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Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby

 
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 Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby

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Ewan Campbell


Ewan Campbell
Vendeur chez l'Apothicaire



Masculin
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Particularités: J'ai un énorme bagage à main (et ma copine a des gros boobs).
Ami(e)s: Phil et Rita et les boobs (mais surtout les boobs) :)
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MessageSujet: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeMer 14 Aoû - 15:45




Yours is the light by which my spirit's born : - you are my sun, my moon, and all my stars.


Avec le recul, peut-être n'avions pas tant perdu de temps que ça... Je n'avais cessé de maudire cette misérable échauffourée dans les ruelles sombres de Pré-au-Lard, et ce qu'elle m'avait coûté, l’inquiétude de Ruby et la nuit chaotique qui s'en était suivie. Mais au petit matin, ou plutôt après que nous nous soyons réveillés une deuxième fois, bien plus reposés que la première, la lumière qui avait filtré à travers les volets en bois aux lattes inégales de ma chambre avait eu cet éclat si particulier des journées qui s'annoncent belles. Je m'étais levé dans un tout autre état : bien décidé à laisser à la nuit le tumulte de mes angoisses et de mes tourments. Plus rien ne comptait en vérité que Ruby et nos retrouvailles quelque peu ratées et qu'il me fallait rattraper. Ce n'était pas que je me sentais redevable : j'agissais sans attendre en retour, je ne voulais que... lui faire plaisir, et je me rendis compte en m'éveillant ce matin-là qu'il n'y avait pas grand chose de plus qui comptait alors. Pré-au-Lard avait revêtu ses habits de printemps, et sans doute était-ce parce que je ne travaillais pas ces jours-ci que je ne contemplais pas le village en pensant déjà à la journée qui m'attendait à la boutique, mais que j'étais d'avantage sensible à la légèreté qui planait dans l'air, aux rayons dorés du soleil qui dans mon esprit scintillaient comme les cheveux de Ruby, au ciel clair et bleu qui n'avait rien de ces ciels d'orage, sombres et menaçants, lourds et pressants sur mes souvenirs. Cette quiétude, pourtant, avait été un peu bouleversée quand j'avais remarqué un changement singulier dans le salon - rien n'avait véritablement changé mais quelque chose avait tout de suite attiré mon attention. Sur les étagères, mes livres et mes grimoires avaient tous bougé et il me fallut peu de temps pour constater qu'une main les avait classés par ordre alphabétique. Cette main, je la devinais bien : Ruby, probablement pendant que j'avais été endormi, s'était affairée à ranger le salon - mes potions n'y avaient pas échappé. Je savais pourquoi elle faisait cela, et je savais aussi que par ma faute elle avait été si nerveuse et inquiète que ses peurs s'étaient exprimées. J'avais été l'investigateur de ce bazar qui la mettait si mal à l'aise... Combien je me sentais coupable ! Pour toute réaction, j'avais simplement remarqué avec un sourire détaché qu'il serait maintenant beaucoup plus pratique de m'y retrouver. Le reste m'importait peu. En la voyant sortir de la salle de bain, apprêtée et plus habillée que quelque part je l'avais espéré, je m'étais définitivement rendu à l'évidence. Nous étions tous les deux, et je comptais bien en profiter.

J'avais, durant l'absence de Ruby, songé à beaucoup de choses que nous pourrions faire. Car finalement, quand nous nous voyons à Pré-a-Lard, nous n'avions pas forcément le temps d'aller plus loin que le petit village. Puisque j'y habitais, et que j'étais définitivement plus libre qu'un élève de Poulard, j'avais découvert quelques endroits agréables au cours de mes promenades (notamment un endroit particulièrement beau que Joseph m'avait fait découvrir) et où je voulais emmener Ruby. Qui plus est, le simple fait de passer du temps tous les deux nous suffisait d'une certaine manière, et il se passait relativement souvent de simples instants pendant lesquels nous restions juste à discuter ou à nous embrasser sans avoir besoin de quoi que ce soit d'autre. Mais je voulais qu'elle s'amuse : aussi, dès que je fus remis de mes blessures, je fis en sorte que notre journée soit la plus rentable qui soit. Nous étions jeudi : elle avait veillé sur moi depuis le début, c'était à mon tour de la remercier pour toute l'attention dont elle était capable - plus que je n'en avais jamais eu depuis longtemps. L'éducation de mes parents était bien trop pudique pour un quelconque épanchement. Je lui avais préparé un repas pour lequel je m'étais appliqué, avant de lui interdire de m'aider à ranger et nettoyer quoi que ce soit, puis je lui avais servi du thé avant de lui proposer mon idée pour l'après-midi. Ce n'était pas grand chose, mais je voulais lui faire découvrir ce petit chemin qui s'élevait derrière les hauteurs de Pré-au-Lard, longeait une petite vallée et s'enfonçait dans la forêt avant de déboucher sur un petit village : quelques maisons s'élevaient là, vieilles, en pierres, vestiges pourtant maintenus en état, et dans le pub qui accueillait les voyageurs, ils servaient le meilleur chocolat chaud que j'avais jamais goûté. Après, le sentier grimpant s'élevait vers les montagnes, serpentait entre les vallons, bordé de bruyère et de fleurs jaunes et oranges, avant d'arriver à un petit plateau, assez haut, d'où la vue était remarquable - Poudlard, au loin, avait beau se dresser de toute sa majestueuse stature vers le ciel, il paraissait tout petit. Dans ce petit plateau se creusait un lac - et pourtant je ne cherchas pas forcément la proximité de l'eau, mais ce lac à l'étendue lisse et si brillante qu'on aurait dit un diamant ne me faisait pas peur. C'était au bord que je proposai à Ruby de pique-niquer - après cette longue marche, nous étions affamés - et nous passâmes le reste de la soirée allongés sur la couverture étalée par terre, couchés sur le dos, à observer les étoiles naître une à une dans le ciel.

Durant tous ces moments où nous discutions, où Ruby me parlait des nouvelles du Kent, où nous évoquions ce que nous avions fait l'un et l'autre, je me sentais partagé entre deux états d'âme. Le premier, le plus fort, m'aurait rendu proche de la fébrilité si je ne l'avais pas maîtrisé. Non seulement Ruby m'avait manqué, mais tous ces moments où nous étions si proches - et ils n'étaient pas rares puisque nous dormions et vivions ensemble - me rendaient de moins en moins résistant au désir qui montait en moi. Ruby l'ignorait sans doute, mais le moindre de ses gestes, de ses sourires et de ses éclats de rire me donnait de délicieux frissons tout le long de l'échine, et il n'y avait pas une seule journée où, en l'admirant à la dérobée, je n'écoutais pas forcément ce qu'elle me disait, laissant mes pensées dériver vers des souvenirs bien précis et ce que se plaisait à imaginer mon esprit sans que je lui en donne pourtant la complète autorisation. Ce qui augmentait mon appréhension vis-à-vis de ce sujet : comment ne pas la brusquer, l'effrayer ? Comment ne pas la pousser à faire ce qu'elle ne voulait pas, comment éviter qu'elle se sente obligée ? L'idée même m'était intolérable. Mais surtout, comment me détacher de cette envie qui allait grandissante ? Plus je la voyais et plus elle était belle, plus nous nous embrassions et plus nos étreintes étaient passionnées, plus je la serrais contre moi et plus cette tendresse qui émanait d'elle, aussi lumineuse qu'un rayon de soleil pourtant un peu timide, touchait mon cœur. Pour seule consolation, j'avais le souvenir si précis du goût de sa peau sur mes lèvres, du galbe de ses forme sous mes paumes, et de l'odeur plus sucrée et sensuelle du creux de son cou. Mais le deuxième de ces états d'âme bien difficiles à contrer dans de telles circonstances n'était ni plus ni moins que celui qui me hantait depuis que j'avais manqué de lui dire. Plus cela approchait et plus je m'en rendais compte ; moins je me sentais capable de respecter mon plan. Pas depuis qu'elle était là... Alors j'avais attrapé l'une de ses mains, tandis que nous contemplions le ciel, et je l'avais caressée entre les miennes, je l'avais embrassée, je l'avais admirée et en avais tracé les contours du bout des doigts, priant que par une quelconque magie que je n'aurais pas connue, cela scelle à jamais tout ce que nous avions vécu ensemble. Quand nous étions rentrés, en transplanant, cet état d'esprit un peu mélancolique s'était sûrement communiqué à Ruby que j'avais tenue serrée contre moi, car la conversation en vint à mes parents, leur séparation qu'ils ne voulaient pas nommer, les réactions de mon père et le déni de ma mère qui ne voulait surtout pas perdre la face devant les autres. J'étais touché que Ruby montre autant d'intérêt à ces histoire qui étaient les miennes, même si je refusais de m’apitoyer car je ne pouvais pas m'empêcher de penser : elle avait eu bien pire. Quand fatalement, j'évoquai Jamie, le cratère brûlant et qui ne cessait de s'accroître que sa mort avait causé à ma famille, je finis comme toujours par me sentir amer, vaguement en colère, vaguement triste, et surtout las.

Le lendemain, il me fut particulièrement difficile de me concentrer chez l'Apothicaire, non seulement parce que j'avais hâte que la journée se termine pour retrouver Ruby, mais en plus parce qu'elle avait eu la bonne idée, pour tromper mon attente, de passer me voir, au cours de son jogging. Sa longue silhouette moulée dans ses habits de sport et une que de cheval se balançant entre ses épaules - vision qui m'empêcha totalement de me concentrer un tant soit peu pour le reste de la journée. Je rangeai les yeux de scarabées à la place des foies de rat, la bile de tatou dans le rayon des nettoyants pour chaudron, et quand vint l'heure de la fermeture, Joseph s'épargna ma négligence maladroite et me laissa rentrer chez moi, s'occupant tout seul de fermer la boutique.

Car ce soir était particulier : j'avais invité Ruby au restaurant, indifférent à ses protestations, et prétextant en riant que nous n'avions pas fait les choses formellement, et qu'il fallait que nous ayons ce genre de rendez-vous. Non seulement j'avais envie de lui faire découvrir ce bon restaurant de Pré-au-Lard que je savais qu'elle apprécierait, mais en plus... Une part de moi, la plus fière, était absolument ravie de sortir à son bras, de l'emmener quelque part où nous serions reconnues comme si nous étions bel et bien un couple. En rentrant, je pressai le pas, songeant que ce devait être ça le sentiment d'avoir une maison, d'être pressé d'y rentrer. Depuis Jamie, il me semblait que je ne me rappelais plus ce qu'était une famille - puisque la mienne se désarticulait - mais plus j'y réfléchissais, plus je doutas que, quelque part, cela existe vraiment. En regardant autour de moi, j'étais incapable de citer une seule personne qui avait une famille heureuse. Sans doute que Phil partageait cela avec moi et que cela nous rapprochait, cette famille qui existait sans être effective. Mais ce soir, j'avais hâte et soudain chez moi prenait une toute autre dimension. Ruby y était : qu'avais-je besoin de plus ?

Quand je rentrais, elle m'attendait, avec son sourire étincelant... et une tenue qui, une fois n'est pas coutume, provoqua de petits frissons dans mon ventre et le long de ma colonne vertébrale. Blanche, elle lui mettait la taille et ses longues jambes en valeur, et quand je posai ma veste sur le canapé pour m'en débarrasser, mes mains entourèrent possessivement la taille de Ruby et je l'embrassai, déposant un premier baiser sur ses lèvres puis mêlant mon souffle au sien, tentant d'évacuer un tant soit peu la frustration accumulée au long de cette journée.


- La journée a été trop longue et tu es trop belle, râlai-je dans le creux de son oreille, avant de glisser ma main le long de son bras et de le lâcher, à contrecœur. J'arrive, m'excusai-je, et je partis dans ma chambre dans le but de me changer et de quitter mes habits dans lesquels j'avais travaillé toute la journée. J'enfilai le pull beige que Ruby m'avait offert, me recoiffait rapidement puis la rejoignis. Elle était en train de nourrir les deux hiboux - le petit avait sa nouvelle cage dorée que nous étions aller acheter ensemble, afin que Ruby puisse l'emmener avec elle à Poudlard. En les regardant et en souriant, un instant, je sentis que j'étais fatigué et que c'était présumer de mes forces que de croire que ma blessure à la poitrine allait me laisser en paix, mais je ne dis rien, car pour rien au monde je n'aurais annulé cette soirée. Ruby, qui s'était coiffée et maquillée pour l'occasion, était si belle, si simplement belle, que j'ignorais franchement comment j'avais pu espérer une seconde lui résister. Au moment de partir, elle s'arrêta dans l'entrée mettre du rouge à lèvres d'une couleur clair sur ses lèvres entrouvertes, et il me fallut toute la volonté du monde pour m'arracher à la contemplation de ce spectacle particulièrement... éprouvant.

Dans la rue, alors que le soir tombait et que le soleil disparaissait derrière les toits de Pré-au-Lard, j'enroulai mon bras autour de la taille de Ruby et posai ma main sur sa hanche, qui ondulait souplement au rythme de la marche. Jamais mon cœur ne m'avait paru aussi gros et sur le point d'exploser, mais je m'efforçai de garder les idées claires en la questionnant sur sa journée et en lui racontant la mienne. Finalement, la porte du restaurant s'ouvrit à notre approche, et nous laissa entrer là où j'avais réservé une table. Elle était dans un coin de la salle, à droite, juste assez bien illuminée par des petites bougies magiques dont la flamme variait du doré à l'argenté, mais juste assez à l'abri des regards pour que nous soyons tranquilles. Passant devant Ruby, je fis exprès de lui tirer la chaise, puis d'attendre qu'elle se retourne pour lui enlever sa veste, en bon garçon de bonne famille (old sport) que j'étais, et dont les gens qui me connaissaient s'amusaient.

- Mademoiselle, la priai-je s’asseoir avec un petit sourire aux lèvres.

Il se figea instantanément, et mon regard fut comme aimanté par ce que la veste avait découvert : la robe de Ruby était ouverte dans le dos, et si rien que la cambrure de celui-ici m'était indécemment supportable, la naissance de sa chute de reins, encore moins. Je ravalai ma salive et retins mes mains de se précipiter sur la peau que je devinais douce, allant m’asseoir en face d'elle. La serveuse, visiblement décidée à bien s'occuper de nous, nous couvrit d'attentions et de grands sourires, et lorsqu'après que nous ayons commandé elle proposa la carte des boissons, je refusai gentiment mais nettement. Une fois qu'elle partit, j'attrapais doucement la main de Ruby, sur la table. Mon regard ne la quittait pas. Oui : bien sûr, j'y avais pensé. Mais nous étions deux, et elle ne devait rien craindre - je savais qu'elle était capable de se battre comme elle l'avait fait jusque là. Ce n'était pas simplement la lumière vacillante des étoiles qui brillait au fond de ses yeux, trop faible et lointaine pour illuminer la terre ; c'était toute la puissance d'une galaxie bien décidée à rester entière, à ne pas imploser et disparaître. Je savais qu'elle avait cette force-là ; que parce qu'on l'avait abîmée, elle s'abîmait avec de l'alcool par un obscur réflexe de défense, mais que sa volonté était infaillible. Ne serait-ce que pour elle, je savais aussi qu'elle le faisait pour Lizlor, pour les gens qu'elle aimait. Et c'était ce qui la rendait si admirable, à mes yeux.

