre dans ses bras - mes bras étaient gourds et j'avais l'impression d'être un pantin, inutile - je me fis la réflexion que je haïssais cet endroit, ce bureau, où j'apprenais l'atroce vérité dans toute sa splendeur, celle qu'on redoute plus que tout. Je nous revoyais, prostrées et en larmes alors qu'elle avait prononcé ces quatre terribles petits mots "Lizlor, Papa est mort" qui, combinés ensemble, avaient eu cette puissance dévastatrice de la perte d'un être cher. Voilà pourquoi je n'aimais pas cet endroit - ajouté à cela qu'au début de ma scolarité, Maman me convoquait encore dans son bureau, alors que maintenant je venais moi-même la voir, et prendre le thé avec elle chaque semaine. Mais nous allions dans sa chambre la plupart du temps : pas son bureau. Son bureau était austère et baigné d'horribles souvenirs, de mes angoisses d'enfant et de ma rébellion qui rebondissaient inlassablement entre les quatre murs quand je m'y trouvais et finissaient par me donner le vertige. Sans doute qu'elle le savait - je n'avais jamais osé lui dire - et que c'était pour cette raison qu'elle avait voulu que nous nous y retrouvions aujourd'hui... Parce qu'elle savait que j'allais de souffrir de ce qu'elle avait à me confier, et puisque cet endroit était condamné, autant qu'il le soit pour toujours.

J'étais stupide - tous les signaux que j'avais reçus! Et je savais, je savais qu'elle allait mal et que ce n'était pas une simple plaisanterie, que cela allait plus loin qu'Hadrian et leur séparation, que c'était enfoui, comme toute chose qui nous fait vraiment mal et qui se décide de se terrer au plus profond de nous, dans le silence, se nourrissant de toutes nos petits chagrins pour jaillir, plus forte que jamais, au moment le plus opportun. Ce fut le fait qu'elle était venue chercher une
bouteille dans les cuisines qui donna la force à mon esprit de trouver la clé de l'énigme, de mettre toutes les pièces du puzzle dans l'ordre.

D'abord, je protestai à grands cris - pourquoi Hazel Woodley était encore à son poste de professeur ?! - mais Maman me fit ce geste que font toujours les adultes : ce n'est pas de ton ressort, ça. Elle s'appliqua à m'exposer calmement le déroulé de la soirée, et je frémissais au dur et à mesure tant je trouvais cela atroce, jusqu'à en venir au fait que Ruby lui avait demandé de garder le silence. Pour me protéger, j'imagine. J'aurais sans doute fait pareil - jusqu'à ressentir ce que cela faisait d'être celle à qui on cache un lourd secret, jusqu'à me rendre compter que laisser la vérité dormir sous un joli tissu de mensonges ne la rendait que plus blessante à son réveil. Si Maman se décidait à me le dire, c'était parce qu'elle s'inquiétait pour Ruby et qu'elle jugeait que je devais savoir, étant donné que j'étais la personne la plus proche de Ruby, et que j'avais donc le pouvoir de l'aider. L'aider?... Mais je me sentais si faible, si impuissante, face à sa douleur! Cela m'échappa même et j'avais des larmes dans la voix quand je le dis à Maman :
mais on ne peut rien au chagrin des autres, même si on les aime, tu le sais bien... Tu le sais bien parce que je peux rien au tien et que tu as beau le cacher et le panser comme tu peux, il reste, toujours, il est en toi, en moi, partout, et pour toujours, comme un fardeau... Elle avait observé un court silence et dans ses yeux j'avais vu passer une ombre, mais elle avait continué, et elle m'avait dit qu'il fallait l'aider tout de même, la sortir de ce qu'elle faisait et qui n'était pas bon pour elle, que même si ce n'était pas effacer son chagrin à proprement parler, cela l'aiderait à se sentir mieux.

J'avais envie de me mettre les mains sur les oreilles, de fermer les yeux et que plus rien n'existe. Je sentais qu'on s'amusait à me déchirer, là quelque part, dans les ombres de mes pires terreurs, et qu'on m'ôtait tout ce que j'avais de plus précieux en me murmurant d'une voix sifflante et délibérément moqueuse : Tiens, tu vois? Tu n'as rien vu venir. Et je te le prends...

Mais céder à cet abandon dans lequel j'avais envie de rouler et de disparaître n'arrangerait rien, si bien que je finis par sentir une vague, ou plutôt un raz-de-marée, prendre forme à l'intérieur de moi, et que sur un regard d'encouragement de Maman, je quittai cet affreux bureau pour tenter désespérément de recoller les morceaux de ma Ruby que j'avais laissé s'envoler dans la tourmente en ne bronchant pas un seul instant.

Nous avions convenu, comme d'habitude, de nous retrouver à la tourelle puisqu'on était mercredi après-midi et que nous goûtions toujours ensemble, avec nos tartes au citron, en cet endroit. Tandis que je marchai d'un pas rapide et décidé - que Carlton ou un autre imbécile ne se trouve pas en travers de mon chemin sinon ce n'était pas un simple coup de poing que je lui envoyais, mais sa tête que j'encastrais dans le mur - j'essayai de me calmer, de ramener ma raison qui avait fuit bien loin, et je me disais : ne pleure pas, tu vas la faire pleurer, ne t'énerve pas, tu vas lui faire du mal, ne la gronde pas, tu vas la faire culpabiliser, ne fais pas semblant d'être calme, elle va croire que tu lui en veux, ne... J'avais les poings serrés, tellement que mes ongles s'incrustaient dans ma peau et me faisaient mal, mais je ne le sentais pas. Dans la tourmente de mes pensées je distinguai partiellement que : elle ne s'était jamais fait mal toute seule dans les escaliers mais que Woodley l'avait frappée et qu'elle m'avait menti, parce que ce soir-là elle était allée chercher de l’alcool dans les cuisines, ce qui m'amenait à réaliser qu'elle avait réellement un problème avec ça et que j'avais été bien trop laxiste - je me disais qu'après tout si elle se sentait mieux ainsi... - mais qu'au contraire j'avais eu raison, qu'elle en abusait, réellement, et qu'elle s'y rattachait, et qu'elle était... alcoolique. Il me paraissait impensable qu'on le soit à nos âges, je ne m'imaginais que des grandes personnes, à la peau rouge et ravagée, qui sentaient fort l'alcool bon marché. Mais il y avait sans doute plusieurs expressions de cette "maladie" et... Voilà. Il fallait qu'elle arrête.

C'était tout ce que je pouvais concrètement penser. Quand j'arrivais à la tourelle, Ruby était là. Il ne lui fallut pas plus d'une seconde pour qu'elle juge, à mon allure, que quelque chose n'allait pas, et son sourire se figea sur ses lèvres.

De tous les scénarios que j'avais envisagés, aucun ne se vérifia. C'était plus fort, plus grand que moi, et ça m'avait envahie toute entière et j'étais presque quelqu'un d'autre, comme hors de mon corps, comme avant, quand il y avait quelqu'un d'autre dans la brume avec moi... Mais cette fois... Si je scrutais bien le brouillard... C'était elle, c'était Ruby, avec ses longs cheveux ternis et ses yeux délavés par les larmes. Et elle s'en allait... Elle me quittait...

Je fondis sur elle, lui arrachai son sac des mains, le renversai sur le sol. Une flasque en verre tomba : je la saisis et l'envoyai s'écraser contre le mur à côté de nous, de toutes mes forces. Le bruit aigu du verre qui explose me fit sursauter et me sortit de l'étrange état dans lequel je me trouvais : je ne sanglotais pas mais de grosses larmes dévalaient mes joues et mon coeur et je tremblais comme une feuille, plantée devant Ruby.


- Mais qu'est-ce que tu fais, hein! Parce que crois que ça va t'aider ça! Que ça va le ramener! Que ça va changer ta vie! Ah c'est sûr oui ça te fait oublier - je hoquetai et manquai d'air, et les mots se bousculaient dans ma gorge, mais je ne pouvais pas m'empêcher d'exploser - mais c'est n'importe quoi, et en plus tu me prends pour une conne, et en plus tu me mens, et pourquoi c'est Maman qui me l'a dit? Et si c'était moi qui t'avais fait ça! Et en plus tu aurais pu me le dire à Noël... Et pourquoi tu bois comme ça, c'est mauvais, tu veux mourir ou quoi? Et tu t'en fous! Et moi, tu t'en fous? - Instinctivement j'avais reculé, parce que je ne voulais pas la voir me dire mais non Liz, je ne m'en fous pas, je t'aime... - MAIS C'EST PAS COMME CA QU'ON AIME LES GENS!

Je dus me taire quelques secondes, je n'avais plus d'air dans les poumons, et je m'appuyai à la barrière : tout mon corps tremblait sans que je le contrôle et je voyais flou, de plus en plus, des points blancs dansaient devant mes yeux. La colère? La peur? L'impuissance? Je n'avais même plus idée des mots qui fusaient de mes lèvres.
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Ruby Standiford-Wayland


Ruby Standiford-Wayland
Apprentie à Sainte Mangouste



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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeDim 10 Fév - 16:42

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"What is in this wine?
The more I drink the more I wander off."


Elle pourrait revenir, me prendre sur les faits à nouveau, ça pourrait recommencer, elle, un autre, peu importe. Tout pourrait revenir, tous les souvenirs, mais qu’est-ce que ça changerait ? J’en ai besoin. Je le sais, c’est le placard d’en bas, il faut juste que je demande aux elfes quelque chose et pendant qu’ils sont occupés, d’un coup de baguette, je la récupère. Voilà... Oui, je l’ai ! Je l’ai ! Maintenant, ça ira mieux. Oui, il est tôt, mais j’ai déjà attendu avant de descendre ici… Je me suis mis une limite, j’ai tenu, j’ai le droit… D’avoir ma récompense. Peu importe si Woodley revient, si elle me refait mal.

Je le mérite, pas vrai ?

La salle sur demande… Elle est si froide. Elle refuse de me donner ce que je veux… Pourquoi ? Pourquoi il n’y a que ce sol froid ? Et pourquoi est-ce qu’il tourne, encore, encore ? Les lumières… Je ne veux pas me lever. Pourquoi est-ce que la bouteille est déjà presque vide ? Quelle heure est-il ?

Je suis fatiguée, fatiguée.

Lizlor, elle pourrait le savoir aussi. Elle pourrait me trouver là… Qu’est-ce qu’elle dirait ? Elle sait déjà… Elle sait toujours tout, mais je ne peux pas… Elle aura peur pour moi.

Je ne peux pas la protéger.

