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~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]

 
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 ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]

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Ruby Standiford-Wayland


Ruby Standiford-Wayland
Apprentie à Sainte Mangouste



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Date d'inscription : 03/09/2011

Feuille de personnage
Particularités: « and from the rain comes a river running wild that will create an empire for you. »
Ami(e)s: Lizlor; « Maybe home is nothing but two arms holding you tight when you’re at your worst. »
Âme soeur: « Lover, when you don't lay with me I'm a huntress for a husband lost at sea. »

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MessageSujet: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMar 19 Fév - 19:43

(Suite à Everything is so fragile.)






"Here in these deep city lights
Girl could get lost tonight
I'm finding every reason to be gone
There's nothing here to hold on to..."


« J'ai toujours dit que tu étais bien plus forte que tu le pensais. »

Si seulement, pensai-je amèrement alors que Lizlor passa son bras autour de mes épaules et que le mien vint soutenir sa taille pour qu’elle se mette debout. Elle paraissait encore toute faible, fiévreuse, et malgré les longues heures de sommeil, terriblement fatiguée. Sa voix se faisait basse, mais avec une pointe d’espoir, comme la vaine lueur d’une flamme qui vacillait tout comme son corps trop frêle pour supporter autant de poids sur ses épaules. Je déposai un nouveau baiser sur sa joue et je fis disparaitre les débris de verre d’un coup de baguette avant d’ajuster mon sac sur mon épaule. Par la fenêtre, j’avais envoyé valser ma cigarette presque finie, et le point rouge avait disparu dans l’intensité de l’obscurité. M’assurant que Liz était prête, je lançais un dernier regard à la pièce. La couette était encore là mais ça m’était égal, j’allais aller la chercher plus tard car je n’avais pas le temps de la transporter et j’avais déjà ma meilleure amie dans les bras. Je me demandais malgré moi combien de pleurs ces pierres avaient absorbé, combien de rires et d’étreintes secrètes. Qui avait été là avant ? Qui avait considéré ce lieu comme leur dernier refuge, tout comme moi et Liz ? J’avais l’impression que ces quatre murs détenaient nombre de nos secrets, mais qu’il était en sécurité ici, haut et loin du reste du château. Ce qui venait de se passer ici, je ne pourrais probablement jamais l’oublier et j’entendais encore les sanglots de ma Gryffondor, comme imprimés dans mes tympans, jouant en boucle. Je voulais partir d’ici, j’avais le cœur trop lourd et tout résonnait entre ces pierres, tout était confiné. J’étouffais.

Je ne savais pas si j’étais aussi forte qu’elle le disait, mais j’en eus assez pour marcher avec Lizlor appuyée contre moi. Je voyais bien qu’elle voulait se faire plus légère, moins dérangeante, mais je l’obligeais malgré elle à lâcher ses muscles pour se reposer totalement contre moi. Elle n’avait plus assez de force de toute manière, et elle manqua plusieurs fois de rater une marche en descendant mais elle n’en ria pas –elle gémissait doucement, comme si le moindre écho lui était insupportable tant elle était épuisée. Je continuais de lui murmurer sur le chemin que tout allait bien, et je la sentais sourire un peu malgré tout, derrière ses mèches blondes. Arrivée dans les couloirs vides et silencieux, j’eus une seconde d’hésitation. Où l’amener ? Chez sa mère ? Il était trop tard, et j’avais peur de faire des histoires. Je songeais qu’en plus, Sara était au courant de… De mon problème, et probablement que Lizlor allait réagir ainsi. Je ne voulais pas nous expliquer, lui dire pourquoi nous débarquions aussi tard avec sa fille aussi vidée de toute son énergie solaire. La salle sur demande, elle et moi ? Non, j’avais trop peur que mes désirs y prennent forme, et que dans mon insomnie continuelle, j’espère trop fort pour une bouteille et ne puisse pas tenir la promesse que j’avais faite. Mon esprit dériva vers Stephen… J’aurais pu réveiller le garçon et qu’ils aillent dans la salle sur demande, mais je n’étais pas sûre que Liz ait envie de lui expliquer non plus la situation. Le plonger de trop près dans nos problèmes, c’était l’effrayer et je ne voulais pas qu’il pense qu’elle était trop faible, trop fragile, et qu’il prenne peur. Non, il fallait que je l’amène dans son dortoir, tout simplement.

Les escaliers à affronter ne furent pas de tout repos, et je sentais Lizlor prête à flancher à nouveau entre mes bras trop faibles mais je me concentrais pour surtout ne pas risquer de la lâcher, et nous réussîmes à monter jusqu’au portrait de la Grosse Dame. Elle voulut râler, mais elle sembla voir nos états et ne dit rien tandis que ma Gryffondor murmurait le mot de passe et que nous pûmes enfin rentrer dans une salle commune chaude, chaleureuse. J’étais déjà venue ici, en toute illégalité évidemment, pour voir Lizlor ou Hadrian. J’eus un pincement au cœur en imaginant qu’il dormait sagement ici, à quelques mètres de moi, mais il n’était plus ma priorité ce soir. A vrai dire, il me paraissait très loin, et je réalisai qu’il m’était totalement sorti de l’esprit même lors de ces longues heures d’insomnies –mais pas Ewan… Je secouais un peu la tête pour me réveiller, et je montais avec Lizlor jusqu’à son dortoir. Je la lâchai enfin pour qu’elle se glisse sous sa couette que je bordais avant de déposer un baiser sur ses paupières closes et je murmurai un dernier « Je t’aime » qu’elle n’entendit peut-être pas, car elle semblait s’être rendormie. Doucement, je pris la peine de réveiller sa voisine de lit que nous connaissions un peu, en m’excusant platement, et lui demandai de s’occuper de Liz si ça n’allait pas car elle était un peu malade. Elle sembla assez éveillée pour me comprendre, approuva et j’eus à peine de le temps de la remercier qu’elle s’était rendormie.

En sortant de la salle commune, je me retrouvais soudain dans le silence total, l’obscurité mais surtout la solitude, et ils me prirent tous à la gorge si brutalement que j’en chancelais. Où aller ? Si j’allais dans mon dortoir… Il y avait ma bouteille dans la commode, et je n’aurais jamais la force de la vider, de la jeter, sans vouloir en prendre. En cet instant même, tout mon corps criait pour boire ne serait qu’une goutte et j’avais peur, peur de moi-même de le vouloir autant. Je me sentais trembler un peu, et je voulais me dire que c’était le froid… Je ne savais pas où aller… Peut-être retourner dans la Tourelle ? C’était sûrement la meilleure option. Le corps endolori et épuisé, je repris la direction de ce refuge qui devait encore renfermer les pleurs de Lizlor, et dans les dédales des couloirs je sentais mes pas se faire plus lent –j’avais peur d’y retourner. J’avais peur de recommencer mon cauchemar, de ne pas pouvoir dormir, oh je ne pourrais pas j’en étais sûre ! J’avais le cœur qui battait si faiblement, et chaque respiration sonnait comme un soupir exténué mais mon cerveau continuait de tourner et mes pensées se bousculaient et me brûlaient d’un feu glacé.

Et si ?...

Je ne sais pas ce qui me fit basculer, mais en arrivant au premier étage, je ne me dirigeai pas vers le pont. Je continuais de descendre, l’esprit embrumé mais avec une idée fixe. Devant mon passage secret que je connaissais par cœur je n’eus aucune hésitation et je l’empruntais sans réfléchir. Je savais où je voulais aller, où je devais aller. Dans la poche de ma cape, j’avais le livre entre mes doigts. Il fallait que je lui rende. Comme ça, ça serait fini une bonne fois pour toute. Ce soir je faisais le tri, je me remettais à zéro et j’avais bien compris qu’il n’y aurait pas de place pour des histoires douloureuses si je voulais m’en sortir. Et Ewan m’était douloureux. N’est-ce pas ?

L’air frais de Pré-au-Lard ne me fit pas frissonner, comme si mon corps entier était anesthésié. Je n’étais pas sûre que mes jambes fussent encore totalement fonctionnelles, mais je me forçais à me concentrer pour me souvenir. Chez lui… La petite rue, derrière le magasin de livres, avec la porte bleu marine. Je m’en souvenais, il fallait que je retrouve… La grande rue était éclairée, et quelques silhouettes trainaient là, sortant probablement des bars. Je n’aimais pas trop cette atmosphère, et je pressai le pas en passant devant les Trois Balais d’où j’entendais des rires. Sur mon passage, des sifflements s’élevèrent et je ne pris même pas la peine de regarder les deux hommes qui fumaient sous le porche. J’avais la nausée, et lorsqu’ils m’interpellèrent, je sentis un sursaut me saisir comme si j’allais me remettre à sangloter. J’accélérais, le cœur lourd, tentant de ne pas penser à leurs mots… « Et ma jolie, où tu t’enfuis ? » Loin de vous, s’il vous plait, laissez-moi en paix… Je tremblais légèrement, et j’avais peur de me retourner, et qu’ils soient encore là… J’atteignis cependant l’appartement d’Ewan sans plus d’encombres, et je montais les marches silencieusement. Mon cerveau endormi ne se concentrait que sur ce livre, ce maudit livre que je devais lui rendre. J’allais lui rendre et partir, et enfin j’allais pouvoir être tranquille !

Je toquais à la porte une première fois. Je sentis alors un soupçon de stress monter en moi, et sans pouvoir me contrôler, je frappai un peu plus fort parce que je voulais juste que ça soit fini, qu’il ait son livre et que je parte. Son livre. Lui rendre son livre… Ah ! Il ouvrait la porte !


- Je… Commençai-je brutalement, bien décidée à en finir au plus vite…

Mais…

Mais… Mais qu’est-ce que je foutais là ? Je sentis tout à coup un énorme poids dans la poitrine, et je réalisais qu’il était plus d’une heure du matin et que j’étais là, devant Ewan. Sa présence me fit l’effet d’un choc, comme si tout à coup je prenais conscience de la réalité que la douleur avait anesthésiée. J’étais chez Ewan, alors que ça faisait une dizaine de jours que nous ne nous étions plus parlé, et que j’avais décidé de ne plus jamais le revoir. Parce qu’il… Qu’il ne voulait rien avec moi, oh mais moi non plus, enfin, euh, je n’étais pas sûre de… Ah, mais pourquoi étais-je venu jusqu’ici ? A en juger par ses cheveux en bataille et son torse nu –oh, euh…- il devait probablement être en train de dormir ce qui paraissait totalement logique vu qu’il était une heure du matin, mais qu’est-ce que j’étais conne ! Mais qu’est-ce que je fichais ici ?

Il fallait que j’arrête. Je savais très bien ce que je fichais ici. Je m’en foutais du livre, je n’étais pas venue pour lui rendre… J’étais venue pour lui. Pour le voir. Parce que je voulais le voir, parce qu’il me manquait –mais c’était si stupide ! Parce que j’avais l’impression que je n’avais plus qu’ici pour me réfugier, parce que je m’en voulais tant pour la dernière fois et que je refusais que ça finisse comme ça… Mais… Mais c’était ridicule, il fallait absolument qu’il ferme cette porte et qu’on arrête ce… Ce truc-là ! Pourquoi est-ce que sa présence soudaine sembla m’affaiblir ? Pourquoi est-ce que j’avais envie de lâcher toutes mes barrières ? Et surtout, mais bordel, pourquoi est-ce que je sentais que je pouvais le faire, que j’étais en sécurité ?!


- Je suis désolé je… Murmurai-je contre toute attente, perdue, après une longue minute de silence. Et en le voyant là, en le voyant me regarder, j’eus juste envie d’abandonner, de tout lâcher. Mon corps n’attendit pas le signal de mon cerveau, et soudain tout remonta et s’écrasa sur mes joues sous formes d’énormes larmes qui dégringolèrent dans des sanglots étouffés. Je me sentis trembler comme une feuille et je voulais moi aussi dégringoler, tomber, disparaitre… Je savais pas où aller… Lâchai-je comme piteuse conclusion entre deux pleurs qui m’étranglaient.

Oui, ils m’étranglaient, eux comme tout le reste. Et je n’en pouvais plus… Je voulais juste abandonner… M’abandonner…
Contre lui.


"Could I hold you?"
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Ewan Campbell


Ewan Campbell
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~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Empty
MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMer 20 Fév - 20:21

Rien n'avait changé. Rien ne le pouvait, de toute façon : j'organisais tout avec trop d'application pour que me soit autorisée une quelconque déviation. En un sens, cela avait quelque chose de rassurant, parce que j'avais un but et qu'il me semblait à la fois tellement lointain et tellement oppressant que je savais qu'il ne m'en aurait pas fallu beaucoup pour que je m'en éloigne... Pour que j'évite cette fin fatidique, cette espèce d'étrange retour en arrière, moi qui m'était pourtant juré de ne plus jamais y revenir. J'ignorais ce qui me poussait à avoir autant de rigueur pour poursuivre ma tâche jusqu'au terme, mais quelque part, quand je pensais à Jamie et à ces parents disloqués que je voulais oublier, je comprenais sans trop de mal ce qui me guidait là-dedans. Notre famille n'avait été qu'une famille en façade et aujourd'hui même les semblants avaient été éparpillés - que ma faute soit reconnue ou non, il y avait quelque chose en moi qui voulais se racheter, et sans doute était-ce pour ça que je mettais un point d'honneur à secourir mon père, malgré tout. Était-ce de l'espoir? Sans doute... Et un tel mot me paraissait bien vain quand tout d'un coup il m'apparaissait. Je me sentais amer, alors. Et si j'avais tort?...

Mon oncle Matthew possédait une distillerie de whisky dans l'ouest de l’Écosse et puisque ce n'était pas loin de Poudlard, et qu'il était la personne de notre famille avec qui je m'entendais le mieux, il me proposait sans cesse de venir le visiter. Je lui écrivais d'ailleurs plus de lettres qu'à mes propres parents - rares, elle se bornaient à expliquer où j'étais et que tout allait bien. Avec Matthew, c'était différent et cela l'avait toujours été : je me rappelais avec un bonheur qui ne faiblissait jamais, même à travers mes souvenirs, des vacances passés chez lui. Il n'avait jamais eu d'enfants, et je savais combien Jamie et moi comptions pour lui, et nous le lui rendions bien. Il était bien plus jovial et décontracté que mon père tout en conservant une certaine sévérité quand il le fallait, mais surtout, il aimait je crois profondément les enfants et nous consacrait tout le temps dont il disposait, ce que mon père et ma mère n'avaient jamais su faire. Dans mon esprit, c'était à lui que je devais mes découvertes d'enfant, c'était avec lui que nous jouions dans le bois en bas de la distillerie, c'était lui qui nous avait fait goûter de l'alcool pour la première fois, c'était lui qui nous racontait des histoires, c'était lui enfin qui répondait à nos questions, tout le temps. Jamie lui répétait toujours que nous aurions voulu qu'il soit notre père, et Matthew répondait toujours par quelque chose de drôle. Aujourd'hui, je comprenais bien mieux le petit sourire à la fois heureux et gêné qu'il avait eu en ces instants... Encore plus quand je revoyais son désespoir à l'enterrement de mon frère et les regards vides qu'il adressait à mon père. Je savais, oh, je savais qu'il avait pensé exactement la même chose que moi.
Ne vois-tu pas qu'il te reste un fils, malgré tout?

C'était inutile : il ne l'aurait jamais compris. Elle non plus.

J'avais fini par y aller un week-end, en transplanant depuis Pré-au-Lard. Mon travail au pub ne me laissait pas de week-end mais à la fin du mois, comme Ed faisait son inventaire, j'avais exceptionnellement eu deux jours de relâche. Sans plus tarder j'avais prévenu Matthew : il n'y avait rien de tel pour se changer les idées chez lui. J'aimais le parfum étrange de la distillerie, les gens qui y travaillaient depuis tant d'années, ma tante, toujours aussi avenante et discrète, et Matthew, dont la grosse voix portait d'un bout à l'autre de la maison et dont le rire avait toujours rassuré la moindre de mes terreurs d'enfant. En plus de son domaine d'exploitation, il avait quelques cottages qu'il louait, surtout l'été, et dont s'occupait ma tante. Il m'en prêtait toujours un quand je venais, depuis que j'avais eu 18 ans, prétextant que j'étais trop grand pour dormir près d'eux, mais en vérité, je savais combien cela lui faisait plaisir de bien m'installer car ces cottages avaient toujours été destinés à ses futurs enfants... qu'il n'aurait jamais. Mon préféré était le plus petit des quatre, perché sur l'espace le plus haut de la falaise mais en même temps abrité par une falaise plus grande qui coupait la baie agitée par l'océan toujours en colère. L'intérieur était simple, rustique, mais parfaitement entretenu, et depuis le lit on voyait l'horizon et les flots par la grande fenêtre. Je me sentais chez moi, bien plus qu'à Oxford. Nous avions bien profité du week-end, Matthew m'avait fait rire comme d'habitude et j'avais aidé ma tante à réinstaller de vieux meubles, nous avions bien mangé, et j'avais surtout fait deux grasses matinées, ce qui ne m'arrivait plus jamais. Du coup, j'étais dans une espèce de langueur douce et agréable, encouragée par le fait qu'un bon whisky accompagnait toujours nos repas.

Je n'avais pas ouvert le carnet. Il était à elle et il n'était pas un simple objet, il était ses propres pensées couchées sur le papier, et j'avais bien trop de pudeur et de respect pour le lire. Je l'avais d'ailleurs oublié dans un coin de ma chambre. Mais le samedi soir, alors que j'étais rentré vers le cottage en contemplant les étoiles de cette fraîche nuit - elles me faisaient immanquablement penser à Ruby, à présent - j'avais sorti ma veste le temps que le feu ronfle dans la cheminée et réchauffe la pièce, et... Il était dans ma poche. Je n'y avais pas fait attention, je n'avais pas porté cette veste depuis ce soir-là. Devant l'âtre, dans la pièce uniquement éclairée par les flammes, je l'avais tourné et retourné entre mes doigts. Petit à petit, je l'avouais à regrets... La curiosité me piquait. Qu'écrivait-elle? Que pensait-elle? Qu'y avait-il dans sa tête? Pourquoi m'y intéressais-je? Pourquoi hésitais-je? Pourquoi... Mais plus je tentais de me persuader que j'allais lui rendre et que je ne devais pas lire, plus je me disais que je n'allais pas la revoir, et qu'elle ne saurait jamais que j'avais son carnet. D'ailleurs, à Pré-au-Lard, je guettais les rues parfois, mais étrangement, même en journée, je ne l'avais plus jamais croisée. Faisait-elle exprès?...

Oh, tant pis. J'ouvris le carnet, passant mes pouces sur le grain des pages. Son écriture était appliquée la plupart du temps, élancée comme elle, mais par moment elle semblait rencontrer des difficultés invisibles, se faisait plus brouillonne, moins certaine. Des mots accrochaient mon regard tandis que je feuilletai rapidement, avec l'étrange impression de faire quelque chose d'interdit. Je ralentis mes gestes petit à petit, puis me mis à lire vraiment. Il y avait beaucoup d'heures notées suivie de quelques mots : le prénom de Lizlor, la Gryffondor, revenait beaucoup. Mais entre ces pense-bêtes se glissaient parfois des mots - Hadrian, souvent plusieurs fois griffonnés - et des bribes de pensées où résonnait un certain de désespoir. Les pages entièrement recouvertes étaient rares et quand j'en lus une entière je me sentis gêné, comme si j'étais un voyeur : Ruby avait visiblement écrit ses pensées du moment, elle disait qu'elle en avait marre de ne pas se souvenir et de ne pas pouvoir ralentir, et je ne comprenais pas tout, tout comme j'entrevoyais la vérité. Elle écrivait bien, cependant, je trouvais qu'elle faisait passer quelque chose par ses mots ; quand mon prénom apparut sur une page, puis à plusieurs reprises... Je me trouvai interdit. Et, surtout, mon cœur se mit à battre, excité par le simple fait que... Allais-je savoir ce qu'elle pensait de moi?! Mais il n'y avait rien de concret, si ce n'est qu'elle marquait que nous avions passé une bonne soirée, et qu'elle relatait quelques anecdotes qui nous avaient amusés - je ris malgré moi en les relisant. Ma lecture terminée je m'aperçus qu'il était déjà tard et que je rentrais tôt le lendemain - précautionneusement, je rangeai le carnet, l'esprit préoccupé. Je m'en voulais toujours, et je regrettai sa présence. En vérité, les soirs à la Taverne du Sanglier étaient bien plus mornes. Ils l'avaient toujours été mais le simple fait de savoir qu'elle allait venir les égayait. Maintenant... Cela ne risquait plus d'arriver, et bien que je savais que j'avais bien fait d'être honnête avec elle en ne me rapprochant pas trop, je ne pouvais pas nier qu'il m'en coûtait et qu'elle me manquait vraiment - son rire, son sourire, son regard - et que je m'inquiétais un peu pour elle, encore plus après avoir lu son carnet. Je savais qu'elle n'avait pas une vie simple - j'avais l'impression de ne rien avoir arrangé, et je n'en étais pas fier, car je n'avais pas cherché à lui faire du mal.

Ma vie avait repris son cours après cela - le carnet était maintenant dans le tiroir de ma table de nuit, à la fois à l'abri mais pas trop loin, et bien sûr, au même endroit que le carnet de mon frère, qui ne me quittait jamais, bien que je ne l'ai jamais lu.

Ce début de semaine avait été plutôt éprouvant car j'avais eu des acheteurs très demandeurs de potions en tous genres et j'avais beaucoup travaillé en plus de mes heures de journée, mais cela avait valu le coup : je m'étais fait un joli sac de Gallions. Qui plus est, il y avait du monde à la boutique, et j'avais eu de quoi m'occuper l'esprit sans interruption, ce qui faisait que j'étais rentré chez moi plutôt tardivement et vraiment fatigué, sur tous les plans. J'avais été invité par la voisine à dîner, et au début j'avais voulu refuser car elle était bien gentille mais assez gâteuse et elle m'agaçait, mais j'étais tellement las que je n'avais même pas le courage de me faire à manger, si bien que j'acceptai de manière absolument intéressée. Finalement, elle était dans un bon jour et elle me fit rire ; elle me fit même de la peine car je compris que ses enfants ne venaient plus la voir et qu'ils l'abandonnaient, préoccupés par leurs propres vies... Il y avait quelque chose de triste dans ses aveux qu'elle faisait en marmonnant des paroles sèches et énervées, parce que parfois ses lèvres tremblotaient, et elle m'apparut infiniment plus sympathique. Elle n'était qu'une vieille dame un peu délaissée, et ses radotages n'étaient pas si insupportables que ça - en prenant congé, je me promis de venir lui rendre visite un peu plus souvent.