Hélas, la serveuse, décidément très investie, en plus de s'assurer dès qu'elle le pouvait que tout allait bien, nous offrit à la fin du repas deux coupes de champagne d'un air entendu, et me glissa l'addition après une légère pression de sa main sur mon épaule. Plutôt mal à l'aise, je ne le montrais pas, la remerciais poliment, mais fis disparaître d'un coup de baguette magique le contenu des deux flûtes. Toutes mes préoccupations étaient dirigées vers Ruby, dont le regard subitement fixe m'avait un peu inquiété. Comme je ne voulais pas que notre premier dîner au restaurant tourne à la catastrophe, je fis signe qu'il était temps d'y aller, lui présentai sa veste, réglai la note, et déjà nous étions dehors. Cette fois, la nuit était tombée et nous marchions à la lueur des réverbères - j'avais entouré ses épaules de mon bras, la serrant tout contre moi, j'avais l'impression qu'elle tremblait un peu - et en marchant, je ne cessais de lui embrasser les cheveux, la tête, tout en lui murmurant des paroles que je voulais réconfortantes, des anectotes, tout et rien, mais juste pour lui changer les idées. En bas de chez moi, je m'arrêtai pour l'embrasser, et mes lèvres descendirent dans son cou et vers ses épaules, mais nos gestes étaient plus tremblants que d'habitude - le froid, son anxiété qui déclenchait la mienne ? Le mieux était de monter... Dans l'escalier, je me fis la réflexion que je craignais quelque chose sans savoir quoi exactement, et que je me sentais bien moins apte à combattre.


- Donne-moi ta veste, la priai-je avec un sourire rassurant, alors que j'allais l'accrocher dans l'entrée.

Mais une fois revenu dans le salon, Ruby s'était entourée d'un fracas de portes que l'on ouvre et que l'on ferme, parce qu'on cherche quelque chose. Il ne me fallut pas une seconde pour trouver quoi. Quelque chose s'affola en moi - et si c'était dangereux pour elle, et si la crise était forte, et si il lui arrivait quelque chose que je n'étais pas en mesure de soigner ?! Mais il ne fallait pas que je panique ainsi. Je respirai profondément, et allai vers elle, dont les gestes étaient de plus en plus agacés, puis posai mes mains sur ses épaules pour la calmer.


- Ma Ruby, tu sais bien qu'il n'y a pas ce que tu cherches ici, dis-je doucement mais fermement. C'était faux : j'avais encore quelques bouteilles de Pur-Feu, mais scellées avec un sortilège. Elle ne les trouverait pas. Calme-toi, s'il te plait. Assieds-toi. Sur ses épaules, mes mains se déplaçaient doucement, pour essayer de la détendre.

J'étais prêt à tout : à la voir crier, pleurer, me repousser, parce que ce n'était pas de moi dont elle avait besoin en cet instant précis. A tout... Pourtant, cette lueur de détresse qui se logeait au fond de son regard différent de d'habitude me fit l'effet d'un coup de poing. Ce n'était pas elle... Ou plutôt c'était elle, en pleine proie à ses démons, et je me rendis compte qu'ils me tétanisaient sans doute autant qu'elle. En cet instant, j'avais peur, simplement peur, qu'elle m'échappe et se brise entre mes doigts comme du verre trop fragile.
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Ruby Standiford-Wayland


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Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Empty
MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeSam 17 Aoû - 21:36



"No home, I don't want shelter
No calm, nothing to keep me from the storm
And you can't hold me down
'Cause I belong to the hurricane
It's gonna blow this all away."




Pourquoi, alors que cette journée devait être parfaite, n’arrivais-je pas à sentir la quiétude qui aurait dû m’envahir ? Tout allait bien, me répétai-je, tout allait bien. C’était un mensonge, je le savais, mais je voulais y croire de tout mon cœur.

Cœur qui battait pourtant paisiblement depuis le début de la semaine, depuis que j’étais chez Ewan. Les premiers jours avaient peu à peu estompés mes peurs quant aux blessures, mais j’avais tenu à m’en occuper avec rigueur. Comme il avait repris des forces, Ewan m’avait conseillé sur quelques bons ingrédients pour des antidotes efficaces, et j’étais ravie de voir petit à petit les plaies se refermer. Comme je craignais qu’elles s’infectent ou simplement le fassent souffrir, j’avais bataillé chaque jour pour qu’il bouge le moins possible. Ça avait été plus facile au début, puisque chaque mouvement lui arrachait une exclamation de douleur – bien qu’étonnement, ou non d’ailleurs, il était bien plus résistant lorsqu’il s’agissait de nos étreintes – mais dès le mercredi, j’avais dû m’opposer fermement à lui. Je ne cessais de répéter que non, ça ne me dérangeait pas de cuisiner, de nettoyer et de m’occuper de tout. Mais autant Ewan était flexible sur de nombreux points, autant il ne se laissait pas faire de ce côté-là – je soupçonnais son éducation et son affection pour moi de le pousser à agir ainsi.

C’est probablement pour me remercier qu’il avait tenu à me traiter comme une princesse le jeudi, alors qu’il se sentait nettement mieux. J’avais râlé pour la forme, mais au final, ce n’était pas si désagréable que ça. De toute manière, depuis que j’étais ici, rien n’était désagréable. Rien n’était plus doux que de me réveiller aux côtés d’Ewan, d’entendre sa respiration comme une berceuse pour m’endormir et de toujours sentir on sourire en miroir au mien. Nous étions biens, simplement biens, allongés l’un contre l’autre à discuter, à rêvasser, à lire ou même à rester là, en silence, nos doigts jouant les uns avec les autres. Je me sentais comme dans un cocon, et chaque instant s’imprimait en moi un peu plus fortement que le précédent. C’était comme si tout ce que je ressentais pour Ewan s’intensifiait et devenait de plus en plus fort, permanent, et qu’il n’y avait aucun doute. Les sentiments prenaient racine en moi, s’ancraient au plus profond, là où je n’avais jamais imaginé amené quelqu’un. Quand je regardais Ewan, je me demandais s’il en était de même pour lui. Depuis que j’avais lu dans le carnet de son frère quelques éléments sur les anciennes filles qu’il avait fréquentées, de nombreuses questions brûlaient mes lèvres. Je savais, bien entendu, que je n’étais pas la première, mais étais-je au moins différente des autres ? Je trouvais mes réflexions bien égoïstes, puisque maintenant nous étions ensembles, je n’avais pas à craindre le passé. Qui plus est, j’avais également eu Hadrian, mais ça n’avait à voir avec que ce que je ressentais aujourd’hui… Mais j’étais hypocrite, comment pouvais-je demander à Ewan si j’étais unique alors que j’étais moi-même incapable de lui dire que je l’aimais ! A mes yeux, je ne méritais pas vraiment d’être différente des autres.

Pourtant, Ewan me faisait sentir différente, et le jeudi ne fut pas une exception. Nous fîmes une promenade par-delà Pré-au-Lard, et même si je n’étais pas sûre qu’Ewan m’écoute totalement lorsque je lui parlais de l’ouvrage sur la flore écossaise que j’avais lu récemment, je m’amusais comme une enfant à ramasser des fleurs sauvages ou à lécher ma moustache de mousse que me faisait le chocolat chaud que nous avions bu. Nous poussâmes la balade jusqu’à un lac à l’onde incroyablement pure. Je me figeais un peu, consciente que l’eau n’était pas l’élément favori d’Ewan, mais il m’indiqua qu’il voulait que nous pique-niquions là. Impatiente, je pressai le pas et, sous le regard inquiet de mon petit-ami, je m’approchai de l’eau pour y glisser mes doigts. Je pouvais voir mon reflet, et je tapotai la surface en riant avant de revenir vers Ewan pour lui envoyer quelques gouttes en agitant mes mains, pour le taquiner. J’étais étrangement euphorique – était-ce un effet secondaire de l’amour, ça c’était fort probable. Lorsque nous nous serrâmes sur la couverture, j’étais baignée du sentiment le plus doux qui soit, et cette tendresse sembla envahir Ewan qui petit à petit s’ouvrir, et nos sujets de conversation devinrent plus sérieux. J’étais triste qu’il le soit, mais j’étais également animée d’une force nouvelle qui voulait me convaincre que je pouvais l’aider. Avant de nous endormir, j’embrassai tout doucement son visage, ses lèvres, ses paupières, sa mâchoire, avant de glisser mon visage dans le creux de son cou en murmurant un dernier « bonne nuit » d’une voix tendre.

Alors comment, alors que j’avais été si légère la veille, pouvais-je sentir un tel poids dans ma poitrine le lendemain ?

Je le sentis dès qu’Ewan partit travailler. Alors que j’avais aimé traîner au lit les jours précédents, encore un peu endormie, ce matin je m’étais réveillée brusquement, et je pris le petit-déjeuner avec Ewan, légèrement tendue. Je fis bonne figure, je l’embrassai amoureusement avant qu’il parte, lui murmurant un « fais attention à toi » qui se voulait détaché. Après lui avoir envoyé un baiser par la fenêtre, je me laissai tomber dans le lit, me recroquevillant sur moi-même. Les craintes qui m’habitaient provenaient d’un cauchemar que j’avais fait la nuit dernière où Ewan se faisait à nouveau agresser, et j’avais compris en me levant que hors de l’appartement, sans moi, il n’avait pas de protection – je voulais croire que je pouvais le garder à l’abri quand j’étais avec lui. Mais je compris bien vite que l’inverse était vrai aussi : sans lui, je ne me sentais pas en sécurité. De fil en aiguille, plus je me roulais en boule dans ce lit décidemment trop vide, plus mes peurs et mes faiblesses refaisaient surface. Je fermais les yeux, fort, plus fort, espérant chasser ce que je ressentais. Un instant, j’hésitai à envoyer une lettre à Lizlor – qui était d’ailleurs venu diner le mercredi soir – mais je me rassurais en me disant que ça allait passer. Mais durant le déjeuner, alors que je mangeais rapidement une omelette, le nez dans mon livre, mes yeux furent attirés par le placard en dessous de levier. Je savais ce qu’il contenait – ce que je voulais, ce dont j’avais besoin.

Consciencieusement, je ne pris aucun argent. Je fuyais, tout simplement : d’un côté, je quittais l’appartement qui renfermait ce que je désirais, de l’autre, je ne me donnais pas les moyens d’en avoir à l’extérieur. J’eus tout de même un sourire lorsque je sortis de ma veste les clefs. Ewan m’en avait donné un double mardi, en me disant que j’en aurais probablement besoin, et puis qu’avec les incidents de la veille, ce n’était pas de trop que j’ai moi-même ma clef. Je ne savais pas si c’était… Une excuse pour me les donner, je ne cessais de me répéter que ce n’était que des clefs, mais je ne pouvais pas m’empêcher d’y associer tellement de sens… J’eus un bref sourire en quittant l’appartement, une voix me murmurant qu’Ewan avait confiance en moi, et cela me suffisait à tenir un peu plus longtemps.

Le rire de Lizlor, nos cigarettes, nos discussions, tout cela suffit à me remettre sur pieds pendant quelques heures. Je tentais d’abord de cacher mon mal-être, mais bien vite, je compris que j’avais besoin de parler de tout ce qui m’habitait. J’avais toujours du mal à admettre le manque, mais je devais me résoudre à l’évidence, et me confier à ma meilleure amie était une manière de mettre un frein à mon envie, puisque je voyais dans son regard à quel point elle s’inquiétait et croyait en moi. J’évoquais également mon inquiétude pour Ewan et, d’une voix un peu plus basse et gênée encore, mon désir grandissant que je n’arrivais pas à accepter, cette peur tenace de mal faire qui s’accrochait à moi et m’empêchait d’agir comme je l’aurais voulu. Lizlor me conseilla, comme toujours, me rassurant et me rappelant qu’il ne servait à rien de se précipiter, et que je devais apprendre à croire en moi. Vous vous aimez, dit-elle, alors comment cela pourrait-il mal se passer ? Je méditais ces quelques mots quand nous nous quittâmes, rentrant d’un pas traînant à l’appartement. Lorsque je parlais de mes problèmes avec ma Gryffondor, elle était comme une protection, et une fois seule, je réalisais une nouvelle fois à quel point je ne me sentais pas bien, comme si un trop-plein d’émotions appuyait sur ma poitrine. La vérité, elle était simple, je voulais Ewan, je voulais ses bras protecteurs et son sourire aimant, rien que pour débarrasser mon esprit de mes pensées noires.

Pour me le vider alternativement, je décidais d’aller courir – pour fuir une nouvelle fois l’appartement, d’une certaine manière. Je ne résistais pas à la tentation, et passai voir Ewan chez l’Apothicaire. Lorsqu’il me demanda si tout allait bien, je manquai de lui dire que non, que je voulais rester avec lui à la boutique, que je ne voulais pas être toute seule, mais je me taisais, consciente qu’il se serait senti impuissant. Il devait travailler, je devais le laisser se concentrer, et je quittai la boutique partagé entre le bonheur que me provoquaient ses baisers et notre soirée qui se profilait, et le nuage noir qui flottait au-dessus de ma tête. Je courus longtemps, jusqu’à sentir la fatigue m’envahir, jusqu’à que mon corps me supplie d’arrêter, que mes jambes me tirent et que mon souffle s’agite. Je rentrais alors, l’esprit un peu plus clair puisqu’endormi par la fatigue, et me glissai directement dans la salle de bain pour me préparer.

Ce soir était spécial, et je voulais m’en réjouir, car Ewan m’avait invité au restaurant. J’avais râlé, parce que je ne voulais pas qu’il dépense de l’argent, que je savais précieux, pour moi, mais je n’avais visiblement pas trop le choix. Qui plus est, j’avais glissé de manière innocente que vendredi marquerait officiellement les deux premiers mois de notre relation… Et j’avais été surprise, réellement surprise, de voir qu’Ewan s’en rappelait tout aussi bien que moi. Visiblement, une nouvelle fois, nous avions cru penser chacun quelque chose d’un peu étrange car trop romantique peut-être, sans songer que l’autre y pensait aussi. Cette constatation me fit sourire, et je me préparais avec plus d’entrain, oubliant momentanément les peurs qui m’avaient habité aujourd’hui. J’avais une robe que j’avais trouvé en soldes au début des vacances, à Londres, et que j’avais réellement hésité à prendre avant de finalement me décider. Elle était blanche, éclatante et pure, et sa principale caractéristique était le dos nu qui laissait voir ma peau et le début de ma chute de rein. Je la trouvais un peu osée, mais quelque chose me disait qu’Ewan la trouverait belle, et rien ne me faisait plus plaisir qu’il soit fier de m’avoir à son bras. De toute manière, elle n’était que pour lui, et je ne voulais que personne d’autre ne me regarde.

Lorsqu’il rentra, je sus que j’avais gagné – et encore, ma veste couvrait le tout. Il m’adressa un sourire presque admiratif, et je baissai les yeux, un peu gênée, comme si j’avais peur d’en avoir fait trop. Mais quand il me prit par la taille et m’attira contre lui, je me sentis sourire et je lui rendis son baiser avec la même force, simplement heureuse d’être de nouveau avec lui là où rien ne pouvait m’arriver.


- La journée a été trop longue et tu es trop belle.
- Merci,
murmurai-je en rougissant, contenant à peine mon sourire.
- J'arrive, ajouta-t-il avec un air d’excuse.

J’hochai la tête, et nourris les hiboux en attendant qu’Ewan revienne. Il s’était changé et avait le pull beige que je lui avais acheté, qui lui allait d’ailleurs parfaitement, et j’eus un immense sourire. Je ne pus m’empêcher de l’embrasser avant de partir, un éclat de rire au coin de mes lèvres, et c’était comme si soudain plus rien ne me faisait peur. En sortant, je marchais le cœur léger, le bras autour de la taille d’Ewan, et je l’écoutais parler de sa journée tandis que je mentais un peu sur la mienne – j’avais vu Lizlor, oui, c’était superbe et tout allait très bien. Je mentais, mais il était hors de question que j’admette qu’en ce jour ci-particulier, quelque chose me pesait. Je souriais paisiblement, me rassurant en me disant que la soirée rattraperait le reste. Le restaurant avait une atmosphère chaleureuse et intime et… Et j’entendais des verres qui tintaient, mais je clignais plusieurs fois des yeux, me concentrant sur le sourire d’Ewan qui me mena jusqu’à notre table.