____________

Je bougeai légèrement mes doigts, les passant sur les pierres froides sur lesquelles j’étais allongée. Mes cheveux s’étalaient tout autour de moi, comme une auréole que je n’aurais pas mérité, et je frottai mes paupières doucement en soupirant. Lentement, je roulai pour me mettre sur le dos, avant de me redresser lentement pour observer mon environnement : la salle sur demande. Vide. Il n’y avait qu’une immense horloge sur le mur, dont l’aiguille bruyante comptait les secondes. 9h14. J’avais raté mon premier cours… Encore. Sur le sol à mes côtés s’étendait mon sac renversé, quelques mégots écrasés et ma flasque vide –comme la pièce, comme moi. Et une bouteille de Whisky Pur feu, celle des cuisines, quasiment vide aussi… -comme la pièce, comme moi. Ma tête brulait, d’une douleur connue et presque désormais agréable, mais elle me semblait aussi bien vide –comme la pièce, comme moi. Qu’est-ce que j’ai fait hier soir ? Doucement, je me trainais jusqu’à mon sac pour y chercher mon petit carnet dans lequel je notais tout ce que je devais faire… Les pertes de mémoire devenaient fréquentes et je devais agir en conséquence. J’en tournais les pages lentement, frémissant du bruit du papier sous mes doigts qui grésillait dans mes oreilles fatiguées par l’alcool d’hier soir. Sur la dernière page, je ne pouvais lire qu’un début de phrase « Je ne… ».

Le reste était vide –comme la pièce, comme moi.

Je m’étais trainée jusqu’à mon dortoir, d’un pas lourd et fatigué, avant de m’écrouler à nouveau sur mon lit. J’avais mal au dos d’avoir passé la soirée sur le sol, et je continuais de reconstituer dans ma tête le déroulement de celle-ci. J’avais pris la bouteille après les cours… Est-ce que j’avais été dîné ? Avec qui ? Non… Non, je crois que j’avais été directement dans la salle sur demande et que j’étais restée assise là, à boire et à fumer… Jusqu’à quelle heure ? A quoi avais-je pensé ? Tout était si flou… Tout était toujours flou.

Je me levais finalement, décidant de prendre une douche et de me dépêcher pour être en cours vers 10h, pour celui de potions. Je pourrais toujours dire que je ne me sentais pas bien, ou que mon réveil n’avait pas sonné. Prudence allait savoir la vérité… Mais maintenant, ça lui était égal à elle, à elle aussi, alors pourquoi y penser ? Les professeurs n’étaient de toute manière pas dupes, et encore moins à mon sujet qui se faisait de plus en plus… Désespéré ? Oh, j’avais réussi jusque-là à tenir un rythme plus bas que celui habituel, mais toujours convenable. Mais depuis… Environ deux semaines, c’était la chute libre. Je passais plus de temps à l’infirmerie à dormir qu’assise sur une chaise, j’avais beaucoup de devoirs en retard et les professeurs commençaient à perdre patience. Comment leur dire que je n’arrivais plus à m’accrocher ? Ils devaient tous croire que ça aurait dû aller mieux, comme tous mes camarades. Car j’allais finir par oublier Hadrian. Oh, bien sûr, ça commençait à faire son chemin. Mais s’il n’y avait que ça, ah ! Maintenant, je m’étais enfoncée moi-même dans des choses peut-être plus complexes, j’avais fait d’autres conneries, perdu d’autres personnes… Prudence. Et… Et
lui. Mais je devais m’en foutre, surtout de lui, il ne représentait rien. A vrai dire, c’était simplement handicapant car je ne pouvais plus aller au bar boire tranquillement, ni lui parler d’ailleurs et… Non, attendez, je m’en fichais de ça ! L’alcool me manquait, la tranquillité du bar ma manquait, son cocktail me manquait. Mais pas Ewan. Pas vrai ?...

Je laissais l’eau chaude dévaler chaque courbe de mon corps et chaque recoin de ma peau, espérant comme toujours qu’elle réussirait à me laver –vraiment. Ma tête commençait à retrouver un peu de sa contenance, la douleur se dissipant ou simplement devenant assez familière pour n’être plus désagréable comme l’avaient été les premiers réveils de soirées. Par soirée, j’entendais aussi celle où j’étais avec Tirya, Annalisa, ou Liz, et d’autres élèves, qu’il y avait la musique, qu’on dansait et riait. Pas celle que je passais sur le sol de la salle sur demande même si désormais, elles étaient beaucoup fréquentes. Peu importe.

Devant le miroir, en sous-vêtement, je me surpris à me regarder pour la première fois depuis un petit moment. Mes cheveux, encore humides, dévalaient piteusement mes épaules en des boucles fatigués. D’immenses cernes sous mes yeux éclairaient ma peau blanchâtre, et me donnaient un air presque cadavérique. Je n’avais pas perdu de poids cependant, mais c’était peut-être la manière dont je me tenais qui donnait cette impression de fatigue… Lentement, je passais mes doigts sur le haut de mes cuisses, frissonnant un peu. Je pouvais en sentir le relief…
Les cicatrices. Elles se dispersaient sur mes cuisses, se concentrant surtout sur le haut et les hanches, que j’avais considéré comme les endroits les moins visibles. Il n’y en avait pas beaucoup, trop pour quelqu’un de censé, mais je me limitais pourtant… Je ne l’avais fait que trois fois. La troisième avait été un peu plus violente, certes, pensai-je en suivant de mon index la longue trace qu’avait fait mon rasoir sur ma hanche, atteignant un peu mon ventre. Les plus vieilles, datant des premières fois, avait commencé à cicatriser et la peau pelait un peu, et j’espérais que la nouvelle qui se formerait soit… Mieux. Mais ça ne marcherait pas, je le savais, et je savais que continuer à m’ouvrir ainsi n’allait rien arranger. Pourtant, j’avais une telle satisfaction à sentir la douleur qui, horizontalement, se répandait lorsque la lame soulevait doucement ma peau, jusqu’à la faire saigner lorsque j’appuyais légèrement plus fort. J’éprouvais même un étrange plaisir lorsque je les voyais, même lorsque ça ne saignait plus, lorsque je comprenais que c’était moi qui avait fait ça. Que je pouvais le faire, me faire mal… Que ça avait du sens. Je choisissais, ou non, d’avoir mal… C’était une douce douleur.

La matinée se déroula lentement, je cherchais Lizlor des yeux sans jamais la trouver, et je passais mon cours de potions à côté d’Annalisa. Je sentis les regards se tourner vers moi avec étonnement lorsque je levais la main pour répondre à une question, chose que je n’avais pas faite depuis un long moment. La question ? Comment décupler les effets de la corne de licorne dans le Felix Felicis.

Des plumes de cygnes.

Cette unique question, cette réponse, ces quelques secondes avaient été fatales à mon esprit que j’avais senti dévié sur un terrain que je refusais, que je repoussais. Et, comme un réflexe que j’avais fini par prendre, je sentis ma main déviée dans mon sac jusqu’à la poche intérieur qui abritait mon antidote à moi –la flasque que j’avais rempli ce matin avant de partir. Mais j’étais en cours, et cet après-midi j’avais rendez-vous avec Lizlor. Si je commençais, j’allais vouloir continuer et je ne voulais pas confirmer les soupçons que ma meilleure amie avait déjà. Tant que je n’arrivais pas à gérer ce problème, je ne pouvais pas lui en parler, pas question qu’elle s’inquiète. Quand j’aurais arrêté peut-être, je pourrais lui dire qu’à un moment j’avais un peu trop bu mais sûrement s’en doutait-elle déjà et si elle ne s’inquiétait pas ça voulait bien dire que ça ne devait pas être trop grave !… Bien sûr qu’elle s’inquiétait, j’étais stupide de vouloir croire le contraire. Tout n’était qu’une question de temps, je le savais. Mais quand ?...

Perchée en haut de notre tour, de notre repère, je fumais lentement une cigarette en attendant ma Gryffondor. J’étais toujours en avance, et elle en retard mais finalement, j’aimais ça. Parce que j’entendais toujours ses pas qui montaient les marches, et ils raisonnaient à l’unisson avec les battements de mon cœur qui se faisaient presque plus pressants, sentant que son oxygène approchait. Mais aujourd’hui, je le sentis dès que le son monta jusqu’à moi. Elle ne marchait pas comme d’habitude… Je sentis mon sourire se crisper, inquiète soudain. J’avais croisé beaucoup de regards au cours de ma vie. J’y avais vu de l’affection, de l’admiration, beaucoup de pitié, de la haine, de la gêne. J’y avais vu de la colère parfois, beaucoup. J’en avais croisé oui, et ils voulaient tous dire quelque chose de différent. Mais je n’avais jamais croisé ce regard-là. Celui de Lizlor qui voulait dire qu’elle était énervée contre moi.

Soudain, je sentis mon sac se faire arracher de mes mains et dans une nuée de boucles blondes, je contemplais Lizlor qui rageusement le vidait, incapable de bouger. Je savais ce qu’elle faisait, et elle aussi. Quelques secondes plus tard, elle avait trouvé ce qu’elle cherchait. Ma flasque fût envoyée contre un mur de la tourelle et éclata en milliers de petits morceaux que je fixais. Il n’y avait qu’un mot qui vint à mon esprit à ce moment-là :

Enfin.

Je ne pouvais plus mentir, je ne le pouvais juste plus. Je voulais qu’elle le sache, peut-être.


- Mais qu'est-ce que tu fais, hein! J’avais imaginé de nombreuses fois cette scène où elle comprendrait, comme je l’avais compris en Italie, que l’alcool était devenu un problème plus qu’une solution. Mais devant ses larmes de détresse soudain, je ne voulus plus du tout penser qu’enfin elle le savait, je ne voulais plus être soulagée d’en finir avec ce mensonge… Plus du tout. Je sentis mon cœur s’accélérer. Parce que crois que ça va t'aider ça! Que ça va le ramener! Que ça va changer ta vie! Je le croyais. Je suis tellement désolé Liz, je le croyais vraiment… Arrête de pleurer… Ah c'est sûr oui ça te fait mais c'est n'importe quoi, et en plus tu me prends pour une conne, et en plus tu me mens, et pourquoi c'est Maman qui me l'a dit? Non, non ! Non, ce n’est pas ça ! Comment tu peux penser ça Liz, je ne voulais pas te faire du mal ! Je… Je ne savais pas quoi faire ! Et si c'était moi qui t'avais fait ça! Plutôt mourir. Et en plus tu aurais pu me le dire à Noël... Je pensais que ça allait passer, que j’allais réussir à être heureuse comme quand je suis avec toi, loin de tout, pardon, je n’arrive pas… Et pourquoi tu bois comme ça, c'est mauvais, tu veux mourir ou quoi? Non, je ne te laisserais jamais ! Tu es folle ! Et tu t'en fous! Et moi, tu t'en fous? NON ! MAIS C'EST PAS COMME CA QU'ON AIME LES GENS!