Il n'était pas trop tard, alors avant de me coucher, je m'accordai un dernier petit plaisir : Matthew, qui fumait la pipe, m'en avait offerte une à mes 18 ans. Comme beaucoup de sorciers âgés il fumait des herbes dans sa fine pipe en bois clair et depuis que j'étais enfant, je ne savais pas pourquoi mais cela m'avait toujours fasciné, si bien qu'il m'en avait offert une également. Je l'utilisais peu, de temps en temps, mais j'appréciais cette sensation, l'odeur des herbes, le goût, le toucher policé du bois. Je restai dans mon salon de longues minutes, devant le feu qui s'éteignait, sentant la fatigue m'envahir entièrement. Puis, j'allai me coucher, après une douche rapide, et je tombai comme une masse dans mon lit.

J'étais trop épuisé pour faire des rêves ou des cauchemars - tant mieux. Ceux-ci revenaient en boucle, cycliquement, et quand j'avais un peu de répit, je ne les regrettais pas. Pourtant... Un léger coup sur le bois... Le bois d'une barque retournée, pourquoi quelqu'un toquait d'en-dessous? Elle dérivait doucement sur l'eau, calme... Les coups se firent plus fort et j'émergeai de cette vision étrange. Des coups contre ma porte. Un regard vers l'horloge : une heure passée.

- Oh, putain, Phil! grognai-je en me frottant les yeux.

Il n'y avait que lui pour débarquer à cette heure-là : il fallait définitivement que je lui passe une clé, cela ne me dérangeait pas du tout de cacher certains trucs pour lui, mais si il commençait à débarquer à n'importe quelle heure de la nuit... A regrets, je m'extirpai de mon lit et, comme j'étais persuadé que Phil était derrière ma porte, je ne pris pas la peine de passer un t-shirt car je ne portais que mon pantalon de pyjama. Le bruit de la serrure résonna fort dans le silence de la nuit, et j'ouvris la porte, grimaçant un peu de devoir m'habituer à la lumière tamisée du palier.


- Je… ... Ruby?!

Mais... Pourquoi?! Ma première réaction fut l'inquiétude : elle s'accrut quand je notai ses yeux fatigués, humides... Les sanglots qui l'agitaient doucement. Emmitouflée dans son manteau, elle avait l'air d'une enfant, simplement d'une enfant, en quête de cette affection qui lui a toujours fait défaut - cela me toucha si profondément que je sentis mon cœur se serrer. J'ouvris la porte en grand, m'effaçant légèrement pour qu'elle rentre, mais elle ne bougeait pas.


- Je suis désolée je… Je savais pas où aller…

- Il n'y a pas de problèmes, la rassurai-je d'un sourire. Rentre.

Cette fois elle vacillait, et si j'avais l'habitude de la voir vaciller à cause de l'alcool... Je devinais qu'il n'en était rien. Ses traits étaient voilés d'un si terrible chagrin que je m'en voulus d'avantage de ne pas lui avoir accordé assez d'attention, et je voulais me montrer le plus rassurant possible, c'était tout ce qui comptait - malgré tout, je ne pouvais m'empêcher de me dire : pourquoi vient-elle chez moi?

Un jour, mon oncle m'avait raconté une anecdote à propos de sa rencontre avec ma tante. Ils avaient une histoire plutôt drôle, pleine de péripéties, et à les voir tous les deux ensemble dans une osmose si tranquille, j'avais de la peine à imaginer leurs aventures passées et leur caractère visiblement impétueux. Mais il m'avait dit, et je m'en rappelais très nettement : parfois, les femmes pleurent et tu ne sais pas vraiment pourquoi ; tu as juste besoin de savoir qu'il faut que tu les prennes dans tes bras, et que tu les serres très fort. Je ne voulais surtout pas que mon geste soit mal interprété mais effectivement je songeai à Matthew et je ne voyais qu'une seule solution... Je pris doucement Ruby dans mes bras et poussai ensuite la porte dans son dos, qui se ferma en un clic discret. Elle était froide - son manteau, sa peau - et cette vague du dehors contre ma peau me fit frissonner mais je la serrai un peu plus contre moi, inclinant sa tête sur mon épaule en appuyant doucement sur sa nuque. J'appuyai alors mon menton sur ses cheveux dorés - ils sentaient aussi bons que dans mes souvenirs - et quand j'enroulai mes bras autour d'elle pour qu'elle se sente en sécurité, je sentis qu'elle mettait les siens autour de ma taille. La sensation de ses mains sur ma peau nue déclencha une telle réaction que je ne respirai pas pendant quelques secondes, et que mon cerveau se remit en marche après une courte pause, tandis que je me mettais à frotter doucement ses cheveux, son dos. Elle était pourtant dotée d'une certaine assurance, d'une prestance, en temps normal, mais à sangloter doucement entre mes bras j'avais l'impression qu'elle s'effondrait tout aussi légèrement et qu'elle apparaissait si vulnérable... Je continuai à la serrer contre moi en ne me laissant pas aller, conscient qu'elle avait besoin d'une épaule secourable - et que pour je ne sais quelle raison, elle m'avait choisi.


- Calme-toi... Ça va aller... Que se passe-t-il? murmurai-je doucement, sans insister, répétant mes phrases et mes gestes rassurants. Je ne voulais pas la brusquer ; juste qu'elle se sente en position de faire ce dont elle avait besoin.

Comme il faisait sombre à nouveau, puisque la lumière du palier ne filtrait plus, j'attirai alors doucement Ruby vers le milieu de la pièce - me décollant d'elle, non sans un certain regret qui n'avait pas sa place ici - prenant sa main ; j'agitai ma baguette posée là sur le meuble pour que le feu ronfle à nouveau dans le cheminée. Alors, je lui ôtai son manteau, raidie de froid, pour le poser sur le fauteuil et l'invitai à s'assoir sur le canapé. Quand je m'assis à côté d'elle, ma main continuai à frotter son dos, doucement, et mon bras entourai son épaule - ses yeux brillaient de larmes et quelque chose me dérangeait profondément dans le fait qu'une pluie sombre en voilait les étoiles...
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Ruby Standiford-Wayland


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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMer 20 Fév - 23:55

Je ne savais pas où regarder. Je n’osais pas affronter son regard, tout simplement parce que j’avais peur de ce que j’allais y trouver. De la surprise, n’est-ce pas ? Je me souvenais très bien de notre dernière conversation, de mes mots abrupts et catégoriques qui avaient voulu couper court à tout, tout ce que nous avions. Mais qu’avions-nous ? J’avais toujours été incapable de le décrire, même à Lizlor, j’avais toujours l’impression de retenir ce que je pensais et ce que je ressentais car je refusais de m’y attarder –par peur. Mais devais-je vraiment l’expliquer ? Ne pouvais-je pas simplement admettre que j’aimais sa compagnie, sans chercher à comprendre plus ? J’étais fatiguée de vouloir trouver des explications partout, dans les moindres parcelles de ma vie mais pourtant n’était-ce pas ce qui me maintenait lucide ? J’avais commencé à boire pour ça, pour arrêter de toujours réfléchir parce que parfois, j’avais l’impression que mon cerveau partait si loin et dans des zones si obscures que ça m’échappait totalement. Ça me faisait peur de me souvenir, de comprendre à retardement des morceaux de ma vie, et de me dire que j’aurais dû agir différemment. Je n’en pouvais plus de me demander constamment « et si ? », et si je n’avais pas joué dans la grange, et si j’avais été moldue, et si Brooke n’avait pas été là cette été, et si je n’avais pas commencé à douter, et si… J’aurais pu inlassablement refaire chaque moment, jusqu’à qu’ils soient parfaits. Mais je devais bien accepter qu’ils ne l’étaient pas. Je devais accepter que j’avais eu tort, et que ce n’était pas une fin en soi, peut-être simplement une étape. Rien n’était bloqué. Je ne savais pas où j’allais avec Ewan, je ne savais pas où j’allais tout court, mais qui le savait ? J’avais des points de départ et peut-être devais-je m’en contenter, cesser de me torturer l’esprit pour savoir comment les choses auraient pu être. Elles étaient, voilà tout.

Alors, même sobre, je devais accepter que j’étais ici, devant Ewan. Je ne pouvais plus faire demi-tour, je n’en avais même pas envie. Mais que dire, si ce n’était m’excuser ? Pardon, pardon, encore et toujours pardon. J’étais désolée d’être ici, mais pas seulement… J’étais tellement désolée de notre dernière soirée ensemble. Pourtant, mes craintes étaient toujours présentes, parce que si je voyais Ewan et notre relation d’une manière assez flou, j’avais peur que lui ai une idée bien tranchée sur la question. Que je ne sois que la jolie fille dont il avait envie. Mais j’aurais dû lui en parler, plus calmement mais c’était déjà si confus pour moi que je voyais mal comment lui exprimer clairement sans m’engager dans un terrain glissant dont je connaissais l’inclinaison de la pente malgré moi. Alors j’avais choisi de m’enfuir dans l’alcool, pensant que peut-être il me rendrait plus lucide mais je comprenais à retardement, encore une fois, qu’il ne m’avait pas aidé, bien au contraire. Car maintenant, totalement sobre pour la première depuis un bon moment d’ailleurs, je sentais le doute poindre. Non pas au sujet de ma présence ici, mais bien de la manière dont j’avais vu Ewan. Je sentais quelque chose, tout au fond, qui me disait que je pouvais lâcher prise et qu’il serait là. Et je n’avais pas à l’expliquer –pas cette fois.


- Il n'y a pas de problèmes. Rentre.

J’eus un soupir étrange, comme si j’attrapais brusquement ma respiration, tentant d’imprimer ce qu’il venait de dire. Pas de problèmes… Je pouvais rentrer… Et rester… Je sentis un sanglot monter à nouveau, presque de soulagement, mais aussi d’épuisement. J’abandonnais, je déposais les armes. Et mon corps sembla suivre les ordres de mon cerveau, ou plutôt l’absence de ceux-ci, et je vacillais en tentant de faire un pas.

Il se passa alors quelque chose de complétement inattendu et étrange, qui pourtant sembla en une seconde résoudre tout, se révélant être la seule chose dont j’avais besoin en cet instant.

Ewan me prit dans ses bras. Je ne compris pas tout à fait ce qui se passa, parce que mes jambes étaient si cotonneuses que je me laissais littéralement porter par son étreinte en fermant les yeux. J’entendis un bruit, et je compris qu’il avait fermé la porte. Une nouvelle fois, je pénétrais chez lui et c’était coupé du reste, de Poudlard, ici il n’y avait rien de plus que lui et moi –et c’était tellement rassurant. Il eut un contact étrange entre la chaleur de sa peau à peine tirée de son lit, et la fraicheur de la mienne qui venait d’affronter le soir hivernal, mais je me sentis instantanément réchauffer par l’étau de ses bras dans lequel je me logeais sans réfléchir plus longtemps. J’obéissais à sa main dans ma nuque qui m’attirait dans son cou qui sentait son odeur qui m’avait tant poursuivi depuis que je l’avais perdu, je le connaissais encore dans les moindres notes même si ce soir j’en trouvais une différente qui me rappelait un peu le tabac. Malgré mon épuisement, je sentis sa chaleur se propager jusqu’à moi et instinctivement, j’enroulais mes bras autour de sa taille, sentant sous mes doigts glacés les recoins de sa peau douce et tiède. Mes jambes tremblaient en écho à ma respiration que les sanglots continuaient de couper mon souffle. Mais petit à petit, ils furent comme aspirer par les caresses d’Ewan qui doucement, passait sa main le long de mes cheveux pour me calmer –et ça fonctionnait. Je ne voulais rien de plus en cet instant, je voulais simplement rester là bercée par ses murmures et ses bras. Je tentais vainement d’articuler un merci, mais il se perdait dans mes pleurs et j’abandonnais, espérant que mes mains qui s’accrochaient à son dos suffisaient à transmettre tout ce que je sentais –et je sentais tellement de choses.


- Calme-toi... Ça va aller... Que se passe-t-il?

Je ne répondis pas tout de suite. Il me semblait qu’il y avait tant de choses à répliquer, et je me sentis soudain si petite devant tout ce que je voulais lui dire, sans réussir à cerner réellement ce que je pensais. Pour le moment, je voulais simplement qu’il soit là, même s’il ne m’étreignait pas, simplement sa respiration et sa présence. Parce qu’elle m’apaisait, comme la pluie que je regardais les soirs d’été où l’orage venait briser la lourdeur de l’atmosphère. Et même lorsqu’il s’écarta, même si je me sentis sortie d’un cocon protecteur, j’étais moins vulnérable. Parce qu’il était encore là, et que son étreinte m’avait apporté quelque chose de plus qu’une épaule sur laquelle m’appuyer, elle m’avait apporté la preuve qu’il pouvait être là même quand je n’avais plus le cœur à rire. Et c’était ça que j’attendais non ? Je voulais qu’il sache qui j’étais quand je n’avais pas bu, qui j’étais quand les choses devenaient trop lourdes –et elles l’étaient tant ce soir. Pourtant, une part de moi avait peur de l’effrayer, mais je ne voulais pas faire demi-tour ni prétendre que j’en étais une autre plus forte. Je n’étais que moi, moi et mes jambes qui tremblaient …

J’eus un nouveau frisson lorsqu’ Ewan m’ôta mon manteau, mais je le laissais faire comme une poupée désarticulée, le regard perdu dans les flammes du feu qu’il venait d’allumer d’un coup de baguette. Je me laissais tomber sur son canapé qu’il m’avait indiqué sans réfléchir, et lorsqu’il passa son bras autour de mon épaule, je relâchais une nouvelle fois mes muscles et posai ma tête contre la sienne. J’avais fermé les yeux, et pendant un moment je cessais de penser, littéralement. Je me concentrais simplement sur l’odeur de son cou, sur la note de vanille qui se cachait derrière celle de réglisse. Je ne sais pas combien de temps je restais là, mais mes larmes finirent par s’effacer et j’eus la force de me dégageais de son étreinte. Silencieusement, j’ôtais mes bottines et repliai mes genoux contre ma poitrine, les entourant de mes bras, avant de finalement me tourner vers le jeune homme pour affronter son regard. Les flammes éclairaient doucement son visage, et qu’il était beau, mais qu’il me paraissait un peu inquiet ! Pourtant, ses yeux me regardaient presque comme avant –comme s’il ne m’en voulait pas débarquer à cette heure-là chez lui sans être capable de m’expliquer.


- Je ne sais pas pourquoi je suis là, si tu te poses la question… J’ai pas d’explications. Lâchai-je finalement, en détournant le regard vers les flammes qui crépitaient et brisaient mes silences. Je suis juste bien ici, je suis bien avec toi, et je ne sais pas pourquoi. Je ne veux pas savoir. Ça ne t’embête pas trop? Je… Je voulais pas être toute seule. Murmurai-je en guise d’explications, d’un ton désolé. Tu avais raison. Continuai-je tout doucement, la voix tremblant sous le poids de mes regrets. Je… Je bois trop. Je le savais, mais c’était si facile… D’oublier, de rire…

Je jetai un regard à nouveau vers ses pupilles bleutés, avant de lui faire un très maigre sourire. Mes doigts tapotaient mes chevilles nerveusement, et je me reconcentrais sur les flammes avant de fermer les yeux. J’avais envie de lui parler de Lizlor, de cette soirée dans les cuisines… De lui parler de tout…


- Lizlor aussi, elle a fini par savoir. Avant de venir au bar, je volais des bouteilles dans les cuisines. Brillante idée, n’est-ce pas ? Ajoutai-je avec un rire tout bas, comme pour détendre l’atmosphère. Woodley m’a trouvé une fois. Et… Elle s’est bien amusée. Eludai-je en fermant les yeux, comme si je sentais à nouveau mon corps traîné sur le carrelage froid, et les angles des meubles dans mes côtes… C’est la mère de Lizlor qui nous a trouvé, et je lui ai demandé de ne rien dire. Je ne voulais pas l’inquiéter, tu comprends ? Je n’attendais pas de réponse, je parlais seule mais ça me donnait le courage de continuer, comme si je cherchais son approbation. Mais elle a fini par lui dire, et… Et Lizlor a compris que j’avais un… Un vrai problème. Au final, je l’ai encore plus inquiété…

Je m’en voulais tellement, si seulement Lizlor pouvait savoir à quel point je me haïssais et combien je regrettais. Je sentais les mots qui continuaient de s’échouer contre mes lèvres qui ne tremblaient presque plus, mais comme par réflexe, j’appuyais mon front sur mes genoux pour enfouir mon visage sous mes cheveux blonds. Comme pour me cacher, tant j’avais honte.

- J’aurais pu montrer les bleus. Mais je ne voulais pas lui dire… Que Woodley avait utilisé la legilimancie, et que j’avais tout… Revu. Ma voix se faisait si basse que je n’étais pas sûre qu’Ewan entendait. Je ne savais pas non plus si je devais lui dire tout ça, mais j’avais besoin de parler et il était là, j’avais envie qu’il sache. Qu’il m’écoute. Je me sentais bien quand il m’écoutait. Lizlor aurait pas supporté, moi non plus d’ailleurs mais je n’ai pas trop eu le choix.

Au fur et à mesure que les souvenirs de la soirée remontaient, je sentais l’ombre de l’incident planait lourdement au-dessus de moi. Doucement, je dégageai mon visage de ma cachette, et je me tournais vers Ewan qui me regardait toujours.

- Et si toi tu savais… Tu me détesterais. Soufflai-je dans un murmure.

Et à cette idée, j’eus un frisson. Parce que si je me détestais, à l’idée qu’Ewan me voit comme il aurait dû le faire s’il connaissait l’histoire, j’avais un poids qui se formait dans ma poitrine. Il venait s’ajouter à tout le reste, et étrangement ce soir, je me demandais si… Si dire les choses n’était pas le meilleur moyen de m’alléger.

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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMar 26 Fév - 20:24

Il y avait quelque chose de rassurant dans le crépitement de la cheminée, qui s'accroissait à peu, et je me sentis légèrement... Non, pas rassuré. Il n'y avait rien de rassurant dans le fait qu'elle débarque ici au milieu de la nuit - seul Phil pouvait faire cela, et ce n'était certainement pas pour venir pleurer dans mes bras, mais plutôt pour s’acquitter de ses petites tâches frauduleuses, ce que je comprenais très bien - encore plus quand on pensait à notre dernière entrevue, où je lui avais clairement fait comprendre qu'il n'y avait pas de place pour elle dans ma vie, ni probablement pour moi dans la sienne. Je me rappelais encore de son regard coléreux et déçu, et voilà qui était bien étrange que je sois celui chez qui elle venait chercher refuge mais, et alors? Le monde était peuplé de constats bien plus illogiques que celui-là et il y avait longtemps que je ne m'attardais plus à les comprendre. Car c'était à y perdre la raison : pourquoi ceci, pourquoi cela? Les choses arrivaient, un point c'est tout, qu'on le veuille ou non, qu'on l'en empêche ou non, qu'on en soit fautif ou non. C'était tout ce à quoi je pouvais me raccrocher. Bien faible au demeurant... Mais cela m'aidait à y voir plus clair, de tenir le coup. Alors, qu'y avait-il dans le bruissement de ces flammes, dans ses sons bien particuliers qui émanaient de la cheminée et résonnait dans le silence? L'odeur du feu et du bois brûlé se faisait plus forte, mais pas désagréable, et masquait à peine l'odeur persistante mais légère du tabac que j'avais fumé tout à l'heure. J'ignore combien de temps elle resta lovée contre moi ; j'espérais juste qu'elle trouverait ici assez de chaleur et de réconfort pour apaiser ce qui semblait l'agiter, et cela n'allait pas plus loin. Je regrettai de plus en plus le manque de tact que j'avais eu avec elle, ou bien de m'être laissé emporter et de n'avoir pas réagi avant qu'il ne soit trop tard, et il y avait quelque chose dans la façon dont j'essayais de me comporter avec Ruby qui avait valeur de remède. J'aurais aimé pouvoir lui expliquer la totalité de l'histoire, de mon histoire, la raison pour laquelle nous nous étions disputés, le fait que j'allais partir, j'aurais aussi aimé avoir le pouvoir de la faire sourire comme quand je lui faisais des cocktails rien que pour elle, mais j'aurais été bien utopique d'y croire un seul instant. La vie était composée de chemins plutôt sinueux ; nous n'étions pas sur le même et je ne voulais pas me perdre, mais en revanche, j'étais prêt à l'aider si sur le sien il y avait quelques obstacles.

En plus de l'odeur de charbon chaud, celle de Ruby venait me chatouiller les narines de temps à autre, surtout quand elle bougea un peu et ôta ses chaussures, et encore une fois en la respirant ce parfum m'enchanta, sans que je sache les exactes notions qui le composaient. Les filles avaient légèrement un parfum fleuri et léger, et c'était le cas du sien, mais au fond, ou autour, ou s'y entre-mêlant en spirales - comment définir les fragrances d'un parfum? - il y avait ce fond plus corsé et capiteux, cette odeur de menthe poivrée qui rehaussait le tout, comme si elle voulait titiller la curiosité et nous diriger vers une autre voie. Je compris alors, au fur et à mesure que ses sanglots se calmaient, et que nos êtes l'une contre l'autre restaient immobiles, ce qu'il y avait dans le bruit si particulier du feu qui crépitait dans le silence de la nuit. C'était le bruit annonciateur d'une vague qui approche - encore et toujours une vague - et qui se roule et qui avance à toute vitesse, sans bruit, avant d'éclater avec fracas. Ce silence à peine ponctué des petits bruits du feu attestait de quelque chose d'important allait arriver. J'étais prêt ; puisque Ruby m'avait choisi pour refuge, je me voyais mal lui refuser ce dont elle avait visiblement besoin.

Je me demandais bien ce qui l'avait poussée à oublier un instant notre dernière dispute. Elle si solide malgré les litres d'alcool qu'elle buvait, je n'étais pas dupe, que lui avait-il fallu pour s'abandonner complètement? Je la regardai du coin de l’œil alors qu'elle bougeait à nouveau et se décollait de moi, et ses cheveux me chatouillèrent la peau au passage, et je me rendis compte que malgré tous les détails que je savais sur elle, qui n'étaient pas négligeables, malgré son carnet - en la voyant je n'étais pas fier, d'ailleurs, de l'avoir lu-, je ne la connaissais pas, je ne connaissais pas les raisons et les lueurs qui attisaient son regard ou des ombres qui passaient devant ses yeux. Il y avait quelque chose d'assez libérateur dans le fait que malgré tout nous soyons presque des étrangers, unis par un lien que je n'expliquais pas encore.