- Mademoiselle, me pria-t-il en me tirant la chaise et en m’ôtant ma veste, et j’eus un petit rire – rien ne m’amusait plus que de le voir jouer au garçon bien élevé. Pas tant que ça d’ailleurs, car il ne m’échappa pas qu’il eut un sourire un peu plus crispé lorsque je découvris mon dos nu, et je souris, satisfaite mais un peu intimidée.

Mais les choses s’envenimèrent dès que la serveuse surgit. Elle me lança un bref regard, et un très long et appuyé à Ewan, et un immense sourire. Je connaissais ce regard et je compris rapidement le message : elle le trouvait attirant. Je me raidis sur ma chaise, et commandai comme si de rien n’était. Probablement avait-elle été un peu surprise de son charme, et je ne pouvais que la comprendre, et elle n’insisterait pas durant le repas. Mais décidemment, le sort s’acharnait, et elle proposa avec un air innocent la carte des boissons – je m’immobilisai, incapable de répondre. Ewan s’en chargea, refusant poliment, et lorsque la serveuse partit, il prit doucement ma main. Je détournai le regard, mais nouai nos doigts un peu plus fortement, respirant calmement et régulièrement. Mais le reste du repas ne m’aida en rien : la serveuse continuait de sourire à Ewan, lui demandant toujours s’il avait apprécié le repas, sans même me regarder si je daignais répondre. Elle glissa même un sous-entendu, et je dus réellement me contenir pour ne pas la frapper et éclater en sanglot à la fois. Ne me voyait-elle pas ? Etais-je si insignifiante ? Et Ewan qui riait et souriait... Ne se rendait-il pas compte ? Ou alors… Est-ce qu’elle lui plaisait ?

Et puis… Les deux coupes de champagne.

Je ne sais pas ce qui provoqua le plus grand tremblement en moi : la main de cette serveuse sur l’épaule d’Ewan, les petits bulles dorées qui explosaient à la surface du liquide brillant, l’air profondément gêné d’Ewan, l’odeur de l’alcool qui vint se faufiler jusqu’à moi, le sourire horrible de la jeune femme – tout, tout se bousculait en moi et me rendait malade. Je n’arrivais même pas à prétendre ne pas fixer les deux coupes. Tout mon intérieur rugissait, et je nouais sous la table mes mains pour les empêcher de trembler. J’avais tout à coup très chaud, et très froid à la fois, et la nausée, tout tambourinait et lorsqu’Ewan fit disparaitre le contenu des coupes, je manquai d’exploser. Je me levai comme une automate, et sorti dehors, laissant mon esprit flotter dans le restaurant, au-dessus des deux coupes que j’aurais voulu vider. Ewan glissa son bras autour de mes épaules, mais je ne sentis pas la chaleur de son étreinte, ni les frissons de ses baisers ou la douceur de sa voix. Il me semblait qu’il me parlait, mais je n’entendais pas, captant quelques bribes qui sonnaient étrangères. Je ne pensais plus qu’à une chose, à l’envie qui grandissait en moi et me dévorait, au regard de cette serveuse, à ma stupide robe trop blanche et trop étriquée, comme si j’avais eu la prétention d’être jolie et attirante, je me sentais tellement bête, et puis pourquoi est-ce que je n’avais pas pu boire juste cette coupe, juste une…

Ewan m’embrassa doucement lorsque nous arrivâmes en bas de chez lui, mais je répondis à peine à son étreinte qui ne me provoquait rien. Je ne sentais plus rien à part l’horrible déchirement à l’intérieur, le manque qui avalait le reste, et je voyais bien qu’Ewan aussi était mal à l’aise, je savais ce qu’il pensait, il se demandait ce qu’il fichait là alors qu’il aurait pu être en train de discuter avec la serveuse, rire, être avec quelqu’un de normal et d’amusant, pas avec moi. Pourquoi se donnait-il même la peine de prétendre le contraire ? Je montai les escaliers rapidement, l’esprit préoccupé et concentré sur une unique chose. Dès que nous fûmes rentré, il me sembla qu’Ewan murmura quelque chose, mais je n’entendis pas et alors qu’il retourna dans l’entrée, j’y vis l’occasion rêvée : une seconde plus tard, j’étais dans la cuisine.

Où étaient-elles ? Pourquoi est-ce qu’elles n’étaient plus là ?! Je me crispai, et sentis la colère m’envahir. J’ouvris plusieurs placards, cherchant, sans rien trouver et bientôt je constatai que non seulement mes mains tremblaient, mais aussi tout mon corps.


- Ma Ruby. Je sursautai et me retournai légèrement. Dos à moi, Ewan était là, et je compris avec quelques secondes de retard que ses mains étaient sur mes épaules. Je clignais des yeux rapidement, fronçant les sourcils, le cœur tambourinant. Ma Ruby ? Sa Ruby ? Je n’étais pas à lui, depuis quand, alors qu’il souriait à l’autre il n’y a pas une demi-heure de ça, et je ne voulais pas être à lui, parce que si j’étais à lui, alors il avait de l’emprise sur moi, et je dépendais de lui, et je lui devais quelque chose, je ne voulais pas, je voulais simplement boire, pourquoi n’avais-je pas le droit ?! Tu sais bien qu'il n'y a pas ce que tu cherches ici. Calme-toi, s'il te plait. Assieds-toi.

Je le fixais, silencieuse et tremblante.

Il me mentait.

Je me dégageai de son emprise en le poussant, me tournant complétement vers lui et le regardant, le visage crispé par la colère. Il avait peur de moi, je le voyais, et en cet instant, je savais qu’il regrettait d’être avec moi.


- Où est-ce qu’elles sont ? Demandai-je d’une voix calme mais froide. Je les ai vu lundi soir, je les ai vu, répétai-je, avant de me retourner vers les placards et de me remettre à fouiller. Mais où étaient-elles ? Je poussai une exclamation de frustration et de colère, et d’un geste fébrile, je poussai des pots en verre et l’un tomba sur le sol, s’explosant et provoquant un fracas désagréable. Je poussai une injure et me tournai violemment vers Ewan, le fusillant du regard. Pourquoi je ne peux pas avoir juste un verre ?! J’en ai besoin.

Et il ne comprenait pas, personne ne comprenait ! Pourquoi pensaient-ils tous que ça me faisait du mal, c’était le contraire, j’avais besoin de boire pour me sentir mieux, pour m’abandonner un peu, ce n’était pas ma faute si j’avais autant qui me pesait et je voulais m’alléger, ce n’était pas grave, c’était même bénéfique, pourquoi personne ne le comprenait ?! Je passai ma main tremblante sur mon visage, respirant, tentant de reprendre mon calme. Si je m’expliquais calmement, il comprendrait, il me laisserait boire, puisque j’en avais besoin.

- J’en ai besoin, répétai-je d’une voix plus fébrile que je ne l’aurais voulu. Mais Ewan ne semblait pas prêt à céder, et bientôt les larmes qui se bloquaient dans ma gorge furent estompés par l’amertume qui m’habitait, la haine et la colère et surtout l’atroce douleur qui me brûlait de l’intérieur. J’avais la tête qui tournait, je voulais boire, juste boire… Tu ne comprends pas, tu ne me comprends pas, jamais, c’était un mensonge, un horrible mensonge, mais si j’étais odieuse, peut-être qu’il céderait, pourquoi tu ne veux pas comprendre que j’en ai besoin... Donne-moi juste un verre !

J’avais crié, comme pour expier toute la colère qui m’habitait, et soudain, je plaquai mes paumes sur la poitrine d’Ewan et je le poussai violemment, avançant en le menaçant du regard. Je ne contrôlais plus rien, j’en prenais conscience, et j’avais envie de crier, de le frapper, de le supplier, et bientôt mes mains se retrouvèrent à tambouriner contre son torse, poings fermés, comme pour évacuer ma frustration et pour me venger, le punir, parce que si j’avais mal alors lui aussi, ce n’était pas juste, pourquoi faisait-il ça ?!

- Ce n’est pas grave, juste un verre ! M’exclamai-je, et j’eus un rire étouffé – j’avais l’impression d’être dans des montagnes russes, passant par tous les stades possibles. Mes mains qui le frappaient s’ouvrirent et j’attrapai le col du pull pour attirer Ewan vers moi et contre toute attente, je l’embrassai. Pourquoi tu me fais ça ? Demandai-je d’une voix suppliante, avant de l’embrasser à nouveau, dans un geste un peu désespéré. Mais je voyais bien qu’il ne répondait pas comme je voulais, et puis je voulais boire, je ne savais même pas pourquoi je l’embrassai, je ne comprenais plus rien. Tu me fais du mal, ça me fait mal, je veux juste boire, promis après j’arrête, pourquoi tu me fais ça… Gémis-je, mes poings continuant à marteler son torse – mais je n’avais aucune force.

Je m’écartai brusquement de lui – je ne comprenais pas, pourquoi il faisait ça alors qu’il savait que j’en souffrais ?! Il ne m’aimait pas, je le voyais bien, ou alors il ne savait pas le faire, parce que tout ce dont j’avais besoin c’était boire, ce n’était pas difficile, pourquoi il me faisait ça ?!


- Je veux juste boire ! Criai-je à nouveau, et je le poussai, sentant en moi de nouveau une étrange force. Mais dans la bataille, je ne savais plus vraiment ce que je faisais, je m’accrochai à lui, je l’écartai, j’avais envie de le frapper et de l’embrasser, j’avais envie de pleurer et de rire, j’avais la nausée et tout m’échappait. Je te déteste ! Donne ! M’exclamai-je, les larmes aux yeux, dégoûtée de ma propre attitude. Pour me raccrocher à la réalité qui se tordait, j’embrassais Ewan avec fougue, et je le poussais toujours en laissant échapper des exclamations de colère. Je ne savais pas si j’en étais vraiment consciente, mais je nous amenais jusqu’à la chambre, et les connexions se firent étrangement dans mon esprit, mais j’avais envie de boire, j’avais envie d’Ewan, et je ne savais plus comment réagir à tout ce qui me traversait. Donne-moi juste un verre !

Mais il ne voulait pas, ou peut-être ne lui donnai-je pas vraiment la force de se dégager, je luttais contre ses mains qui voulaient attraper les miennes et probablement m’arrêter, et je le poussai une nouvelle fois violemment, cette fois-ci dans la chambre, et j’agrippai ses lèvres par surprise, le faisant basculer sur le lit. Je bloquai ses jambes entre les miennes, et tandis qu’il était allongé, j’attrapai ses poignets pour les plaquer sur le matelas et l’empêcher de bouger. Mais je n’avais pas assez de force, bien qu’une étrange me dévorait, le manque, et je savais qu’Ewan arriverait à m’écarter – or, tant que je n’avais pas eu ce que je voulais, pas question de le lâcher. Je l’embrassais, avec une passion comme j’en avais rarement, cherchant à anesthésier son esprit, mon corps se courbant contre le sien, quelques mèches de mon chignon caressant sa peau. Je descendis mes lèvres dans son cou, le mordillant, remontai le long de l’artère et embrassai son oreille.

- Juste un verre, murmurai-je, avant de l’embrasser une nouvelle fois avec fougue.

Mais comme il résistait, j’agis sans réfléchir – je n’en étais plus capable de toute manière. Mes mains qui tenaient fermement ses poignets attrapèrent les mains d’Ewan et je les plaquai sur ma poitrine, me penchant pour l’embrasser, l’empêchant de protester. Je tenais toujours ses mains contre mon corps, et mordillai sa lèvre inférieure dans un ultime baiser. Puis, comme j’espérais qu’il ne réponde plus vraiment de rien, et que d’ailleurs j’étais tout aussi chamboulée, je lâchai finalement ses mains et effleurai des miennes son entrejambe et fis glisser mes doigts sous son jean.

Je ne savais plus ce que je voulais, mais une chose était sûre : si je paraissais contrôler la situation, jamais je ne m’étais sentie aussi perdue qu’en cet instant.

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Ewan Campbell


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MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeMer 21 Aoû - 16:08

Je savais ce qui nous rassemblait, les fils étranges et discrets qui nous liaient l'un à l'autre, mais je savais aussi nos différences. Et jamais, en cet instant, je ne les avais plus clairement constatées. Il y avait un écart, un écart énorme, entre nos deux histoires, tous détails mis à part : j'avais grandi au sein d'une famille. Si particulière qu'elle soit, si détestable, à sa façon, et si aimante aussi, elle avait existé (pour ce qui était d'exister aujourd'hui, c'était une autre histoire - mais il y avait un côté temporaire à ce petit bémol, et je m'y raccrochais), elle m'avait élevée, obéissant à son rôle. Tout ce que je reprochais à mes parents était vrai, était concret, et pas seulement issu de ma propre imagination puisque Jaime le partageait, et que j'avais déjà eu quelques discussions avec Bonnie et Matthew (quoi que restreintes, car je concevais bien qu'ils ne voulaient pas critiquer ouvertement nos parents). Mais tout ce que je leur reprochais n'enlevait rien au fait que nous avions eu une enfance heureuse, que nous avions été choyés, que nous avions eu un toit, un foyer, que nous n'avions eu rien que notre insouciance et nos problèmes d'enfants en quête de liberté pour accompagner nos journées. Cela, je ne pouvais pas l'effacer de ma mémoire. Aussi forts qu'étaient à présent mes peines et mes tourments, je savais que ma force de les contrer venait aussi de là, de ces moments où j'avais pu être un enfant, un adolescent, sans l'ombre d'un soucis autrement plus important que celui de se rebeller contre l'autorité agaçante de ses parents. Ruby, elle... Ruby elle n'avait pas été cet enfant qui siégeait au fond de chacun d'entre nous, elle n'avait pas eu cette famille, pas forcément parfaite, car aucune ne l'était, mais qui était nécessaire pour la suite. N'était-ce pas ce qui m'avait frappé, quand j'avais appris à la connaître ? Cette lueur au fond de ses yeux, cette candeur parfois, dans ses sourires, dans ses gestes, dans ses paroles. Cette enfance à fleur de peau qui n'avait jamais eu l'occasion d'exister. Et cela me rendait triste, si triste... Si impuissant aussi : on ne peut rien au passé.

Alors, face à cette crise qui montait et semblait envahir tout mon petit appartement de son air malsain, en plus de la peur que je ressentais s'ajoutait un désarroi intense. Je ne savais pas gérer cela - que devais-je faire pour la calmer, pour lui ôter l'envie de boire ? Lui parler ? La laisser faire, « juste un peu » ? L'en empêcher par la force, la gronder ? L'ignorer ? Lui donner une potion, mais quoi, une potion pour la calmer, pour combler quoi ? Je ne savais même pas quelles zones le manque touchait, quels ingrédients étaient nécessaires pour ce cas particulier.

Quand elle se retourna, son regard me frappa une nouvelle fois. Il était froid et dur, si dur, je ne le reconnaissais pas, et il m'inquiétait autant qu'il m'effrayait.

- Où est-ce qu’elles sont ? Je les ai vu lundi soir, je les ai vu, elle s'était violemment dégagée de ma tentative et s'énervait un peu plus - son geste provoqua la chute de quelques pots en verre, dont le bruit résonna, désagréable, trop aigu, et me sembla traîner longtemps dans l'air, comme le sifflement vicieux d'un serpent. Pourquoi je ne peux pas avoir juste un verre ?! J’en ai besoin.

- Essaye de te calmer, la raisonnai-je d'une voix douce, mais mon cœur battait tellement fort dans ma poitrine qu'il m'assourdissait, mes tempes me cognaient, et ma gorge se serrait. J'avais peur.