- Je… Je t’ai blessé Lizlor, je suis un monstre et je ne me le pardonnerais jamais.

Je restais debout, droite, sans bouger pendant quelques secondes, regardant ma meilleure amie pleurer et trembler, sans faire un seul mouvement. Comment avais-je pu croire que ça ne se serait pas déroulé comme ça ? Je la connaissais… Par cœur. J’avais continué à me faire du mal, plus qu’elle ne l’imaginait, sans lui dire et en sachant très bien qu’à la fin, elle le verrait, elle le devinerait. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que j’avais ça ? MAIS POURQUOI ? Pourquoi lui avais-je fais ça ?! Je lui avais promis, que je resterais, je lui avais promis, je m’étais promis à moi-même, que j’allais l’aider, être là… Et je savais que ça passait par mon propre bonheur, car nous étions complémentaires, ça ne pouvait pas être l’une sans l’autre. Je l’avais pourtant fais, j’avais choisi de moi-même de continuer à boire, de m’ouvrir, et je me haïssais en cet instant même d’en avoir encore envie. D’être aussi faible, de faire ça à Lizlor. Les larmes avaient commencé à perler, à se faufiler sur mes joues, tandis que je contemplais les dégâts que j’avais provoqué. C’était moi, c’était encore moi, c’était toujours moi. Et je recevais les contrecoups que je méritais.


- C’est... Je pensais que c’était comme ça, pour ne pas t’inquiéter… Je… Quelque chose avait cependant surgit. J’étais un monstre, mais je ne pouvais pas, je ne pouvais plus laisser Liz. Me laisser mourir n’allait pas la sauver, elle ne serait pas mieux sans moi –je l’aurais voulu, mais je savais que ce n’était pas le cas. Elle était la seule, l’unique, qui me donnait ce sentiment. Je voulais me battre pour elle, rien que pour elle, et si ça impliquait de me battre contre moi-même, je l’aurais fait. J’avais tort, je l’ai toujours su mais… Je… Les larmes s’étaient faites plus pressantes, plus douloureuses et mon menton tremblait tandis que j’essayais tant bien que mal de finir mes phrases. Je voulais, non je veux toujours… Je suis désolé, je peux plus te mentir, j’arrive plus à contrôler, j’ai besoin de ça...

Les sanglots commençaient à monter et je me haïssais de pleurer alors que c’était Lizlor que je devais consoler, mais je ne pouvais pas supporter de la voir dans cet état sans sentir mon cœur se tordre, et ça faisait tellement plus mal qu’une simple lame contre ma peau.

- Les bleus qu’elle a fait… Elle savait de qui je parlais. Sara lui avait dit… Et je ne pouvais pas lui en vouloir. Je pouvais les cacher. Je ne voulais pas que tu… Tu ne pouvais rien faire contre elle, on ne peut rien. Je voulais te le dire, mais j’avais tellement peur et le temps est passé et je savais que ça te blesserait que je te l’ai caché… Mes épaules se secouaient doucement, tandis que je cherchais les yeux de Liz derrière sa crinière qui me paraissait terne. A Noël, c’était tellement bien, je te jure que je n’ai rien bu, je ne voulais même pas !... Je pensais que j’allais arrêter mais en revenant... Et je… Je réalisais pas que c’était mauvais, mais maintenant je sais… Je sais que je suis comme elle. Comme ma mère.

Et je ne pouvais pas lui infliger ce qu’elle m’avait fait, je ne pouvais pas lui faire du mal… Je fis un pas vers Lizlor qui se tenait à la barrière, hésitante. Pouvais-je?...

- Je… Je voulais pas… Non, je veux pas, que tu crois que tu ne peux rien faire… Parce que Lizlor, s’il te plait je… Ma voix se perdait, incapable d’articuler tout ce qui se bousculait en moi. Tu m’aides je te jure, c’est ma faute, c’est encore ma faute… Tremblante, j’avais tendu ma main vers, sans oser toucher son corps qui s’agitait de sanglots. Je t’en supplie…

Prend ma main, pitié. Viens dans mes bras.

Ou je n’ai plus rien.



"You're watching me rebel
Believing stories only hearts can tell
But when is it enough?
When do I call my feelings on their bluff

And I feel homeless."


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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeLun 11 Fév - 19:37

Je me sentais mal, vraiment très mal : c'était sans doute l'expression physique de tout ce qui me précipitait le cœur et l'esprit. Mais par moment j'avais l'impression que le souffle me manquait et que je ne le retrouverais jamais plus ; j'avais chaud, puis froid, j'étais traversée de torrents de lave incandescente et l'instant d'après on me plantait des pics de glace dans tout mon corps ; je tremblais comme une possédée et rien n'y faisait, pas même l'air que je happais difficilement, je voyais trouble et je me sentais faiblir - la rambarde m'était d'un bien précieux secours. Je n'avais jamais été dans cet état-là, pas même dans mes crises d'enfant, quand j'étais en colère ou que j'avais juste envie de hurler contre la terre entière et que je finissais par bouder, terrée dans mon lit. Là, je ne contrôlais plus rien et mon malaise physique augmentait le tourbillon de mes peurs et de mes doutes, je voyais déjà le moment où j'allais exploser, sans doute, ou bien où j'allais tomber inconsciente sur le sol, et si j'aurais aimé me calmer car je savais pertinemment que cette crise de panique flagrante n'allait rien arranger à l'affaire, j'en étais incapable. Mes nerfs avaient pris possession de moi, totalement, et ils étaient devenus fous, et je ne pouvais que subir leurs émois. Et j'avais reculé car je sentais mes pulsions animales rejaillir en moi et se cacher juste sous ma peau, à fleur, prêtes à bondir, et alors que Ruby s'approchait de moi probablement aussi tremblante que je l'étais, j'avais envie de me jeter sur elle, de pleurer, de la secouer, de la serrer contre moi et de la frapper, tout en même temps - mais pourtant je savais, oh, je savais! que ce n'était pas de sa faute, mais un voile terrible m'était tombé sur les yeux, et pour l'instant, tout n'était en moi que crainte et colère qui, mélangées l'une à l'autre, formaient un cocktail des plus explosifs. C'était comme si j'étais sorti de mon corps et que je me voyais, les joues rouges trempées de larmes, le regard assassin, hurlant comme une hystérique et gesticulant comme si je tentais de me battre contre un monstre invisible qui menaçait de m'étriper.

Je voulais me calmer mais je ne pouvais pas : il y avait trop de secrets accumulés et de peurs passées sous silence pour que j'expose calmement ce que je ressentais. Et quand par moment je la détestais je me détestais encore plus - comment pouvais-je! Mais il y avait quelque chose de si terrible dans ce qu'elle avait accompli sinueusement dans mon dos, qu'elle le veuille ou non, que je lui en voulais, je m'en voulais, je m'en voulais à me jeter depuis la tourelle d'avoir fermé les yeux comme une idiote, je lui en voulais d'avoir cru bon me protéger en ne me disant rien, je lui en voulais d'avoir omis les horreurs que Woodley lui avaient fait subir, je lui en voulais de me faire ressentir la trahison parce que c'était Maman qui m'avait tout appris - Maman qui l'avait su avant moi -, je lui en voulais de s'en vouloir et depuis toujours, je lui en voulais de se faire du mal, je lui en voulais de m'infliger ça, je m'en voulais de lui en vouloir pour tout ça, je m'en voulais de n'être pas capable d'être calme alors qu'elle avait besoin d'aide, je m'en voulais de ne même pas avoir compris ce qui se tramait dans l'ombre alors que je SAVAIS qu'elle allait mal mais que je me contentais de mes fatalités, de penser que je ne pouvais rien à tout ça...

Mais pourtant c'était vrai, je n'y pouvais rien...

Et le feu repartait de plus belle, j'avais envie de hurler à m'en percer les tympans parce que tout ça n'était pas juste, que j'en avais assez d'être inutile, de voir le monde comme je le voyais, de veiller sur ceux que j'aimais, alors qu'ils ne cessaient de souffrir malgré tout et qu'il n'y avait rien que je puisse faire, et j'étais là, à tenter de rapiécer ce qui ne pouvait pas être réparé, parce qu'on ne guérit pas toutes les blessures, et j'avais envie de planter mes propres griffes dans mon visage et de m'arracher les yeux et les oreilles pour ne plus rien voir et ne plus rien entendre car je me sentais détruite par tout ce qui était hors de ma portée ; quel cauchemar, quel cauchemar, cette impuissance!


- C’est... Je pensais que c’était comme ça, pour ne pas t’inquiéter… Je…

- EH BIEN C'EST RATÉ ET C'EST ENCORE PIRE!... Je ne pouvais pas m'empêcher mais je le devais ; comme les larmes qui dévalaient mes joues sans que je puisse les retenir, les phrases, assassines, avaient besoin de jaillir elles aussi, mais je ne le voulais pas...

- J’avais tort, je l’ai toujours su mais… Je… Je voulais, non je veux toujours… Je suis désolé, je peux plus te mentir, j’arrive plus à contrôler, j’ai besoin de ça...


Contrôler, contrôler, contrôler, pourquoi n'avait-elle que ce mot à la bouche!! Elle ne voyait pas qu'en... J'avais plaqué ma main sur ma bouche pour m'obliger à me taire, alors que plus ça allait moins je voyais clairement ce qui m'entourait, que mes poumons me faisaient mal d'être trop privés d'air, et que ma peau me brûlait tellement que j'aurais pu me l'arracher pour ne pas avoir à supporter cette souffrance. Mais le pire était mon cœur : il cognait comme s'il avait voulu jaillir de ma poitrine, et il battait si fort que mes tempes en bourdonnaient.


- Les bleus qu’elle a fait… Je pouvais les cacher. Je ne voulais pas que tu… Tu ne pouvais rien faire contre elle, on ne peut rien. Je voulais te le dire, mais j’avais tellement peur et le temps est passé et je savais que ça te blesserait que je te l’ai caché… A Noël, c’était tellement bien, je te jure que je n’ai rien bu, je ne voulais même pas !... Je pensais que j’allais arrêter mais en revenant... Et je… Je réalisais pas que c’était mauvais, mais maintenant je sais… Je sais que je suis comme elle. Comme ma mère.