- Je ne sais pas pourquoi je suis là, si tu te poses la question… J’ai pas d’explications. Pour la rassurer tout de suite, je lui lançai un petit sourire. Maintenant qu'elle était là, ça n'avait pas d'importance, et elle ne me dérangeait pas de toute façon. Je… Je voulais pas être toute seule. Tu avais raison. Je… Je bois trop. Je le savais, mais c’était si facile…

On dit toujours que cette victoire-là est la plus difficile ; j'étais heureux pour elle qu'elle en ait pris conscience. Le regard que nous échangeâmes était plein de compréhension - ce qui m'intriguait maintenant c'était comment elle en avait pris conscience, et ce qu'elle comptait faire ensuite. Sa présence ici commençait à s'expliquer un peu, et même si il me manquait sûrement beaucoup de pièces, j'attendais la suite, sûr qu'elle allait me les donner. Je sentis que ma culpabilité n'allait pas tarder à arriver : même si elle était grande et faisait ce qu'elle voulait de sa vie, je lui avais offert des verres et elle était venue me voir au pub, et je n'étais pas très fier de ne pas avoir été plus franc plus tôt.

- Lizlor aussi, elle a fini par savoir. Avant de venir au bar, je volais des bouteilles dans les cuisines. Brillante idée, n’est-ce pas ? Je levai un sourcil - la première pensée qui me vint à l'esprit fut qu'elle avait décidément des ressources bien cachées, car je n'étais pas certain que la directrice de Poudlard soit ravie d'avoir nommé préfète une jeune fille un peu débauchée qui lui volait de l'alcool dans ses cuisines. Y penser me rappela nos 400 coups, avec Jamie, alors que nous étudions encore, et avec Phil aussi. Je souris en réponse à son petit rire, mais je ne voulais pas trop m'attarder sur ces souvenirs-là. Woodley m’a trouvé une fois. Et… Elle s’est bien amusée. Je ne connaissais pas Woodley car elle n'était pas encore professeur quand j'avais terminé Poudlard, mais de ce que j'entendais à Pré-au-Lard et de ce que racontait les élèves, il y avait plus charmant qu'elle. C’est la mère de Lizlor qui nous a trouvé, et je lui ai demandé de ne rien dire. Je ne voulais pas l’inquiéter, tu comprends ? Mais elle a fini par lui dire, et… Et Lizlor a compris que j’avais un… Un vrai problème. Au final, je l’ai encore plus inquiété…

Comme elle se recroquevillait un peu plus sur elle-même et qu'elle cachait son visage dans ses jambes repliées, j'eus la pressante envie de la prendre dans mes bras, juste comme ça, d'enfouir ma tête dans son cou et de la sentir une nouvelle fois contre ma peau, mais en même temps que cette envie se fit trop intense je réalisai que ce n'était vraiment pas le moment, et que d'ailleurs il fallait peut-être que j'enfile quelque chose, même si je n'avais pas froid, car tout d'un coup je me sentais un peu trop découvert. Je jetai un œil dans la pièce mais je n'avais laissé traîner aucun pull ou t-shirt, et un peu mal à l'aise le temps de quelques secondes, je changeai de position, m'installant en tailleur sur le canapé, tourné vers Ruby, toujours de profil et enfoui derrière ses secrets et ses larmes. Mais, curieusement, sa voix avait une neutralité particulière, comme si elle récitait une leçon.

- J’aurais pu montrer les bleus. Mais je ne voulais pas lui dire… Que Woodley avait utilisé la legilimancie, et que j’avais tout… Revu. Lizlor aurait pas supporté, moi non plus d’ailleurs mais je n’ai pas trop eu le choix.

Cette fois, je sortis de mon silence attentif, brusquement indigné.

- Comment ça, la legilimancie?! Mais... C'est complètement interdit de l'utiliser sur une élève, c'est qui cette prof? Et Wayland n'a rien fait?! Mais... J'avais beau tourner la chose sous tous les angles, il n'y avait pas une seule manière de justifier cet acte, et quand je croisai le regard de Ruby je sentis que mes sourcils étaient froncés et que mon mécontentement se voyait clairement. Si il y a bien un endroit qui doit être parfait, pourtant, c'est bien Poudlard... murmurai-je alors malgré moi - comme ces moments avaient été parfaits, maintenant qu'ils étaient figés dans le temps... Qu'est-ce que tu as... revu? demandai-je prudemment, d'une voix plus douce. Je voulais bien qu'elle comprenne qu'elle n'était pas obligée de me répondre, qu'elle pouvait me parler si elle le voulait, ou se taire si elle préférait.

Quand elle se releva, je trouvai son regard plus dur tout d'un coup.


- Et si toi tu savais… Tu me détesterais.

Mes lèvres s'étirèrent légèrement et j'eus un petit rire, la regardant comme si elle venait de dire la chose la plus étrange qui soit. Soudain je la revoyais rire et plaisanter avec moi au bar, et Merlin, je ne pouvais pas faire autrement que de l'admirer et de la trouver belle, même quand elle pleurait et qu'avait les traits tirés et les yeux rougis ! Sa voix avait quelque chose de particulier également, douce, mais chaleureuse comme les journées d'été qui font envie. La détester ! Quelle bien étrange idée...

- A part si tu m'avouais qu'en réalité, tu détestes les potions, tu sais, je ne vois pas vraiment pas comment je... Comment on peut en venir à te détester, plaisantai-je à moitié, me repris-je à moitié, en cachant tout autant à moitié et plutôt maladroitement le compliment sous-jacent. Attends, ne bouge pas, fis-je tout d'un coup en pointant mon doigt vers elle.

Je me levai du canapé et filai dans la cuisine, qui se découpait dans l'angle du mur et s'ouvrait sur le salon. La cuisine était à moitié un placard et on ne pouvait pas y tenir plus qu'à deux mais elle m'était bien suffisante. Agitant ma baguette pour allumer la lumière, je me mis à fouiller dans les placards plus ou moins organisés, avant de faire venir à l'aide d'un Accio une petite boîte de thé que ma tante m'avait donné quand j'étais allé un week-end chez eux. C'était toujours elle qui me fournissait de ce thé particulier, aux propriétés magiques, qui contenait des substances qui apaisait et réchauffait de l'intérieur, et qui fonctionnait particulièrement quand on avait le cafard. Il était en plus agréablement parfumé, et je fis bouillir de l'eau, avant d'en servir deux tasses et de les rapporter, tout comme la théière que je posai sur la petite table en bois bancale et usée que j'utilisais comme table basse, dégageant les vieux exemplaires de la Gazette du bout du pied. J'en tendis une à Ruby avant de récupérer ma place, me réinstallant en tailleur. Le parfum du thé me mettait déjà dans une humeur plus légère, et j'espérais qu'il allait agir sur elle aussi.

- C'est une recette secrète de ma tante : tu vas voir, tu n'as jamais bu du thé comme celui-là, expliquai-je en lui lançant un petit clin d’œil, car elle ne pouvait pas ignorer l'atmosphère soudainement sereine qui régnait alors que de la bouilloire s'échappait des volutes de vapeur d'eau à une forme particulière, magique elle aussi. ... Alors?

Plutôt que de viser véritablement son avis sur le thé, mon "alors" tentait plus ou moins habilement de savoir si l'heure était ou non aux confidences. J'espérais qu'elle n'allait pas être trop coûteuses, mais vu les précédentes... Malgré le thé, mon espoir n'était pas très vaillant.
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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeJeu 28 Fév - 10:40



"And today I was a dead girl walking, see the light burn through tears
Heard you say my name and get to talking of the love and all the fears
And you saw all the pain I was holding, and yet still you’d hold me near
‘Cos you’re a good man, ‘cos you’re a good man,
I keep telling myself to just let go."



Je me sentais si frêle, si minuscule, exactement comme lorsque je m’étais retrouvée au poste de police, dans une salle où tout le monde s’activait autour de moi et que je restais pétrifiée sur ma chaise, cherchant peut-être à m’enfoncer dans le dossier jusqu’à disparaître car j’avais l’impression que tous me regardaient et pourtant, il n’y avait plus rien à voir, je n’étais plus que ce petit être infime, presque comme une poussière. Si seulement j’avais pu être cette poussière qui, d’un coup de vent, aurait disparu dans l’atmosphère. Mais j’étais bien là, sur le canapé d’Ewan, et j’avais l’impression d’y être si petite et faible, parce que j’avais trop de peine pour que mon corps puisse la contenir et pourtant, c’était comme si elle prenait toute la place et que je ne pouvais m’en défaire. Ce n’était pas moi qui prenais de la place, c’était la douleur gigantesque qui m’oppressait si bien qu’elle m’étouffait, mais de l’intérieur. Elle me rongeait littéralement, et j’étais bien incapable de crier ou même de bouger car, aussi immense qu’elle soit, elle n’était qu’à l’intérieur et encore une fois je me sentis si minuscule pour la porter… Et au fur et à mesure que je parlais, que les souvenirs remontaient, tout ce faisait plus net et plus pressant. Mes erreurs, celle en particulier de croire que l’alcool allait m’apporter quelque chose, me revenaient et semblaient soudain être bien plus marquées. Je me demandais même comment, stupidement, j’avais cru pouvoir m’en sortir –et en sortir ma meilleure amie par la même occasion. Le joli voile des mensonges s’était lentement soulevé, et j’entrapercevais toute la vérité endormie qui n’avait jamais disparu, et qui me murmurait d’une voix sinistre que j’étais faible, si faible d’avoir voulu m’y soustraire de la sorte.

Mais quelle était la vérité ? Probablement que j’étais juste… Troublée. Je ne pouvais pas prétendre que ce que je portais, ce que j’avais vécu, n’existait pas et ne me rendait pas différente –et plus fragile. Mais aussi que j’étais monstrueuse, tellement monstrueuse, d’avoir agi de la sorte envers Lizlor, de l’avoir blessée tout en étant conscience. Implicitement, certes, mais je ne pouvais pas prétendre qu’en buvant, je ne m’étais pas attendue à ce genre de retombées. Car je le savais pertinemment, j’avais fait une erreur, une de trop et ce n’était plus simplement moi que ça impliquait. J’aimais Lizlor, je l’aimais tellement, et je ne pouvais plus vivre sans comprendre qu’en me blessant, physiquement ou non, elle le sentirait aussi. Je ne pouvais pas non plus vivre en ne m’appuyant que sur elle, et pourtant c’était sûrement de là que tout devait partir car j’étais bien incapable de me… Soigner pour moi-même. Parfois, j’étais lasse d’avoir si peu d’estime pour moi-même, et pourtant pas une seule fois dans ma chute je n’avais songé à la douleur que je pouvais m’apporter en m’enfonçant un peu plus. J’étais incapable de prendre soin de même, pourquoi l’aurais-je de toute manière ? Woodley l’avait bien dit. Tout était de ma faute. Alors, pourquoi me secourir ?...


- Comment ça, la legilimancie?! Mais... C'est complètement interdit de l'utiliser sur une élève, c'est qui cette prof? Et Wayland n'a rien fait?! Si il y a bien un endroit qui doit être parfait, pourtant, c'est bien Poudlard... Rien n’était parfait, pensai-je amèrement, mais je ne répondis rien. Son ton outré me faisait presque plus mal, car je comprenais à quel point ce genre d’histoires pouvait mettre en colère, et forcément encore plus lorsqu’on les apprenait à retardement –Lizlor, encore une fois, Lizlor… Qu'est-ce que tu as... revu?

Sa voix s’était radoucit, et j’eus envie de me réfugier tout contre lui sans plus parler, et que simplement il me rassure avec cette même voix si douce, comme une mélodie, qui semblait rendre tout plus… Facile. J’avais cette impression que parfois, c’était la seule chose que je désirais. Me cacher quelque part, là où je me sentais en sécurité et peu importe si ce n’était pas logique, mais je m’étais sentie coupée du monde lorsqu’il m’avait étreinte. Et c’était lorsque tout disparaissait que mon poids ne s’envolait pas certes, mais me paraissait plus léger. Mais je ne pouvais m’empêcher de me demander si Ewan serait toujours aussi doux s’il savait, s’il comprenait qui j’étais et ce que j’avais fait… Une part de moi désirait toute cette douceur et l’autre me criait que je ne la méritais pas, et je restais prostrée, tentant vainement de cacher mon visage, de me cacher toute entière, sans pouvoir bouger ni répondre à ce qu’il venait de me dire. Qu’est-ce que j’avais revu ? Mais… si il savait !

Et alors que j’annonçais très brutalement ce qui me paraissait évident, je l’entendis rire, comme si je venais de dire une bêtise. Je sentis mon cœur se presser un peu plus dans ma poitrine, car je voyais le jeune homme si… Innocent, incapable d’imaginer un instant toute mon enfance. Mais je voulais qu’il continue de rire moi, je souhaitais tellement que tout soit aussi simple que ces éclats joyeux…


- A part si tu m'avouais qu'en réalité, tu détestes les potions, tu sais, je ne vois pas vraiment pas comment je... Comment on peut en venir à te détester. Attends, ne bouge pas.

Je ne le pouvais pas, de toute manière. J’étais comme clouée sur ce canapé, mes membres vidés de toute force que je gardais pour encore parler et c’était comme si chaque mot me pesait un peu plus car ils renvoyaient à la réalité brutale que j’avais voulue enfouir. En l’énonçant à haute voix, elle me semblait encore plus véritable et pesante. Oui, elle pesait sur moi, m’empêchant tout mouvement. Je le regardais se lever, mon regard se perdant dans la lumière des flammes mêlée à celle des réverbères de l’extérieur qui jouait avec ses cheveux et son dos nu. Je fixais ses omoplates finement dessinés, et la courbe de sa nuque qui se prolongeait jusqu’à sa colonne légèrement cambrée… Mais bientôt, il disparut dans la cuisine, et je m’arrachais à ma contemplation pour me concentrer à nouveau sur la cheminée où je perdais mon regard dans les reflets rougeâtres. Je finis même par clore mes paupières, la tête à nouveau enfouie dans mes genoux, et je respirais doucement m’accrochant simplement au bruit qui provenait de la cuisine.

Je bougeais finalement lorsque j’entendis Ewan revenir, et alors qu’il s’asseyait en face de moi, en tailleur, je consentis à faire de même –à lui faire face. Il me tendit un tasse de thé dont la fumée se glissa jusqu’à moi et la respirant, je sentis une petite vague de chaleur m’envahir, avant même que j’y trempe mes lèvres.


- C'est une recette secrète de ma tante : tu vas voir, tu n'as jamais bu du thé comme celui-là. Je reçus son clin d’œil en rougissant légèrement et je murmurais un merci à peine audible avant de baisser les yeux vers ma tasse. ... Alors?

Je portais le liquide brûlant à mes lèvres et silencieusement, j’en bus quelques gorgées avant de faire un petit sourire timide. Il n’avait pas menti, je sentis ma poitrine animée d’une douce chaleur, à l’image de la sensation que j’avais eue lorsqu’Ewan m’avait pris dans ses bras. Ce genre de sensation qui me mettait en confiance, qui donnait envie de s’abandonner… Et pouvais-je le faire ? Je savais très bien que derrière sa question, il parlait de l’allusion que j’avais faite sur mes souvenirs raviver par ma professeure. Je me sentais presque prise au piège, car j’avais désormais deux options qui étaient simples. Lui dire, ou me taire. Si je choisissais la deuxième, ne serait-ce pas plus simple ? Je pourrais alors encore prétendre être normale mais je savais parfaitement que ce n’était qu’un mensonge de plus et pourtant, pourquoi ne pas lui mentir ? Pourquoi voulais-je tant qu’il me voit ainsi ? Il ne me connaissait pas, pas de Poudlard en tout cas, et c’était comme si avait lui j’avais une autre chance, celle d’être honnête. Mais je ne savais pas m’y prendre, je ne savais pas assumer mes faiblesses… Mais si je lui disais tout… Tout ! Comme ce mot me paraissait minuscule pour exprimer ce qu’il y avait derrière. L’incident, ma mère, tout ce qui s’en était suivi… Si je lui disais, je prenais un risque. Un risque de tout briser, mais encore une fois, qu’allais-je briser ? Nous avions cette relation étrange, ineffable, et l’honnêteté me semblait la meilleure manière de la concrétiser –dans un sens ou un autre. Si je lui disais, il pouvait soit fuir, soit rester. Tout mon être se disputait car je voulais qu’il reste, qu’il continue à me prendre dans ses bras, mais je savais que je ne méritais en rien ce genre d’affection ! Il était assez intelligent pour comprendre… Que j’étais mauvaise.

- Tu peux… Lui dire, ou me taire ? Tu peux me promettre de ne pas me couper ? Lui dire. Parce que ça risque d’être un peu confus et… Si je commence, je ne sais même pas si je vais réussir à finir alors…

J’avais choisi –et quel choix ! Je sentis ma gorge s’assécher, et je commençais à trembler un peu comme si mon corps savait exactement où j’allais m’aventurer, frissonnant déjà aux souvenirs qui revenaient. Je repris un peu de thé, cherchant probablement à puiser un peu de force dans la chaleur qu’il procurait dans ma poitrine qui se contractait douloureusement à l’idée que j’avais décidé de lui dire… Tout lui dire.

- Ma mère n’est pas morte d’une maladie. Je savais que j’aurais dû commencer par le début. Par l’incident. Mais je savais aussi que si je le faisais, je ne pourrais jamais continuer car les larmes s’agrippaient déjà à ma gorge et à ma voix basse. Enfin… Je suppose que l’alcoolisme est une maladie, et que ça ne l’a pas aidé. Si j’avais réussi à soutenir le regard d’Ewan à la première phrase, je fus incapable de ne pas le détourner. Maladroitement, je glissai une de mes mèches derrière mon oreille avant de regretter mon geste –il pouvait lire plus facilement mon visage… Elle s’est suicidée. Quand j’avais six ans.

A ces mots, je revoyais les petites pilules qui jonchaient le sol du salon, et la boite renversée qui avait roulé plus loin. La bouteille, toujours tout contre elle, et ses yeux fermés qui ne pourraient plus se rouvrir. Et moi, moi qui m’était penchée vers son visage pour chercher en vain sa respiration avant de m’écarter et de la fixer un instant sans un mot, comprenant petit à petit ce qui se passait. J’avais six ans. J’avais six ans et j’avais annoncé à travers un téléphone que ma mère venait de mourir.

Parfois, je me demandais si une part d’enfance avait pu y survivre.


- Mais je crois qu’elle était un peu morte avant… Je veux dire, ce n’était plus ma mère, plus depuis… Et ma voix s’éteignit, et je me maudissais d’être incapable de le dire. J’avais la désagréable sensation de ne pas être seule à parler, comme si cette petite Ruby de six ans était avec moi et que c’était elle qui racontait son histoire que personne n’avait jamais pu écouter ni comprendre. Elle aussi, elle ne supportait plus tout ça. Mais moi, j’étais trop petite pour fuir comme elle l’a fait, et c’est peut-être pour ça que je l’ai fait maintenant… Murmurai-je encore plus doucement.

J’étais consciente que ce que je disais était extrêmement confus. Qu’il lui manquait une pièce du puzzle pour comprendre. Je n’arrivais même pas à le regarder, pourtant nous étions si proches… Nos genoux se touchaient, et avec mes yeux baissés, je voyais toujours ses mains qui tenaient sa tasse –et j’avais envie de les prendre…


- C’est après sa mort que j’ai été placé en famille d’accueil. Mais… J’étais trop… Compliquée à gérer. Et c’était un euphémisme… Je me haïssais tellement, tu ne peux pas comprendre pourquoi, pas encore, je suis désolée parce que j’arrive pas à le dire et… Tout était si confus et je me mélangeais, incapable de faire une phrase claire tant il y avait de choses à dire. J’avais l’impression de mourir de l’intérieur. Je ne savais pas qui j’étais, je ne savais pas comment comprendre cette douleur et ce dégoût, le mot était sorti, mais Ewan ne pouvait pas l’associer à quelque chose de concret et encore une fois je m’en voulais de lui compliquer la tâche, alors je faisais n’importe quoi…

Les souvenirs étaient encore une fois aussi clairs que s’ils dataient hier. Chaque famille d’accueil, chaque regard et chaque mot. C’était toujours le même scénario. Ils avaient tous l’impression qu’eux feraient mieux que les autres, que j’allais m’améliorer au fur et à mesure. Que les choses allaient se tasser. Mais aucun ne comprenait que ça me rongeait de l’intérieur, que cette culpabilité me tuait littéralement, mais personne ne le pouvait car ça ne pouvait pas être moi ! Même moi, je le savais, ce n’était pas rationnel. Mais quelles autres options ? Toutes les enquêtes, toutes les recherches n’amenaient qu’à des réponses vides et de nouvelles questions. Mais moi, je l’avais su dès qu’on me l’avait demandé. Ruby, qui est venu ? Qui l’a tué ?

La réponse, elle était simple mais impossible. C’était moi.


- Je me faisais du mal, je refusais de manger, puis je recommençais, je cassais tout autour de moi, j’hurlais, puis je ne parlais plus pendant des jours… Et je ne dormais presque plus, je ne dors presque plus, parce que c’est toujours le même cauchemar. Encore aujourd’hui, à chaque nuit. Je me suis mis à tout ranger, parce que si moi j’étais en bordel, peut-être que je pouvais contrôler le reste, tu vois ? Et dans ce murmure, je relevais finalement les yeux vers Ewan comme pour y chercher un soutien, mais j’avais peur de son regard qui devait être si confus par ce que je racontais –ça n’avait pas de sens, pas encore. Je voulais juste… Arrêter d’être… D’être sale.

Je sentais que la vérité était toute proche, prête à sortir, et j’étais allé trop loin pour reculer. Son ombre planait, emplissant la pièce, et je le revoyais comme s’il était là –comme s’il l’était toujours. Mais alors que mon esprit s’aventurait dans les souvenirs les plus enfouis, d’autres revenaient en pêle-mêle et il n’y avait plus que l’incident, il y avait avant… Il y avait son sourire, les histoires qu’il me racontait avant de dormir, les bonbons qu’il me ramenait de son épicerie où je passais de nombreux après-midi avec lui à jouer dans les rayons, le thé à la myrtille qu’il me faisait les soirs d’hiver –il y avait tant de choses que désormais je voulais effacer de ma mémoire car je ne cessais de me demander si pendant tout ce temps, il avait déjà pensé d’une autre manière qu’un père devrait penser à sa fille.

Je levais les yeux vers ceux d’Ewan et pendant un moment je captais son regard parce que je voulais me souvenir de la manière dont il me regardait avant de savoir, de tout savoir et de tout comprendre.