Elle essayait sans doute de se calmer - elle passa une main sur son visage, mais ses longs doigts fins tremblaient nerveusement, et sa peau était pâle, trop blanche. J'amorçai un geste, mais elle l'évita, ré-attaquant de plus belle.


- J’en ai besoin. Tu ne comprends pas, tu ne me comprends pas, jamais, pourquoi tu ne veux pas comprendre que j’en ai besoin... Donne-moi juste un verre !

C'était la vérité : je ne comprenais pas. Je ne comprenais pas cette dépendance physique, ce soudain besoin de boire de l'alcool, alcool qui pour moi était une simple petite habitude, parfois, une boisson comme les autres que j'avais plaisir à boire pour l'apéritif, dans certaines occasions, avec des amis, au pub. Mais de là à perdre la raison pour un simple verre - non, je ne comprenais pas, et je ne comprendrais probablement jamais. Pourtant, c'était une simple constatation, mais lancée par les lèvres de Ruby, avec autant d'agressivité et de dédain, je pris cela comme une accusation et elle me fit du mal ; j'étais incapable de la comprendre et de comprendre son mal-être, comment pouvais-je prétendre l'aider à le surmonter ?! C'était pointer du doigt la vanité de tout ce que je pouvais essayer pour venir à son secours. Et cela n'arrangeait rien au désespoir qui s'était développé en moi.

- Non, je ne t'en donnerai pas, m'entendis-je dire fermement, mais rien en moi n'était aussi assuré que je le paraissais.

Poussant un peu plus loin la chose, Ruby s'était avancée vers moi et me sollicitait maintenant physiquement, par ses gestes, ses poings dirigés contre moi. Surpris d'abord, j'eus un léger pas en arrière alors qu'elle se mettait à me frapper, mais je tins bon, ne bougeai plus et la repoussai aussi doucement que je le pouvais, mais fermement. Je ne la quittai pas du regard - le sien papillonnait un peu partout, était trouble un instant, assassin la seconde d'après, vague ensuite, puis suppliant - mais le mien restait droit et ne cillait pas. J'étouffai simplement un cri de douleur, serrant les dents, quand elle tapa plusieurs fois à l'endroit de ma blessure, qui s'était refermée mais me provoquait toujours de temps en temps des douleurs lancinantes, particulièrement aiguës.


- Ce n’est pas grave, juste un verre ! Elle passait du rire aux larmes, et la seule chose que je pouvais faire était garder mes positions, lui faire face, lui parler, l'empêcher de perdre totalement pied. Pourquoi tu me fais ça ? Tu me fais du mal, ça me fait mal, je veux juste boire, promis après j’arrête, pourquoi tu me fais ça…

Je ne m'y étais pas attendu, à cela : elle m'avait embrassée, à deux reprises, avec une énergie qui n'était pas celle de d'habitude, et ses lèvres étaient à la fois possessives et tremblantes, comme si il en dépendait de sa vie de m'embrasser en cet instant. Fait étrange, j'aurais voulu lui rendre son baiser que je n'aurais pas pu, car tout mon corps s'était verrouillé à ce baiser : je savais ce qu'il représentait, il n'était pas un vrai baiser, il était non seulement le signe de sa panique, mais aussi un moyen de me faire flancher, auquel je n'allais pas céder. Mes lèvres restaient closes sous les assauts de Ruby - bien que, me prenant par surprise, elle avait réussi à rendre mon souffle court, à liées ses lèvres aux miennes plus que je ne l'aurais voulu. Quand elle écarta un peu son visage, je la regardai avec insistance : pourquoi tu fais ça ? Arrête tout de suite.

Je ne voulais pas lui faire du mal, pourtant...

- Tu sais très bien que ça n'arrangera rien, répondis-je d'une voix douce, comme si je parlais à une enfant. En même temps, j'essayais de bouger un peu vers le côté, de l'entraîner avec moi pour que nous nous retrouvions près du canapé et qu'elle s'asseye, ce qui apaiserait un tant soit peu son énervement ; pendant ce temps là je réfléchissais : quelle potion pouvais-je bien lui donner en attendant, rien que pour apaiser ses nerfs ? Et puis, pourquoi tout d'un coup, pourquoi cet état ? Les deux coupes de champagne avaient-elles suffi à provoquer ce cataclysme ?  

Mais, comme si elle avait compris, elle s'était écartée de moi, brusquement, reculant un peu aussi, annihilant mon petit stratagème. Déçu de moi, j'avançais à nouveau vers elle, m'écartant du canapé.


- Je veux juste boire ! ... Merlin, elle commençait à friser l'hystérie, il fallait vraiment que je fasse quelque chose. Je te déteste ! Donne ! Donne-moi juste un verre !

Quelles obscures raisons me poussèrent à me laisser faire, à la suivre vers la chambre alors qu'elle riait, pleurait, parlait fort, me poussait, me tirait par le col de mon pull, sans ménagements ? Je ne savais pas, mais tout allait trop vite, et je me retrouvai projeté contre le lit, Ruby grimpée sur mes genoux, en ce qui me parut l'espace d'un instant, ses mains plaquant les miennes contre le matelas, son corps au-dessus du mien, son odeur m'enveloppant tout entier, et mon souffle qui avait tout d'un coup perdu toute régularité. Mes lèvres entrouvertes ne lui résistèrent pas, et si tant est qu'il me restait une once de régularité dans les battements de mon cœur, dans les pulsations du sang dans mes veines, Ruby envoya tout valser d'un revers de main avec son baiser, et les gestes lascifs qu'elle avait - jamais elle ne m'était apparue si... pleine de désir, et je compris que c'était cela qui me tétanisait, qui m'empêchait de reprendre le dessus, de me rappeler à l'ordre : ce n'était pas elle, elle était en pleine crise de nerfs !

- Juste un verre, m'offrit-elle pour toute réponse à mon « arrête » balbutié comme je pouvais.

Elle n'arrêta pas, bien au contraire : subitement elle attrapa mes mains et les plaqua autoritairement sur sa poitrine. Bon. Ma gorge se serra d'avantage - et Ruby m'embrassait encore, mordillant mes lèvres, déclenchant des frissons dans tout mon corps, tandis que je sentais sous mes mains la rondeur délicieuse de ses formes. Il y avait tout au fond de moi comme le cœur d'un volcan, dont je devais retenir la chaleur, parce que ce n'était pas le jour, pas le moment ; quand Ruby eut la mauvaise idée de poser sa main sur mon pantalon et de la glisser ensuite entre ma ceinture et ma peau, ce fut comme un électrochoc - je sus que j'avais attendu trop longtemps.

D'un coup je me redressai, sans ménagements, dégageant mes mains et agrippant les siennes, que je croisai derrière son dos, sans les lâcher - par pitié, qu'elle arrête cette torture. J'avais le souffle court, mais je sentis que je la fusillai du regard, et que toute mon inquiétude et mon impuissance s'échappa de moi d'une manière que j'aurais souhaité éviter, pourtant :


- Maintenant, ça suffit, grondai-je, tu arrêtes ça et tu te calmes, à quoi tu joues ?!

Ma voix n'avait plus rien de rassurant et d’apaisant, elle était plus forte et tranchante, et soudain Ruby toujours sur mes genoux me paraissait une petite créature bien fragile - je ne voulais pas crier, pas lui faire peur d'avantage. Je m'obligeais à reprendre mon souffle, mes esprits, pendant quelques secondes. Je ne voulais pas empirer les choses : je ne voulais pas non plus céder à tout le désir qu'elle avait rendu bouillant en moi, ce qui me laissait plusieurs paramètres plus moins gérables à prendre en compte. Prudemment, je lâchai une de ses mains, prenant bien garde à ce qu'elle ne se dégage pas non plus, qu'elle ne s'enfuit pas je-ne-sais-où. Ma main libre vint se poser en coupe sur sa taille, l'incitant à se calmer, lui montrant que je ne voulais pas lui faire de mal, que j'étais désolé de m'énerver, de ne pas savoir comment réagir. Je regardai ses beaux yeux bleus, mis en valeur par le maquillage - le restaurant me paraissait si loin - y cherchant ces petites étoiles qui me guidaient dès que je me sentais perdu, mais elles étaient loin, clignotantes, toutes faibles, voilées par un rideau de larmes qui ne tardèrent pas à glisser sur les joues de Ruby. Je baissai les yeux, les fermai une seconde, avant d'embrasser son front.

- Pourquoi ? Qu'est-ce qui t'a donné envie de boire comme ça ? murmurai-je, caressant toujours sa taille du bout des doigts. Je suis désolé, le restaurant était peut-être une mauvaise idée...

Je m'en voulais à présent ; quelle idée. Un endroit où il était possible de boire, où il y avait des sollicitations... Si au moins j'avais prévenu la serveuse avant, peut-être que rien de tout cela ne serait pas arrivé... Ou bien était-ce autre chose, autre chose que Ruby ne me disait pas ? Je scrutais son regard, mais n'y trouvais aucune réponse. La proximité de son corps ne me facilitait pas la tâche - ainsi que tout ce qui venait de se passer, et je ne pouvais pas m'enlever de la tête son corps si joliment mis en valeur par sa robe, cette position qu'elle avait sur mes jambes, ses baisers passionnées et ces frissons qu'elle avait fait naître en embrassant mon cou, en essayant définitivement de me faire perdre la raison. Bien sûr que j'avais envie de faire l'amour à Ruby ; mais il y avait trop d'enjeux pour que je ne m'en préoccupe pas.

- Et puis, je veux que tu te sentes prête, que tu le veuilles autant que moi je te veux, murmurai-je dans son oreille, car je l'avais doucement attirée contre moi, pour la serrer dans mes bras, ma paume caressant son dos nu. Et ce n'est peut-être pas le meilleur moment, d'accord ? M'écartant un peu, je lui fis face et lui souris. Je ne veux pas que tu te sentes obligée.

Cette fois, je déposai un baiser, doucement, sur sa joue, à l'endroit de son petit grain de beauté, puis sur ses lèvres. Mon cœur tambourinait dans tout mon corps mais je tentais de ne pas y prendre garde.
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MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeSam 24 Aoû - 13:48

Il me semblait qu’Ewan me parlait, mais je n’entendais pas. Sa voix était lointaine, comme un bourdonnement et dès que j’essayais de me concentrer dessus, tout ce qui faisait rage en moi me sifflait dans les oreilles et faisait s’évanouir le reste. Est-ce qu’il essayait de m’aidait ? Non, répondit une voix dans ma tête. Mais ce n’était pas mon intonation habituelle, c’était bien plus autoritaire et quelque part légèrement démente, comme si je n’étais pas pleinement responsable de mes actes ou de mes pensées. Devais-je écouter cette partie de moi qui avait pris pleinement possession de mon corps? Celle dont les pensées se développaient jusqu’au bout de mes doigts noués en poings qui frappaient la personne dont j’étais amoureuse ? Mais il te fait mal, objecta la voix. Elle avait raison, compris-je alors. Pourquoi me faisait-il ça ? Je voulais simplement boire, il avait entre ses mains le pouvoir de soigner l’horrible douleur qui me ravageait en cet instant, mais il restait immobile et refusait de céder à mes demandes. Je ne comprenais simplement pas, tout tournait trop pour que je puisse calmement lui demander ses motivations, mais je n’arrêtais pas de penser qu’il y prenait du plaisir, je ne voyais pas d’autres solutions, pourquoi me faisait-il ça alors ? Il voulait que je sois mal, que je sois inférieure, qu’il puisse me contrôler ? Je ne voulais qu’il puisse contrôler ma douleur, j’en étais la seule détentrice, et je voulais le remède, pourquoi ne pouvais-je pas avoir un verre?!

Je ne savais pas exactement ce que j’essayais de faire, mais quand le poussai sur le lit, j’eus la sensation que pour un instant, je pourrais reprendre le dessus. Mes mains étaient passées des poings aux caresses, et j’exerçais de tout mon corps une pression sur celui d’Ewan, sentant une étrange adrénaline s’infiltrer en moi. Je pouvais tout faire basculer, moi aussi, et mes lèvres cherchaient avidement une prise, souriant presque fièrement de ce retournement de situation. Que voulais-je au fond ? Boire, boire, boire, martelait mon cerveau, et je tentais de l’écouter. Si je donnais ce qu’il voulait à Ewan, me donnerait-il ce dont j’avais besoin ? Je ne savais pas s’il craquerait, je ne savais pas comment faire, je ne cherchais plus à être logique, tout ce qui était désormais clair, c’était la légère pression de mes dents sur la peau d’Ewan, dans son cou, puis sa lèvre inférieur, et la manière dont mes mains se laissaient glisser sur son torse et plus bas encore. Il n’arrivait pas à garder son esprit clair, je le voyais bien, et bientôt je le sentis lorsque j’eus l’audace finale de lâcher ses mains que j’avais plaqué sur ma poitrine pour à mon tour toucher un endroit plus sensible, comme pour pousser la chose encore plus loin.

Un instant avant qu’Ewan ne se redresse, une pensée s’imprima clairement dans mon esprit : voulais-je réellement boire, et était-ce la véritable cause de mes agissements ?

Il se dégagea de mon emprise, et je laissai échapper une exclamation de colère – non, que faisait-il, je voulais boire, et ce que j’allais faire, n’était-ce pas ce qu’il voulait lui ? Je tentais de me débattre un instant, mais il avait évidemment un avantage physique et mon état me laissait finalement bien plus vulnérable que je ne l’aurais voulu. Je m’agitais un instant, mais il plaqua mes mains derrière mon dos en les tenant fermement, m’empêchant toute protestation. J’expiai un « lâche-moi » dans un murmure qu’il n’entendit peut-être pas. J’avais l’impression d’être en cage, et je voulais soudainement pleurer parce qu’il ne comprenait rien, j’avais mal, il me tenait trop fort et tout ce que je demandais, c’était un verre ; pourquoi étais-je désormais prise au piège ?


- Maintenant, ça suffit. Je sursautai et relevai la tête. Je ne connaissais pas cette voix, cette intonation, je ne l’avais jamais entendu et encore moins envers moi. Je restai incrédule, muette, mais soudain, c’était comme si tout le monde s’était échoué contre moi violemment. Quelque chose s’imbriqua dans mon cerveau, et j’eus l’impression qu’on avait tout retourné autour de moi, passant mes émotions d’un extrême à l’autre. Tu arrêtes ça et tu te calmes, à quoi tu joues ?!

Je sentis un hoquet en moi, et je clignai plusieurs fois des yeux. J’eus la sensation que ma vision se réajustait, et petit à petit, plusieurs détails apparurent dans mon esprit. Ma position sur Ewan, le goût qui trônait encore sur mes lèvres, celui de sa peau, ma respiration haletante, la sienne qui n’avait pas l’air de mieux s’en tirer, mais surtout, son regard brutal et accusateur. Mais je savais d’où il venait. Ewan ne me regardait pas comme d’habitude car je n’étais pas comme d’habitude. Les quelques minutes précédentes me revinrent violemment en mémoire et tout à coup, chaque mot que j’avais dit, chaque geste, je me sentis tellement immonde que les larmes s’écroulèrent sur mes joues en un instant. Mais qu’avais-je fais ? Ma tête tournait, ressassant tout ce que j’avais osé dire pour boire. Ce qui me faisait le plus peur, sûrement, c’était ce que j’avais pensé en cet instant, la manière dont j’avais été persuadé que j’en avais besoin, que ça me ferait du bien. Je savais que c’était mal, bien sûr, alors comment avais-je pu basculer ainsi ? C’était comme si je n’étais plus maîtresse de moi-même, et je détestais ça, pire encore, ça me faisait peur. Qu’aurais-je pu faire ? Et si Ewan n’avait pas tenu ? Et qu’avait-il pu penser de moi ainsi, mais…

Qui étais-je, quand j’étais en manque ?