Plus elle parlait, plus elle essayait de justifier, et plus j'entendais ces horreurs qui me révoltaient de sa propre bouche, je me sentais trembler d'avantage et sangloter comme une idiote, et je ne voulais pas, j'en avais assez, je voulais être forte parce que je le devais... Mais je n'y arrivais pas.

Le fait qu'elle évoque sa mère et qu'elle s'y compare - non, jamais! - acheva de m'ôter toute raison, et les points qui dansaient devant mes yeux s'agglutinèrent en un énorme point éblouissant, et si je n'avais pas eu un sursaut de force, parce que je ne POUVAIS pas l'abandonner ainsi, je crois que je me serais effondrée.


- ARRÊTE DE PLEURER!
m'entendis-je crier encore une fois, sans que je le veuille, alors que la vue des larmes qui se formaient dans ses beaux yeux bleu saphir achevait de me broyer le cœur.


- Je… Je voulais pas… Non, je veux pas, que tu crois que tu ne peux rien faire… Parce que Lizlor, s’il te plait je… Tu m’aides je te jure, c’est ma faute, c’est encore ma faute… Je t’en supplie…

Cette fois encore je ressentis la pulsion de me jeter sur elle et de la pousser de toutes mes forces contre le mur comme la bouteille, et quoi, peut-être qu'elle aurait explosé comme une simple bouteille de whisky, elle aussi?! Mais ce pas en avant et sa main tendue me provoquaient, et cette expression de violence que je contenais ne signifiait qu'une chose et je le savais : la peur, la peur atroce et acide qui me rongeait de l'intérieur comme de l'arsenic, parce j'aimais Ruby tellement fort que sa souffrance était la mienne, que son mal-être était le mien, et que je ne pouvais pas être heureuse si elle ne l'était pas. C'est pas vrai, tu mens encore, disait-une petite voix dans ma tête, je ne sers à rien, je ne t'aide pas... La preuve. Et à ce moment-là me revinrent les paroles de Maman, que j'avais essayé de ne pas trop me répéter jusque là : les horribles paroles qui me racontaient, avec des pincettes parce qu'elle savait que j'allais mal le supporter, ce que cette femme avait fait subir à Ruby, ces humiliations, cette violation de son esprit, comme si elle était condamnée, encore et toujours, à ce qu'on agisse par la force et qu'on la broie un peu plus...

C'en était trop et je cédai - la rambarde ne m'était presque plus d'utilité tellement je me sentais faible, j'avais l'impression d'être faite de coton mou et sans consistance - et je tombai dans ses bras plus qu'autre chose, manquant sûrement de la renverser, mais je n'en savais rien. Dès l'instant où je me sentis serrée très fort contre elle... C'était comme si soudain j'avais atteint cette île paradisiaque en pleine tempête, l’ilot protecteur... Mais le calme arrive toujours avant la tempête, et le temps que je reprenne une longue respiration, qui avait le goût et le parfum des plages de l'Oregon mélangé aux cheveux gorgés de soleil de Ruby,, j'éclatai en sanglots, si fort qu'ils me firent mal en me déchirant la poitrine et la gorge. Cette fois si je ne voyais plus rien c'était les larmes qui me voilaient la vue, si je ne respirais plus c'était tout mon être qui hoquetait violemment, et je sentis encore la crise d'angoisse s'emparer de moi, tandis que les larmes, libératrices, tentaient de vider le trop-plein de mes émotions.

- Mais j'ai tellement peur pour toi et je ne sais pas quoi faire, je ferais n'importe quoi, n'importe quoi... Il m'était difficile de parler autant qu'il m'était difficile d'avoir les idées claires, mais ma conscience n'était pas loin, dans le brouillard elle aussi, et elle essayait péniblement de rentrer à la maison : C'est trop dur, je ne peux pas me battre toute seule, si toi tu te bats pas, si tu abandonnes... Comme avec Maman, j'avais mon visage dans son cou, là où j'étais à l'abri, et mes mains allèrent se poser à plat sur le visage de Ruby pour effacer doucement ses larmes. Qu'est-ce qu'on fait, maintenant? murmurai-je entre deux sanglots.

Aussi violente qu'elle m'était, je voulais la vérité, l'entière vérité, la seule arme qui nous permettrait d'avancer.
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Ruby Standiford-Wayland


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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeJeu 14 Fév - 19:48



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Oui, je l’avais imaginé, ce moment où tout risquait de basculer. Parce que Lizlor n’était pas aveugle, j’étais de moins en moins discrète et ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle accepte d’ouvrir les yeux. Je ne lui en voulais pas de ne peut-être pas avoir compris de suite, car je ne l’avais pas fait non plus, je savais qu’elle n’osait simplement pas me rajouter une pression avec ses inquiétudes. C’était comme un étrange cercle, je refusais de l’inquiéter, elle refusait de m’inquiéter, et on tournait en rond comme ça en pensant pouvoir se protéger. Mais je savais que j’étais la fautive dans l’histoire –je l’étais toujours. Nous n’avions jamais fonctionné comme ça, elle et moi, nous ne nous mentions pas, jamais. Je ne me souvenais pas une fois lui avoir caché quelque chose. J’avais eu du mal à me confier parfois, surtout sur mon enfance. J’avais eu la lâcheté de lui avouer l’incident dans une lettre, incapable d’affronter son regard qui était pourtant le seul que je connaissais qui ne m’avait jamais jugé, pas une fois. Je savais qu’elle ne le ferait pas, et qu’elle ne l’aurait pas fait si je lui avais parlé de mes parents. Après cette révélation, il nous était arrivé d’en reparler, surtout lorsque nous étions toutes les deux en Oregon. J’entendais encore le bruit des vagues qui échouaient leur écume sur les grains blonds du sable qui me rappelaient la chevelure de Lizlor. Et entre cet océan et les étoiles du ciel, dans la fumée de nos cigarettes et l’ivresse de nos rires, de l’alcool, je sentais mon cœur si facilement s’ouvrir à ma meilleure amie. Alors pourquoi un tel basculement ? Pourquoi n’avais-je pas su lui dire ce qui s’était passé quand Hadrian m’avait plaqué, quand Woodley m’avait trouvé ? De quoi avais-je eu peur ? De la décevoir, de ne pas être aussi forte que je l’aurais voulu ? Mais non, je savais qu’elle ne m’aurait jamais jugé ! Je le savais ! Alors pourquoi ? Pourquoi est-ce que je m’étais enfermée dans… Dans ça ?

- EH BIEN C'EST RATÉ ET C'EST ENCORE PIRE!...

Je recevais ses réponses comme des coups de griffes, de couteaux, la douleur mais surtout la peine m’étaient insupportables –et méritées. Je savais qu’elle avait raison, et je m’en voulais tellement de ne pas y avoir réfléchi plus tôt, alors que je savais que Lizlor le vivrait ainsi –peut-être avais-je voulu minimiser sa douleur ? J’aurais réagis tout comme elle le faisait en cet instant même. Dans ma chute, j’avais oublié qu’elle et moi ne formions qu’une, que notre amitié fusionnelle liait nos sentiments et nos vies. Je ne pouvais pas croire qu’en me détruisant, je ne la toucherais pas. Si me faire du mal m’était presque égal, en faire à Lizlor n’était simplement pas imaginable et à vrai dire, il n’y avait rien de plus douloureux de savoir que sa peine était ma responsabilité. Je me haïssais, je me haïssais tant ! Je contemplais les dégâts au travers des soubresauts qui agitaient les épaules de ma Gryffondor, des larmes qui s’échappaient de ses azurs, et mon impuissance face à une douleur que j’avais causé. Je devinais que c’était sa mère qui lui avait dit, car elles devaient passer l’après-midi ensemble et peut-être… Peut-être qu’elles avaient parlé de moi, parce que je comptais pour elles ? Les Wayland m’avaient tant apporté, et voilà comment je le rendais à Sara, en mentant à sa propre fille, en la mêlant à nos histoires d’adolescentes qu’elle devait deviner plus que je ne l’aurais voulu…

- ARRÊTE DE PLEURER!

Je ne peux pas ! Arrête de crier, pitié ! Voulus-je répliquer, mais j’avais trop peur de faire plus de dégâts, et il fallait que je laisse tout sortir, que je lui dise tout… Et chaque mot que je laissais échapper devait lui faire l’effet d’une bombe, j’entendais presque les secousses de son cœur au fur et à mesure de mes confessions. Je n’arrivais pas à stopper les larmes moi aussi, pas parce que j’étais triste pour moi, mais bien pour Lizlor, j’avais tellement mal qu’elle ait mal –et à cause de moi ! Si je lui avais dit plus tôt, si j’avais vu ce que ça lui faisait, peut-être n’aurais-je pas continué et surtout, j’aurais compris à quel point c’était mauvais… J’avais fini par le voir en Italie, mais c’était pire aujourd’hui devant le regard affolé de ma meilleure amie dans lequel je revoyais toutes ses soirées que j’avais passé à boire, tous les trous de mémoires, mes pleurs, mes colères, mes migraines, tout ce que j’avais gâché à cause de cette foutue habitude –et pourtant, je m’y complaisais tant dedans ! Parce que quand j’étais ivre, j’oubliais tout, ou peut-être expérimentais-je des sensations qui maintenant m’étaient familières, comme si j’étais en sécurité… Parfois, je ne savais même plus pourquoi je reprenais une gorgée, mais j’en avais envie, comme j’avais envie de cigarette parfois bien que la sensation soit différente avec l’alcool : j’en avais besoin. Vraiment besoin.

Mais j’avais encore plus besoin de Lizlor, et qu’elle soit heureuse.