- Ce que ma mère n’a pas supporté, c’est ce que mon père m’a fait… Et ce que je lui ai fait. J’avais le cœur qui allait exploser, je sentais des bouffées de chaleur me prendre et je me maudissais d’avoir fini le thé trop vite, car c’était maintenant que j’en avais besoin. Et malgré ses vertus qui m’avaient apaisé, je n’étais pas assez sereine pour raconter l’incident –je ne le serais jamais. J’avais six ans aussi, c’était… Six mois avant la mort de ma mère…

Mes lèvres tremblaient, et comme à chaque fois que je voulais parler de l’incident, j’entendais le craquement des feuilles dans mes oreilles, ce craquement qui m’avait annoncé son arrivée ce fameux jour de mai alors que je jouais dans la grange… Et ce craquement qui m’avait fait me tourner et le voir…

- Il… La nausée me prenait et je fermais les yeux en tentant de respirer calmement alors que tout mon être était au supplice des souvenirs. Il m’a violé. Silence, et une larme. Puis une autre. Et bientôt, une multitude de perles liquides qui dévalaient mes joues. Et j’ai juste voulu qu’il arrête, je l’ai voulu tellement fort, et la magie… Tu… Tu comprends ? Tu comprends ce que j’ai fait ? Et tout le monde dit qu’il le méritait, mais c’est pas vrai ! Ma voix s’étranglait dans mes sanglots, et je m’étais légèrement redressée, essuyant vainement les larmes qui roulaient indéfiniment. Personne ne mérite de se faire tuer par sa propre fille au fond d’une putain de grange, et même si lui m’a détruite, moi, moi… Je me noyais dans mes pleurs, hoquetant, tentant d’articuler. Moi, j’ai souhaité tellement fort qu’il meurt que cette faucille s’est déplacée et… Suffoquai-je, manquant cruellement d’air au milieu de mes hoquets. C’était moi, je le savais, je le sentais ! Mais personne ne pouvait y croire, même pas moi… Et… Et je sais ce que tu te dis, parce que tout le monde a dit pareil ! Que c’est horrible, qu’il était immonde mais… Mais c’est moi qui l’ai tué ! Ma mère avait raison… J’entendais sa voix qui criait cette injure que je ne pouvais plus oublier, et je n’avais jamais pu dire à haute voix à qui que ce soit, alors qu’elle me hantait, elle me hantait tant… C’est moi le monstre !

Je ne pus en dire d’avantage. Les sanglots me prirent trop violemment et j’avais enfoui mon visage dans mes mains. Mais il n’y avait pas que moi qui pleurais, non. Il y avait cette Ruby à la robe rose qui jouait dans la grange, et celle qui avait passé des heures sous sa douche pour faire partir la saleté gravée, et la Ruby qui avait trouvé sa propre mère morte sur le canapé, et celle qui se mordait les poignets, et celle qui rangeait tous les placards… Il y avait toutes ces Ruby, toutes ces peines et tous ces sanglots qui n’en formaient plus qu’un long et déchirant qui secouait mon corps incapable d’en supporter d’avantage, comme un cri au fond de la nuit et du gouffre dans lequel j’avais été plongé trop tôt.



"There was someone that I knew before,
A heart from the past, that I cannot forget
I let him take all my gold, and hurt me so bad
But now for you, I have nothing left."
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Ewan Campbell


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~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Empty
MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeLun 4 Mar - 19:22

Quand elle se réinstalla face à moi, dans une position presque identique à la mienne, je ne pus m'empêcher d'avoir un léger sourire - comme s'il m'était impossible de lutter contre le fait que les coins de mes lèvres s'étirent. Ruby ne le voyait pas : elle buvait son thé, les yeux baissés, après m'avoir remercié d'un murmure, et je savais que les effluves vaporeuses et les gorgées de thé qu'elle buvait lui faisaient le même effet qu'à moi : une étrange sérénité s'imprégnait dans l'air, comme si il avait été plus chaud, comme si il nous englobait nous et rien que nous pour nous protéger. Et malgré tout, malgré la situation et tout ce que je m'imaginais, plus ce qu'elle venait de raconter, par bribes, malgré le fait que la vague ne se soit toujours pas fracassée avec violence sur le sable dur et chaud de la plage, je trouvais un infime espoir dans le fait qu'elle soit chez moi, car c'était bien la preuve qu'elle était là pour quelque chose - pour chercher quelque chose - et que sans doute j'étais en mesure de la lui apporter? Je prenais cela comme une mission, un défi, qu'il ne me fallait pas échouer - encore plus quand je repensais à la manière dont je l'avais éconduite, et qui me restait désagréablement en tête, comme un remord indélébile. Je m'en voulais - Ruby était tellement une personne que j'estimais, que j'admirais, et que j'appréciais plus que je ne l'aurais dû, que j'avais l'impression d'être le dernier des ingrats d'avoir été si méchant avec elle, après toutes ces soirées passées ensemble, après le fait qu'en plus, elle m'ait aidé et défendu ce soir-là dans les ruelles de Pré-au-Lard. Quelque chose avait changé : si je me retenais à cause des limites que je m'imposais et du chemin tout tracé que je devais suivre, je me rendais subitement compte que ce ne devait pas être aux dépends de certaines valeurs, qui restaient importantes pour moi, malgré tout. Alors tant pis si encore une fois nous rapprochions un peu : il était hors de question que je ne l'écoute pas, que je ne tente pas d'être là pour elle, ou pire encore que je la renvoie de chez moi sans m'attarder un peu sur ce chagrin terrible qui semblait lui écraser les épaules. Étrangement, alors que je me disais tout cela, j'entendais la voix forte de mon père - un peu comme celle de Matthew, avec autant de puissance mais dotée d'un timbre bien moins mélodieux et chaleureux - qui me vantait les mérites du travail acharné, et qui m'expliquait comment on devait procéder pour réussir et être le meilleur - et ces conseils contrastaient alors tellement avec ce que j'étais en train de constater.

Je sentais ses genoux contre les miens, et l'odeur épicée du thé couvrait l'odeur délicate que dégageait Ruby ; instinctivement je m'étais un peu plus penché vers l'avant comme si j'avais cherché à la respirer encore une fois. Mais comme elle posait la tasse et se redressait légèrement, je compris qu'elle allait, sans doute, libérer cette vague qui gonflait et gonflait et ne demandait qu'à se casser sur le rivage - et que ce n'était plus du tout le moment de me perdre dans la contemplation de son visage, qui restait beau même baigné de larmes, et de ses cheveux blonds cendrés qui dévalaient ses épaules. J'avais envie d'enrouler une mèche autour de mes doigts, juste comme ça, comme cette même envie un peu plus tôt de mettre ma tête au creux de son cou et de fermer les yeux. J'avais l'impression qu'auprès d'elle, j'étais à l'abri... Mais de quoi exactement ? Je chassai ces questions qui n'avaient pas lieu d'être. Mon regard ne quittait pas Ruby, dont soudain toute la fragilité m'apparaissait de façon très frappante et se propageait jusqu'à moi - comme si un seul geste de ma part, un seul mot, aurait pu la faire exploser en milliard de petits débris...


- Tu peux… Tu peux me promettre de ne pas me couper ? Parce que ça risque d’être un peu confus et… Si je commence, je ne sais même pas si je vais réussir à finir alors…

Pour toute réponse, je traçai silencieusement une croix sur mes lèvres et je souris doucement une nouvelle fois, l'encourageant à continuer. Je ne m'en rendis pas compte sur le coup, mais mes mains s'étaient posées sur ses genoux qui touchaient les miens, comme une vague tentative de la rassurer, de lui rappeler que j'étais là, quoi qu'il arrive, et qu'elle pouvait se reposer sur moi.

Si j'avais imaginé la suite ? Jamais, et quand bien même... Quand bien même j'y aurais été préparé... Le peut-on vraiment ? Les horreurs de la vie ont de cela qu'elles frappent, encore et encore, inlassablement, de quelque manière qu'on les apprenne, qu'on les vive et revive, qu'on les raconte, qu'on les ressente. Elles dépendaient, qui plus est, de tant de facteurs qu'elles pouvaient différer du tout au tout selon les circonstances. Qui sait quelle histoire aurait été la mienne si mes parents n'avaient pas trouvé d'autres manières pour étouffer leur désespoir ? Quelle aurait été mon existence aujourd'hui si j'avais trouvé le réconfort dont j'avais tant eu besoin mais que personne n'avait été capable de me donner ? Qui sait, enfin, combien les choses auraient été différentes si je n'avais pas eu ce poids sur les épaules, cette culpabilité que je me refusais de nommer et de voir, si je n'avais pas pu parler plus tôt de ma véritable histoire, à Ruby par exemple ? Quelles auraient été nos relations ? Serait-elle venue ici ce soir ? Je n'avais de réponses à rien de tout ça, et y penser me donnait le tournis - car je pouvais continuer, encore et encore. J'avais la désagréable mais nette sensation de n'être que le jouet du destin - ce que j'essayais de combattre malgré tout, en organisant ma vie comme une construction bien calculée de A à Z.


- Ma mère n’est pas morte d’une maladie. Enfin… Je suppose que l’alcoolisme est une maladie, et que ça ne l’a pas aidé. Elle s’est suicidée. Quand j’avais six ans.

Ce fut là que je me rendis compte de la place de mes mains, car je me mis machinalement à exercer une petite pression sur ses genoux - je n'allais pas parler, je l'avais promis, mais mes pouces caressaient doucement le tissu de son jean. J'imaginais bien que son histoire de famille cachait de biens horribles secrets, si elle avait été en famille d'accueil. Sa mère s'était suicidée - et en plus avait été alcoolique... Comme le choc de se rendre compte qu'elle aussi pouvait se prétendre comme telle devait être rude, connaissant son passé.


- Mais je crois qu’elle était un peu morte avant… Je veux dire, ce n’était plus ma mère, plus depuis… Elle aussi, elle ne supportait plus tout ça. Mais moi, j’étais trop petite pour fuir comme elle l’a fait, et c’est peut-être pour ça que je l’ai fait maintenant…

Quelque chose oppressait mes poumons - quelque chose dans la courbe tremblante de ses lèvres, dans son regard baissé, dans sa voix incertaine. La vulnérabilité qui émanait tout d'un coup de Ruby, encore plus que tout à l'heure, m'attristait profondément et je me retrouvais dans une impasse : ne pas parler, ne rien faire, je l'avais promis. Alors que j'avais tant envie de la serrer à nouveau contre moi ! Mais... Je devinais que le pire était à venir, et quoi que je fasse, même mes bras, n'étaient-ils pas vains face aux démons de son enfance ?... Qui aurait pu, un jour, chasser les miens ?...

- C’est après sa mort que j’ai été placé en famille d’accueil. Mais… J’étais trop… Compliquée à gérer. Je me haïssais tellement, tu ne peux pas comprendre pourquoi, pas encore, je suis désolée parce que j’arrive pas à le dire et… J’avais l’impression de mourir de l’intérieur. Je ne savais pas qui j’étais, je ne savais pas comment comprendre cette douleur et ce dégoût, alors je faisais n’importe quoi… Je me faisais du mal, je refusais de manger, puis je recommençais, je cassais tout autour de moi, j’hurlais, puis je ne parlais plus pendant des jours… Et je ne dormais presque plus, je ne dors presque plus, parce que c’est toujours le même cauchemar. Encore aujourd’hui, à chaque nuit. Je me suis mis à tout ranger, parce que si moi j’étais en bordel, peut-être que je pouvais contrôler le reste, tu vois ? Je voulais juste… Arrêter d’être…

Il y avait autant d'éléments qui résonnaient familièrement en moi que d'éléments auxquels je ne m'attendais pas et qui m'arrivaient en pleine figure - et si je m'astreignais à rester attentif et à ne pas montrer de signes particuliers, il n'en était pas pareil à l'intérieur. Mon cœur se serrait et mon esprit fonctionnait en sur-régime. Comment ? Pourquoi ? Quelle en était la raison et comment avait-on laissé une petite fille dériver ainsi... Après ce qu'elle avait vécu, après la mort tragique de sa mère... Que lui reprochait-on, ou plutôt, que se reprochait-elle ?

Elle leva alors la tête et je captai son regard - le mien devait être particulièrement intense alors que mes mains continuaient à faire acte de présence sur ses genoux - mais il me parut si lointain, si étranger, qu'une autre Ruby apparaissait sous mes yeux.


- Ce que ma mère n’a pas supporté, c’est ce que mon père m’a fait… Et ce que je lui ai fait. J’avais six ans aussi, c’était… Six mois avant la mort de ma mère… Il… Il m’a violé. Et j’ai juste voulu qu’il arrête, je l’ai voulu tellement fort, et la magie… Tu… Et tout le monde dit qu’il le méritait, mais c’est pas vrai !

Mon envie de pleurer affleura en même temps que la sienne mais au prix d'un intense effort je retins les larmes qui m'étaient montées brusquement au bord des paupières - un viol. Dans toute son horreur, accentuée d'avantage par l'acteur du crime puisqu'il était son père, et, oh... La révolte brûlait chaque parcelle de mon corps... Quelle horreur, quel épouvantable crime, je ne parvenais pas à y croire... Mes mains s'étaient figées et crispées, un peu, sur ses genoux. Comme une vision un peu floue, j'imaginais cette petite fille blonde et souriante, qui jouait toute seule, dehors, dans un jardin et une ombre immense arrivait et emportait en une fraction de seconde tout ce qui faisait sourire l'enfant, puis disparaissait avec à tout jamais. Je savais par ce que l'on racontait que la magie s'exprimait parfois chez les enfants, toute seule, surtout quand ils avaient des émotions intenses - cela plus l'histoire de Ruby, je compris avant qu'elle le prononce, et acquiesçai très légèrement.

Bien sûr, qu'il le méritait. Je ne m'étais jamais imaginé capable de sentir autant de haine et de répulsion à l'égard de quelqu'un - quelqu'un que je ne connaissais même pas.


- ... Personne ne mérite de se faire tuer par sa propre fille au fond d’une putain de grange, et même si lui m’a détruite, moi, moi… Moi, j’ai souhaité tellement fort qu’il meurt que cette faucille s’est déplacée et… C’était moi, je le savais, je le sentais ! Mais personne ne pouvait y croire, même pas moi… Et… Et je sais ce que tu te dis, parce que tout le monde a dit pareil ! Que c’est horrible, qu’il était immonde mais… Mais c’est moi qui l’ai tué ! Ma mère avait raison… C’est moi le monstre !

Il y avait énormément d'émotions qui me bouleversaient, et je fus presque soulagé qu'elle baisse la tête et pleure, à gros sanglots cette fois, cachée entre ses mains, car je ne pus pas retenir quelques larmes, de simples larmes, qui roulèrent le long de mes joues et que j'essuyai rapidement. C'était plus fort que moi : comme si quelque chose devait sortir, après tous ces aveux, sans quoi j'allais exploser. Au milieu de toute cette atrocité, pure et violente, je distinguais des bribes, je comprenais des détails, et c'était comme si une pièce venait de se rajouter à l'engrenage pour qu'il re-fonctionne. Je crus que j'allais me frapper en y repensant - je passai ma main dans mes cheveux - par Merlin, dire que j'avais essayé de l'embrasser, dire que j'avais essayé de l'embrasser... Dire que j'avais essayé de l'embrassé malgré elle, que je l'avais forcée, presque ! Elle avait dû tant me haïr, et surtout, j'avais du tant remuer de mauvais souvenirs que j'aurais pu disparaître six pieds sous terre si j'en avais eu la possibilité. Je me sentais minable et ridiculement réduit à de pauvres hormones bien faibles - comme lui - et nulle constatation ne pouvait être pire que celle-là. Un instant, j'appuyai très fort mes mains sur mes yeux. Je me sentais mal, pour elle, pour tout ce qu'elle avait vécu, et pour l'instant, un seul mot voulait sortir de mes lèvres : pardon, pardon, pardon...

- Pardon, murmurai-je au bout d'un long silence ponctué de ses larmes. Mais déjà je m'étais penché vers elle et je la prenais dans mes bras, calant sa tête dans le creux de mon cou, entourant son buste de mes bras. Et je la berçai doucement, essayant tant bien que mal d’apaiser son chagrin... Tu n'es pas un monstre... Tu n'étais qu'une enfant.

Pour l'instant, c'était tout ce que je pouvais articuler, et je m'en voulais pour bien d'autres choses - pour la façon dont je l'avais peu considérée alors qu'elle méritait tellement plus, par exemple... Mais je cherchais désespérément quoi dire pour la rassurer, pour la faire aller mieux, mais au vu de l'horrible vérité, il n'y avait rien qui semblait peser assez. Plusieurs minutes s'écoulèrent ; je n'avais plus la notion du temps. Je finis par me décoller très légèrement d'elle, sans détacher mes bras, et je lui baisai le front, avant de l'obliger à me regarder.

- Mais tu sais, je t'admire... Comment as-tu pu penser que j'allais te détester ? Au contraire... Tu reviens de loin et... Ça ne change pas la façon dont je te vois, je trouve que tu es une fille merveilleuse et... Courageuse surtout, encore plus courageuse de m'avoir avoué tout ça. Combien cette phrase était vraie, mais cela il n'y avait que pour moi le voir, mais qu'importe.

Je la serrai à nouveau contre moi - je crois que dans ces moments-là il n'y avait rien qui comptait plus. Combien avais-je attendu ce geste de la part de mes parents, qui pourtant n'était jamais venu ! Mais cette fois j'avais tourné ma tête vers elle et mon visage disparaissait dans ses cheveux, que je respirai, pour me donner des forces.


- C'est sans doute impossible, commençai-je en décollant mes visage à regret de ses cheveux, mais il faut que tu arrêtes de t'en vouloir... Un jour. Si tu te crois coupable, tu peux au moins essayer de te dire qu'il n'y a plus rien à faire maintenant... Et que tout ça est derrière toi. Ma main frottait son dos, doucement. Tu comprends ?

C'était exactement ce que je tentais de faire - laisser la culpabilité derrière moi.

Je me redressai alors et cherchai la bouilloire, récupérai la tasse de Ruby, et la remplis à ras bord. Puis je lui mis d'office entre les mains, en l'obligeant très clairement :


- Bois tout ça. Pendant qu'elle s’exécutait, je tentai d'en savoir plus, ignorant si elle voulait continuer à en parler, mais je pouvais au moins essayer : Tu en as parlé à qui ? Mais du coup... Tu as gardé contact avec des gens de ta famille?... Prudemment - et parce que je venais de voir à la petite horloge de mon salon qu'il était deux heures passées - j'ajoutai : Si tu préfères, tu peux rester dormir ici, ça ne me dérange pas.

Contrairement à moi, Poudlard ne devait pas lui rappeler autant de souvenirs désagréables, mais je pouvais imaginer combien il était nécessaire, parfois, de s'éloigner un peu, pour prendre de recul. Une chose était certaine : je n'allais pas la laisser partir seule dans cet état là.
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Ruby Standiford-Wayland


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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeJeu 7 Mar - 15:40

J’avais beau connaître chaque seconde, chaque détail, chaque recoin de ma propre histoire, j’avais toujours l’impression d’être une impasse lorsque je voulais en parler. Tout se mélangeait dans mon esprit, mes mots se tordaient et se déformaient mais surtout, ils me paraissaient soudain bien impuissants pour tout décrire. Je ne savais même pas s’il était possible de parler de ça, de mettre des mots sur ce que j’avais ressentis. Sur ce que je ressentais. Peut-être n’y en avait-il pas, mais cette perspective m’étouffait, elle me condamnait à être enfermée dans ma propre douleur sans jamais pouvoir la partager. C’était bien la chose la plus importante que Lizlor m’avait apprise : se confier, c’était d’une certaine manière partager son fardeau et si j’avais longtemps eu peur de le faire, peur d’imposer mes problèmes, j’avais compris avec elle qu’aimer quelqu’un, c’était accepté de partager même les choses les plus dures. Je portais les peines de Lizlor autant qu’elle portait les miennes, et c’était comme un échange qui rendait la chose plus supportable à mes yeux. Connaître les secrets, même les plus noirs, d’une personne que l’on aime résonnait pour moi comme une preuve d’affection, de soutien, c’était un acte plus que des mots, comme un accord silencieux : je connais ta peine, tu connais la mienne –nous nous connaissons. Oui, j’avais fini par comprendre qu’il était possible de parler des choses, même les pires. J’avais juste besoin de trouver quelqu’un qui veuille écouter, avec qui je sentais le besoin de lâcher prise et de dévoiler mon enfance.

Je sentais ce besoin avec Ewan. Je le trouvais soudain, étrangement soudain, mais peut-être était-ce le reflet de mes propres sentiments, s’il était justifié de les qualifier ainsi, envers le jeune homme. Ça n’avait pas d’explications logiques, pas autant que je ne l’aurais voulu, et j’étais parfois terrifiée de tout ce qui se tramait dans mon cerveau lorsqu’il s’égarait dans les souvenirs de mes soirées avec le barman. Mais ce soir, je n’avais plus peur de ça. Ce soir, j’avais simplement eu le besoin de dire les choses, les vraies choses, et c’était aussi soudain que le sourire qui naissait sur mes lèvres lorsqu’Ewan me regardait quand je rentrais la Tête de Sanglier. C’était d’ailleurs la première fois que j’avais cette envie, ce besoin, de raconter mon histoire sans avoir d’hésitation. Je l’avais déjà murmuré à Annalisa, écrite à Lizlor, pleuré à Hadrian, mais dans ces cas, j’avais longuement réfléchis et hésité. Sur comment le dire, quand, comment… J’avais peur. Il restait cependant Ana, à qui j’avais crié cette histoire sous le coup de la colère. Mais à présent, il n’y avait aucune colère. Les mots coulaient entre mes lèvres sans que je lutte, et ils s’assemblaient en dessinant la triste vérité. Et ils allaient beaucoup plus loin que je ne l’aurais cru, décrivant comme ils le pouvaient ce que je ressentais avec une sincérité qui m’étonnait presque, tant elle me paraissait véritable. Au milieu de mes larmes, je trouvais une maigre consolation : ce soir, j’étais moi.

Ewan avait posé ses mains sur mes genoux, et ses pouces qui doucement les caressaient étaient comme un lien dans la réalité, tandis que j’étais repartie dans mon enfance au fur et à mesure de mes paroles. Je m’accrochais à cette sensation, et dès que les mots butaient dans ma gorge, que mes sourcils se fronçaient, que la nausée me prenait, je me concentrais sur ses pouces, parce que c’était bien plus qu’un contact pour moi, c’était la preuve qu’il était là, et que silencieux comme il me l’avait promis, il m’encourageait à continuer. Et je réussis, malgré tout, à parler encore et encore, alors que je savais très bien sur quel chemin je m’étais engagé. Je savais ce qu’il y avait au bout… Je m’en approchais, petit à petit, et mon corps s’y faisait de plus en plus réticent –je tremblais, mes yeux me piquaient. Mais je refusais de faire demi-tour. J’avais besoin, je ne cessais de le réaliser plus je continuais de parler, qu’Ewan sache qui j’étais, car peu importe ce que nous avions, je voulais qu’il me voit comme j’étais réellement, et l’incident était une part de moi, que je veuille ou non.

La sentence finit par tomber, et je sentis les mains du jeune homme s’immobiliser sur mes genoux –comme si le dernier lien avec la réalité avait disparu, et que j’étais retournée onze ans en arrière.