- Pourquoi ? Qu'est-ce qui t'a donné envie de boire comme ça ? Je suis désolé, le restaurant était peut-être une mauvaise idée...

Je n’arrivais pas à y voir clair. De sa main, Ewan caressait ma taille, et il avait embrassé mon front, sa voix se radoucissant en un instant. Je sentis que je m’étais mise à trembler, et je fus incapable de soutenir son regard : j’enfouis mon visage dans mes mains, sentant les sanglots me prendre et m’agiter, mais je tentais de lutter. Je ne voulais pas pleurer, pas maintenant que j’avais déjà tout gâché. Je détestais cette sensation, celle d’à nouveau être consciente de la réalité après un état de crise passagère. Je me rappelais encore de celles que j’avais eues durant mon enfance, lorsque je criais, que je frappais les murs, que je cassais les choses autour de moi. C’était exactement le même sentiment, comme si un monstre dans mon estomac s’était réveillé et me dévorait entière, dictant mes gestes et mes paroles. Et c’était toujours pareil, il me donnait l’impression qu’autour de moi, on me voulait du mal, mais j’avais fini par comprendre que c’était le contraire : je me voulais du mal. Ce soir était un exemple de plus, comment avais-je pu me laisser ainsi faire par le manque ? Cela faisait si longtemps que je m’accrochais pourtant…

J’avais passé un stade depuis que j’avais cessé de boire. La mélodie dans ma tête, comme j’aimais l’appeler, s’était petit à petit calmée et les symptômes physiques s’étaient atténués, n’étant plus que passagers. Mais de tous les instants que j’avais vécu où le manque m’avait saisi, je ne me rappelais jamais d’avoir perdu mes moyens à ce point. J’en étais malade, en y pensant. Sûrement était-ce que je n’avais pas été devant quelqu’un d’autre, encore moins quelqu’un qui avait la possibilité de me donner à boire… Et il avait fallu que ça soit devant Ewan que j’ai une telle réaction, que je sois aussi stupide. Quand il m’attira contre lui, je voulus protester, mais je ne pus me retenir : j’entourais sa nuque de mes bras et je le serrais tout contre moi aussi, plongeant mon visage dans le creux de son cou, y cherchant l’odeur familière qui me donnait l’impression d’être à la maison. Petit à petit, je sentis les larmes se calmer, et je me concentrais durant notre étreinte pour qu’elles cessent.


- Et puis, je veux que tu te sentes prête, que tu le veuilles autant que moi je te veux. Et ce n'est peut-être pas le meilleur moment, d'accord ? Je ne veux pas que tu te sentes obligée.

Je le regardais, un peu hésitante, imprimant ce qu’il venait de me dire. Quelque chose grésillait en moi, mais je ne savais pas dire quoi, sûrement était-ce le plaisir d’entendre une telle douceur dans sa voix, et ce qu’il venait de dire me fit réaliser à quel point j’avais été stupide. Je comprenais, avec un certain recul, ce que j’avais cherché à faire tout à l’heure. Je voulais faire flancher Ewan, mais au fond, j’étais tout aussi contrainte à mes désirs qu’il devait l’être. Durant les quelques jours que nous avions passé ensemble, je rougissais constamment en songeant à ce que je ressentais, car ce n’était pas simplement une affaire de sentiments, mais bien de sensations physiques. Je n’avais jamais éprouvé cela, le désir qui vous gagne et vous fait envie, et je devais avouer que j’en étais légèrement honteuse. Etait-ce normal, de ressentir ça ? Je rendis doucement son baiser à Ewan, cherchant à retrouver une conscience claire. Je le savais, désormais : mes agissements avaient eu des conséquences que je ne pouvais nier, et maintenant je ne savais pas trop comme réagir à nos deux cœurs tambourinant et nos corps tendus et alertes.

- Ne t’excuse pas, c’est moi, finis-je par dire, inspirant un grand coup comme pour prendre des forces. Le restaurant était une très bonne idée, mais… Peut-être pas ce soir, avouai-je à contrecœur. J’aurais dû te le dire, je n’ai pas passé une très bonne journée, je… J’étais inquiète, c’est stupide, mais j’avais peur qu’il t’arrive encore quelque chose, et ça fait ressortir pleins de chose. Je poussai un soupir, énervée contre moi-même. C’est plus difficile que je ne le voudrais, mais je ne veux pas que tu me trouves faible…

Je croisai nos regards et tentai vainement de lui sourire. Je ne voulais ni qu’il me trouve paranoïaque, ni qu’il s’en veuille, car ce n’était pas sa faute si j’étais toujours inquiète, et encore moins si je ne lui confiais pas. Je me sentais honteuse, me remémorant comment Ewan m’avait plusieurs fois demandé comment j’allais, et combien de fois j’avais menti.

- Je pensais que le restaurant me ferait du bien, mais c’était sans compter l’autre là, dis-je d’une voix hésitante, et je vis au regard d’Ewan qu’il ne comprenait pas ce dont je parlais. Je ne savais pas si je devais être surprise, avec du recul je réalisais qu’il n’avait sûrement pas du remarquer. Il ne remarquait jamais. La serveuse, expliquai-je timidement, un peu mal à l’aise. Tu lui plaisais, beaucoup, ça se voyait, elle a passé la soirée à… J’agitai ma main dans l’air, tentant d’expliquer un concept qui moi-même m’échappait un peu. Excuse-moi, je ne veux pas être jalouse, c’est pas ça, c’est juste que… Je voudrais que ça ne soit que moi, c’est tellement égoïste mais je n’arrive pas à penser différemment, confiai-je en me mordant la lèvre, baissant les yeux.

Elles avaient toutes l’air mieux que moi, pensai-je amèrement.

Je ne voulais pas être possessive, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. En vérité, j’étais consciente de la chance que j’avais d’être avec Ewan, et j’étais terrifiée de le perdre. Le pire, c’est que je voyais que c’était mon attitude qui risquait de me couter notre relation. J’étais perdue car d’un côté, j’avais perdu Hadrian en masquant mes problèmes et de l’autre, j’avais peur de perdre Ewan en lui dévoilant. J’étais honnête, mais plus je l’étais, plus je me disais qu’il allait finir par se lasser. Et ça, je ne le voulais pas…


- Je t’ai fait mal ? Demandai-je à voix basse, la gorge nouée par les larmes que j’avais calmé. Laisse-moi voir, murmurai-je, et avant qu’il proteste, je posai mes mains sur le bas du pull et l’obligeai à l’ôter.

Sur son torse, la cicatrice s’étendait et si elle s’était bien refermée durant ces quelques jours, elle était à présent légèrement rouge, et je passai tout doucement, le plus délicatement possible, mes doigts sur la peau d’Ewan. Mon menton tremblait un peu, mais je revalais mes sanglots, levant le regard vers Ewan, sincèrement désolée. Je m’en voulais tant. Je caressais sa peau pendant un long moment, comme pour aspirer la douleur, avant de me pencher de déposer un baiser sur son cœur puis plusieurs sur son torse, fermant mes yeux, posant mes lèvres tendrement sur la blessure. Je me redressai et embrassai lentement Ewan, mes mains attrapant sa nuque, et pendant un moment, j’étais à nouveau en sécurité. Et je voulais qu’il soit aussi, je ne voulais pas qu’il ait mal. Surtout pas à cause de moi. Je m’écartai et posai ma paume sur son cœur.


- Tu… Tu ne crois pas tout ce que j’ai dit, n’est-ce pas ? Murmurai-je honteuse en le regardant timidement. Tu me comprends, plus que n’importe quel garçon ne pourrait le faire, et je… Je ne te déteste pas, vraiment pas… Dis-je avant de poser mes lèvres sur les siennes, doucement.

Puis, c’était comme toujours, nos baisers montaient en intensité petit à petit, et je sentis mon corps se presser un peu plus contre le sien. C’était ma manière à moi de lui dire que je l’aimais, que j’étais désolée. Mes mains se pressaient contre son torse nu, effleurant ses clavicules puis ses épaules avant de se poser ses omoplates finement dessinés, appuyant légèrement dessus pour rapprocher Ewan de moi, presque inconsciemment. Une nouvelle fois, je sentis le feu qui crépitait en moi devenir plus fort, plus brûlant, et il réveillait une à une chaque cellule de mon épiderme, comme pour décupler toutes les sensations. Je m’écartai finalement, le souffle légèrement hors de contrôle. Mes mains glissèrent le long de ses bras, cherchant les siennes, et j’entrelaçais nos doigts.


- Tu sais, je ne me sens pas obligée, moi aussi, j’ai… Je marquai une pause, gênée. J’ai envie de toi, moi, dis-je dans un souffle, baissant les yeux. Mes doigts qui jouaient sur les paumes d’Ewan glissèrent jusqu’à ses poignets, et j’enroulai ses bras autour de ma nuque, posant ses mains en haut de mon dos – là où se trouvait l’attache de ma robe. Je me sentais un peu fébrile, et timidement, je lâchai ses mains et passai les miennes dans mes cheveux, dénouant mon chignon. Mes boucles blondes s’éparpillèrent sur ma poitrine et mon dos nu, mais je les dégageai, les ramenant sur le devant, les tirant un peu, mal à l’aise. J’avais baissé les yeux, et je les levai finalement vers Ewan. Je savais que je n’avais pas fini, et avant qu’il ne comprenne comment ôter ma robe, je reposai mes mains sur les siennes comme pour le stopper. J’ai peur, murmurai-je avec un rire gêné. J’avais honte de mes réactions, mais je savais que je ne pouvais pas avancer sans les confier. J’ai confiance en toi, mais… Mais et moi ? Si je n’étais pas… Douée ? Je voudrais juste te faire plaisir, achevai-je en détournant les yeux, mes doigts caressant ses mains qui se trouvaient toujours sur l’attache.

Je ne voulais pas les ôter. Je me sentais prête, je l’étais depuis déjà un moment, mais il me fallait franchir un pas, un pas unique qui me tétanisait. Je me penchai vers Ewan et l’embrassai avec toute la douceur et la sensualité dont j’étais capable, lâchant finalement mes mains pour les poser sur son torse. J’espérais qu’il comprenne que silencieusement, je venais de lever la dernière barrière, et que je l’invitais enfin à aller plus loin – j’avais peur, mais il était avec moi, et c’était la seule chose dont j’avais besoin en cet instant pour me sentir bien.

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Ewan Campbell


Ewan Campbell
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Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Empty
MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeJeu 29 Aoû - 0:49

J'enviais Ruby, aussi étrange que cela puisse paraître, dans ces moments-là. Je l'enviais pour avoir cette capacité à tout lâcher et à s'effondrer, baissant ses barrières aussi simplement qu'il suffisait de le dire, s'effondrant avec elle et laissant par la même occasion tout ce qui l'étouffait se faire emporter par le courant qui tourbillonnait autour de nous. Je savais que ces états étaient nécessaires, parfois ; je n'avais pas oublié la soirée de la rivière et la quiétude, le lendemain, d'avoir expié tout mon mal par des mots et des larmes. Jusque là, je l'avais si peu expérimenté - par pudeur, sans doute, puisque mes parents ne m'y avaient jamais autorisé, sauf pendant les premières semaines, celles dont je gardais un souvenir diffus. Ce n'était pas vraiment de l'oubli dû à une trop grande tristesse, c'était un voile que j'avais posé et que je n'avais plus jamais relevé. Je ne voulais pas me souvenir ; plus précisément, je ne pouvais pas. Je savais que je n'en avais pas le courage. Ruby l'avait et c'était exactement cela que j'enviais : quand tout devenait trop oppressant, je ne savais rien faire d'autre que de laisser mes problèmes derrière moi, et si cela fonctionnait un temps, je savais bien qu'on ne fuyait pas éternellement ce qui nous empêchait de garder la tête hors de l'eau.

Toujours est-il que quand elle s'effondra, au sens propre comme au figuré, puisque ses épaules s'affaissèrent contre moi et qu'elle éclata en sanglots, et que je sentis en même temps qu'elle cédait et redevenait elle-même, j'eus une seconde de culpabilité : ma voix si sèche avait cassé quelque chose dans l'atmosphère et nous avait surpris, tous les deux. Je n'étais pas habitué à m'entendre parler si durement - mais je n'avais pas eu le choix, et je le savais. Qu'aurais-je pu faire de plus que de simplement la réveiller de sa crise, ne jouant pas en son sens justement, en lui montrant comme je le pouvais que, non, cela n'allait pas ? Tout de suite, mon ton redevint plus doux, et je lui souriais tendrement, pour qu'elle se calme - qu'elle me rassure. J'avais encore peur, et cela ne changeait pas de la tenir contre moi, de sentir ses mains chercher refuge dans mon dos, sa tête dans mon cou. Je n'avais probablement pas peur comme elle avait eu peur pour moi l'autre soir, j'avais une peur plus insidieuse, et surtout inconnue. On avait beau entendre des histoires sur le sujet, il me semblait qu'il était bien impossible de décréter une loi ou un médicament absolument efficace à 100% pour lutter contre cette singulière addiction à l'alcool. Elle dépendait de tellement de choses, de souvenirs, de choix et d'actions... S'il ne m'était pas impossible de savoir les grandes lignes qui avaient poussé Ruby à boire, je n'étais pas certain pour autant de connaître la véritable raison de cet échappatoire artificiel. Le contrôle, mais de quoi ? C'était bien tout le contraire. Lâcher prise... Cela revenait à fuir, sauf que l'alcool entravait la fuite, peu à peu. Oublier, peut-être. J'avais beau me plonger dans son regard dont l'éclat me semblait tout éteint, malgré les larmes qui perlaient à ses yeux, aucune réponse ne parvenait jusqu'à. Simplement la constatation que je n'avais pas vraiment les armes pour l'aider à lutter, sans doute...

Il me semblait que toute la chaleur qui avait quitté mon corps depuis que nous étions sortis du restaurant revenait peu à peu alors que je serrai Ruby contre moi - que ses sanglots se calmaient un peu, et que ses baisers au goût salé de ses larmes apaisaient peu à peu les battements de mon cœur. J'aurais voulu que la soirée soit bien différente, que ce restaurant reste un bon souvenir, que nous soyons rentrés en observant les étoiles et en nous embrassant que nous ayons espérés sans le dire briller aussi fort qu'elles nous aussi, dans un petit coin du ciel - mais je n'avais pas prévu cela, et elle non plus probablement. Mais je ne regrettais rien : je préférais mille fois avoir été là plutôt qu'elle ait cédé, qu'elle soit descendue dans la rue s'acheter à boire, qu'en savais-je. Je me rendis compte alors que je ne savais même pas jusqu'où elle aurait pu aller, par simple manque.


- Ne t’excuse pas, c’est moi. Le restaurant était une très bonne idée, mais… Peut-être pas ce soir. J’aurais dû te le dire, je n’ai pas passé une très bonne journée, je… J’étais inquiète, c’est stupide, mais j’avais peur qu’il t’arrive encore quelque chose, et ça fait ressortir pleins de chose. C’est plus difficile que je ne le voudrais, mais je ne veux pas que tu me trouves faible…

Faible ?! Je fronçai les sourcils lorsqu'elle me lançait un bien pauvre petit sourire. Elle était bien loin du compte ; au contraire, jour après jour elle me prouvait le contraire. Elle avait sa force bien à elle, mais n'avions-nous pas tous nos propres manières ?... J'eus une pensée amère pour mes parents et leurs réactions, mais je chassai ces idées noires de mon esprit, car je n'avais pas envie de tristesse supplémentaire. Le problème était que l'aveu de Ruby, le simple fait que je ne me sois pas rendu compte qu'elle n'était pas en état, mon envie sans doute trop grande quand je la voyais et quand je l'embrassais et qui devait m'obstruer un peu la vue... Tout cela me donna l'impression d'être si peu attentif à elle, que les mots se bloquèrent, honteux, au fond de ma gorge.