Ma main la suppliait, j’avais si peur de la toucher et de la briser, littéralement. Les secondes me parurent une éternité jusqu’à que finalement elle ait un mouvement vers moi, un mouvement violent qui manqua de me faire tomber, de surprise et d’épuisement, de soulagement. Je l’attrapais et soudain c’est comme si mon cœur s’écrasait dans ma poitrine pour faire jaillir d’autres larmes, j’étais incapable de m’arrêter tant je m’en voulais mais je ne pouvais pas la lâcher, jamais, et mes bras la serraient si fort… J’aurais voulu aspirer sa douleur, quitte à doubler la mienne, ça m’était bien égal, je voulais simplement qu’elle soit là dans mes bras et que je puisse la protéger à nouveau. Je voulais la bercer, mais elle tremblait tant ! Elle s’étranglait dans ses sanglots et je la serrais encore plus fort, tellement fort, je voulais tant qu’elle comprenne tout ce que je sentais pour elle, et à quel point j’étais désolé ! Je murmurais de vains « calme-toi » et « chut » en caressant ses cheveux d’une main, mais je me sentais inutile, incapable de la calmer et pourtant, j’aurais tout fait ! Je la laissais sangloter sans pouvoir dire quoi que ce soit, ma voix étranglée par mes propres pleurs que je voulais retenir pour ne pas encore être faible, mais sa douleur m’était simplement insupportable, comme un immense poids qui s’abattait sur moi… Je me souvenais de la sensation que j’avais eu quand elle m’avait prise dans ses bras alors que je pleurais d’avoir couché avec Chuck, et de ce secours qu’elle m’avait apporté, et je voulais faire de même –mais comment, lorsque j’étais aussi la source des larmes ?...


- Mais j'ai tellement peur pour toi et je ne sais pas quoi faire, je ferais n'importe quoi, n'importe quoi...

Je la berçais encore, sentant chaque parcelle de mon cœur exploser en entendant cette phrase, comme une supplication, et je refusais qu’elle se sente impuissante, non, si seulement elle savait !

- Mais… Mais Lizlor, tu viens de le faire… Murmurai-je tout doucement.

Et je ne faisais pas qu’allusion à cette flasque explosée contre les murs de cette tour, de notre tour, mais de cette panique qui venait de la saisir. C’était comme une sonnette d’alarme, parce que si mon corps voulait, tant, trop, boire, ce n’était pas lui qui déciderait cette fois. Ce n’était pas non plus mon cerveau embrumé et accro, non, c’était bien mon cœur. Et lui, il ne battait plus que pour elle parce que si elle n’avait pas été là, oh, mais qui aurais-je été de toute manière ?


- C'est trop dur, je ne peux pas me battre toute seule, si toi tu te bats pas, si tu abandonnes... Je m’étranglais aussi dans mes sanglots, et ça me faisait tellement mal de l’entendre dire ça… Et ses mains se posèrent sur mes joues pour effacer mes larmes, et non, c’était à moi de faire ça !... Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ?

Ma main frottait le haut de son dos, doucement, comme pour la réchauffer, et je poussai un petit soupir. Je ne pouvais pas… Je ne voulais pas abandonner. Je réalisais tout à coup quelque chose ce que je savais déjà, mais il me revint en mémoire bien plus brutalement et peut-être en compris-je soudain le réel sens. Lorsque j’avais dit à Annalisa que je n’abandonnerais pas, je n’avais pas eu le cœur de vraiment y croire, mais avec Lizlor c’était différent. Elle était différente pour moi. J’avais une affection énorme pour ma propre demi-sœur, et pour beaucoup de gens autour de moi mais ma meilleure amie n’avait rien à voir, et d’ailleurs je ne savais même pas pourquoi je continuais de l’appeler ainsi. C’était… Comme une sœur, non, encore plus fort, c’était quelque chose d’ineffable, je ne pouvais pas l’expliquer, pas même à moi, c’était simplement ce que je sentais… Elle était un bout de moi, non, elle était moi.

J’avais fini par calmer mes pleurs jusqu’à les tarir, et je fermais les yeux un instant tout en berçant Lizlor, sachant très bien ce que je devais faire… Ce que j’allais faire. Nous avions commencé, autant finir, car je l’avais décidé dès qu’elle avait commencé à sangloter : je ne voulais plus jamais lui mentir, jamais.

- Ce qu’on va faire… Ma voix était mesurée, j’essayais qu’elle ne tressaute pas de mes derniers sanglots malgré tout. Ma main se passait sur ses cheveux, comme pour les lisser, tandis que la tenais toujours un peu comme une mère tient son enfant qui a un chagrin. C’est que je vais arrêter, enfin, je vais essayer. Parce que ça n’allait pas être si facile… Je te promets pas que parfois j’en aurais pas envie, ou que je ne craquerais pas mais… Mais je te le dirais, d’accord ? Murmurai-je dans un souffle, le cœur toujours trop lourd dans ma poitrine. Et j’abandonnerais pas, pour toi, promis. Je t’aime Lizlor, je t’aime tellement… M’entendis-je encore souffler tout doucement, comme une berceuse.

J’avais fermé les yeux parce que les larmes avaient recommencé et que je ne voulais pas, surtout que je n’avais pas encore fini… Pas tout à fait.

Il me fallut toute la force du monde pour dégager Lizlor de moi, pour l’écarter tout doucement pour qu’elle soit face à moi. Je tremblais encore, et d’avance à ce que j’allais faire, et je passais moi aussi mes doigts sur ses joues pour récupérer les larmes qui y perlaient.


- Mais… J’ai autre chose à te dire. Ma voix se fit plus basse, honteuse. Je pensais au premier soir où je l’avais fait, et mon cerveau dériva vers Ewan –oh, il me manquait… Tu… Je… Je suis désolé, je sais que… Que c’était mal, et que j’allais devoir arrêter de me détruire ainsi.

Je ne réussis pas à finir ma phrase. Lentement, j’ôtais ma cape et la laissais sur le sol, sans oser regarder ma Gryffondor, et je commençais à avoir des vertiges en pensant que j’allais lui montrer… Je pris de ma main gauche celle de Lizlor, pour la tenir et la serrer aussi fort que je voulais la prendre dans mes bras, et baissai les yeux vers mon ventre et mes cuisses. Doucement, de ma main libre, je tirais un peu mon pantalon pour qu’il découvre un peu mes hanches que mon pull cachait encore. Et, respirant difficilement, je soulevais cette dernière barrière qui cachait ma peau pâle, fine, écorchée de longs traits rouges, parfois plus vifs, récents et profonds, et de cicatrices.

J’entendis un sanglot, et je ne savais plus si c’était le mien ou celui de Lizlor, car j’avais la tête qui bourdonnait et mes yeux rivés sur mes hanches et mon ventre, la vue brouillée par les larmes qui étaient revenues, de honte et de douleur.

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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeDim 17 Fév - 22:01

J'étais épuisée. Comme quand on est réveillé de force d'un sommeil particulièrement écrasant, et qu'on ne parvient pas à émerger, à ouvrir les yeux, à s'éveiller complètement. Les sanglots secouaient mon corps tout entier et je ne pouvais pas lutter, comme si j'avais été prise de convulsions, les larmes dévalaient mes joues et se perdaient dans le cou de Ruby qui me berçait et me chuchotait des mots pour me rassurer alors qu'elle pleurait tout autant. J'avais le coeur tellement gros... Je gardai les yeux clos dans l'espoir de me rendormir, de sombrer complètement et que ce cauchemar s'arrête, mais une partie de moi savait pertinemment qu'il serait encore là quand je me réveillerais, et que je ne pouvais pas me laisser sombrer - et l'abandonner. Heureusement qu'elle me tenait contre elle et qu'elle me serrait dans ses bras, car j'en avais réellement besoin. Je ne me rappelai pas avoir déjà senti une pareille... résignation, sans cesse attisée, comme des coups de lance, par des sursauts de rébellion. Non! Je ne pouvais pas la laisser faire - je ne pouvais pas accepter cette situation plus longtemps! Oh, mais comment?... Je me voyais exploser toutes les bouteilles d'alcool que je pouvais trouver, à portée de main, je me voyais devenir enragée et chasser toutes ses idées noires, une à une, en les boxant comme de vulgaires oreillers qu'on aimait à s'envoyer pour jouer lors de nos vacances si parfaites. Les vacances... Je l'avais sentie triste mais pourtant je me rappelais l'avoir vue heureuse... Était-ce un mensonge? Est-ce qu'elle avait fait bonne figure pour ne pas m'inquiéter? Je ne pouvais pas lui en vouloir, j'aurais sans doute cherché moi aussi à l'épargner à sa place mais... Mais comme mon cœur se serrait d'avoir été autant mise à l'écart, et comme surtout je regrettais de ne pas avoir plus tôt pris le taureau par les cornes! Non, je ne pouvais pas me dire cela : je la croyais, les vacances avaient été bénéfiques. Mais après... J'eus un gros soupir secoué de larmes. Tout autour de moi était humide : mes cheveux, les siens, sa peau, ses vêtements contre lesquels je pleurais. Je manquai d'air, il me semblait, et je tremblais toujours comme une feuille mais je ne pouvais pas me résoudre à quitter ses bras rassurants et protecteurs.

- Mais… Mais Lizlor, tu viens de le faire…

Sa voix me paraissait venir de tellement loin... Et quelque part je n'osais pas trop la regarder, j'avais eu de si violentes pulsions à mon égard! Elles s'étaient calmées, expulsées par mes larmes, mais tout mon corps était encore engourdi et tétanisé de cette violence crise qui m'avait secouée, et je me rendis compte alors que j'avais tant serré les poings que je m'étais griffée moi même. Il me fallut faire un effort considérable pour me redresser et m'obliger à décrisper mes doigts, comme si une force invisible les obligeait à se recroqueviller malgré moi.

Quelle étrange faiblesse m'avait gagnée! En relevant la tête, tout tournait autour de moi et cette fois les points étaient blancs et les couleur, comme anesthésiées : je ne voyais même pas clairement le visage de Ruby, et il y avait fort à parier que sans son appui je me serais étalée sur le sol, sans forces. Il n'y avait que les soubresauts qui me soulevaient à intervalles réguliers pour me rappeler que je n'étais pas dans un songe, un bien triste songe, et le goût salé et presque métallique dans ma bouche de toutes les larmes que j'avais avalées. J'eus un petit gémissement peu convaincu, tant mon inutilité me paraissait flagrante, mais j'étais dans l'attente de ses explications, et je me raccrochais à cela... Comme une sentence qui va tomber. Bonne? Mauvaise? J'eus une bouffée d'espoir - elle avait l'odeur marine et salée de celle du vent frais qui balayait notre maison en Oregon les soirs d'été - mais elle fut bien fugace... Tour s'imbriquait petit à petit dans mon esprit, il y avait trop de variables, trop de paramètres, ma meilleure amie n'était n'était pas un être faible qui succombait à un pauvre chagrin d'amour, c'était un tout et je le savais parfaitement. Je l'avais toujours su, sans doute, qu'arriverait un jour une tornade plus dévastatrice que les autres. Elle était là. Dévastatrice, dans tous les mots... Et malgré moi je comprenais, même si cela me révulsait : comme il était salvateur de se faire du mal pour oublier le mal qu'on nous faisait...