Je ne suis pas sûre du temps qui s’écoula alors, du silence qui s’étira et pour combien de temps. Peut-être était-ce quelques secondes, ou de longues minutes… Je ne savais plus. J’avais perdu la notion du temps, des choses, tout se noyait dans mes pleurs qui ne pouvaient se calmer, assaillis par tous les souvenirs. Si je n’avais pas eu peur, ou presque, lorsque j’avais parlé, c’était maintenant que les doutes me prirent à la gorge. Et maintenant ? Maintenant que j’avais tout dis… Qu’est-ce qu’on faisait ? Parce qu’Ewan n’était pas stupide, lui pourrait sûrement comprendre, parce qu’il n’était pas aussi indulgent que Liz, que c’était ma faute, que j’étais malsaine, tordue. Pourtant, malgré toute cette part de moi qui me haïssait et voulait disparaitre, partir d’ici et ne jamais revenir parce que je ne le méritais pas, il y avait mon cœur qui gonflait, gonflait, et ne demandait qu’à s’échouer quelque part –et je savais déjà où il désirait aller.

Et c’était comme si Ewan l’avait entendu.

Une nouvelle fois, je me sentis basculée contre lui et je m’étranglais dans un hoquet de soulagement alors que mon visage se retrouva caché dans son cou. Tout était trop trouble pour que je distingue son odeur, ou la fraicheur de sa peau, mais je savais qu’il était là, et que moi aussi j’étais là… Dans ses bras… Je continuais de pleurer malgré tout, et j’avais replié mes bras contre ma poitrine pour essuyer d’un revers de main mes larmes, mais le geste était sans fin tout comme l’était les pleurs. Mais dans cette tempête, je tentais une nouvelle fois de m’accrocher à un contact, à celui d’Ewan. Je n’avais jamais réellement trouvé de maisons, ou je les avais toutes perdues, mais j’avais déjà eu l’impression d’être… En sécurité quelque part. Et en cet instant, dans ses bras qui me tenaient et me berçaient, j’étais à nouveau en sécurité. Je n’étais peut-être pas chez moi, mais je n’étais pas une totale étrangère –peut-être même, avais-je ma place ici ? Parce que moi, si j’avais pu avoir assez de force pour le prendre dans mes bras, il y aurait eu une place toute spéciale et j’aurais voulu qu’il se sente autant chez lui que je me sentais chez moi au milieu de ses étreintes. J’aurais voulu que la place entre mes bras soit le reflet de celle qu’il avait dans mon cœur, car bien que je ne la définisse pas encore… Je savais qu’elle avait de l’importance.


- Pardon. Tu n'es pas un monstre... Tu n'étais qu'une enfant.

… Pourquoi s’excusait-il ? Je voulus répliquer quelque chose, mais je pleurais toujours trop pour m’exprimer. Alors comme seule réponse possible, je bougeais très légèrement mes bras pour répondre à son étreinte en les passant autour de sa taille, et je me sentis les serrer plus que je ne l’aurais dû peut-être.

- Et… Et je ne pouvais plus l’être après ça, c’est pas… C’est pas juste. Articulai-je au milieu de mes larmes. J’avais l’impression de me plaindre comme l’aurait fait un enfant qui aurait perdu à un jeu, mais c’était justement cette part de moi qui voulait s’exprimer, cette part enfantine qu’on avait brisé bien trop tôt et qui au souvenir de l’incident, revenait, parce qu’au fond j’étais parfois simplement fatiguée de prétendre être forte. Pourquoi moi ? La phrase m’avait échappé, et je savais qu’elle n’avait aucune réponse –pourtant, j’en cherchais malgré moi. Je veux juste être… Normale.

Parce que je ne pourrais jamais l’être… Je ne pourrais jamais revenir en arrière. Je ne pourrais jamais avoir une enfance comme tout le monde. La mienne s’était brisée alors qu’elle commençait tout juste. J’avais été comme projeté dans l’univers des adultes, celui où les princesses de mes contes de fée n’existaient pas, où parfois les gens étaient mauvais et où la vie n’était pas aussi simple que jouer dans un jardin avec sa voisine ou manger des sucreries. J’avais été violé à un âge où on ne comprend qu’à peine le sexe. J’avais tué quelqu’un à un âge où on ne comprend qu’à peine la mort. Avais-je compris, quand mon père l’avait fait, ce qui se passait ? Et quand moi, je l’avais fait, est-ce que j’avais compris ? Je n’y croyais qu’à peine. Et je n’avais pas compris tout ce qu’on me demandait par la suite, ce que les médecins disaient, et les inspecteurs, ils avaient tous leurs questions de grandes personnes qui m’étaient étrangères. Je n’étais qu’une gamine, et j’aurais tant voulue le rester. Alors, est-ce que ça faisait de moi quelqu’un de plus mature ? Non. Ça ne me rendait que plus faible.


- Parfois… Mes larmes s’étaient légèrement calmées, mais pas mes mots qui continuaient encore et encore. Ça n’avait pas de sens, et je n’attendais aucune réponse. J’avais juste besoin de parler. Je me dis que si je…. Si je… Si je ne l’avais pas fait, peut-être qu’il aurait recommencé. Et c’est moi qui en serais morte… C’est quoi le pire ?

Cette question m’avait tant obsédée et effrayée. S’il avait continué ? Qu’est-ce que j’aurais pu faire, si j’avais été une moldue… Est-ce que j’en aurais parlé à ma mère ? Est-ce que j’aurais compris à quel point il était malsain ? Tout ce que j’avais compris, quand ça s’était produit, c’est que ce n’était pas normal. Parce qu’il me faisait mal, et je ne me sentais pas bien, il n’agissait pas comme avant, il me regardait différemment… Il me faisait si mal...

Je restais bercée par les bras d’Ewan de longue minutes, et mes sanglots s’étaient transformées en larmes amères qui roulaient doucement en silence. Mes épaules se secouaient encore parfois, mais sous l’emprise de l’étreinte du jeune homme, elles se calmaient petit à petit et s’affaissaient contre lui. Oui, je m’affaissais, je m’écroulais littéralement. Je brisais la jolie façade, les mensonges et je laissais la vraie Ruby s’abandonner contre Ewan qui, visiblement, l’acceptait. Timidement, je sentais un drôle d’espoir monter en moi et bien que je tentais de lutter contre lui, je ne pouvais ignorer la voix qui murmurait : peut-être peut-il t’aimer malgré ce que tu viens de lui raconter ?


- Mais tu sais, je t'admire... Il avait déposé un baiser sur mon front et entre son regard qui désormais était plongé dans le mien et ce qu’il venait de dire, j’avais du mal à ne pas sentir une drôle de chaleur dans le creux de ma poitrine –et le thé n’y était pour rien. Comment as-tu pu penser que j'allais te détester ? Au contraire... Tu reviens de loin et... Ça ne change pas la façon dont je te vois, je trouve que tu es une fille merveilleuse et... … Je ne sais pas comment je pus recevoir un tel compliment sans me remettre à pleurer, mais je m’accrochais à ses yeux que je voyais de plus en plus en clairement, au fur et à mesure que les miens s’asséchaient. Courageuse surtout, encore plus courageuse de m'avoir avoué tout ça.

Je laissais le visage d’Ewan disparaitre dans mes cheveux tandis que ce simple mot, merveilleuse, s’infiltrait en moi. Chaque lettre, chaque syllabe, tout résonnait en moi et je sentais mon cœur vaciller, grésiller sous l’impulsion de ce mot. Comment pouvait-il me dire ça ? Après tout ce que j’avais fait, à mes parents, à Lizlor, à lui, à moi-même, comment… Peu importe, pensai-je soudain. Je ne voulais pas me poser de question, pas ce soir, pas dans ces bras. Là, j’étais juste bien et je ne voulais pas douter de rien. Je me sentais de toute manière trop faible et triste pour réfléchir.

- Je suis désolée de m’être énervée contre toi… Lâchai-je soudain. Je suis désolée de ne pas être assez bien. Ajoutai-je dans un murmure, malgré moi.

Je ne l’étais pas, pas pour lui, pour Lizlor, pour quiconque d’ailleurs. Et ces derniers temps, je n’avais même pas essayé, je m’étais laissé manger par ma peine et mes problèmes. Comment pouvait-il, après tout ça, me qualifier de courageuse et merveilleuse ? J’en étais l’exacte opposée… Pourtant, j’entendais encore la voix de Liz me murmurer que j’étais plus forte que je ne le croyais, et j’aurais tant voulu qu’elle ait raison mais à mes yeux, tout était contre moi de ce côté-là. Et même si les circonstances n’étaient pas favorables, j’étais toute aussi fautive que l’était le hasard qui s’était acharné sur moi –je ne pouvais pas croire qu’il y avait du destin, pas après ce qui m’était arrivé.


- C'est sans doute impossible, mais il faut que tu arrêtes de t'en vouloir... Un jour. Si tu te crois coupable, tu peux au moins essayer de te dire qu'il n'y a plus rien à faire maintenant... Et que tout ça est derrière toi. Tu comprends?

Il s’était écarté de moi mais je lui lançais toujours des regards furtifs, derrière mes cheveux qui retombaient tels des fils d’ors devant mes yeux. J’eus l’étrange sensation d’être comprise tandis qu’il me parlait, il n’avait pas les mots habituels et, même s’il n’était pas d’accord avec mon point de vue, il me semblait qu’il le respectait. Il me respectait.

- Oui… Répondis-je timidement, en hochant la tête. Mais je n’arrive pas le mettre derrière, c’est… Collé à moi.

Il n’y avait pas d’adjectif plus vrai. C’était collé à moi, cette saleté qui semblait avoir remplacé ma propre peau et je ne pouvais m’en débarrasser. Pourtant, je le souhaitais si fort, de pouvoir avancer, oublier… Mais je ne savais pas quelle stratégie adopter pour cesser de me haïr autant et, sans quelqu’un comme Ewan pour m’affirmer le contraire, je n’aurais jamais eu l’idée ou l’envie de le faire. Pourtant parfois, je me disais que peut-être que j’avais tort, et que Lizlor avait raison de me dire que j’étais forte –mais ces moments étaient engloutis trop rapidement, surtout en ce moment. Et j’aurais voulu que tout soit simple, aussi simple que l’était la chaleur qui m’envahissait quand je plongeai à nouveau mes lèvres dans le thé qu’Ewan m’avait resservi.

- Bois tout ça. Tu en as parlé à qui ? Mais du coup... Tu as gardé contact avec des gens de ta famille?... Si tu préfères, tu peux rester dormir ici, ça ne me dérange pas.

Je laissais le liquide brulant me réchauffer, et pendant un instant, je ne parlai pas. Je réfléchissais, repensant lentement à chaque aveu, à chaque personne qui avait pu entendre de mon plein gré l’incident, mais aussi à ma « famille ». Le père de ma mère était mort avant ma naissance, et ma grand-mère lorsque j’avais trois ans. Ils n’avaient pas assisté à tout ça… Et puis il y avait mes grands-parents paternels. Je me souvenais encore des après-midi que je passais chez eux, lorsque mes parents étaient occupés à travailler et que je n’avais pas école. Je me souvenais de leur ferme, des gâteaux de ma mamie, des vieux jouets en bois. Mais je me souvenais surtout d’après, et comment ils étaient finalement partis pour fuir les regards des gens, fuir ma mère, me fuir moi…

- Je n’ai pas de famille. Répondis-je finalement, d’un ton plus las que triste. Mes grands-parents paternels sont partis après… Après l’incident. Je n’ai jamais cherché à avoir des nouvelles. Pourquoi faire, de toute manière ? Pour leur dire quoi ? Que maintenant j’étais sûre, Poudlard m’avait confirmé que j’étais bien à l’origine de leur fils ? Parfois, je pensais à eux avec une certaine compassion… Parce que si moi j’avais un père immonde, eux avaient un fils. Je l’ai dit à Lizlor… Et deux autres filles, parce que… Les circonstances faisaient que je le devais, je crois… Je ne voulais pas rentrer dans les détails pour Ana, ou Annalisa. Je m’étais assez confiée ce soir, je ne me sentais pas de continuer, d’autant qu’Ana était toujours un sujet sensible. Et Hadrian. Ajoutai-je à voix basse, revoyant cette scène dans la tourelle, et la manière dont il m’avait pris dans ses bras –j’en eus un pincement au cœur, tout petit mais bien présent. Si petit à petit, je m’en étais détachée, il ne m’était pas possible de piétiner tous nous souvenirs. Je crois qu’au fond, je ne l’aimais plus, ou moins, mais le bonheur qu’il m’avait apporté n’avait pas totalement disparu et me manquait toujours. Pourtant, je songeais que si aujourd’hui j’avais la possibilité de me remettre avec lui… Je ne le ferais pas. Pas après tout ce qui m’était arrivé, tout ce que je m’étais infligé. J’étais différente et lui, probablement trop… Léger pour comprendre. J’avais aimé Hadrian, mais je ne pouvais me mentir : il avait la belle vie et parfois, je me sentais si minuscule à côté de lui et si apeurée qu’il ne me comprenne pas. Et maintenant… Toi. Soufflai-je timidement. Il était l’une des rares personnes à le savoir désormais, et j’espérais que cela ne l’effraie pas trop. Je frottai mes yeux, épuisée, avant de repenser à la proposition d’Ewan. Tu… Tu es sûr, voulus-je murmurer, mais je savais que si Ewan m’avait proposé de rester, c’est qu’il le voulait. Je veux bien, s’il te plaît.

Je ne me sentais pas le courage de retourner à Poudlard. J’avais tant pleuré que j’en étais épuisée, mais aussi parce que me souvenir de toute cette histoire était particulièrement… Dur. Et je ne voulais pas non plus retourner dans un dortoir silencieux, avec Prudence endormie, Prudence avec qui j’étais toujours en froid et pour de bon probablement. J’étais bien ici, et j’étais bien avec Ewan. C’était lui que je voulais voir à mon réveil, et pas le regard glacé de mon amie que j’avais lâchement repoussé et déçue.

Je laissais Ewan me mener jusqu’à la salle de bain, et il m’apporta un de ses tee-shirts en guise de pyjama. Dans le miroir, je contemplais le reflet de mon visage fatigué, cerné et pâle. Je me faisais presque peur. Alors que j’ôtais mon jean, je passai par réflexe mes doigts sur les cicatrices qui griffaient mes cuisses, parfois plus profondes que je ne l’aurais cru, et j’eus soudain peur qu’Ewan puisse les voir. Mais par chance, son tee-shirt était assez long pour les couvrir, et je plongeai mon nez dans le col pour sentir son odeur –toujours celle de vanille, sous toutes les notes plus puissantes. Je passai un peu d’eau sur mes traits fatigués avant de fuir le miroir et de retourner dans la chambre tout doucement. Le jeune homme y était encore, disposant les cousins sur le lit proprement bordé –j’eus un sourire.


- Ne te donne pas tout ce mal. Soufflai-je. Il se tourna, remarquant probablement ma présence, et je tirai maladroitement sur le tee-shirt, effrayée qu’il soit trop court –il l’était déjà, d’une certaine manière, pensai-je en réalisant que j’étais littéralement en culotte. Mais merci. Ajoutai-je avec un doux sourire.

Lentement, je m’approchais du lit et tandis que je m’asseyais sur le bord, j’observais Ewan sur le pas de la porte. Je compris alors qu’il avait probablement prévu de dormir sur le canapé, et je ne sais pas vraiment pourquoi, mais cela me fit sourire et je sentis une petite flamme dans ma poitrine. Je n’avais pas tort : il me respectait. Je levais les yeux vers lui, me sentant presque rougir. J’ouvris la bouche pour dire bonne nuit, mais soudain me ravisais. J’avais envie de dormir oui, mais…


- Ewan ?... Murmurai-je alors, à peine consciente de ce que je voulais lui demander. Pourtant, je n’avais aucun doute… Tu peux… Rester ?

Parce que je voulais qu’il soit simplement à côté de moi, que j’entende sa respiration, que je sente son odeur et que je sois sûre… Sûre qu’il était avec moi malgré tout.

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Ewan Campbell


Ewan Campbell
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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMer 13 Mar - 16:49




Cela faisait partie de l'impensable - ce qu'on s'imaginait à peine, qu'on énonçait parfois, mais qu'on ne visualisait pas complètement. Justement, quand on esayait, il arrivait toujours un moment, une limite où l'on se disait : mais comment ?! Mais pourquoi ?! Et déjà le cerveau balayait ces visions nauséeuses, parce que si l'horreur avait un nom elle restait plus délicate à imaginer - comment penser l'impensable ? Ces histoires-là me ramenaient quelques années auparavant, quand nos parent avaient commencé à nous laisser, Jamie et moi, le début de ce qu'on appelle - qu'on croit être - la liberté. Mais sous les par-terre bien fleuris et entretenus des Campbell se cachait une rigidité extrême, qui s'immisçait dans toutes leurs actions. Ma mère nous imposait des règles, des horaires, si strictes, que finalement cet avant-goût de liberté s'était avéré bien fade. Et au repas du soir, moment sacré et toujours à heure fixe à ne rater pour rien au monde, indiquaient les règles de notre maison, elle prenait comme un malin plaisir à raconter les histoires les plus horribles qui soient - ce à quoi mon père rajoutait une couche, en ajoutant des détails qu'il lisait dans le journal. Ainsi, il suffisait que Jamie et moi demandions la permission d'aller chez des amis et que pour ce faire il nous fallait traverser le quartier tous seul et longer la forêt pour que notre mère raconte cette "épouvantable tragédie" d'une famille en vacances dans le Yorkshire ayant succombé, en traversant une forêt, à l'attaque de Centaures en colère. Ces histoires - morts, attaques, blessures, accidents en tous genres - étaient véridiques mais là n'était pas le problème : le vrai problème était la façon insidieuse dont elle nous les racontait, pour nous effrayer, nous dissuader. Avec Jamie nous n'y croyons pas, pestant contre la stupidité des parents voulant toujours sur-protéger leurs enfants, et nous bravions les dangers. Mais toujours était-il que ces agressions, ces viols, ces morts restaient confus, planaient comme des menaces, comme des cauchemars, riens de plus. Ils faisaient peur mais restaient loin de nous malgré tout. N'était-ce pas une généralité ? Il me semblait que la maladie, la mort, les crimes étaient aussi impalpables qu'ils étaient réels - et ils s'éloignaient au fur et à mesure de leur intensité.

Et puis, il suffisait d'une seconde - d'un instant. L'impensable s'accomplissait et emportait, avec fracas, toutes nos certitudes sur son passage dévastateur. Mon frère ne pouvait pas mourir : nous étions jeunes et en bonne santé, quelle idée ! La mort était un concept abstrait qui touchait les vieilles personnes et dont on parlait à la radio ou dans la Gazette. Mais sous notre toit, dans notre vie, elle nous était bien étrangère... Il avait suffit que la barque se retourne et que, ce soir-là, à cause des pluies de la veille, le courant soit trop fort, pour que la mort s'invite chez nous et mette les pieds sous la table. Et c'était une claque bien amère qui frappait alors : la réalité dans toute sa splendeur, l'Horreur avec un grand H qui finalement, chaque jour, n'était pas si loin de nous. Il y avait quelque chose qui dépassait la pensée dans le fait que les crimes, comme le viol, obéissaient aux mêmes lois - dans le fait que notre condition d'humain nous empêchait d'envisager l'inhumain jusqu'à ce qu'il se concrétise... Cette histoire d'un père qui viole sa fillette et meurt à cause de la défense de celle-ci semblait tout droit sortie d'une de ces anecdotes glauques, de ce qu'on raconte pour dégoûter et horrifier. Et pourtant, la fillette était là, en chair et en os, sous mes yeux, et subitement cette distance vaseuse entre l'atroce notion de viol et moi était balayée comme une simple barque bien trop légère pour la puissance des eaux en colère...

Derrière ses larmes, Ruby me paraissait à la fois si proche - mes mains sur ses genoux, ses yeux aux éclats de saphirs, son souffle, son parfum, tout cela était bien réel - et si lointaine, elle aussi, comme une idée informulée - comment vivait-elle avec tout cela ? A quoi pensait-elle chaque matin ? Comment imaginait-elle la suite ? Quel genre de cauchemars hantait ses nuits ? Elle avait déjà mentionné qu'elle dormait peu, et j'ignorais pourquoi exactement, mais je me rendis compte, étrangement, que j'aimais apprendre ce genre de détail. En revanche, pour le reste, je me sentais toujours aussi mal - mes larmes ne coulaient plus heureusement, Ruby n'avait pas besoin de ça - mais j'étais profondément touché par ces aveux qui m'emplissaient d'une infinie tristesse. Bien sûr qu'il n'avait rien à faire, à changer, et que c'était ainsi, tant pis pour elle, tant pis pour nous, mais encore une fois je ressentais cette injustice que j'essayais pourtant de tuer dans l’œuf à chaque fois qu'elle grandissait en moi.


- Et… Et je ne pouvais plus l’être après ça, c’est pas… C’est pas juste. Pourquoi moi ? Je veux juste être… Normale.

Et elle se disait la même chose - nos histoires n'avaient rien de comparables mais je le savais, je l'avais senti, que quelque chose nous liait, depuis le début, parce qu'on est toujours un peu semblable quand, bien caché à l'intérieur de nous, quelque chose est cassé. Comme elle avait passé ses bras autour de ma taille - par réaction purement physique, je sentis ma peau frissonner légèrement - et qu'elle pleurait contre moi, je me contentai de la bercer un peu plus. Je n'étais pas gêné, pas cette fois, j'étais juste un peu perdu dans mes pensées que ses larmes noyaient d'avantage, et je me disais que rien que pour ce soir j'aurais aimé être quelqu'un d'autre, peut-être pas ce garçon qui avait trop à penser et rien à quoi s'accrocher, pour être en mesure de panser un tant soit peu ses peines.

- Parfois… Je me dis que si je…. Si je… Si je ne l’avais pas fait, peut-être qu’il aurait recommencé. Et c’est moi qui en serais morte… C’est quoi le pire ?

J'avais conscience que les mots de Ruby étaient des mots qui n'attendaient pas de réponse mais qui avaient juste besoin de sortir - depuis la petite table à côté de nous, les volutes de la fumée du thé tourbillonnaient toujours, autour de nous, et il me sembla d'ailleurs qu'elle sanglotait moins fort et qu'elle s’apaisait légèrement. Je me trouvai stupide, alors, d'avoir cru pouvoir soigner son chagrin avec du simple thé magique alors qu'il devait être bien incapable en vérité, devant cette histoire, mais l'idée soudaine qu'au moins j'avais essayé et qu'au moins Ruby était là, contre moi, ses longs cheveux dorés me chatouillant la joue et émettant cette odeur douce et envoûtante, me rassurait - me donnait l'étrange impression d'être... Responsable. Oui, j'étais responsable d'elle, et c'était comme si tout d'un coup j'étais doté d'un pouvoir supplémentaire, et je me sentais soulagé. Rien n'était impossible - l'Australie s'immisçait dans mes pensées - et alors soudain le sourire et le rire de Ruby ne me paraissaient plus si éloignés ; comme s'il ne tenait qu'à moi de les faire renaître.