- Je pensais que le restaurant me ferait du bien, mais c’était sans compter l’autre là. J'eus un signe d'incompréhension. La serveuse. ... Quelle serveuse ? Tu lui plaisais, beaucoup, ça se voyait, elle a passé la soirée à… Excuse-moi, je ne veux pas être jalouse, c’est pas ça, c’est juste que… Je voudrais que ça ne soit que moi, c’est tellement égoïste mais je n’arrive pas à penser différemment.

- Je... commentai-je enfin, mais cette fois, ce fut l'incompréhension qui me coupa la parole. Comment ça ? Je ne comprenais pas - ou plutôt je ne compris pas tout de suite. La serveuse était sans doute le tout dernier des derniers détails de ce soir qui s'était inscrit dans mon esprit. La serveuse. Je lui avais plu. ... Ah bon ?! Si tant est que je me souvienne, oui elle avait été souriante et agréable et là pour nous rendre service, mais n'était-ce pas tout ce qui imposait son métier ? A moins que... Oh, je voyais. Peut-être que Ruby avait cru des choses, ou peut-être que je ne les avais pas vues. Mais, je ne me souviens même pas de son visage, fut la première parole sensée qui jaillit de ma bouche. Qu'est-ce que ça peut faire ! Elle ne me plaisait pas, elle. J'ai bien mieux, conclus-je avec un petit sourire qui n'était destiné qu'à Ruby. En vérité, je me demandais comment il était possible que le fait qu'elle me plaise plus que n'importe quelle fille sur cette terre ne sautai pas aux yeux à chaque seconde qui passait, mais qu'importe. Tu aurais dû me dire pour aujourd'hui, je... Je baissais les yeux, réellement désolé. J'aurais dû faire plus attention, balayai-je alors en secouant la tête, et d'une voix plus dure, mais contre moi-même, cette fois.

Je l'embrassai pensivement, déposant un baiser sur ses lèvres. J'avais peur qu'un jour, les barrières soient trop hautes... Un jour... Mais ce
un jour avait un sens si vilain quand je suivais le fil de mes pensées, que je serrais les dents, évitant soigneusement pendant une seconde le regard de Ruby. Elle s'inquiétait de ma blessure - je n'y pensais même plus. Oui, elle m'avait fait mal, mais tant pis. Ça n'avait pas d'importance.

Quand ses mains parcoururent ma peau, je sentis les mêmes frissons, bien familiers à présent, revenir à la charge, je sentis mon souffle me trahir ; il faillit manquer quand Ruby m'embrassa, et je me demandai si elle avait senti les tambourinements de mon coeur. Le baiser qui s'en suivit, trop sensuel, n'arrangea rien, et si je combinais tous les efforts du monde pour ne pas me laisser embarquer à nouveau dans cette vague de désir qui ne cessait de grandir, je me trouvais de moins en moins efficace. Mais je ne pouvais pas ! Je me refusais, tout net, à espérer plus de caresses et finalement à espérer que Ruby comble mes envies, alors que je n'avais aucune idée comment réparer ses plaies et apaiser ses angoisses. J'avais l'impression d'être furieusement égoïste alors qu'elle était à mille lieues de là - mais sa silhouette, sa robe, ses formes, ses jambes de chaque côté de moi, ses baisers, le dessin de sa bouche, et ses mains qui couraient sur ma peau... Elle me torturait, de la manière la plus exquise qui soit, mais tout de même. J'avais l'impression d'être un adolescent à nouveau, incapable de penser à autre chose qu'au flot d'hormones qui se faisaient décidément sentir.  


- Tu… Tu ne crois pas tout ce que j’ai dit, n’est-ce pas ? Tu me comprends, plus que n’importe quel garçon ne pourrait le faire, et je… Je ne te déteste pas, vraiment pas…

- Je sais, répondis-je, un peu crispé - mais je savais, bien sûr que je savais ! J'avais appris l'art de déchiffrer ce qu'elle n'osait pas dire et ce je ne déteste vraiment pas, eh bien... Je t'aime, ne t'inquiète pas, murmurai-je avec un petit sourire.

Sauf qu'il fallait qu'elle arrête. Je ne voulais pas la vexer, mais... Il fallait qu'elle arrête.

Je ne me souvenais pas avoir eu autant envie de quelqu'un, dans ma vie. Ce n'était pas forcément illogique : les premières amours sont ce qu'elles sont, mais à cet âge, quand je m'en rappelais... Nous ne savions pas trop à quoi nous jouions, ou pas trop ce que nous cherchions. Je me souvenais de ces moments-là comme une petite parenthèse dans le temps. Avant l'été où tout avait basculé - ce qui jouait forcément. Et puis, les autres... Mais j'avais été, je crois, trop triste pour trouver une place pour qui que ce soit d'autre. Et puis Ruby était arrivée ; ni pourquoi ni comment, je ne savais pas. Toujours était-il qu'elle était là et que maintenant je la désirais de tout mon être, qu'elle me rendait heureux, et que je détestais les jours quand je savais que je n'allais pas la voir. Pourtant, ironie du sort, elle avait cet âge-là... Cet âge qui ne me dérangeait pas, pourtant. Mais cet âge bien lointain pour moi ; quand je me revoyais, j'avais l'impression d'être un enfant... Mais encore une fois, Ruby ne l'était plus, hélas. Depuis plus longtemps que moi. Je ne savais plus quoi faire : la repousser, la supplier, l'embrasser encore et encore. Mon coeur s'affolait, mais avec une force inouïe, une assurance inébranlable, et ma peau semblait prendre vie par elle-même, au fur et à mesure que les mains fines de Ruby courraient dessus, comme si elles ne se doutaient de rien... Et je me perdais dans son regard, bien plus vivant que tout à l'heure ; si je faisais attention j'y retrouvais les petites étoiles bleu argentées que je connaissais bien...

Mais elle était trop près, et soudain j'eus l'impression de perdre pied et de tomber dans le ciel infini de ses yeux.

- Tu sais, je ne me sens pas obligée, moi aussi, j’ai… J’ai envie de toi, moi.

Quelque chose bloqua l'air, la terre, le cosmos ; quelque chose serra ma gorge. Comme un automate, je laissai Ruby prendre mes mains et les porter dans son dos. Je frémis - quelle idée avait-elle en tête ?

- J’ai peur. J’ai confiance en toi, mais… Mais et moi ? Si je n’étais pas… Douée ? Je voudrais juste te faire plaisir.

Oh... Il me sembla que tout se débloqua de la même manière que le temps s'était arrêté, et qu'un son bourdonnant reprenait dans mes oreilles, que le sang coulait à flot dans mes veines, que la chaleur de Ruby autour de moi se faisait plus pressante encore. Ce regard m'avait peiné autant qu'il m'avait touché - je compris qu'il y avait bien plus dans cet enjeu, bien plus que je ne l'imaginais, pour elle. J'eus presque envie de confier : moi aussi, j'ai peur. Et si je te fais mal ? Et si... Et si tu ne peux pas, tout simplement, et si tu te souviens ? Mais je savais qu'il ne fallait pas. J'eus simplement un sourire, secouant la tête doucement, laissant mes mains sur l'attache de sa robe. Je collai mon front contre le sien, sans détacher nos regards. Comment lui faire comprendre que jamais elle n'allait me décevoir, puisque c'était cela dont elle avait si peur ?

- Fais-toi confiance, murmurai-je. N'aie pas peur. Et puis... Mais non, pas de et puis, quoi de plus ? Elle m'embrassait, et j'avais compris. C'était le moment - au moment même où je m'y étais attendu le moins. Mais je rajoutai, séparant nos lèvres, comme pressé tout d'un coup : Mais je veux que tu me dises. Si ça ne va pas, si je te fais mal... Je veux que tu me dises, la priai-je.

C'était tout. Ou c'était peut-être la fin, qu'en savais-je. Mais l'attache céda entre mes doigts aussi simplement que cela, comme si elle avait attendu toute la soirée, docilement, que je daigne la défaire.

Ruby avait détaché ses cheveux, et je lui en fus mentalement reconnaissant, car au fur et à mesure que je faisais glisser la robe de ses épaules et le long de ses bras, les rouages de mon cerveau s'imbriquaient les uns dans les autres, et ne me laissaient pas d'autre choix que de comprendre clairement et simplement ce qui allait suivre. C'était comme un rêve trop longtemps espéré et fantasmé, si bien que je n'arrivais pas à croire qu'il était finalement réel... Et mes craintes s’amoncelaient, profitant de la brèche ouverte par ma hâte et mon anxiété fiévreuse. Je voulais tellement que tout se passe bien, que Ruby se sente bien, qu'elle apprécie, qu'elle... Je voulais qu'elle se voit telle que je la voyais, rien de plus. Je voulais qu'elle voit que je lui faisais l'amour parce que je l'aimais. Je me mis à l'embrasser sans trop savoir par où commencer, sans me préoccuper de sa robe bloquée à sa taille car elle était toujours installée sur mes genoux, sans freiner mes mains, mais sans m'arrêter de réfléchir pour autant : chaque geste comptait. Je lui saisis sans doute la nuque un peu trop brutalement, je l'embrassai sans doute un peu trop passionnément pour ne pas l'effrayer, mais quand mes lèvres descendirent vers son cou, sa gorge, sa poitrine, il était évident que je pouvais me vanter de tout le sang-froid du monde... Ce n'était plus vraiment le cas. Ruby réagissait à chacune de mes caresses et je la sentais qui se tendait sous la paume de main posée dans le bas de son dos, cambré un peu plus à chaque fois que j'attaquais l'arrondi de sa poitrine, que je me perdais dans l'odeur de son corps, dans la douceur de sa peau.

Je n'étais plus certain d'où j'étais exactement, du monde autour de nous. La perception du corps presque nu de Ruby perturbait chaque parcelle de mon être. Je finis par la soulever légèrement pour la coucher sur le lit, essayant de ne pas attraper sa taille avec trop d'empressement, me positionnant au-dessus d'elle. Je ne pouvais pas détacher mon regard du sien, et mon souffle court faisait écho au sien, mais je finis par m'y arracher, pour la contempler, tout entière. A cet instant, elle eut un geste et tendit le bras pour éteindre la lampe de chevet qui diffusait une lumière peu forte.


- Non, la priai-je entre deux respirations. J'avais posé la main sur son bras. Je veux te voir...

Je ne voulais pas de l'obscurité qui cacherait nos corps peut-être, mais aussi son regard, sa bouche, et tout ce que je pouvais admirer. Je voulais lire, aussi, ce qu'elle n'oserait pas me dire si quelque chose n'allait pas.

Doucement, je fis glisser sa robe le long de ses longues jambes que j'avais enfin le loisir de caresser et d'embrasser comme je le voulais. J'accompagnai la descente du tissu de baiser de plus en plus insistant sur sa peau, et quand il échoua à ses pieds, je remontai tout aussi doucement, caressant des mains et des lèvres ses jambes, ses cuisses, jusqu'à ses hanches. Il subsistait quelques traces sur sa peau, que j'embrassai aussi, peut-être encore avec plus de douceur.

Et puis les soupirs de Ruby m'encouragèrent à continuer, et quand j'attrapai sa main et que nos doigts se crispèrent les uns autour des autres je crus que j'allais perdre la raison ; mais son souffle haché me guidait et je m'y accrochais comme si je n'avais plus que cela. Je n'avais pas imaginé que ce serait si fort : aussi tendre que je l'avais voulu, mais encore plus puissant, et en cet instant j'étais si bien et si serein, au fond de moi, contrairement à ce qu'indiquait mon souffle court, si en accord avec tout ce qui semblait me constituer, que mon cœur se gonflait dans ma poitrine, irradiant de vie - une vie que j'avais peut-être un peu trop laissée de côté. Quand Ruby m'attira tout contre elle, que nos deux corps reposèrent entièrement l'un sur l'autre, que mes mains la parcouraient toute entière sans vouloir un instant quitter sa peau, il me revient ces mots qu'elle avait dits, quand tout s'était écroulé autour de moi, et malgré la puissance de mes sensations et des battements de mon cœur, ils étaient là et ne me quittaient jamais : je ne te laisserais jamais mourir. Mourir... Je pouvais bien mourir entre ses bras, ce soir, je ne préoccupais plus de rien, plus de la suite, plus du passé. Il n'y avait qu'une phrase qui trottait dans ma tête, accompagnant nos soupirs de plus en plus profonds, exaltés :


« Ne me laisse jamais. »

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Ruby Standiford-Wayland


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Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Empty
MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeVen 30 Aoû - 10:48

Avais-je seulement le droit de faire un commentaire sur la serveuse et son attitude ? Je n'avais pas à contrôler la vie d'Ewan, je le faisais déjà trop avec la mienne, et je... Mais non, je ne pouvais pas m'y résoudre : je ne voulais pas. Il était mien, j'étais sienne, je ne voyais pas d'autre définition de ce que je ressentais. Les sentiments amoureux ne pouvaient pas se ramifier, il n'était destiner qu'à une unique personne, et je voulais être cette fille pour qui Ewan ressentait cela. Mais il était beau, il était intelligent, il était attentionné, il était souriant – la liste était tellement longue – alors oui, oui bien sûr que je n'étais pas la seule à le remarquer. Mais, et moi ? Qu'est-ce que j'étais ? J'étais amoureuse de lui, mais est-ce que ça suffisait ? Je voulais simplement qu'il soit heureux d'être avec moi, mais peut-être avait-il le sentiment de me traîner comme un boulet ? Il suffisait de regarder mon attitude il y a un instant de cela ; je prétendais l'aimer, mais je ne me montrais jamais méritante de ce qu'il éprouvait pour moi. J'étais désolée, voilà les pitoyables excuses qui voulaient s'échapper en boucle de mes lèvres. J'étais désolée de tout, de ce que j'avais fais, de ce que j'avais dis, de qui j'étais.

Et à la fois, je ne pouvais pas m'en empêcher. Je voulais qu'il m'aime comme je l'aimais.


- Je... Mais, je ne me souviens même pas de son visage. Qu'est-ce que ça peut faire ! Elle ne me plaisait pas, elle. J'ai bien mieux. J'eus un sourire en coin, et je baissais les yeux, gênée. Je le savais sincère lorsqu'il confiait ses sentiments, j'avais confiance en lui, mais alors, quel était mon problème ?! Je n'avais pas confiance en moi, je le savais, et toutes mes peurs pouvaient bien se taire un instant lorsqu'Ewan me complimentait ou me prouvait son amour, je savais qu'elles reviendraient d'une manière ou d'une autre. Tu aurais dû me dire pour aujourd'hui, je... J'aurais dû faire plus attention.

- Non!
Murmurai-je, d'un ton catégorique, posant mon index sur ses lèvres pour le couper. Je ne voulais même pas entendre ses excuses qui n'avait pas lieu d'être. Je lui souris tendrement – malgré tout, chaque mot qu'il prononçait m'irradiait d'une énergie rassurante, et toute l'attention dont il m'entourait me faisait me sentir si... Bien, que c'en était presque égoïste. Tu ne peux pas deviner, ajoutai-je doucement.

J'hésitais à lui dire que j'avais confiance en lui, que je voulais bien croire qu'elle ne lui avait pas plu, mais je réalisais que cela n'allait qu'accentuer mon incohérence. Moi même, je m'échappais, et c'était peut-être pour cela que je me collais un peu plus contre Ewan, et que je cherchais refuge entre ses bras : j'avais l'impression qu'il me retenait, à sa manière, dans la réalité, mais surtout qu'il me faisait l'accepter. Je n'avais pas peur avec lui, ou du moins, je ne craignais pas les mêmes choses. Je voulais qu'il le comprenne, ça, et surtout qu'il ne croit pas ce que j'avais dis plus tôt.