- Ce qu’on va faire… C’est que je vais arrêter, enfin, je vais essayer. Je soupirai très légèrement de soulagement, ne la quittant pas des yeux - sa voix était soudain plus contenue, comme si elle s'était reprise, et je lui en étais reconnaissante car cela apaisait ma panique. Je te promets pas que parfois j’en aurais pas envie, ou que je ne craquerais pas mais… Mais je te le dirais, d’accord ? Je souris faiblement. D'accord... Et j’abandonnerais pas, pour toi, promis. Je t’aime Lizlor, je t’aime tellement…

Cette fois, notre accolade fut bien plus douce - même si je cherchai à ce qu'elle me serre fort contre elle pour contrer les spasmes qui m'agitaient. Il y avait tant de choses que je voulais dire, tant d'attitudes que je voulais montrer, mais c'était comme si on m'avait arrachée à moi-même et que je flottais un peu partout dans l'air de la tourelle, j'étais trop légère et trop volatile pour me concentrer, et à chaque fois que je pensais arriver à quelque chose je repartais, emportée par un ressac imaginaire. Pourtant de plus en plus, je n'avais plus peur. J'essayais de me raisonner : elle voulait arrêter, ce qui était déjà une première victoire. Ensuite, maintenant que je savais, j'allais pouvoir l'aider. Et puis, maman aussi - pas question de lui cacher cela, même si Ruby me le demandait, je le refuserai. Je me rappelais de conversations entre Papa et Maman à propos d'un voisin qui buvait trop et la manière dont il s'était fait aider, et ils avaient évoqués des potions, des manières d'apaiser l'envie, et j'étais toute prête à faire des études sur le sujet si nécessaire pour être de taille. Je me sentais l'âme d'une guerrière, prête à se jeter dans un âpre et dur combat, qu'il fallait gagner à tout prix. Il m'était alors plus facile de, enfin, tenter de la rassurer, et moi aussi je frottai doucement son dos du plat de ma main, moi aussi je la maintenais contre moi et je respirai le parfum de ses cheveux, moi aussi je la berçai un peu, et ma mâchoire parvint à se desserrer pour murmurer, tout bas :

- Mais moi aussi, je t'aime tant...

Plus sereine, malgré tout, je me sentais toujours aussi faiblarde, et mon cœur battait irrégulièrement. Des vertiges me prenaient, petit à petit, mais je battis des cils pour les chasser en même temps que mes larmes.

- Mais… J’ai autre chose à te dire. Tu… Je… Je suis désolé, je sais que…

Docile, je me laissai repousser, prostrée, le corps lourd et l'esprit plein de brume mais il me semblait que plus rien ne comptait si ce n'était de sortir de ce tunnel dans lequel nous étouffions, et qu'il fallait pour cela qu'elle se libère de tous ses mensonges et de tout ce qu'elle ne montrait pas. Je ne compris pas tout de suite pourquoi, alors qu'elle me tenait très fort la main - comment était-elle capable d'une telle force, me demandais-je alors, je me sentais si faible! -, elle triturait ses vêtements. Quand elle me fit un signe je me penchai pour voir... Pour voir... Je ne m'attendais à rien, je n'en avais même pas la force. Ce fut comme si, pour m'achever, on me versait un seau d'eau glacée et acide sur la tête et les épaules, et que mes dernières forces s'évaporaient à ce contact. Des traces, des petites coupures, des griffures, une peau charcutée par ses soins, voilà tout ce qui s'offrait à mes yeux, et je n'arrivais pas à en détourner le regard. Pourquoi? Dans quel but? ... Encore?! Je me sentis sangloter à nouveau mais de toute manière je ne contrôlais plus rien. Cette fois, je sentais que la nausée naissait dans mes entrailles - il ne manquait plus que ça. A part la preuve flagrante qu'elle allait si mal qu'elle se faisait du mal par tous les moyens dont elle disposait, que pouvais-je conclure d'autre?

Je fermai les yeux un instant, sans rien dire, à la fois pour puiser dans l'énergie qui me quittait, et aussi pour ne pas tourner de l'oeil - il n'y avait rien à faire, malgré toute ma volonté, mes nerfs avaient été mis à trop rude épreuve. Je pensai à Maman - et quel courage il fallait pour être mère, me dis-je alors, pour supporter cela! Ce que je ressentais était à la fois si terrible et si indissoluble, et surtout sans solutions, que je ne le souhaitais à personne.

Quand je les rouvris, Ruby était toujours là, les petites traces rouges qui balafraient sa peau aussi, et je sentis comme une langueur apaisante m'envahir. A présent, ce n'était plus des taches de lumière qui me dansaient devant les yeux, mais tout était lumière : même Ruby, elle brillait et resplendissait et m'éblouissait presque. Doucement, je posai la main sur son ventre pour cacher les blessures, puis sur sa main pour qu'elle rabatte ses habits.


- Pourquoi tu fais ça? m'entendis-je dire de loin alors que j'imaginais pourtant qu'elle n'en avait pas les réponses... Mais je n'étais plus en colère. Je ne veux pas que tu te fasses mal. Et puis, à quoi ça sert?...

A expier le mal par tous les moyens, à le faire sortir, probablement... J'avais la tête tellement lourde que je me sentis glisser contre Ruby, mais je parvins à me caler contre son épaule.

J'étais toujours parcourue de tremblements convulsifs mais je ne pleurais plus : mes yeux semblaient s'être asséchés d'un coup, depuis que l'intense lumière était apparue. N'était-ce pas le signe que, quoi qu'il arrive, il y avait une solution, un après? Ce n'était pas la lumière aveuglante de la fin c'était celle, brillante et solaire des plages de l'Oregon, de nos souvenirs de cet été, qui jouait dans le blond de nos cheveux, qui rougeoyait le soir quand nous fumions nos cigarettes au bord de la mer. Oui, c'était celle-là! Tout allait s'arranger... Ruby n'allait plus boire et j'allais l'empêche de se faire du mal. N'est-ce pas?...

Ce furent ces idées qui m'accompagnèrent doucement dans une chute que j'acceptai volontiers - je tombai sans avoir peur. Comme tombe un rêve. Je ne réussis qu'à marmonner quelques mots indistincts qui étaient destinés à rassurer ma meilleure amie - "Tout ira bien" - et quand je levai ma main pour l'enrouler autour de son épaule elle retomba mollement, comme tout le reste de mon corps. Les tremblements cessèrent alors, tandis que je sombrai, épuisée, dans un sommeil épais et sans songes.
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Ruby Standiford-Wayland


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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeLun 18 Fév - 20:51



"I've got this light
I'll be around to grow
Who I was before
I cannot recall

Long nights allow me to feel...
I'm falling...I am falling
The lights go out
Let me feel
I'm falling
I am falling safely to the ground."




Je n’avais jamais vu Lizlor dans un tel état. Pourtant, son impulsivité ou son tempérament colérique m’avaient amené à la voir sous différents jours, mais je n’avais jamais été la source de ce genre d’état. Parfois, c’était contre Stephen, contre un prof, plus vraiment contre Sara mais il arrivait qu’elle soit un peu fâchée pour des petites broutilles. Mais à chaque fois qu’elle avait été en colère, nous nous étions réfugiés dans cette tour pour fumer, pour discuter et elle finissait toujours par s’apaiser. Et maintenant, dans ce lieu qui avait entendu tant de nos rires, résonnaient nos sanglots douloureux. Je sentais les muscles de Liz se crisper, s’animer de tremblements et j’avais beau la tenir, la tenir le plus fort que je le pouvais, elle n’arrivait pas à se calmer. Sa détresse me fendait le cœur, littéralement, c’était une douleur inouïe comme je n’en avais peut-être jamais connu. Elle n’était pas physique non, mais pourtant j’avais l’impression que mon cœur se tordait sous des décharges d’électricités qui le faisait battre dans tous les sens, épuisé de tenir encore à ces assauts. Mais il ne pouvait pas lâcher, je ne pouvais pas, parce que Lizlor était là et peu importe la douleur il fallait que mon corps continue, et surtout qu’il ne lâche pas prise –jamais. J’essayais de me focaliser sur l’odeur des boucles blondes de ma meilleure amie, comme si ce simple sens activé m’assurait que j’étais encore en vie. Je ne devais pas oublier cette odeur, je devais m’y rattacher. Elle était là, Lizlor était là dans mes bras et même s’il me semblait qu’elle allait finir par s’assécher à force de pleurer, elle était en vie. Et il fallait que je lui rende les forces qui la quittaient, je ne voyais aucune autres solutions si ce n’était que de la tenir encore et encore, de lui murmurer tout ce qui me venait par la tête pour la calmer « ça va aller » « calme-toi » « c’est fini là, respire » en y mettant toute ma conviction car j’y croyais vraiment, je voulais y croire : on allait s’en sortir. Je m’en sortir pour elle.

- Mais moi aussi, je t'aime tant...

Il me fallut un nouvel effort pour ne pas éclater en sanglots. J’aurais voulu le répéter mille fois à Liz, que je l’aimais, par-dessus tout et tout le monde. Nous ne nous le disions pas souvent, nos déclarations passaient sûrement plus par nos regards que par nos mots, mais j’aimais ce fonctionnement. Nous n’avions rien à prouver à personne, je n’avais pas à crier partout ce que je sentais car ça ne regardait que moi, que nous. Peu importe ceux qui nous regardaient incrédules, comme si notre amitié était trop soudaine, trop étrange. Peu importe oui, je les emmerdais. J’aimais Lizlor. Plus que tout, et que quelqu’un ose me dire que c’était cliché ! Qu’on ose me dire qu’il était cliché de dire que j’aurais donné ma vie pour elle. Parce que si beaucoup lançaient ce genre de déclarations, combien l’aurait réellement fait ? Moi je l’aurais fait. Nous n’étions complètes qu’ensemble. Je savais qu’elle m’aimait moi, c’était d’ailleurs la seule chose dont j’étais sûre de manière générale. Et je savais que Lizlor pensait la même chose, et d’ailleurs, je l’interdisais bien d’avoir des doutes car notre amitié était presque plus que fusionnelle, non, en fait, elle était magique. Parce que je n’avais jamais peur de l’aimer trop, peur qu’elle me fasse du mal ou m’abandonne. A cette pensée, j’eus un petit tremblement et une larme roula : moi, je lui avais fait du mal. Elle avait peut-être pensé que je ne le ferais jamais, mais je l’avais fait au fond et je n’avais même pas réfléchis. J’étais… J’étais un monstre.