- Je suis désolée de m’être énervée contre toi… Je suis désolée de ne pas être assez bien.

Cela ne s'expliquait pas, mais un poids s'était élevé de ma poitrine. Rationnelles, les choses m'apparaissaient alors clairement. J'eus un sourire qu'elle ne vit pas, car j'étais caché dans ses cheveux, et mon bras s'enroula autour de ses épaules dans un geste protecteur. Cette dispute n'avait plus du tout d'importance, et tout mon ressentiment à son égard semblait s'être envolé, ou plutôt s'être terré dans la cave crasseuse de la Tête de Sanglier, avec Ed pour seul compagnon.

- Oh, ce n'est pas grave du tout, après tout, tu avais un peu raison... Je haussai les épaules. Inutile de s'avancer trop loin non plus, si l'heure était aux aveux, je n'étais pas prêt à ceux-là - et sans doute que Ruby n'avait pas envie de les entendre non plus, après une telle soirée. Et je te trouve très bien, dis-je avec un sourire timide. Après tout, c'était plutôt moi qui n'étais pas assez bien ce soir-là, tu ne penses pas ?

Le souvenir de ce moment plana un instant autour de nous, mais il ne me préoccupait pas plus que cela. A vrai dire, je pensais seulement au moment présent, aux yeux rougis de Ruby, à cette envie que j'avais de lui rendre son sourire et de partager ses peines - et qui encore une fois bouleversait tout ce que je m'autorisais -, au thé encore bien chaud qu'il fallait qu'elle boive, et à tout ce qui était à portée de main : dans la cheminée, le feu brûlait avec moins d'entrain que tout à l'heure mais de toute façon la pièce était assez chaude, la lumière tamisée qui en émanait reposait nos yeux fatigués de toutes ces émotions, et l'aiguille de l'horloge avançait tranquillement à travers la nuit, se souciant peu de nous, comme toujours. Le fait que je devais me lever tôt le lendemain matin me paraissait ridiculement peu important, tout comme les lumières faibles qui brillaient par la petite fenêtre de mon salon, celles de quelques lampadaires encore allumés, ou de fenêtre rares dans la nuit. C'était indéfinissable mais encore une fois, je sentais ce moment hors du temps et hors de tout, ces rares moments où la vie a une réelle consistance, avant de redevenir fluide à nouveau et de replonger dans les remous du quotidien. Et d'avoir, comme toutes les eaux, une force imbattable, irréversible...

Mais ces instants-là, par essence, ne durent jamais. Nous nous étions écartés et comme elle buvait son thé, je changeai de position, m'asseyant normalement dans le canapé - le dossier plus frais me fit un peu froid dans le dos. Maintenant que je l'avais proposé, brusquement ma demande me parut indécente : dormir ici ? Où, dans mon lit ? Et moi ? Je me dis alors que j'avais bien fait d'allumer du feu dans la cheminée, car j'allais dormir dans le salon, évidemment.


- Je n’ai pas de famille. Mes grands-parents paternels sont partis après… Après l’incident. Je n’ai jamais cherché à avoir des nouvelles. Je l’ai dit à Lizlor… Et deux autres filles, parce que… Les circonstances faisaient que je le devais, je crois… Et Hadrian.

Ah oui - j'avais presque oublié son existence. Je me demandais bien comment il avait réagi et comment... Ils avaient fait, tout cela me parut flou tout d'un coup, mais je ne pouvais m'empêcher de me demander : comment aujourd'hui Ruby se sentait-elle par rapport à cela ? Est-ce que cela lui était... possible ? Je crus que j'allais rougir en imaginait furtivement ce projet à exécution et je me raclais la gorge, avant de bouger à nouveau.

- Et maintenant… Toi. Tu… Je veux bien, s’il te plaît.

... Parfait ; je sautai sur l'occasion, et me levai, renvoyant d'un coup de baguette les tasses et le thé dans la cuisine. Content d'avoir une raison de me lever et de bouger, je montrai alors la salle de bain à Ruby en espérant que ce ne soit pas trop le désordre, et au passage, j'attrapai un t-shirt si elle voulait s'en servir de chemise de nuit, sans savoir si elle avait besoin d'autre chose. Quand elle disparut dans la petite salle de bain, je balayai ma chambre du regard : les couvertures rejetées parce que je m'étais levé d'un coup en pensant me trouver nez à nez avec Phil, mes vêtements dans un coin, des livres dans un autre que je n'avais pas pris la peine de ranger, des vieux cartons que je n'avais pas encore déballés - et pour cause, ils contenaient des cadres et des photos, que j'avais toujours un peu de mal à voir... Je commençai alors à refaire le lit et tirer les couvertures - j'avais un peu honte tout d'un coup, et l'impression que ma chambre n'était pas vraiment faite pour recevoir des filles comme Ruby - et puis je ramassais mes vêtements que je mis dans l'armoire sans les plier, avant de donner un coup de baguette pour que les livres se posent sur l'étagère. Puis, je poussai les cartons dans un coin tout contre le mur pour qu'ils ne se remarquent pas trop. Tout d'un coup, un détail, mais pas des moindres, se pointa à la surface de mon esprit : Ruby était mineure et sous la responsabilité de Poudlard, et si quelqu'un là-bas se rendait compte de son absence ? Je pris rapidement un parchemin pour écrire un mot à Phil, mais me ravisai au dernier moment - Ruby n'avait sans doute pas envie qu'il soit au courant. Après une légère hésitation, je griffonnai quelques mots qui expliquaient que Ruby était chez moi et qu'elle allait bien, j'inscrivis Lizlor Wayland sur l'enveloppe avant de la donner à mon hibou qui s'envola dans la nuit. Je rangeai ma plume et retournai à mon rangement - au moment où j'étais en train de bien installer les oreillers en tapant dedans, elle fut dans la chambre.

Je m'y étais pourtant mentalement préparé - mais ce qu'elle prononça alors se perdit complètement, une boule s'était formée dans ma gorge car la vision nette de ces longues jambes fuselées dont seul le haut des cuisses disparaissait sous mon vieux t-shirt me laissant deviner la suite - et ses formes un peu plus haut - me prit totalement de court. Et pourtant je savais qu'elle me plaisait, mais voir son corps d'aussi près et... plus dénudé que d'habitude me rappela très nettement la présence de mes hormones masculines. Je déglutis en ne répondant que par un sourire à son remerciement, et m'approchai de la porte tandis qu'elle allait s'installer - il fallait que je m'arrache de ce spectacle. Il devait y avoir quelques couvertures dans le placard du couloir, me dis-je mentalement, pour me concentrer, et j'attrapai la poignée pour tirer la porte, me retournant une dernière fois vers Ruby : même dans la pénombre son regard étincelait, et je devinais les ondulations et les courbes douces de ses cheveux.


- Eh bien bo...

- Ewan ?
Mais elle me coupa la parole. Tu peux… Rester ?

... Oh.

Hésiter aurait été impoli, accepter était impossible, mais refuser était au-dessus de mes forces.


- Oui bien sûr, si tu veux, dis-je le plus simplement du monde, comme si j'avais compris qu'après tout cela elle ne voulait pas être seule, qu'elle avait peut-être un peu peur, qu'elle se sentait mieux en compagnie.

Je me glissai sous les draps avec le cœur tellement battant qu'il cognait jusque dans mes oreilles - je me réjouis des mystères du corps humain qui sait garder ce qu'il faut secret car je savais qu'elle n'entendait rien de tout cela - et la rejoignis. Les draps étaient un peu froids, et je frissonnai une nouvelle fois, mais devais-je vraiment attribuer ces frissons au froid?... Jamais ma chambre ne m'avait paru si... petite, ni mon lit d'ailleurs, car le corps de Ruby reposait tout près de moi : un seul mouvement et je la touchais. Je me coulai dans le lit en quelques mouvements, me figeant ensuite, la couverture remontée jusqu'au coup, restant sur le dos les yeux rivés vers le plafond. Il me semblait que la terre s'était arrêtée et qu'il n'y avait plus aucun son autour de nous. Et en cet intense moment, le silence avait un bruit et il m'était assourdissant.

Je n'étais pas assez stupide pour ne pas comprendre qu'un certain désir m'agitait - encore plus quand j'imaginais, de nouveau, ses jambes nues - et que je venais de me mettre là dans une situation de plus embarrassantes en acceptant en plus de dormir dans le même lit qu'elle, mais je m'efforçai de me raisonner : après ce qu'elle venait de me confier, elle avait besoin d'attention et de soutien, elle avait besoin de moi pour ce que j'étais et pas de mes envies masculines évidemment, et je ne voulais surtout pas l'offenser. D'autant plus qu'elle n'était pas le genre de filles que l'on peut avoir pour une soirée, donc, je ne voulais pas m'engager dans cette voie-là. Je savais que j'allais pouvoir me contrôler, évidemment, mais c'était juste un peu... Éprouvant.

A trop rester immobile, tous mes muscles commençaient à me démanger et j'avais envie de bouger pour changer de position mais je n'osais pas faire un mouvement - elle non plus ne bougeait pas et seul son souffle m'indiquait qu'elle était là, et apparemment tournée de dos - tant mieux. Je finis par me sentir obligé de bouger et je changeai alors de place - le bruit des draps me parut déchirer la nuit - en me tournant un peu vers le centre du lit et en réajustant mon oreiller. Au même moment, Ruby bougea elle aussi et se tourna vers moi - cette fois ce n'était pas possible, mon cœur menaçait de casser mes côtes, comment ne pouvait-elle pas l'entendre ?! - et par le hasard de nos mouvements, nous nous retrouvâmes non seulement face à face mais l'un contre l'autre. Ou plutôt... Sa tête à la hauteur de mes épaules se posa contre mon torse nu et ses cheveux, étalés comme des rayons de soleil, chatouillèrent ma peau. Son odeur me venait en plein dans les narines et je fermai les yeux pour ne pas... Je ne sais pas, imploser, exploser? J'arrangeai mes jambes pour lui laisser de la place, mais nos deux corps s'arrangeaient parfaitement. Comme s'ils avaient été faits pour dormir ensemble. Je voulais que le temps s'arrête et que le sommeil nous entraîne, je ne voulais plus bouger, jamais, sa tête presque contre mon cœur ; mais elle en décida autrement et, relevant la tête quelques secondes, déposa un baiser probablement à l'endroit qui était le plus proche de ses lèvres, et en guise de remerciement, mais cet endroit s'avéra être mon cou, là où la peau est si fine qu'elle palpite et que les sensations en sont décuplées... Elle ne pouvait pas le savoir, mais j'étais particulièrement sensible à cet endroit, et un feu d'artifice explosa au creux de moi et m'illumina tout entier. Pour toute réponse, car je n'étais plus trop capable de rien, mon bras vint se poser autour d'elle. Le sommeil dans lequel je sombrai, étrangement vite alors qu'une véritable bataille se livrait à l'intérieur de moi, fut des plus délicieux et il passa comme un rêve - j'avais d'ordinaire des rêves plutôt perturbés et sombres, violents, mais ceux-là furent doux et gorgés de soleil de la teinte et de la lumière des cheveux de Ruby.

Il y avait des années que je m'éveillais tout seul, et plutôt tôt, par habitude de travail. Ce matin là n'y échappa pas, et la lumière qui filtrait par les volets, blanche, signe d'une journée grise mais lumineuse, fut la première chose que j’aperçus, avant de me rappeler que, non, je n'avais pas rêvé - Ruby endormie contre moi n'était pas une illusion d'optique ou mes rêves se continuant dans la réalité. Je ne bougeai pas, d'abord, écoutant le rythme lent de sa respiration. Nous avions peu bougé de comment nous nous nous étions endormis, et ses cheveux s'étalaient sur moi tandis que son visage, aux traits détendus par le sommeil, reposait sur ma peau. Ses lèvres étaient légèrement inclinées en une petite moue, à la fois triste mais aussi mystérieuse et elle me captiva : je crois que je n'avais jamais fait assez attention à ses lèvres, à leur dessin, et je continuai de rêver éveillé, la regardant dormir car je trouvais ce spectacle le plus apaisant au monde. Tout et rien me passait par l'esprit : le cottage de Matthew, la lumière d'été sur la mer, le thé de ma tante, les bons repas, ma vie à Poudlard, des souvenirs d'enfants, ma vie ici, hier soir, l'odeur du feu de cheminée, le fait que Ruby soit venue me voir, la suite?, l'heure qui tournait, mon travail qui allait attendre un peu. Et je me dis que cela faisait bien longtemps que je n'étais pas simplement resté dans mon lit à rêvasser, et que cela me faisait du bien... J'allais me rendre à la boutique pour midi, mon patron n'était pas regardant là-dessus, du moment que rattrapais mes heures. A regrets, je finis par m'arracher du lit, car plus ça allait plus je savais que je n'allais jamais pouvoir la quitter, et je me levai doucement, la tête qui me tournait un peu. J'attrapai quelques vêtements et sortis de la chambre - dans le couloir j'eus un soupir et je m'immobilisai un instant pour m'assurer que je ne l'avais pas réveillée.

Je pris une douche et m'habillai, avant de me diriger dans le salon où je ravivais le feu une nouvelle fois, puis je me rendis dans la cuisine. Dans le reflet de la fenêtre, j’aperçus mon reflet - et je détestais cela, car dans ces moments où je me voyais en double ce n'était pas moi que je voyais en double mais lui ; j'avais des cernes sous les yeux et ils paraissaient d'ailleurs d'un bleu-gris encore plus clair que d'habitude à cause de la lumière particulièrement éblouissante et blanche du dehors. Je me lançai alors dans l'élaboration d'un petit-déjeuner pour Ruby et moi - mais surtout pour elle, pour lui donner des forces : puisque j'étais responsable d'elle, j'allais m'y atteler sérieusement. Bientôt, l'appartement fut empli de l'odeur des toasts grillés, des œufs brouillés, du bacon grillé, du thé qui chauffait, tandis que je finissais de couper des fruits pour faire une petite salade de fruit, puis je sortis le reste de tarte à la citrouille que ma tante faisait à la perfection, et déposai le tout sur la table.

Je l'entendis avant de la voir et me retournai tranquillement avec un sourire :


- Tu as bien dormi ?

Mais je compris bien vite que je n'allais plus pouvoir regarder son visage aux traits fins, ses lèvres toujours un peu courbées en un petit sourire et ses yeux parsemés d'étoiles comme avant, maintenant qu'elle avait dormi tout contre mon cœur.
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Ruby Standiford-Wayland


Ruby Standiford-Wayland
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~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Empty
MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeJeu 14 Mar - 21:50

Les moments où je pensais à nouveau à mon enfance étaient ceux qui me rappelaient toujours, douloureusement, à quel point j’étais vulnérable. J’avais l’impression qu’il y avait un monde entre qui j’étais et qui j’aurais voulu être, un océan qui était infranchissable tant il était tumultueux et je le savais bien, tant j’avais essayé de le traverser. Mais les choses me semblaient évoluer dans un sens que je n’aurais jamais imaginé, celui où je décidais peut-être d’accepter qui j’étais, et ce que l’incident avait fait de moi. N’est-ce pas ce qui m’avait permis de me confier à Ewan ? L’acceptation ? Evidemment, ce que j’étais devenue ces derniers mois, je ne comptais pas le rester et plus j’y pensais, plus je sentais l’amertume grandir en même temps que cette envie de boire qui s’accentuaient plus les heures tournaient et plus la dernière goutte d’alcool se faisait lointaine. J’éprouvais peu à peu, depuis que j’avais compris mon problème, une révulsion contre mon propre corps et cette sensation de manque qui m’envahissait trop régulièrement. Les choses m’apparurent alors plus clairement au fur et à mesure que j’y pensais : je n’acceptais pas qui j’étais, mais je devais accepter ce que je j’avais vécu et les conséquences. J’aurais voulu que cette constatation soit simple à assimiler et que les choses puissent changer ainsi, mais il était devenu clair que désormais peut-être la bataille ne se menait plus contre le passé, mais contre le présent. Je me raccrochais à l’idée que si je n’avais pas pu décider de mon enfance, c’était moi qui avait orienté la suite et surtout cette mauvaise période que je traversais, or si j’avais pris ce sens-là, je pouvais prendre l’autre, n’est-ce pas ? Je pouvais m’en sortir –les mots de Lizlor me revinrent en mémoire et pendant une fraction de seconde, et parce que les bras d’Ewan qui me tenaient me rassuraient, je voulus croire qu’elle avait raison et que j’étais forte. Il ne me restait plus qu’à transformer cette fraction de seconde en minutes, en heures et même en jours pour qu’enfin je me fasse assez confiance pour tenter de changer.

Comme toujours, les secondes furent englouties dans une nouvelle peur qui avait surgi : et si je n’y arrivais pas ? Il fallait accepter la réalité, l’alcool était devenu une addiction et elle ne pourrait disparaitre ainsi. J’allais avoir envie de boire, j’allais peut-être même craquer, et si je le faisais et que je le disais à Lizlor, j’allais la décevoir –encore une fois. Et j’étais fatiguée de ne décevoir les autres, de me décevoir, de ne jamais être à la hauteur. Je savais que j’étais trop exigeante avec moi-même, mais comment pouvait-il en être autrement quand j’avais des responsabilités –oui, ma meilleure amie en était une. On ne pouvait pas aimer quelqu’un et ne pas accepter les conséquences de cet engagement, l’amitié qui avait été une notion qui m’avait paru si floue pendant tant d’années m’était devenue à présent la valeur la plus importante qui soit. Je ne voulais pas blesser Lizlor en me blessant, mais je savais que je ne pouvais plus non plus lui cacher et encore moins lui mentir. Je me trouvais si stupide d’avoir de telles peurs parfois, car elle ne me jugerait jamais mais je n’étais pas rationnelle tant j’avais peur de lui faire du mal ou de la perdre, et n’arrivais pas à le changer. Encore une fois, je me haïssais d’en arriver là alors que c’était le seul aspect de ma vie où je n’avais aucun doute et ce constant vacillement, entre la force que je pensais trouver et les peurs qui m’avalaient, m’épuisait. Malgré moi, je me sentis me recroqueviller un peu plus contre Ewan et si les pensées noires avaient remplacé mes pleurs, je me concentrais sur l’odeur de son cou pour me calmer –et étonnement, cela semblait fonctionner.


- Oh, ce n'est pas grave du tout, après tout, tu avais un peu raison... Et je te trouve très bien. Je sentis mon cœur se contracter et je baissais instinctivement les yeux, gênée, sans pouvoir cependant m’empêcher de sourire. Je savais que… Que nous nous apprécions, que je lui plaisais même –mais à présent je n’étais plus sûre de rien, après toutes les complications et les confessions. Je n’arrivais jamais à savoir ce que je voulais qu’il ressente, mais je savais simplement qu’à chaque fois qu’il me complimentait, j’avais l’impression qu’une part de moi fondait littéralement. Il avait toujours cette manière de le faire, poliment, comme un murmure qu’il n’osait laisser échapper, avec un petit sourire comme s’il était gêné de ce qu’il venait de dire, et je répondais avec le même sourire –et à l’intérieur, il y avait quelque chose qui vibrait et m’engloutissait toute entière. Après tout, c'était plutôt moi qui n'étais pas assez bien ce soir-là, tu ne penses pas ?

Pour être honnête, je n’avais plus envie d’y penser. Certaines de mes peurs n’avaient pas changé, celles qui me murmuraient malicieusement qu’Ewan ne me disait pas tout, mais d’autres avaient disparu. J’avais craint qu’il ait peur de se rapprocher de moi, comme s’il préférait rester dans cet espace un peu flou rien n’était concret. Mais encore une fois, c’était peut-être moi qui l’avait voulu parce qu’il fallait se rendre à l’évidence que j’étais celle qui ne savait pas ce qu’elle voulait –enfin, je n’étais pas sûre de savoir ce qu’il voulait au fond. Je me raccrochais simplement au fait qu’il m’avait écouté, qu’il avait été là et la chaleur de ses étreintes m’avaient donné la douce impression d’être dans un cocon coupé du monde –et je ne voulais plus en sortir. Sans vraiment réfléchir, je lui avais mis un certain poids sur les épaules en lui racontant mon histoire et pourtant, je n’arrivais pas à la regretter car chaque sourire et chaque mot qu’il m’adressait me confirmait que j’avais eu raison de le faire. Pour la première fois, je m’étais ouverte complétement à quelqu’un que je ne connaissais que depuis peu –même si pourtant c’était comme si je l’avais connu depuis des années. Comme si je refusais de mentir avant de… Que… Que tout ce que nous avions nous mène quelque part.

- Ce soir tu es parfait.

Ce fût la réponse que je réussis à dire, et je n’en ressentis aucune gêne tant elle m’apparut juste. Recroquevillée dans ses bras, j’avais l’une de mes mains sur son torse et sans réfléchir, je laissais mes doigts l’effleurer, comme une caresse. J’avais les yeux clos et pendant quelques secondes, je ne me concentrais plus que sur la tiédeur et la douceur de sa peau. Je me fis l’étrange réflexion que, si je l’avais pu, je serais restée toute la nuit, même sans dormir, parce que ses bras étaient plus reposants que n’importe quelle heure de sommeil à mes yeux. Mais je ne pouvais pas lui avouer, et j’avais autant peur de lui dire que de le ressentir alors lorsque nous nous détachâmes, je ne protestais pas et songeais, épuisée, que dormir pourrait tout de même me faire du bien. Il y avait désormais un silence profond mais doux qui avait empli tout l’appartement, et je ne sursautais même plus au crépitement de la cheminée qui s’éteignait petit à petit. C’était étrange de constater que si le feu s’épuisait là, il y en avait un autre qui brûlait plus assurément, caché sagement là où personne ne pouvait le voir et j’étais la seule à en sentir la chaleur qui se répandait dans mes veines.

Lorsque je retournais dans la chambre, il me sembla qu’Ewan eut une absence en me regardant et je sentis mes joues se colorer d’une rose que l’obscurité dissimulait. Pourtant je n’eus aucune hésitation lorsque je lui demandais de rester, comme si le contraire me paraissait insupportable. Je voulais qu’il soit là, que je sente sa simple présence même si ne nous nous touchions plus. J’avais peur peut-être de rêver, ou que demain les choses soient différentes et je refusais de rater une simple seconde que je pouvais passer tout près de lui. Et j’avais peur de dormir seule de toute manière, parce que le cauchemar ne serait jamais loin, les peurs, et j’avais envie de me raccrocher à quelque chose pour ne penser à rien si ce n’était que j’allais m’en sortir. Mais plus que ce désir de compagnie, c’était la sienne que je voulais. C’était lui que je voulais.


- Oui bien sûr, si tu veux.