- Je sais. Je t'aime, ne t'inquiète pas.

Ces mots déclenchaient toujours plus en moi, et mes lèvres sur les siennes se firent un peu plus avides. Ewan pouvait-il comprendre que c'était ma manière de tout lui dire ? Mes sentiments, mais aussi à présent, mes désirs ? Il était trop poli pour une telle interprétation, j'en étais consciente, et il n'oserait jamais franchir le pas tant que je ne lui aurais pas donné mon accord. Au fond, il l'avait déjà, mais je devais assumer pleinement ce que cela impliquait, et quand je posai ses mains sur l'attache de la robe, je sentis le doute me gagner doucement. Et j'avais besoin d'exprimer ce doute.

- Fais-toi confiance. N'aie pas peur. Et puis...Je me sentis trembler un peu plus, et je l'embrassais comme pour reprendre mes esprits et comprendre ce qui allait se passer, mais au fond, c'était tout le contraire qui se produisait : j'étais à la merci des sensations que me provoquait notre étreinte. Mais je veux que tu me dises. Si ça ne va pas, si je te fais mal... Je veux que tu me dises.

Sa demande acheva de me plonger dans une atmosphère qui m'était étrangère et à la fois délicieuse. J' hochai la tête en signe d'approbation et je me sentis sourire tout doucement, embrassant pour toute réponse Ewan – j'étais délicieusement confuse. Je savais où cela allait nous mener, et à la fois, j'ignorais tout. C'était comme nouveau, comme un renouveau. Lorsque la robe glissa sur mon corps, je me crispais un peu, hésitante, et à la fois... Pourquoi douter ? Je ne pouvais pas ignorer que mon physique lui plaisait, et j'en avais la preuve une nouvelle fois. Et pourtant, ça n'avait rien de désagréable comme je pouvais le sentir parfois quand on m'observait : en cet instant, je me sentais simplement belle, mais pas seulement par mon corps, mais bien par tout mon être, et c'était une sensation toute particulière lorsqu'elle était liée à quelqu'un que l'on aimait. Son baiser fut un peu brusque, et j'y répondis, un peu troublée et bientôt, tout m'échappa. Il écarta mes cheveux qui avaient dévalé ma poitrine, et ses lèvres se posèrent avec ferveur sur ma peau, provoquant des sensations comme je n'en avais jamais connues. Je n'arrivais pas à reprendre ma respiration, et étrangement, je me sentais sourire en même tant – j'étais simplement bien.

Un instant plus tard, il était au dessus de moi, et mon cœur s'emballa, presque paniqué, lorsqu'Ewan détacha son regard du mien et qu'il le promena sur mon corps quasi-nu. Je tentais de reprendre ma respiration, voulant presque murmurer quelque chose, mais je ne savais pas quoi. Ma main se faufila jusqu'à la lampe de chevet, car si je voulais l'admirer à loisir, je ne voulais pas qu'il puisse voir mon corps abîmé et... Et je ne savais pas, j'avais simplement peur de ne pas être assez jolie.


- Non. Il avait posé sa main sur mon bras, et murmurai tout doucement, et tendrement. Je m'immobilisais, un peu perdue. Je veux te voir...

Je sentis mon être entier se crisper, d'une bien délicieuse manière, et mon cœur s'emballa un peu plus. J'avais peur, je ne pouvais pas le nier, mais le tout se mêlait dans une attente presque insupportable, car je savais que ça arriver, je pouvais le sentir. C'était partout, autour de nous, cette atmosphère pressante et emplie du désir qui nous animait tout deux. J'étais fébrile, et lorsqu'Ewan ôta petit à petit ma robe, mon corps se tendit un peu plus. Chaque baiser qu'il offrait à ma peau semblait décupler un peu plus tout ce que je sentais déjà, et ma respiration se faisait déjà bien moins régulière. Je me sentais à la fois vulnérable et puissante, je n'arrivais pas à choisir toutes les émotions qui me traversaient, et bientôt, je fus incapable de réfléchir tout court. Ses lèvres étaient remontées jusqu'à mes hanches, et j'eus un petit mouvement craintif, honteuse des cicatrices qui subsistaient encore... Mais s'il est vrai qu'il existait ce qu'on qualifiait de « bisous magique » pour soigner les blessures et faire disparaître la douleur, alors c'était exactement ce que me prodigua Ewan lorsqu'il déposa quelques baisers plus tendres que les précédents, là où ma peau restait marquée. J'étais bouleversée, ni plus ni moins.

Mes doigts se crispèrent sur les draps, et j'entendis un soupir s'échapper d'entre mes lèvres – j'avais été incapable de le retenir. Les lèvres d'Ewan s'étaient désormais posées dans cet endroit que j'avais toujours cru que je garderais secret, caché, parce qu'il me semblait que ça ne pouvait pas me faire du bien si on le touchait et... Et j'avais eu tort, puisque ma respiration saccadée prouvait bien l'état dans lequel je me trouvais, complètement retournée par les milliers de sensations qui parcouraient ma peau. La main d'Ewan attrapa l'une des miennes, et il me sembla que je serrais ses doigts avec une force inouïe, comme pour ne pas perdre complètement pied. Je n'en pouvais plus, c'était simple, et j'en voulais encore plus : ma main libre attrapa la nuque d'Ewan, et je ramenais son visage contre le mien, et par la même occasion, son corps. Je n'avais aucune minute de répit, ses mains se faufilant tout contre ma peau, et je perdais le peu de respiration qui me restait dans nos baisers. La manière dont nous nous regardâmes m’électrisa : nous étions à la fois amoureux, sûrs de nous, et complètement dépassés par les sensations qui nous envahissaient.

J'aurais voulu être plus assurée, mais lorsque mes mains descendirent vers la ceinture d'Ewan, je sentis la peur me gagner à nouveau, insidieuse, et à la fois elle se noyait dans toute l'envie qui me prenait. Sa main se posa sur la mienne, et je sus qu'il avait compris : je suivis son geste, le souffle court, ne cessant de l'embrasser. Nos deux corps se rencontrèrent, ne formant plus qu'un, et ma respiration fût coupée un instant, comme aspirée par l'intensité du frisson qui venait de me parcourir. Je ne pouvais pas le nier, il eut une sensation presque désagréable, de douleur, mais elle s'envola l'instant d'après, remplacé par quelque chose de bien plus qui m'arracha un gémissement.

Je savais soudain pourquoi cela comptait plus que n'importe quoi d'autre, ou qu'avec n'importe qui d'autre : j'aimais Ewan, et je voulais qu'il me possède toute entière, que je le possède, que nous ne formions plus qu'un, et je voulais que cela soit aussi fort et merveilleux que ce que je ressentais. J'aimais Ewan, comme je n'aimerais jamais personne, et cette unique vérité me frappa de plein fouet et brusquement, je m'appuyai sur mes coudes, coupant momentanément notre étreinte.


- Ewan, attends, murmurai-je, tentant de trouver assez de force pour calmer ma respiration et parler distinctement. Mes yeux rencontrèrent les siens, et je ne cillai pas. J'étais emplie d'une telle certitude qu'elle m'habitait toute entière et guida les mots jusqu'à mes lèvres. Je t'aime.

C'était si simple. Je compris alors que c'était les seuls mots qui manquaient pour que je prenne enfin confiance, comme s'il suffisait à tout éclairer. J'attrapai les lèvres d'Ewan avec beaucoup plus de passion cette fois, et mes mains qui cherchaient encore leur prise un instant auparavant, surent exactement où glisser, caresser, griffer et s'accrocher. J'avais l'étrange impression qu'il n'y avait plus de contradictions en cet instant : plus de bien ni de mal, de doute ou de certitude, de peur ou de confiance, il n'y avait que nos deux corps qui ne formaient qu'un, et chaque mouvement faisait écho à un autre, tout comme nos respirations. Quand je perdais le souffle, Ewan me le rendait dans un baiser, et à la fois, j'aspirais le sien, comme si nous nous renvoyions constamment la balle. Mes lèvres descendirent dans son cou un instant, comme pour laisser le temps à l'air de pénétrer à nouveau mes poumons, mais c'était impossible – il m'avait quitté définitivement. J'enroulais mes jambes autour d'Ewan, comme pour nous approcher encore plus, et je sentis mon corps se mouvoir avec un peu plus de force et de passion encore. Et à la fois... C'était si doux, si tendre, et l'intensité qui nous frappait n'ôtait en rien toute la douceur dont nous étions capables lorsqu'il s'agissait de nos étreintes. Mes mains voulait découvrir chaque parcelle de sa peau, mes lèvres aussi, et j'étais pourtant aussi à la merci des caresses d'Ewan, envahie de trop d'émotions pour les départager.

Chaque soupir qui s'échappait de mes lèvres, des siennes, c'était un « je t'aime » silencieux, je le savais, je sentais les sentiments m'habiter toute entière et ne faire qu'un avec le plaisir que je ressentais. Mais ça devenait de plus en plus fort, et j'avais beau m'accrocher, je perdais pieds, je n'essayais même plus de lutter, m'abandonnant toute entière à lui. Son prénom s'échappa de mes lèvres dans un gémissement, et le sentis se crisper : pour toute réponse, je me collais encore plus contre lui, l'embrassant avec force, et dans son oreille, je murmurais « ne t'arrête pas ». Mon ton était proche de la supplication, je ne voulais pas qu'il arrête, j'avais peur qu'il continue, de ce que j'allais sentir, parce que je contrôlais plus rien, et à la fois, c'était tellement intense, parfait... Nos regards se croisèrent, et je crus que mon cœur allait imploser : je fermais brusquement les yeux, rejetant ma tête en arrière avant de l'enfouir dans le cou d'Ewan, mordant presque sa peau pour retenir l'ultime soupir. Un spasme me parcourut et sembla se propager à Ewan. Je le serrais si fort contre moi, si fort, et je me sentais en cet instant en une osmose telle qu'il n'y avait plus rien autour. Juste nous.

Mon cœur tambourinait toujours, et j'étais toujours envahie de la chaleur incontrôlable qui m'avait empli quelques minutes auparavant. J'embrassais Ewan longuement, ne m'aidant absolument pas à retrouver notre respiration, ni à calmer nos corps qui reposaient toujours l'un contre l'autre. Je le regardais pendant un instant, et une nouvelle fois je me sentis sourire, comme si tout le bonheur en moi cherchait absolument à s'extérioriser.


- Mon amour, tu trembles, murmurai-je doucement, passant mes paumes sur ses épaules puis son torse – la manière dont je l'avais appelé ne m'étonna même pas, à vrai dire, les mots avaient coulé entre mes lèvres si facilement que j'avais compris qu'ils étaient naturels.

Je l'attirais finalement contre moi, l'entourant de mes bras pour l'y loger, et je tentais de finalement reprendre un rythme cardiaque normal – impossible. Mais j'entendais aussi la respiration d'Ewan, et je me concentrais dessus comme pour me bercer. Elle devenait de moins en moins rapide, et petit à petit, son corps sembla s'affaisser un peu plus contre moi. Son visage appuyé contre ma poitrine, je caressais lentement ses cheveux, sa nuque, son dos, fermant les yeux. Je ne sais pas combien de temps nous restâmes ainsi, il me semblait qu'il s'était presque assoupi, mais je souriais toujours et je ne cessais pas un instant mes caresses. Je laissais mes pensées vagabonder, songeant à avant, à maintenant, à après, à tout : rien ne m'effrayait. Je regardais Ewan, et il semblait si paisible, si heureux, que j'en souriais instantanément. J'étais heureuse qu'il le soit, voilà tout, et quand je songeais que je n'avais jamais connu quelque chose d'aussi fort depuis... Depuis toujours, je me demandais si pour lui aussi, c'était spécial. Se sentait-il plus heureux qu'avant ? Finalement, il eut un mouvement, et je m'immobilisai avant de m'écartai légèrement de lui et de lui faire face. Son regard me berçait toujours, et je ne détournais pas le mien, repliant cependant mes genoux légèrement contre moi pour me cacher un minimum – d'une certaine manière, j'étais mal à l'aise.

Il sembla le comprendre puisqu'un instant plus tard, nous étions sous la couverture, et il m'avait entouré de ses bras, me faisant face. Je n'étais plus exposée, et à la fois, c'était similaire, il pouvait voir, toucher, mais... Je me sentais comme dans un cocon, sous cette couette, juste contre lui. Je le regardais encore un long moment, mes doigts traçant les traits de son visage, glissant sur sa mâchoire, son nez, ses lèvres, et tout ce que je pouvais explorer. Mes yeux ne lâchèrent pas les siens un seul instant, et je souriais timidement, avant de poser ma paume sur son cœur que je pouvais sentir battre dans sa poitrine.


- Dis, murmurai-je finalement, c'était comment... Avant ? Je marquais une pause, hésitante. Quand tu travaillais avec ton père, tout ça... Tu n'en parles jamais, qui... Qui prenait soin de toi ? Lâchai-je alors échapper, d'une voix plus inquiète que je ne l'aurais voulu.

Parce qu'en le regardant, en le voyant serein, je réalisais à quel point le bonheur rendait ses traits encore plus exquis, et l'idée qu'il les quitte me rendait malade. Mais au fond, une minuscule pensée se faufila dans mon esprit et je ne pus la chasser : si j'étais la cause de ce bonheur, alors jamais il ne quitterait le visage d'Ewan.
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Ewan Campbell


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MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeMer 4 Sep - 18:52





« You saved me in every way that a person can be saved »




Je m'étais rarement aussi peu soucié de ma propre personne qu'en cet instant. Bien sûr, c'était un plaisir partagé, mais jamais je m'étais aussi peu soucié de moi et de ce que je ressentais, et jamais mes pensées et mes actes n'avaient été aussi tout entier dirigés, en bloc, vers une seule personne. Car je ne voulais que cela : faire plaisir à Ruby, dans tous les sens du terme, la rendre heureuse autant que je l'étais moi, lui montrer ce que je ressentais par des gestes bien plus poussés que ce que nous nous étions autorisés jusqu'à maintenant, la mettre à l'aise... Lui montrer avec les moyens que j'avais que son corps n'était pas un problème, que je le voulais autant que je la voulais elle, et ce qui lui faisait peur ne devait pas être une épreuve, au contraire, et que jamais il ne pouvait en être autrement. Mon désir pour Ruby ne me laissait pourtant pas beaucoup de moyens pour garder l'esprit clair, la tête froide, et le recul nécessaire dans ce genre de situations délicates, mais c'était tout ce qui m'importait, et tout ce que j'avais dans l'esprit, mis à part cette formidable envie qui allait grandissante... Et qui allait être comblée. Alors que nous nous embrassions à perdre le souffle et que je dévorais son corps baisers et de caresses, je me rappelai précisément ce que j'avais ressenti la première fois où nous nous étions embrassés, sous cet orage en pleine nuit : ce sentiment d'oppression, d'étouffement, qui ne devait jamais s'arrêter car il était trop bon, mon corps tout entier pressé de ces sensations, les temps qui me tourbillonnaient, les tremblements de désir, l'envie de ne pas arrêter une seule seconde de la toucher et de l'embrasser, la crainte aussi de la suite, cette puissance qui me paraissait plus forte que moi, cette tension à la fois délicieuse et douloureuse... C'était la même chose ce soir, en plus puissant, en décuplé par milliers, Ruby était partout autour de moi, sous mes lèvres, mes mains, mon corps, et je n'aspirais qu'à continuer cette danse et mourir dans ses bras, et rien d'autre.