Mais je devais continuer, pensai-je amèrement. Les cicatrices, bien cachées sous mes vêtements, attendaient sagement en palpitant, d’être mise à la lumière. Je ne pouvais plus reculer. J’avais l’impression que mon corps allait finir par me lâcher, parce que mon cœur ne s’affolait plus, il était simplement achevé par toutes ces contractions –il n’en pouvait plus, je n’en pouvais plus. Mais il n’était plus question de moi, si je souffrais ce n’était encore une fois que ma faute et je le méritais bien. Je ne bougeais pas, même lorsque Lizlor se mit à pleurer. Je sentais les larmes qui dévalaient mes joues, ma vue se troublait mais je ne les chassais pas, j’étais incapable de faire quoi que ce soit. J’avais envie de rentrer sous terre, de disparaitre, je me sentais si minable… Pas parce que je m’étais fait mal, mais bien parce que j’en avais fait à la personne qui comptait le plus pour moi. Et parce que malgré tout, je savais que je m’étais enfermée dans un cercle infernal, je le sentais en cet instant dans le moindre recoin de ma poitrine qui criait parce que tout mon être voulait que la douleur cesse, et pour qu’elle cesse je n’avais qu’une solution. Boire. Mais je ne pouvais plus…


- Pourquoi tu fais ça ? Je ne veux pas que tu te fasses mal. Et puis, à quoi ça sert?...

Elle avait recouvert mes cicatrices qu’elle avait à peine observé, assez pour en trembler, mais son regard était presque vide désormais. Je sentis mon cœur s’affoler à nouveau, il était encore capable de s’activer, devant la blancheur de sa peau et son corps qui me sembla tout à coup fondre, elle était presque désarticulé et chancelante, elle tomba presque sur moi. Instinctivement, mes bras la rattrapèrent, et je sentais qu’elle tremblait encore –j’avais si mal ! Il y eut un dernier sursaut, alors qu’elle tentait de m’étreindre aussi, et je sentis toute conscience s’envoler de ses frêles membres tandis qu’elle s’évanouissait bel et bien. J’eus le réflexe de la serrer un peu plus fort, vacillant légèrement sous son poids avant de me laisser glisser le long d’un mur. Assise sur le sol dur et froid, je tenais ma Gryffondor dans mes bras, laissant son dos reposer contre ma poitrine. Là, la tête enfouie dans ses cheveux, je laissais mes larmes couler silencieusement pour ne pas la réveiller. J’avais l’impression qu’une foule m’avait piétiné, que mon corps ne pourrait plus jamais se relever. J’avais trop mal… Tellement mal…

Il me fallut une force immense pour allonger Lizlor sur le sol un instant avant de me trainer à quatre pattes jusqu’à ma cape pour en sortir ma baguette. J’eus un gémissement alors que ma paume droite se posa sur un bout de verre de ma flasque et je regardais le sang qui perlait, comme un écho à mes larmes. La douleur me paraissait si lointaine, si vaine…

Après plusieurs accio ratés, tant j’étais épuisée, je réussis à faire voler jusqu’à la tourelle une couette et un coussin. Le plus délicatement possible je réveillais un peu Lizlor mais elle ne sembla pas comprendre ce qui se passait, et le temps que je l’installe dans la couette, elle était déjà retombée dans un sommeil profond. M’appuyant contre un mur, je m’assis à côté du visage endormi de ma Gryffondor. Elle semblait si sereine, et pourtant si petite dans ce sommeil, ses longues boucles s’étalaient autour d’elle et d’un geste délicat, j’en écartais une qui barrait sa joue. Ce fût en entendant sa respiration délicate et mesurée que je sentis toute l’horreur de la situation m’envahir, sans raison, et je me mordis la main pour calmer les sanglots qui montaient. Les minutes commencèrent à s’égrainer au rythme des heures. Chaque seconde qui passait, et je sentais la fatigue m’envahir un peu plus, mais je restais prostrée, les bras autour de mes genoux sur lesquels j’avais posé mon menton. Mon regard fixait alternativement le vide et le visage de Lizlor qui dormait paisiblement –et elle était si jolie quand rien ne l’atteignait ! Le soleil finit même sa course, mais je n’avais pas faim. Je ne bougeais simplement plus bouger, je n’étais même plus sûre que je respirais encore. Je ne pleurais plus, parce que je n’avais plus de forces, mais je ne pouvais pas dormir… Parce que je ne pouvais pas m’arrêter de penser.

Je n’avais probablement pas eu de telles pensées depuis l’incident. Aussi noires. Elles commencèrent à me ronger petit à petit, mêlant souvenirs et culpabilité, et tout dans mon cerveau s’agitait dans un calme monstrueux. Ce n’était pas des cris, mais bien des murmures sinistres, des voix –celle de mon père, de ma mère, de Liz, la mienne. Je les entendais rire, me traiter de monstre, me rugir d’aller boire. Qu’est-ce que ça me coutait ? Je n’avais qu’à aller dans les cuisines et revenir, ma Gryffondor ne le verrait même pas, elle dormait si paisiblement ! Et à cette heure-là, tout le monde dinait dans la grande salle ! Personne n’allait me voir !

Non, je ne pouvais pas ! Je l’avais promis à Lizlor !

Et pourtant je ne méritais peut-être que ça. De me détruire. Comment pouvais-je prétendre être sa meilleure amie après ce que je lui avais fait ? Je me haïssais, et elle aurait dû me haïr aussi ! J’étais monstrueuse… Mon regard s’arrêtait parfois sur les dépris de verre, et je sentais tout mon corps qui ne demandait que ça, qu’une simple entaille, pourvu que mon cœur cesse de taper aussi fort. Mais non… Je ne pouvais pas non… Je ne pouvais pas…

Et les voix revenaient, elles refusaient de se taire, mon esprit refusait de s’arrêter de penser ! J’avais la nausée, je voulais simplement arrêter de ressentir quoi que ce soit, parce que je n’en pouvais plus de me supporter…

Lizlor eut un mouvement, et je sursautais. Tout doucement, elle se tira de son sommeil et, s’étirant comme un félin, elle me prit dans ses bras. Mais elle me paraissait étrangement froide, et ses bras autour de mon cou se faisaient pressants, trop pressants… Son visage s’était penché dans mon cou, et dans mon oreille, je sentis son souffle et dans un murmure, elle ne lâcha qu’un simple mot. Monstre. Et j’entendis son rire s’éleva, un rire dément et elle me lâcha brusquement, mais ce n’était plus Lizlor ! Je connaissais ses yeux bleus marine, ce carré blond légèrement ondulés et ses traits fatigués ! Mais je fus incapable de souffler un « Maman » parce que son regard me glaçait, et elle riait encore en me regardant et entre deux éclats sa voix retentissait, l’injure suprême revenait en boucle et ça tambourinait de partout « monstre monstre monstre » et elle riait encore ! Où était Liz ? Je voulus l’appeler, crier, mais il n’y avait aucun son qui sortait de ma bouche… ! Et pourquoi… Ah, non, je connais ce craquement ! Le craquement des feuilles devant la grange, mais… Mais j’étais dans la tour ? Il allait arriver… J’allais entendre sa voix !

Je ne me réveillais pas en criant, mais en sanglotant. La nuit avait enveloppé la tourelle, et le silence emplissait chaque recoin de celle-ci, entrecoupé par mes pleurs et mes tremblements. J’avais glissé le long du mur, presque allongée, mais mon cou était douloureux de la position que j’avais prise en m’endormant malgré moi. Tout mon corps était endolori, et j’avais des sueurs froides qui me faisait trembler, frémir, et j’avais la tête en feu, et les joues rougies de mes larmes. Lizlor dormait toujours, et la voir recommença à me trouer le cœur… Je n’en pouvais plus…

J’eus finalement une idée pour m’occuper. Bougeant mes membres anesthésiés par la douleur et la fatigue, je me penchais jusqu’à mon sac pour le ramener vers moi. Tout doucement, j’en sorti mes cigarettes et un livre. Son livre. La couverture était légèrement usée et je passais mes doigts dessus avec un petit frisson avant de fermer les yeux, imaginant Ewan. Où était-il ce soir ? Que faisait-il ? Et pourquoi est-ce que je ne pouvais pas m’empêcher d’y penser, tout en sentant des tressautements dans ma poitrine. J’étais si stupide ! Il devait être avec une autre fille, avec Monsieur Prescott, ne pensant absolument pas à moi –pourquoi l’aurait-il fait ? Pourtant… Pourtant, je ne pouvais pas m’empêcher de douter, et instinctivement mon esprit embrumé dériva vers les souvenirs de ces soirées-là, où tout me semblait si simple et si… Naturel. J’entendais encore sa voix que je voulais désormais faire taire, je sentais presque la réglisse et la vanille de son écharpe, et je voyais ses yeux sur moi, et j’aimais tant comment il me regardait… Je me haïssais tant d’apprécier cela, ces simples détails.

M’éclairant de ma baguette, je commençais donc la lecture de Rebecca, un de ses romans favoris qu’il m’avait prêté. J’arrivais à oublier, à me déconnecter, le temps de quelques pages et de multitudes de petits mots qui dansaient devant mes yeux fatigués. Mais j’avais un mal fou à me concentrer, et au fur et à mesure des pages, je sentais que cette histoire n’était pas aussi innocente qu’il paraissait… Et je n’arrivais pas à suivre, parce que mon cerveau dérivait tantôt sur Ewan, tantôt sur Lizlor, avant de s’égarer par les routes sinistres de mon enfance qui m’effrayaient tant. Je finis par fermer le livre, et à regarder ma montre. Il était minuit passé. J’allumais une cigarette dans la nuit silencieuse, et éteignait ma baguette pour ne laisser plus qu’un point incandescent éclairer l’opacité terrible qui envahissait l’atmosphère. Mais au bout de quelques bouffées, je sentis Lizlor bouger et je me figeais, sans bruit. Finalement, elle se tourna et je l’entendis murmurer quelque chose, avant de battre des paupières.


- Je t’ai réveillé ? Murmurai-je tout doucement en passant mes doigts sur sa joue dont la peau était d’une tiédeur rassurante. Malgré l’obscurité, je captais ses pupilles lumineuses et pourtant si fatiguées. Je me penchai vers elle et déposai un baiser sur son front. Elle me sembla fiévreuse, et j’eus un frisson. Tu… Tu te sens mieux ? Ma voix n’était qu’une murmure, tant j’avais peur de sa réacion. Je suis désolé Lizlor… Ajoutai-je tout bas, une nouvelle fois.

Et de ma main libre, je cherchais l’une des siennes cachées sous la couette, et j’entremêlais nos doigts dans un sourire terriblement triste –chargé de culpabilité, de honte, et de pourtant tant d’amour.