L’information monta à mon cerveau trop lentement et lorsque je percutais finalement ce que j’avais proposé, il était déjà à mes côtés et je retins ma respiration pendant quelques secondes. Je m’étais tournée vers le mur et je fixais avec de grands yeux que j’avais peur de fermer, je me concentrais ce fond blanc et vide en espérant tomber de fatigue mais chaque respiration d’Ewan me maintenait éveillée, comme si c’était mon propre souffle. Je restais immobile, et tentais de ne penser à rien, strictement rien. J’étais encore en train de vaciller, entre une foule de pensées et de sensations contradictoires. Tout ce que j’avais confié à Ewan était encore présent et m’oppressait, j’en avais peur de dormir, mais j’étais aussi animée d’une certaine sérénité calme et de cette envie irrésistible d’être encore contre le jeune homme parce que je me sentais bien là, et j’aurais même aimé lui parler toute la nuit peu importe les sujets. Mais je vacillais encore et me retrouvais à craindre ce que je ressentais, craindre de m’emballer, puis j’entendais à nouveau la respiration d’Ewan et je retombais dans cette étrange plénitude. C’était un balancement infernal.

Quand j’entendis son corps bouger sous la couverture, j’agis sans réfléchir. Le mien bougea aussi, et ça m’était égal qu’il comprenne que j’avais fait exprès, ou qu’il croit à un heureux hasard. Je voulais simplement être là, contre lui, et dès que je sentis mon visage contre sa peau je fus emplie d’une douce chaleur et tout me parut plus simple. Ewan sembla accepter ma présence et j’abandonnais toute résistance, vacillant finalement de ce côté où j’étais bien. Je voulus lui dire quelque chose, peut-être un simple merci, mais je me refusais à briser le silence. Contre toute attente, j’eus un nouveau geste qui fut délicieusement spontané, et je le relevais mon visage enfouie contre sa poitrine pour déposer un minuscule baiser dans le creux de son cou. L’odeur qui en émanait se mêla avec la douceur de sa peau que mes lèvres goutèrent, et j’en eus un frisson qui persista lorsqu’Ewan m’entoura de son bras, m’attirant encore plus proche de son torse nu contre lequel je me collais en relâchant tous mes muscles. Peu à peu, mon cerveau se déconnecta et je disparus dans un sommeil paisible, légèrement troublé par une odeur de vanille qui agitait mes sens entre deux rêveries.

L’odeur qui me réveilla le matin ne fût pas celle de la vanille, mais bien de bacon grillé dont j’entendais le crépitement depuis la pièce principale. Je clignais des yeux, aveuglée par la lumière qui filtrait, avant de me frotter les paupières et de finalement jeter un coup d’œil autour de moi. Le lit était vide, et j’entendais du bruit dans la cuisine qui m’indiquait que probablement Ewan y était. Je ne bougeais pas de suite, me réveillant lentement en m’étirant sous la couverture encore tiède. A chaque mouvement, la réalité se dessinait plus précisément et les souvenirs d’hier soir se faisaient plus prononcés –je n’étais pas sûre de regretter quelque chose. Je me levais finalement et enfilai mon jean que j’avais plié dans un coin avant de finalement sortir de la chambre un peu hésitante, d’un pas discret.


- Tu as bien dormi ?

Je fus incapable de fournir une réponse immédiate pour simple et bonne raison que lorsqu’il se tourna vers moi, et que nos regards se croisèrent, j’eus un court-circuit dans la poitrine. Je crois qu’il ne dura que quelques secondes, mais cela suffit pour qu’une étrange chaleur se répande en moi et que je sente mon cœur s’accélérer, et je n’avais jamais connu un sentiment aussi soudain et inexplicable. Et lorsque la machine se remit en marche, je sentis un sourire naitre sur mes lèvres, un immense sourire que je ne pouvais contrôler. Non, je ne regrettais rien, j’en étais sûre désormais. Je dus même détourner le regard, gênée de ce sourire qui refusait de me quitter –j’eus presque envie d’éclater de rire. Il grandissait lorsque mon regard se posa sur le petit-déjeuner qu’il avait préparé, puis lorsqu’à nouveau je lui lançais un regard, et j’avais l’impression que j’allais rester bloquée à vie avec cette expression qui s’alimentait des battements de mon cœur.

- J’ai l’impression d’être une princesse. Lâchai-je finalement, en regardant à nouveau la table.

Je n’avais pas l’habitude d’être traitée comme ça, surtout pas de la part d’un garçon et je restais encore quelques secondes immobile avant de finalement m’asseoir, un peu hésitante, craignant presque d’être en train de rêver. Nerveusement, je me mis à passer mes doigts dans mes cheveux que j’avais rejetés d’un côté de mon visage, et j’en démêlais les nœuds rapidement, cherchant à occuper mes mains. Je levais les yeux vers Ewan, et encore une fois je sentis mon sourire s’agrandir.


- Très bien dormi. Répondis-je finalement, avant de baisser les yeux vers les toasts dans mon assiette, un peu gênée. Toi aussi ?.. Ajoutai-je timidement, par politesse –et un peu effrayée qu’il puisse avoir eu une mauvaise nuit alors que la mienne avait été si sereine.

J’osais finalement me servir, mais je ne savais simplement pas comment réagir à tout ce qu’il avait fait pour moi. Malgré moi, j’ordonnais les toasts dans mon assiette avec ma fourchette, les alignant à côté du bacon en tranche parallèle au pain. J’eus envie de trier les fruits de la salade, les classant par couleur, mais je réalisais alors que je commençais que j’allais légèrement effrayer Ewan, et me contentai donc de laisser les morceaux de poires et de clémentine fondre dans mon palais, se mêlant au sirop de sucre, et je restais silencieuse pendant un petit moment.


- Tu ne m’avais pas dit que tu faisais partis des garçons qui savent utiliser une poêle. Dis-je riant, après avoir commencé à attaquer mon bacon.

J’eus envie de le remercier mais encore une fois, je ne sus comment m’y prendre sans rougir ou m’embrouiller, alors je me contentais de lui sourire en espérant que ça suffirait –et je souriais vraiment beaucoup. Mais j’avais du mal à soutenir son regard, le mien papillonnant donc un peu partout autour de nous, s’accrochant à quelques détails –les plumes de cygne qui trainaient sur le plan de travail, le vieux numéro de la gazette du sorcier, des photos…


-Oh ! M’exclamai-je malgré moi, tandis que je venais de voir à côté de la photo de Phil et Ewan de nouvelles photos, dont une particulièrement… Etonnante. Mais c’est toi ! Dis-je en pointant du doigt la photo, et incapable de résister à la tentation, je me levais pour m’approcher et la regarder de plus près. C’était Ewan plus jeune, à probablement 6 ou 7 ans, dans un jardin sous un soleil qui éclairait ses cheveux, et c’était une photo magique où il souriait avant de rire. T’étais trop mignon !.. Continuai-je sans réfléchir à ce que je racontais, avant de rougir un peu en pensant que je parlais d’une photo de lui jeune, que j’étais en train de me mêler de souvenirs personnels qu’il n’avait pas envie que je vois, et qu’en plus il était toujours mignon et que peut-être j’aurais dû utiliser le présent –et je rougis encore plus. Mais c’est drôle… Y avait définitivement un truc qui clochait… On dirait pas toi, enfin si mais tu souris plus comme ça je trouve. Là, c’est le coin gauche de la bouche alors que toi c’est le droit et… Mais qu’est-ce que je racontais ?! Je me tournais vers Ewan et il me regardait vraiment bizarrement. Pourquoi est-ce que je ne réfléchissais pas plus avant de parler ?! Enfin, c’est juste un détail que j’ai remarqué. Achevai-je en me raclant la gorge et de me rasseoir après avoir reposé la photo.

Je me décidais donc à finir de manger, parce qu’au moins ça allait m’éviter de parler et me mettre dans des situations délicates. Je buvais mon thé lentement, et je goûtais à un peu tout ce qu’il y avait sur la table, regardant Ewan un peu nerveusement mais toujours avec ce sourire qui refusait de disparaitre.


- J’ai vraiment abusé de ton hospitalité, je devrais pas tarder, Lizlor doit s’inquiéter… Ajoutai-je plus pour moi que pour lui. Je reposai ma fourchette à côté de mon assiette, droite, avant de soupirer avant de lancer un regard à Ewan. Je… Je sais pas comment te remercier alors… Je commençai à m’embrouiller, je le sentais. Je me levais brusquement, une nouvelle idée en tête pour le remercier –sauf s’il tenait à ce que je l’embrasse à nouveau dans le cou mais ça me semblait une option peu probable. Je vais faire la vaisselle. Lâchai-je de but en blanc. Tu m’as préparé le petit-déjeuner, alors je fais la vaisselle, je suis probablement plus douée que toi en plus. Ajoutai-je avec un petit rire en me dirigeant vers l’évier.

Parce que je préférais m’occuper les mains et l’esprit, et qu’il fallait bien que je remercie Ewan –et puis qu’au fond, je ne disais pas non à rester encore un peu ici, à l’abri avec lui.





Dernière édition par Ruby Standiford le Dim 2 Juin - 20:51, édité 7 fois
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Ewan Campbell


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MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeMar 19 Mar - 1:24

Son sourire était tellement éblouissant qu'il annihilait toute l'énergie autour de nous - le ciel était probablement blanc parce que la lumière dorée du soleil émanait en cet instant de Ruby en face de moi - ou peut-être qu'au contraire c'était cela, c'était elle, cette lumière diaphane saupoudrée dans mon petit appartement, tombant de la fenêtre entourée de bois ? ... Ah, quel idiot j'étais, me dis-je après avoir remis les pieds sur Terre. J'imaginais déjà la réaction de Phil s'il avait su - allais-je lui dire ? - que Ruby, qui pour mon ami se résumerait à une bien belle jeune fille possédant tous les atouts nécessaires, avait dormi chez moi, dans mon lit, à moitié dénudée... Oh, ces jambes... Et que rien ne s'était passé, les élucubrations de mon cerveau mises à part, mises à rude épreuve par cette proximité à laquelle je ne m'étais pas attendu, et, surtout, qui déclenchait en moi bien plus que je ne l'aurais imaginé - ou peut-être ce que j'avais refusé d'imaginer et qui prenait un malin plaisir à se défouler maintenant que je n'avais plus assez de contrôle pour les refouler. D'une manière ou d'une autre, j'étais un imbécile : j'avais la gorge sèche en la voyant débouler dans mon salon et sourire d'un air radieux, ses traits et ses cheveux juste assez froissés par la nuit pour les rendre encore plus charmants, alors que je savais aussi simplement qu'il suffisait de le dire ne pas m'attacher, car je n'avais pas le temps, et puis, pourquoi faire des liens qu'il me faudrait défaire par la suite ? La tentation était grande - infinie - mais puisque je mesurais l'intensité de la chose, justement, je ne voulais pas nous embarquer tous les deux là-dedans. Il y avait trop de chagrin des deux côtés pour qu'on en rajoute. C'était un service que je nous faisais... N'est-ce pas ? ... Toujours était-il que si son sourire me captivait il m'aimantait aussi, et m'était communicatif. Pas d'une manière niaise et exagérée, mais tout simplement... J'avais le cœur léger et les lèvres légèrement inclinée, car honnêtement, rien ne me semblait plus paisible que cette matinée, alors que l'odeur des toast et des œufs brouillés se faisait plus présente autour de nous. Mais ce qui m'interpellait le plus dans ce sourire, en dehors du fait qu'elle était belle et que les jolies filles ont toujours comme atout majeur leur sourire, c'était ce qui s'y cachait, et depuis ses confidences d'hier j'avais l'impression, quand elle souriait ainsi de manière si naturelle, que ses dernières parcelles d'enfance résidaient là... Entre ces deux lèvres légèrement écartées et courbées, dans ce sourire fugace, juste assez pour m'attirer le regard et mettre la puce à l'oreille.

Je lui tirais la chaise évidemment, ne laissant rien paraître outre-mesure. De toute manière, les sensations plutôt intenses de la veille à ce souvenir de son corps un peu trop dénudé avaient laissé place à une certaine sérénité : le fait de m'être occupé les mains à cuisiner, d'avoir tout organisé, et de me raccrocher à mes résolutions de la veille, à savoir de la protéger et de prendre soin d'elle comme elle me méritait, tout cela me permettait de retrouver mon calme habituel. Ma bonne éducation d'Oxford n'était jamais bien loi, comme une deuxième peau, et je la laissais s'installer avant d'en faire de même. J'étais toujours agacé de voir que les idées si bien sous tous rapports de mes parents s'étaient ancrées en moi malgré tout, parce que je cautionnais absolument pas leur éducation si parfaite en apparence mais si creuse en réalité, mais j'imagine que pour ce qui était des bonnes manières je ne voyais pas de manières plus respectueuses d'agir... Alors tant pis.


- J’ai l’impression d’être une princesse.

- C'est le but,
confiais-je d'un ton léger sans vraiment réussir à croiser son regard, mais fort heureusement j'étais déjà occupé à la servir en tout ce dont elle avait envie.

Est-ce qu'elle se sentait différente avec moi maintenant qu'elle m'avait dit son histoire ? Si pour moi ça ne changeait rien, et c'est ce que j'avais essayé de lui faire comprendre, j'étais persuadé qu'elle devait se sentir comme étrangère aujourd'hui. Ce n'était pas vraiment qu'elle avait construit un mensonge mais... Je nous servis du thé, après un rapide coup d'oeil vers Ruby - mais, cela expliquait sans doute bien des choses et... En reposant la théière, la fin de ma pensée m'échappa, pour la simple et bonne raison que je n'étais certainement pas en mesure de m'aventurer sur ce terrain là. La seule réelle différence était qu'elle avait été honnête ; moi, pas.


- ... Toi aussi ?..

Hmm? Ah, oui ! Je hochai la tête, m'attaquant au petit-déjeuner. Oui, j'avais merveilleusement dormi, mais tout d'un coup m'étendre sur le sujet me donnait l'impression de revivre ce moment où je m'étais glissée sous les draps à ses côtés, où elle s'était collée contre moi, et je n'étais pas certain de rester calme comme il le fallait... Tout en mangeant distraitement, je me demandais d'ailleurs si je devais en parler ou non. En soi, il ne s'était rien passé, me rappelait mon esprit rationnel. Il n'y avait donc rien à dire, et je me tins plus fort à cette pensée, alors que machinalement j'observai les étagères de la pièce, pour y déceler sans doute je ne sais quelle réponse qui me manquait. Et ces étagères, ordonnées, je le savais, ne l'auraient pas été assez si Jamie avait été à côté de moi - je pouvais voir très nettement les gestes qu'il aurait eu, la manière de se pencher très légèrement en avant en se concentrant pour aligner les fioles et les bouteilles... Mais en pensant l'imaginer, je compris alors que dans le geste discret mais pourtant bien net de Ruby triant les aliments dans son assiette, Jamie n'avait pas surgi de nulle part. Contre toute attente, je sentis mes lèvres esquisser un vague sourire. Pourquoi, au lieu de me faire de la peine, cette évocation de la maniaquerie de mon frère avait cet effet-là? Sans doute que je voyais de manière floue, indistincte, les réelles raisons qui expliquaient pourquoi Ruby aimait ranger les choses, tout, et que je le comprenais et que je l'acceptais. A vrai dire, il n'y avait rien chez elle que je ne respectais pas. Comment en aurait-il été autrement ?

- Tu ne m’avais pas dit que tu faisais partis des garçons qui savent utiliser une poêle.

Je ris à mon tour, inclinant légèrement la tête pour marquer le compliment. Comme si j'avais besoin de boucler la boucle de mes pensées par la parole, je rétorquai :

- Et encore, tu n'as pas tout vu. Et puis, tu ne trouves pas que mon appartement est plutôt bien entretenu pour un appartement de mec qui vit tout seul ? ... Enfin, quand Phil vient passer le week-end, c'est une autre histoire, conclus-je avec un petit coup d'oeil amusé.

Avec son espèce de nonchalance, de je m'en-foutisme, Phil était quand même nettement moins attaché que moi à un minimum d'ordre et d'entretien, et à vrai dire je me demandais toujours à quoi ressemblait son dortoir quand il avait été adolescent à Poudlard, et j'imaginais le pire. Je n'étais pas maniaque - Jamie oui - j'aimais juste un minimum d'ordre ; avec Phil, parfois, c'était un peu compliqué. Mais en même temps, ça me changeait, et quelque part, je préférais mille fois mieux cela que cette espèce de fausseté que je ressentais quand je rentrais chez mes parents, et que tout me semblait factice, impersonnel. Enfant, j'avais peur de prendre les objets ou les livres posés sur les étagères - il y avait si peu de poussière, ils étaient posés et organisés au millimètre près, c'était comme faire une grosse bêtise, alors que ça ne représentait rien. J'en voulais tellement à mes parents de nous avoir éduqués dans un univers si étriqué en prétendant le contraire, et si souvent avec Phil nos discussions divergeaient sur ce point, j'en venais presque à regretter de ne pas être né dans un univers plus comme le sien, que dans notre maison trop propre et trop jolie d'Oxford.


-Oh ! Mais c’est toi ! Ruby pointait une photo posée là-bas sur... Oh. T’étais trop mignon !...

Je l'avais presque oubliée. Presque. Cette photo était l'une des rares de Jamie tout seul - je crois que j'étais sur les genoux de l'oncle Matthew ce jour-là, il était l'un des rares à passer des moments avec nous deux mais également des moments avec chacun de nous, comme si il avait voulu nier la nature et ne pas nous reconnaître comme deux moitiés. Par instinct, je baissai la tête vers mes œufs brouillés et mon bacon, sentant que mon regard allait me trahir, mais heureusement elle s'était levée. J'eus envie de la retenir et de lui parler de plein d'autres choses pour lui faire oublier, mais elle était debout, trop tard, et observait la photo avec un air attendri. Il n'y avait pas de quoi avoir peur : elle n'allait pas comprendre, mais... Je regrettai tellement mon geste ; j'avais hésité à installer cette photo parce que si nulle part Jamie n'apparaissait, c'était qu'il y avait une bonne raison, et qu'en plus, comme maintenant, je préférais éviter les questions si quelqu'un qui n'était pas au courant voyait une photo de Jamie et moi. J'avais fini par me dire que celle-là n'engageait à rien et qu'il était petit et qu'elle était un peu floue et que...

Mais non. Je n'étais pas prêt, me dis-je tristement. J'avais l'impression que mes propres cris m'assourdissaient à nouveau les oreilles, et que je sentais la lourdeur de ce soir-là, l'odeur des feuilles, de la rivière, de l'herbe mouillée... Le bruit sec du bois qui tape l'eau, le bruissement imperceptible des branches, et la force implacable de la rivière en crue...


- Mais c’est drôle…
S'il te plaît, n'en parle pas plus, la suppliai-je en silence. On dirait pas toi, enfin si mais tu souris plus comme ça je trouve. Là, c’est le coin gauche de la bouche alors que toi c’est le droit et… Je crus que j'allais me figer, me transformer en statue de marbre. Je soutins son regard avec une telle énergie que je sus que je n'allais pas tenir bien longtemps. Enfin, c’est juste un détail que j’ai remarqué.

... Comment ? Comment faisait-elle ?!

Sur le moment, la vérité faillit jaillir de ma bouche :
ce n'est pas moi, c'est mon frère. Aussi simple que cela.

Mais elle effleura et je l'en empêchai - je n'en avais pas la force. Pas maintenant. Pas l'envie non plus. Nous avions eu assez. Pourtant, j'étais réellement estomaqué - et tant mieux en un sens, car la stupeur l'emportait sur la tristesse que je savais à portée de main. Les jumeaux sont plus ou moins identiques - parfois un léger détail permet de les différencier mais il est assez apparent, parfois ils se différencient eux-même dans leurs attitudes, parfois, ils sont assez différenciés malgré tout pour être aisément reconnaissables, parfois ils le cherchent. Jamie et moi ne cherchions rien de particulier mais il en était ainsi : nos ressemblances étaient précises, nous étions le reflet l'un de l'autre, et ce n'était pas une métaphore, car la seule et unique différence résidait dans notre façon de sourire et de nous positionner, en général, lui toujours à gauche et moi toujours à droite, et, oui, les coins de sa bouche se soulevaient vers la gauche un peu plus que la droite, et moi, l'inverse.

... Mais il fallait nous connaître depuis des années pour le remarquer, ou bien le savoir, et encore : Matthew et sa femme mis à part, notre famille et nos parents y compris nous confondaient, même en se concentrant. Alors, le fait que Ruby note cet infime détail et le sorte de but en blanc - et le fait qu'elle reconnaisse Jamie sans connaître son existence me laissa véritablement surpris, et, songeur.


- C'est parce que c'est une vieille photo, dis-je après un temps trop long, probablement, mais les rouages de mon cerveau avaient du mal à se remettre à fonctionner. C'est mon oncle Matthew qui a pris la photo, m'entendis-je continuer. Mensonge, si j'étais sur ses genoux. Pourquoi inclure Matthew dans cette conversation ? Sans doute que je cherchais un peu de son réconfort et de son soutien - qui sait. Il habite en Écosse, pas trop loin d'ici, et je m'entends très bien avec lui.

Oui... Plus je parlais d'autre chose moins je me sentais oppressé, et très vite je me recomposais un air beaucoup plus détendu. Après tout, je devais la protéger, et je ne l'oubliais pas. Or, je voyais difficilement comment la protéger si je la mettais mal à l'aise en agissant ainsi. Comme mon appétit n'était pas encore satisfait, je me remis à manger avec entrain, espérant que ce petit incident ne serait bien vite qu'un mauvais souvenir. Et au fur et à mesure de notre conversation, je sentais que la fin arrivait, je sentais qu'allait venir le moment où j'allais être vraiment trop en retard au travail et qu'elle devrait s'en retourner à Poudlard ; je sentais qu'allait venir le moment où nous devrions nous dire au revoir, or, je n'avais pas dit l'essentiel. Et j'avais bien du mal à le formuler... Mais comment lui dire sans lui forcer la main que j'avais envie de la revoir ? Comment lui proposer de revenir la semaine prochaine à la Tête de Sanglier, comme avant, alors qu'elle buvait trop et que même si je pouvais ne pas lui servir d'alcool, un bar n'était pas à proprement parler le meilleur endroit pour oublier la boisson ? J'avais autant envie de lui dire tout cela que j'ignorais comment le faire, et je me sentais bien peu efficace sur ce coup-là. Voyons ! Ce n'était pas la mer à boire, et si elle n'avait vraiment plus voulu de mon amitié, elle ne serait pas venue chercher refuge ici...


- J’ai vraiment abusé de ton hospitalité, je devrais pas tarder, Lizlor doit s’inquiéter… Je… Je sais pas comment te remercier alors…

- Il n'y a pas de quoi, vraiment,
répondis-je sincèrement et du tac au tac - je n'avais rien fait d'autre que de l'écouter, elle n'avait pas à me remercier ! Ah, j'ai oublié de te le dire : j'ai envoyé une lettre à... J'espérais de ne pas avoir fait de gaffe - à Lizlor hier soir, pour la prévenir. Je me disais qu'il fallait mieux que quelqu'un sache, si jamais ils te cherchaient, si ils...

... Si ils débarquaient chez moi en pleine nuit pour la trouver endormie contre moi. Oui, définitivement, je préférais éviter de devoir expliquer le pourquoi du comment à Sara Wayland.


- Je vais faire la vaisselle. Tu m’as préparé le petit-déjeuner, alors je fais la vaisselle, je suis probablement plus douée que toi en plus.

Cette fois, je me levai aussi brusquement qu'elle et la talonnai, alors qu'elle était déjà partie dans la cuisine.

- Ça ne va pas ! Laisse-moi faire, j'ai eu un Optimal en vaisselle, et je ne veux surtout pas que tu casses mes belles assiettes...

Non seulement mes assiettes, héritées de la mère de mon père, avaient l'air d'avoir fait la guerre et étaient plus ébréchées les uns que les autres, mais en plus, je riais déjà en prononçant ces mots, si bien que ma défense ne dut pas paraître très crédible. Du coup, j'en vins aux mains : me positionnant à côté d'elle, face à l'évier, je lui pris la casserole qu'elle s'apprêtait à laver pour lui ôter des mains mais elle tint bon, alors j'insistais - et mes doigts se posèrent tout naturellement sur les siens, tandis que je nous riions ensemble. Cette sensation, moins brutale que celle de cette nuit, me procura une multitude de petits picotements depuis mes doigts, là où ils touchaient les siens, jusqu'à la racine des mes cheveux et quand je croisai son regard je me demandai, un instant, ce qui se passerait si je cédai à l'envie fulgurante que j'avais de l'embrasser alors qu'elle était si près de moi - mais la casserole glissa de ses mains et je récupérai le butin, faisant s'envoler ces idées fugaces par la même occasion. J'en profitai pour glisser la main sous le jet d'eau qui coulait dans l'évier et en asperger Ruby, afin qu'elle se recule et me laisse la place nette. Alors, tirant la baguette de ma poche, j'eus un geste rapide du poignet et tous les couverts et les assiettes sales s'empilèrent juste devant moi, hors de sa portée.

- Tu vois, je crois que tu ne vas pas pouvoir me battre sur ce coup-là, dis-je avec un sourire satisfait, et je lavai tout en un tournemain.

Hélas, la vaisselle terminée, alors que je jetai un regard machinal sur la petite horloge, je compris qu'il était inutile de repousser encore le moment de sortir d'ici. Je n'avais vraiment pas envie d'aller travailler, et, surtout, de quitter Ruby, parce que... Je n'avais pas envie que ce soit la dernière fois que je la vois, et je n'avais pas envie de non plus de risquer de briser et de ne jamais retrouver cet équilibre qui nous berçait depuis... Que nous nous étions endormis l'un contre l'autre. Je déglutis avec un peu plus de difficulté à cette pensée, et comme elle était de profil, mon regard s'attarda encore une fois sur sa silhouette haute et fine, ses formes, ses cheveux, son visage, la courbe de ses lèvres.


- Je vais devoir aller travailler, murmurai-je, à regrets. Je te raccompagne... Comme la dernière fois? conclus-je en cherchant son regard, timidement. Mais ce n'était pas ça que je voulais exprimer, pas ça qui me faisait un peu peur, et j'ajoutai en essayant d'avoir l'air de rien : En tout cas, tu peux revenir quand tu veux...

Parce que moi je le voulais... Et la Tête de Sanglier n'était pas la seule option possible. En y pensant, d'ailleurs, il y avait plein d'idées qui me venait en tête, plein d'endroits où nous pourrions nous promener, où nous... Mais j'avais pensé nous avec une telle facilité que je ne pus pas aller plus loin. Comme un reproche, mon regard se posa sur la petite photo là-bas, à côté de celle de Phil et moi. Et je compris que ce nous me faisait peur.
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Ruby Standiford-Wayland


Ruby Standiford-Wayland
Apprentie à Sainte Mangouste



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~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Empty
MessageSujet: Re: ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.]   ~ Et quand les océans te monteront aux cils. [PV E.] Icon_minitimeJeu 21 Mar - 21:38



"Remember those walls I built?
Well, baby, they're tumbling down

And they didn't even put up a fight
They didn't even make a sound
I found a way to let you in
But I never really had a doubt
Standing in the light of your halo
I got my angel now

It's like I've been awakened
Every rule I had you breakin'
It's the risk that I'm takin'
I ain't never gonna shut you out."


Si soutenir son regard m’était difficile, retenir mon sourire l’était encore plus. Une lumière d’une blancheur étonnante se répandait dans l’appartement et par la fenêtre, je voyais Pré-au-Lard déjà éveillé qui bouillonnait d’entrain tandis qu’ici, je sentais un calme incroyable. Je ne me faisais pas d’illusions cependant, la tempête n’était pas terminée, au contraire, sûrement commençait-elle à peine. Malgré la sérénité qui m’avait envahie, je sentais qu’il y avait quelque chose de sous-jacent qui grandissait et j’entendais des battements lointains dans ma poitrine qui n’était que pas ceux que me procurait la vue d’Ewan, mais bien le manque. J’essayais pourtant de me raisonner : je ne pouvais pas en avoir envie, pas maintenant. J’étais si bien là, et malgré le début de soirée agitée, les dernières heures avaient changé la donne. Alors pourquoi, alors que je ne pouvais m’empêcher de sourire, je sentais malgré moi cette horrible sensation de vide au creux de la poitrine ? Je n’avais pas bu depuis… Probablement 24h. Ce n’était rien. 24h petites heures… Mais c’était sûrement le début qui serait le plus difficile, n’est-ce pas ? Je n’arrivais plus à me rappeler d’un seul matin où je n’avais pas bu ne serait-ce qu’une gorgée avant de partir en cours. C’était presque plus symbolique d’une réelle nécessité, du moins le croyais-je, tout comme j’appréciais fumer une cigarette après le déjeuner avec Lizlor. J’étais rarement prise d’une envie incroyable de fumer, à vrai dire je n’avais jamais ressenti la sensation d’un manque physique. Liz m’avait déjà manqué, Poudlard aussi. Mais mon corps n’avait jamais demandé d’une telle force, à la fois enfouie mais présente, quelque chose comme s’il en avait réellement besoin pour continuer à fonctionner. Et plus mon cerveau lui dictait qu’il ne pourrait pas l’avoir, plus je sentais mon estomac se contracter. Comment mes émotions pouvaient-elles être si contradictoires ? Comment pouvais-je être en telle sécurité avec Ewan, et si apeurée par mes propres envies ? Je ne savais pas. Mais je l’étais.

Mais il n’était pas question de flancher. Je n’avais pas oublié la panique de Lizlor, ses pleurs raisonnant encore comme une supplication, un appel à l’aide auquel j’étais la seule en mesure de répondre. Alors que je regardais Ewan du coin de l’œil, je ne pouvais pas non plus m’empêcher de me demander ce qu’il dirait s’il savait qu’en instant, outre le fait que j’avais l’envie étrange d’être encore tout contre lui, une partie de moi réclamait autre chose. Comment réagirait-il si je lui disais qu’après quelques heures complétement sobre, j’avais déjà envie de boire ? Je lui avais déjà révélé mes faiblesses hier, et il avait pourtant si bien réagi… Je ne regrettais en aucun cas mes confessions. Certes, désormais, je me sentais un peu différente en sa présence –mais pas dans le mauvais sens. Je me sentais simplement plus vraie. Mais combien de temps tiendrait-il à me voir si fragile ? Il ne pouvait pas, et probablement ne voulait-il pas, s’occuper d’une fille comme moi. Une fille qui avait des problèmes d’alcool. L’unique fait de le penser me donner l’impression d’être encore plus stupide, je me maudissais de ne pas savoir me gérer. Mais je ne voulais pas culpabiliser, pas maintenant, je voulais simplement que tout aille bien… Il fallait que je pense à autre chose. Que je pense à Ewan là, devant moi, avec son sourire calme et sa manière de me regarder. Oui, si je pensais à ça, pendant un instant le reste s’envolait et le manque se trouvait remplacé par une douce chaleur qui se répandait dans mes veines.


- C'est le but.

J’eus presque envie de lui demander… Mais pourquoi? Se rendait-il seulement compte que personne ne m’avait jamais traité comme ça, encore moins un garçon ? C’était souvent l’inverse, c’était moi qui m’occupais des autres –et ça ne me dérangeait pas. Mais je ne refusais pas que l’on me traite comme une princesse, je ne savais simplement pas comment réagir à part sentir mes joues rougir discrètement et mon cœur battre à une cadence un peu plus rapide que la normale. Ce qui m’étonnait le plus, c’est que je n’avais pas l’impression qu’Ewan se forçait, ou qu’il agissait par pitié après mes révélations de hier soir. C’était comme si pour lui, il était logique d’agir ainsi. Malgré moi, je me demandais s’il agissait ainsi avec toutes les filles, ou si… Après tout, il ne s’était jamais étendu sur ses relations amoureuses, et n’avait jamais d’ailleurs utilisé le terme d’amour, et je n’avais aucune idée de la manière dont il traitait les filles en général –et puis, je n’étais pas sa petite amie, me corrigeai-je mentalement un peu tard à mon goût. Finalement, ça m’était égal qu’il ait le même scénario avec les filles –en fait, si, un peu. D’accord, beaucoup. – qu’il courtisait, s’il me courtisait d’ailleurs ce dont je doutais fort depuis ce que je lui avais raconté hier soir, mais ce qui comptait c’était maintenant, et je me raccrochais à la sensation que cet instant était unique pour lui comme pour moi, même si j’étais incapable de définir ce qui se passait exactement. Aussi un peu, c’était plus fort que moi, à ce qu’il m’avait dit… Que ça ne changeait rien, et qu’il me trouvait merveilleuse. Et quand j’y repensais, je comprenais alors que j’espérais réellement que ça soit unique.

- Et encore, tu n'as pas tout vu. Et puis, tu ne trouves pas que mon appartement est plutôt bien entretenu pour un appartement de mec qui vit tout seul ? ... Enfin, quand Phil vient passer le week-end, c'est une autre histoire.

J’avais toujours du mal à les imaginer ensemble. En fait, j’avais simplement du mal à imaginer qu’ils avaient été ensemble à Poudlard, et à visualiser Ewan jeune –j’avais l’étrange impression qu’il manquait quelque chose à mon équation. Je me demandais comment ils étaient tous les deux, ici, ou même comment Ewan se comportait avec ses amis. Parfois, j’avais envie de l’observer, ou simplement qu’il me raconte comment il était, mais je réalisais bien vite que j’étais trop curieuse. Après tout, il ne m’avait vu qu’en présence de Lizlor… Il n’avait pas idée de comment j’agissais à Poudlard, entourée des autres –ou plutôt comment j’avais agi. C’était ironique, moi qui lui avait reproché d’être trop secret alors que j’avais été la première à utiliser cette méthode même avec mes amis les plus proches. Pourtant, je sentais qu’il m’avait cerné presque plus vite que je ne l’avais voulu, et c’était peut-être ça qui me faisait légèrement peur car je ne pouvais pas en dire de même pour lui –même si j’avais quelques théories. Alors est-ce qu’Ewan était aussi secret avec Monsieur Prescott ? Je me demandais aussi si ce dernier avait déjà entendu parler de moi, et je me sentis rougir de honte en pensant que je pouvais croire être assez importante pour qu’Ewan parle de moi.

- C’est vrai que tu t’en tires plutôt bien. Admis-je finalement en regardant une nouvelle fois son appartement. Mais ton étagère là-bas n’est pas droite, regarde, elle penche légèrement… Fis-je remarquer en pointant du doigt une étagère accrochée au mur dont le côté gauche était légèrement plus bas que le droite, me laissant supposé qu’il l’avait mal fixé et que le poids des livres se répartissait mal et la faisait pencher. C’est stressant. Laissai-je échapper, malgré moi avant de me tourner vers mon assiette, un peu gênée.

Ce n’était que des détails, et je savais que j’étais la seule à les remarquer. Mais c’était plus fort que moi, et je me reconcentrais sur mon assiette, légèrement gênée. Je ne voulais pas paraitre embêtante avec ma sale manie… Pourtant, je vis Ewan sourire alors que j’organisais mon assiette et j’en ai un petit frisson en retour. Allait-il un jour me reprocher quelque chose ?! J’avais cru comprendre, pourtant, que l’ordre apparent n’était pas ce qui l’enchantait, du moins lorsque c’en était maladif. Il me semblait que c’est ce qu’il reprochait à ses parents, car lorsqu’il survolait toujours très rapidement ses relations avec, je ne percevais que quelques bribes qui critiquaient la sévérité de son éducation. Il venait d’Oxford et je devinais facilement une grande maison, des repas chics, un immense domaine et des « ne met pas tes coudes sur la table ». C’était un monde qui m’était totalement étranger, et je m’interrogeais toujours sur ce qui se cachait derrière les grands portails en fer forgé des maisons victoriennes. Visiblement, Ewan ne l’appréciait pas mais moi, je ne pouvais pas m’empêcher de me dire que finalement, le résultat n’avait rien de désagréable mais sûrement avait-il su trouver un juste milieu car sa politesse n’avait rien de surjouée.

En parlant de détail, le fait que je remarque cette infime différence entre Ewan enfant et celui qui se tenait en face de moi sembla le laisser… Perplexe. Il me regarda avec une telle intensité que j’en eu des frissons et je fis tout mon possible pour ne pas rougir. Est-ce que j’avais dit quelque chose qui ne fallait pas ? Après tout, ce n’était qu’une remarque et je n’attendais aucune réponse. Il n’y en avait probablement pas d’ailleurs, et je me résonnais : malgré ce détail dans son sourire et, je fus obligée de le remarquer, la forme de la mâchoire, c’était bien une photo d’Ewan. Il avait simplement grandit, comme n’importe qui et il avait changé, je n’allais pas commencer à éplucher ses photos d’enfance pour regarder l’évolution. Si en plus d’un trouble compulsif sur la saleté et l’ordre, j’en développais un sur Ewan, je n’allais pas m’en sortir !


- C'est parce que c'est une vieille photo. C'est mon oncle Matthew qui a pris la photo. Il habite en Écosse, pas trop loin d'ici, et je m'entends très bien avec lui.

J’hochais la tête en me rasseyant. Ce n’était encore une fois qu’un détail, mais le fait qu’il me parle de son oncle me fit sourire. Je maintenais ma crainte sur sa réticente à me parler de lui, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il le fasse ce matin. Peu importe le temps que ça lui prendrait finalement, j’avais compris hier soir que ce n’était pas ça que j’attendais forcément de lui. J’avais besoin qu’il me prouve qu’il était là pour moi, et il l’avait fait à la perfection. J’avais simplement une nouvelle crainte… Est-ce qu’il voulait qu’on se revoit ? Pour moi, la réponse me paraissait évidente mais je n’avais aucune idée de comment lui faire comprendre, ou comment simplement savoir si mon sentiment était partagé. Et plus je regardais l’horloge, plus je sentais que la fin se faisait proche et qu’en sortant de chez lui, tout pouvait se briser et s’oublier, or c’était exactement ce que je voulais éviter. De toute manière, ça me serait bien impossible d’oublier ce qui s’était passé.

- C’est bien que tu t’entendes au moins avec un membre de ta famille alors… Concluais-je doucement avec un petit regard timide.

Je n’ajoutais rien, je sentais que ce n’était pas l’instant pour repartir dans ce genre de sujet. Mais je voulais simplement qu’il sente que si un jour, il franchissait le pas, j’étais là à attendre sagement qu’il m’en parle… Mais de quoi ? Je ne savais pas ce qu’il cachait et parfois je tentais de me raisonner en me disant qu’il n’y avait peut-être rien à cacher mais pourtant j’avais toujours ce sentiment lorsqu’il parlait de lui et que je me plongeais dans ses azurs d’un bleu délavé, qu’il y avait quelque chose qui manquait, qu’il fuyait... Mais au fond, je m’interdisais de ne pas le respecter pour ça.


- Il n'y a pas de quoi, vraiment. Arrête d’être aussi gentil Ewan, c’est vraiment pas possible… Ah, j'ai oublié de te le dire : j'ai envoyé une lettre à Lizlor hier soir, pour la prévenir. La fourchette me glissa des mains et tinta contre mon assiette. Pendant une seule seconde, une unique seconde, je n’eus qu’une pensée à l’esprit. Me lever et l’embrasser là, maintenant, tout de suite. Je me disais qu'il fallait mieux que quelqu'un sache, si jamais ils te cherchaient, si ils...

Il me fallut plusieurs secondes pour reconnecter, parce que j’avais fixé son visage et ses lèvres une minute de trop pour en sortir indemne.

- C’est… Connecte toi Ruby. Connecte toi. Merci, c’était une très bonne idée. Finis-je par articuler, un peu perdue.

Je n’arrivais pas à croire qu’il y ait pensé… Soudain, je me sentis plus légère car je redoutais que Lizlor soit en train de me chercher, et je souriais déjà de ses futures questions de son regard entendue, probablement de sa remarque prétendue innocente « Alors, on dort chez Ewan ? ». Et ce qui me gênait déjà, c’était que je ne savais pas comment j’allais pouvoir répondre à ses questions sans me mettre à sourire comme j’étais en train de le faire, ni de m’emmêler quand j’allais lui expliquer qu’en plus d’avoir dormi chez lui, j’avais dormi avec lui. Contre lui. Je savais pertinemment qu’elle allait comprendre plus vite que moi ce qui était en train de se produire de mon côté, et plus j’allais lui en parler, plus j’allais y penser, plus ça allait se concrétiser dans mon cerveau –et ça me faisait un peu peur. Pourtant, en cet instant précis, je n’avais peur de rien avec Ewan…

Alors peut-être qu’au fond, la vaisselle n’était qu’une excuse pour faire s’étirer ce temps qui me paraissait si court, ce temps où tout était léger et à la fois si concret…


- Ça ne va pas ! Laisse-moi faire, j'ai eu un Optimal en vaisselle, et je ne veux surtout pas que tu casses mes belles assiettes...

Mon rire se mêla au sien tandis que nous commencions une bataille devant l’évier. Il avait naturellement plus de force que moi, mais je tenais bon en m’accrochant à la casserole qu’il voulait reprendre. Ses doigts sur les miens ne me dérangèrent pas, à vrai dire je ne les remarquais qu’à peine, du moins jusqu’à que le regard d’Ewan accroche le mien et que je prenne conscience de la réalité. Sur le coup, je fus déconcentrée quelques secondes qui me furent fatales et je le sentis prendre le dessus dans notre supposée bataille. Je lâchais l’objet de notre dispute et il en profita pour m’arroser et j’eus un cri de surprise en m’écartant par réflexe ce qui lui permit d’accéder à l’évier.

- Tu vois, je crois que tu ne vas pas pouvoir me battre sur ce coup-là.
- Vous êtes un tricheur, Monsieur Campbell ! Ça vous vaudra un Troll à votre examen !
Répliquai-je alors en lui chatouillant les côtes et en lui adressant une moue faussement exaspérée en fronçant mes sourcils, sans pouvoir contenir cependant un sourire.

Mais je ne pus maintenir ma grimace longtemps, car après m’être appuyée contre le frigo alors que j’observais Ewan, je n’eus plus envie de rire –simplement de sourire, d’un sourire doux et serein. Mon regard se perdait sur la courbe de son dos que son tee-shirt me laissait deviner, et ses sourcils qui étaient froncés, donnant à son visage un air soudain sérieux mais il n’en restait pas pour le moins beau –ah, ça, il était tellement beau…


- Je vais devoir aller travailler. Je sentis mon sourire faner, et mon cœur se contracter. Et maintenant ?... Je te raccompagne... Comme la dernière fois? En tout cas, tu peux revenir quand tu veux...

Je sentis une vague m’envahir et mon sourire renaître en même temps que la contraction qui prit mon cœur. Il voulait que je revienne, il me proposait de revenir, il…

Cela ne servait à rien, je n’arrivais plus à penser rationnellement pendant quelques secondes de bonheur pur et simple.


- Tu as bien vu que je n’avais pas besoin d’invitations de toute manière… Répondis-je avec un petit rire, faisant allusion à hier soir –dire que j’avais débarqué à une heure du matin chez lui à l’improviste…

Je récupérais mes affaires lentement avant de suivre Ewan –il m’ouvrit la porte et me laissa passer, et je me sentis une nouvelle fois rougir de plaisir. L’air frais de l’extérieur ne put calmer la douce tiédeur que me procurait la compagnie du jeune homme et nous marchâmes jusqu’au passage secret en discutant comme si de rien n’était, et je m’étonnais toujours qu’il me considère de la même manière qu’il le faisait avant que je lui parle de l’incident. Comme si… Comme si ça ne changeait vraiment rien. Mieux encore, j’avais l’impression que la nuit dernière avait changé quelque chose, du moins pour moi… Et ça me faisait peur parce que je craignais la non-réciprocité mais à la fois, j’étais tellement bien avec lui que je ne me posais pas de questions, pas encore. Il insista pour emprunter le passage avec moi, et je n’arrivais simplement pas à protester contre quelques minutes de plus avec lui. Je réfléchissais aussi à la prochaine fois que nous pourrions nous voir, mais je n’en parlais pas encore, cherchant surement la meilleure des options. Et c’est quand nous arrivâmes devant la porte qu’elle me parut claire, et que je me tournais vers Ewan avec un petit sourire.


- Je t’enverrais une lettre… Pour qu’on se revoit, d’accord ? Comme ça on pourra s’organiser plus facilement.

J’avais presque du mal à parler, parce que j’avais le cœur qui s’agitait et finalement, je ne trouvais qu’une manière de le contenter. Sans réfléchir, je m’approchais de lui à nouveau et j’enfouie mon visage contre son torse en entourant maladroitement sa taille de mes bras, mes mains se nichant dans le bas de son dos. Pendant quelques minutes, je ne parlais pas, et je profitais simplement de ce silence et cette sensation de sérénité incroyable que je ressentais lorsqu’il m’étreignait.

- Merci. Finis-je par murmurer, le visage toujours dans le creux de son cou.

Je réussis à m’en détacher et, incapable de rester plus longtemps contre lui sinon je restais de prendre racine, je détournais les yeux un peu gênée et me mordis la lèvre en rougissant un peu. Puis, puisque je n’arrivais plus à agir clairement, je finis par ouvrir la porte tout doucement pour filer dans les cachots sans oser me retourner, de peur de faire demi-tour probablement.

J’avais le cœur qui battait encore, assourdissant tout mon corps, jusque dans mes paumes qui s’étaient posées sur son dos, et peu importe ce qui était à venir, j’avais eu la chance de goûter à l’infinité d’un moment de quelques minutes, quelques heures désormais disparues mais qui ne seraient jamais perdues.


THE END


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