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MessageSujet: Re: Everything is so fragile - pv Ruby ♥   Everything is so fragile - pv Ruby ♥ Icon_minitimeMar 19 Fév - 15:42

Enfant, comme beaucoup d'autres, je m'étais toujours posé ce genre de questions, et j'en assaillais d'ailleurs les personnes autour de moi. Dis Maman, ça veut dire quoi mourir? On va où quand on meurt? Et comment on naît? Pourquoi? Et pourquoi on dort? On va où quand on dort? Les réponses ne m'avaient jamais convaincue - aujourd'hui, je comprenais pourquoi, car je ne les détenais toujours pas vraiment, et j'avais dû poser bien des colles à Papa et Maman. Toujours était-il qu'au lieu d'abandonner parce que je ne comprenais pas les explications qu'on me fournissait dans ma petite tête d'enfant, je les tournais et retournais dans tous les sens et moins je les comprenais, mais je ne voulais pas lâcher prise : elles tournaient, encore et encore, à m'en donner le vertige. Ça avait sans doute été également l'une des causes de cette crise que j'avais traversée à mon arrivée à Poudlard, en plus de tout le reste. C'était comme si je mourrais à petit feu de ne pas comprendre tout cela, de ne pas donner un sens à ce qui nous définissait, et je restais des heures allongée dans l'herbe du parc ou bien perchée sur mon arbre à contempler le ciel, à ne pas savoir si il tombait sur moi ou si je tombais dedans petit à petit, tout en priant pour qu'il m'apporte une réponse, rien qu'une réponse!... Aujourd'hui, ces questions me hantaient encore, mais de manière plus diffuse. Elles ressortaient le plus quand je rêvais... Et mes rêves étaient toujours nombreux et confus, avec des flashs, comme des instantanés, seuls souvenirs dont je disposais au matin. Je me mis seulement à rêver quand mon sommeil particulier, puisque je m'étais évanouie d'épuisement, s'étiola. J'étais en Oregon, évidemment... La maison, chaleureuse, s'étendait sous un soleil étincelant d'après-midi d'été... Il faisait chaud mais l'air marin apportait toujours un petit courant d'air et s'infiltrait par toutes les portes et les fenêtres ouvertes... J'avais l'impression d'être toute seule dans la maison, ou plutôt d'être invisible, car ma présence ne dérangeaient nullement Maman, Conrad et Ruby qui discutaient au-dehors. Ils installaient une grade table de réception, me semblait-il. Parfois, je traversais des pièces de notre maison dans le Kent, mais toujours je voyais par les fenêtres l'océan qui s'étirait paresseusement, turquoise et éblouissant sous le ciel bleu. Tout avait la luminosité tamisée des jours passés. Il y avait des photos sur la commode, et elles semblaient briller de la même manière que le soleil dehors. Je compris que je cachais quelque chose et brusquement tout s'éclaira - Stephen était dans ma chambre et devait sortir sans qu'on le voit... Mais que faisait-il ici?! Je voulais juste aller me baigner... La porte-fenêtre grande ouverte devant moi battait doucement, bercée par le vent. Sur le seuil, je respirai profondément le parfum du large. Je n'avais qu'à descendre les marches du perron et courir dans l'eau... J'en avais envie... Au même moment, les voix de Maman, Ruby et Conrad ne riaient plus mais se haussaient. Je savais qu'elle avait bu, mais je ne voulais pas y penser... Quand je me retournai, un pied déjà dehors, vers la plage, il apparut dans le salon et lui aussi paraissait inquiet - mais sa silhouette était floue. Elle tremblait comme la flamme d'une bougie... Les petites particules de poussière que le soleil faisaient briller dans l'air le transperçaient de toutes parts. Il allait disparaître et je ne le voulais pas ; je me retournai totalement pour l'appeler mais le temps que je prononce "Papa !" tout disparut... Et dans mes oreilles s'éteignit le chuchotement des vagues.

Dans mes poumons, il y avait l'air frais de l’Écosse qui soufflait autour de notre tourelle, et je papillonnai des yeux dans l'obscurité, presque étonnée de ne pas trouver le soleil vigoureux de l'Oregon baigner ma peau et mes pupilles. Je m'entendis gémir et marmonner à la fois, encore à moitié endormie, à cheval entre le rêve et la réalité.

Petit à petit, je pris conscience que j'étais couchée à même le sol, la tête sur un oreiller et sous une couette tiède ; il ne me fallut pas longtemps en bougeant doucement la tête pour deviner Ruby dans l'obscurité, uniquement éclairée par le faible éclat de sa cigarette incandescente. J'en sentis l'odeur et pinçai légèrement le nez, avant de fermer et rouvrir les paupières plusieurs fois, car j'avais du mal à émerger. Mon corps entier était gourd : j'avais la très nette impression de m'être faite piétiner par un troupeau de trolls ; chaque muscle, chaque parcelle de mon corps se remettait douloureusement de ma crise de panique de tout à l'heure, et ils avaient été trop tétanisés pour que je n'en ressente pas déjà de violentes courbatures.


- Je t’ai réveillé ? Je fis non de la tête - j'ignorai ce qui m'avait tirée de ma torpeur. Tout ce que je savais c'est que je me sentais toute aussi épuisée et que je redoutais de faire un mouvement tant je me sentais raide. Ruby m'embrassa le front et ses lèvres étaient fraîches ou bien ma peau était trop chaude - je me sentais plutôt fiévreuse. J'eus un petit sourire. Tu… Tu te sens mieux ? Je suis désolé Lizlor…

Elle attrapa ma main sous les couvertures et je ne répondis rien, fermant les yeux à nouveau - en cet instant précis je me sentais bien, ou plutôt je ne me sentais pas mal, et je ne pouvais m'empêcher d'être hantée par les souvenirs de mon rêve. Je ne voulais pas qu'elle disparaisse elle aussi... C'était à peu près tout ce que j'arrivais à me dire, et si les souvenirs des heures précédentes ne s'effaçaient pas, il n'y avait rien qui comptait d'autre. Je savais que je n'avais pas été à la hauteur : j'allais l'être, et j'allais me rattraper, l'aider, faire tout ce qu'il fallait, tout ce dont elle avait besoin. Et puis, si à Noël elle avait réussi à ne pas boire, si par moment elle réussissait à se retenir pour cacher son secret, c'était bien que ce n'était pas impossible ! J'avais confiance. Je savais que la suite, c'était à nous de la choisir, de l'écrire. Je ne voulais pas qu'elle soit désolée : la colère retombée, je ne lui en voulais pas, pas même de son mensonge. Il valait tellement mieux, parfois! Si, petite, Maman m'avait expliqué la vérité douloureuse de la mort au lieu de chercher des mots justes mais peu incisifs... J'aurais eu tellement peur, tellement d'avantage que quand la notion me restait floue ! Ruby avait voulu me protéger et cela, par-dessus tout, l'excusaient entièrement. Là n'était plus le problème : il fallait maintenant que nous nous relevions.

J'ouvris les yeux de nouveau et près d'elle il y avait un livre, dont j'en déchiffrais le titre sur la tranche, à l'envers. Ce n'était pas à elle ou à moi, ni à la bibliothèque.


- C'est à Ewan? demandai-je alors, la voix un peu rauque et basse d'avoir tant pleuré. C'est bien?

Le fait même qu'elle le lise me confortait dans l'idée qu'il lui plaisait, même si elle ne l'avait jamais dit clairement. Je ne voulais pas trop lancer le sujet, non seulement car ce n'était pas trop le moment mais aussi parce que je ne voulais pas qu'elle se fasse de faux espoirs, surtout après l'histoire avec Hadrian : elle n'avait pas besoin de ça. Ewan, que j'avais rencontré un soir, m'avait apparu gentil et stable mais là n'était pas le problème, je ne le connaissais pas assez, et si visiblement ils se plaisaient tous les deux, il était bien trop tôt pour quoi que ce soit. Qui plus est, ce n'était pas en traînant avec un barman qu'elle allait régler sa dépendance, et Ewan m'apparaissait alors nettement moins sympathique. Et puis ils s'étaient disputés et visiblement il voulait juste la draguer et rien de plus, alors... Mieux valait ne pas insister. Même si j'avais de la peine pour Ruby, car quand elle me racontait ses soirées avec lui, je ne pouvais pas m'empêcher de me sentir enthousiaste - comme si quelque chose dans l'éclat de ses yeux était soudain plus gai, et se propageait à moi.

Sous mon "C'est bien?" se cachait plutôt la question "Tu vas le revoir?" car ça n'était pas bien clair, même si elle se déclarait farouchement fâchée contre lui. Mais si elle lisait son livre... Malgré moi j'eus un petit sourire que je dissimulai en me frottant le visage, avant de me lever doucement, en position assise. J'eus un grognement : chacun de mes muscles me tirait, et il me fallut rester immobile de longues secondes pour que le monde arrête de tourner autour de moi. Je me demandais même comment j'allais bien pouvoir marcher jusqu'à mon dortoir...


- J'aimerais bien aller me coucher, admis-je alors d'une petite voix un peu piteuse. C'était moi la malade, alors que c'était elle qui avait besoin de soins! J'avais l'impression d'être une idiote égoïste, mais d'un autre côté, ma raison me rappelait à l'ordre : il me fallait être en forme pour me battre à ses côtés. Je tentai de pousser sur mes bras en serrant les dents pour ne pas trop souffler, mais c'était inutile : j'avais la force d'un chaton qui venait de naître. Tu veux bien m'emmener? Où tu veux.

Je voulais juste dormir, le reste m'importait peu. Et je ne voulais pas la forcer... Si elle voulait être seule ou pas, bien que j'ai peur qu'elle boive, et que je savais que dorénavant cette peur allait être constante et que j'allais me méfier de ma propre meilleure amie, le combat qui se préparait m'avait l'air si colossal...

- Je suis sûre que tu vas y arriver, j'ai toujours dit que tu étais bien plus forte que tu le pensais, lui glissai-je à l'oreille quand elle se pencha vers moi pour me soulever. Ma voix était, pour la première fois, presque taquine ; et quand je glissai un bras autour de ses épaules, je me sentis alors si soulagée d'avoir affronté la vérité, et si fière qu'elle m'ait fait une promesse, que malgré tout, l'espoir afflua en moi. Quand ses cheveux dévalèrent mes épaules - où était-ce les miens? - je sus que quoi qu'il arrive, il n'y aurait jamais plus de barrières entre nous.
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