Ce n'était pas possible autrement : en y pensant, avant que cela n'arrive, j'imaginais cela comme une douce délivrance, une vague de plaisir. Mais je m'étais trompé. C'était bien plus : un tourbillon, tellement fort que je perdais tout contrôle, j'en devenais la victime. Comme aurais-je pu, de toute façon : mon corps avait pris le dessus et ne me laissait aucun autre choix que de subir. Voilà pourquoi, aussi, je pouvais m'abandonner complètement, et me consacrer entièrement à Ruby - ses gestes, son souffle, les gémissements qui s'échappaient de ses lèvres et qui n'arrangeaient rien à la pression en moi, chacune de mes caresses, mon corps contre le sien. Tout comptait : je voulais que ce soit parfait pour elle.

Je perdais pied petit à petit mais je m'accrochai à elle, de plus en plus : sa nuque, sa taille, ses cuisses, ses mains... Mes doigts se crispaient contre les siens et inversement, comme si ils se comprenaient, se soutenaient.


- Ewan, attends,
murmura-t-elle tout d'un coup entre deux soupirs et je la regardai dans les yeux, une pointe d'effroi m'envahissant. Était-ce le moment où quelque chose n'allait pas, où je lui avais fait mal?... Je t'aime.

... Oh.

D'accord... Il y eut une onde qui agita mon cœur, et qui me fit frissonner, des pieds à la tête. Je lui étais reconnaissant de me le dire, à son tour, et le fait qu'elle le dise maintenant donnait toute sa valeur à cette déclaration : je n'aurais pas voulu qu'elle la dise en se sentant obligé. Ma main caressa sa joue et partit dans sa nuque, et je l'embrassai tendrement, avant de me laisser emporter à nouveau par la tornade, rassuré de ne pas avoir fait quelque chose de travers, porté encore plus haut par ces trois petits mots qui avaient jailli des lèvres de Ruby... Et pas seulement ; ses yeux, tout son corps le chantait aussi, et j'espérais qu'elle entendait la même chose de ma part.

J'avais le souffle court et trop pour lui répondre quoi que ce soit, mais mes caresses et mes baisers parlaient pour moi, et la suite fut complètement hors de ma portée. Je me laissai guider par ses soupirs, ses mains, ses ongles dans mon dos, et je m'accrochai à elle, à ses lèvres, ses jambes enroulées autour de moi, pour ne pas tomber dans ce qui me semblait un abîme, si je lâchais prise une seule seconde ; quand nos regards se rencontraient, les battements de mon cœur étaient d'une violence inouïe, et si je n'avais jamais ressenti tout cela, avec autant d'intensité, auparavant, je compris ce qui faisait la simple différence : l'amour. Jamais en cet instant il ne m'avait paru plus clairement ce qu'était aimer quelqu'un, de toute son âme, aimer à ne respirer que pour qu'il respire lui aussi, à ne pas exister si ce n'était pour lui. Je fermai les yeux quand Ruby prononça mon prénom, me crispai encore plus quand je la sentis se cambrer et poser ses dents sur ma peau, et quand son soupir exprima l'intensité de la vague qui venait de nous engloutir, je sentis mon corps répondre au sien, dans un dernier effort.

Je sentais physiquement mon cœur tambouriner dans chaque recoin de mon corps, me marteler la peau, les veines, les tempes - c'était un bruit fort, mais tellement vivant en même temps, et ce fut la première pensée qui me traversa l'esprit après le tourbillon de sensations qui m'avaient anéanti : jamais je ne m'étais senti autant
vivre. Je me laissai docilement embrasser, tout contre le corps chaud de Ruby, entre ses bras, et quand nous nous regardâmes je compris que cette vie était la même, celle qui me parcourait tout entier, et celle qui brillait au fond de ses yeux.

- Mon amour, tu trembles, murmura-t-elle, et en effet je me rendis compte que j'étais agité de frissons, contre lesquels je ne pouvais pas lutter. Il me semblait que mon corps ne réagissait plus à ma volonté, et je laissais ma tête se poser doucement contre la poitrine de Ruby, me laissant aller dans sa chaleur et l'odeur de sa peau.

- Serre-moi fort, dis-je entre deux respirations, car c'était tout ce que je voulais : qu'elle me serre contre elle.

Mes yeux se fermèrent, et bientôt je me sentis envahi d'une étrange torpeur, pas de sommeil, mais quelque chose de doux qui m'aidait à reprendre ma respiration, à calmer mon cœur affolé, à retrouver mes esprits, tandis que Ruby me tenait tout contre elle et que ses mains caressaient mes cheveux, mon cou, mon dos. Je ne sais combien de temps se déroula exactement, mais je ne voulais pas me sortir de cet état, c'était une telle sérénité qui s'infiltrait dans chacun des pores de ma peau tout contre celle de Ruby, c'était une telle assurance aussi, un tel... bonheur que je ne voulais surtout pas bouger, ou faire quoi que ce soit pour le faire fuir. Quand je sentis qu'il m'avait nourri tout entier, je bougeai un peu et cherchai le visage de Ruby pour déposer un baiser sur son front et chercher son regard, que je ne voulais plus jamais loin de moi.

Quand elle s'écarta, et qu'elle me souriait avec une telle grâce que je ne pouvais détacher mon regard d'elle, je lus dans son hésitation ce qui n'allait pas ; tout de suite je nous installai sous la couette, la prenant cette fois dans mes bras tout contre moi, enroulant mon bras autour d'elle pour affirmer ma propriété, et je l'embrassai plusieurs fois, en souriant et riant, glissant mes doigts dans ses cheveux qui glissaient un peu partout sur sa peau et la mienne. Mes doigts couraient sur son visage quand ce n'était pas les siens sur le mien, et j'étais bien, simplement bien. Je collais une seconde mon front contre le sien, respirant plus profondément. Je ne voulais plus jamais la lâcher...


- Dis, murmura-t-elle tout d'un coup, et je devinais à son ton que c'était un sujet sérieux, c'était comment... Avant ? Quand tu travaillais avec ton père, tout ça... Tu n'en parles jamais, qui... Qui prenait soin de toi ?

Sans que je puisse me retenir, cette question et son air si absorbé dans ce détail qui semblait réellement l'importer, me fit sourire, et ma main vint s'installer dans son dos, paume contre sa peau, tandis que mon pouce la caressait doucement. Je me redressais un peu pour mieux la voir, et méditais sur ma réponse. Je me sentais tellement détendu et en phase avec moi-même que je voulais lui livrer toute la vérité, de la manière la plus simple qui soit. Mais comment mettre des mots là-dessus ? Comment mettre des mots sur du vide ? Car c'était bien ça dont il était question : ces années floues, comme un court espace-temps dans la ligne de ma vie, ces années de blanc et de vide, où j'étais peu sorti, où j'avais rencontré peu de monde et où j'avais beaucoup travaillé. Bien sûr j'avais gardé contact à mes amis, et bien sûr de temps à autre je faisais ce que font les jeunes de mon âge, mais je n'avais goût à pas grand chose, et le fait de trop travailler m'avait permis d'être fatigué tout le temps, et de ne pas trop penser. Qui plus est, il y avait beaucoup de travail à faire pour la boîte de mon père, alors je me tuais à la tâche pour un but qui en valait la peine. Et le soir quand je rentrais, souvent après le dîner, c'était tant mieux : je me couchais, sinon, je dînais rapidement avec eux ou bien j'allais manger ailleurs, avec mes collègues, pour éviter ces confrontations. Entre mon père et moi les discussions étaient principalement basées sur le travail ; ma mère, sur ce qu'elle accomplissait dans la maison, dans le quartier. Dès qu'il y avait un blanc dans une conversation, ma mère s'empressait de dire des futilités, si tant est que l'envie me prenne d'aborder le sujet devenu tabou chez nous. Mais je n'avais pas eu la force de lutter contre deux, déjà que j'avais à peine la force de me maintenir debout. Il m'avait fallu des mois et des mois pour changer la disposition de la chambre, pour enlever les affaires de Jamie. Il était toujours là, quoi que je fasse. Il ne partait pas, et je me noyais avec lui, un peu plus chaque jour.

- Mon oncle et ma tante, et d'ailleurs, ils l'ont toujours fait, dis-je avec un petit sourire. Les week-end où j'allais les voir étaient les meilleurs, heureusement qu'ils étaient là, remarquai-je car en effet cela avait encore plus de justesse en le disant, mais je me demandais si j'aurais tenu sans le soutien et la bonté inconditionnelle de Bonnie et Matthew. Mais le reste du temps... Tu sais je travaillais beaucoup, et c'était tant mieux, vivre normalement aurait été bizarre, je ne savais pas comment faire. Ces années ont été le pire je crois, j'ai tellement vu mes parents s'éloigner et tout laisser tomber, et puis on ne devait jamais évoquer Jamie alors que moi je ne voulais que ça, et... Je haussai les épaules. Je n'en parle jamais parce qu'il n'a rien à dire, j'ai l'impression que ce sont des années entre parenthèses.

Je n'avais jamais été si direct avec elle, sans doute, je ne lui avais jamais dévoilé autant mes états d'âme, et cela me fit du bien. En la regardant, et en caressant les mèches de cheveux autour de son visage, je remarquai ses sourcils froncés et sa bouche pincée, dans une expression que je ne lui voyais pas beaucoup d'ailleurs : elle était mécontente, et je mis un quart de seconde à percuter que c'était sans doute suite à ce que je venais de dire. Je déposai un baiser sur sa bouche, et je me sentis parcouru d'un petit courant tiède qui fourmilla jusque dans le bout de mes doigts : qu'importait que personne n'ait pris soin de moi alors que maintenant elle était là, et que je sentais tellement fort la façon dont elle s'inquiétait pour moi, et le ferait toujours ?

En souriant et en collant mon visage dans son cou, je l'attirais tout contre moi, embrassant son front encore une fois pour que ses sourcils se défroncent.

- Mais tu sais... Tant pis, lui dis-je droit dans les yeux et avec un petit sourire. Ce qui compte, c'est maintenant. Je n'avais aucune idée de ce qui m'attendait en venant à Pré-au-Lard, à part que j'allais enfin avoir la liberté de vivre comme je le voulais. Je crois que je ne m'étais pas rendu compte que c'était difficile à accomplir... Mais tu es arrivée et tout a changé, je le sais maintenant. Je ne sais pas trop ce que j'aurais fait sans toi d'ailleurs, mais je suis sûr que tu m'as sorti de tout ça. Tu as tout changé, répétai-je en collant mon visage contre le sien.

Je ne voulais pas paraître ridicule, mais je sentais que mes yeux s'étaient un peu humidifiés - pas de tristesse mais de joie, parce que tout ça était vrai, parce que Ruby m'avait sauvé sur bien des tableaux, parce que je lui devais tant, parce que ça faisait tant de bien de le dire et que mon cœur était tout léger. Je fis glisser mon visage dans ses cheveux et fermai les yeux, respirant avec bonheur la quiétude qui apaisait chaque parcelle en moi, juste parce que Ruby était là, tout contre moi.
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Ruby Standiford-Wayland


Ruby Standiford-Wayland
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Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Empty
MessageSujet: Re: Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby   Moonlight drowns out all but the brightest stars | Ruby Icon_minitimeSam 7 Sep - 19:46

I carry your heart with me (I carry it in
my heart) I am never without it (anywhere
I go you go, my dear; and whatever is done
by only me is your doing, my darling)
I fear
no fate (for you are my fate,my sweet) I want
no world (for beautiful you are my world,my true)
and it’s you are whatever a moon has always meant
and whatever a sun will always sing is you

here is the deepest secret nobody knows
(here is the root of the root and the bud of the bud
and the sky of the sky of a tree called life ; which grows
higher than soul can hope or mind can hide)
and this is the wonder that's keeping the stars apart

I carry your heart (I carry it in my heart)

E.E. Cummings


Je n’avais jamais pu réellement imaginer ce que c’était, que de coucher avec quelqu’un. J’étais, sur ce plan, rapidement gênée, par les autres comme par mes propres pensées. Bien sûr que je m’étais demandée ce que ça ferait, si je le faisais avec Ewan. Mais c’était souvent mes craintes qui s’exprimaient ; est-ce que j’aurais mal, est-ce que j’y arriverais, est-ce que je lui ferais plaisir, est-ce que je serais à la hauteur ? Je n’arrivais pas à me figurer l’instant, à visualiser son corps contre le mien. Je ne voyais qu’une masse brumeuse, terrifiante, et à la fois… Quand nous nous embrassions, que nous nous laissions aller à des caresses un peu plus tendres, plus passionnées, je sentais tout mon corps réagir et je me demandais toujours… Si c’était si délicieux, un simple touché, la suite ne le serait-elle pas encore plus ? Je n’avais pas eu tort. Je comprenais maintenant d’où venait l’expression faire l’amour. C’était ça, c’était exactement ça, chaque caresse, chaque baiser, chaque impulsion, tout était orienté par le même sentiment. Il me conduisait, il conduisait Ewan, et nous étions plongés dans une bulle où chaque soupir expiré était un « je t’aime » qui en appelait un autre, et jamais ne m’étais-je sentie aussi aimée et désirable qu’en cet instant. Cette sensation me faisait tourner la tête un peu plus, et j’avais bien du mal à retenir tout ce qui criait en moi, tout ce plaisir qui ne pouvait que s’exprimer au travers de mes soupirs et de mes ongles qui s’enfonçaient dans le dos d’Ewan ; je m’accrochais en lui quand tout autour de moi disparaissait.

Et combien l’amour prenait tout son sens aussi, en cet instant. J’étais amoureuse d’Ewan, une part de moi l’avait toujours su. Depuis quand, je ne savais pas, il me semblait que dès le premier regard, j’avais souri un peu plus que d’habitude, dès qu’il avait serré ma main, j’avais frissonnée étrangement, et chaque mot qu’il m’adressait chantait dans mon oreille. Je savais pourquoi je l’aimais, et à la fois… Oui, je pouvais lui attribuer de nombreuses qualités, il était attentif, doux, discret, amusant, reposant, et bien plus encore. Mais ce n’était pas ça qui faisait battre mon cœur. C’était lui tout entier. C’était ça, je le comprenais, qui m’avait apeuré dès le début. Notre amour n’était pas forcément logique, ou du moins, il prenait toute sa force lorsqu’il échappait aux règles. Je ne pouvais pas quantifier mes sentiments, les expliquer, les contrôler : j’aimais Ewan, je l’aimais tellement que ça c’était répandu partout en moi. Le plus étonnant, c’est que je ne voulais pas y poser mon emprise, parce que je ne voulais rien altérer ; peu importe si ça dépassait, j’étais plus heureuse en cet instant que je ne l’avais jamais été. Cette unique constatation suffit à tout emporter sur passage, et je me collai encore plus contre Ewan, perdant totalement ma respiration dans mes gémissements qui montèrent crescendo avant de se perdre dans la dernière secousse qui m’agita toute entière.

Voilà, c’était exactement ça que je ressentais : j’étais entière. J’étais vivante.


- Serre-moi fort.

Nous nous étions à peine écartés qu’à nouveau, je l’attirais contre moi, le serrant dans mes bras avec beaucoup plus de douceur cette fois-ci.

- Je t’aime, murmurai-je à nouveau. Maintenant que j’acceptais ce sentiment, je ne voulais plus jamais m’en cacher.

Je sentais nos corps encore agités de tout ce qui les avaient saisis il y a un instant, et je souriais doucement, l’esprit encore empli de ces merveilleuses sensations. Si je fermais les yeux un instant, je revoyais son regard, son corps contre le mien, ses mains qui me caressaient, et je me sentais frissonner. Et lorsque j’ouvrais les yeux, que je voyais le visage apaisé d’Ewan contre ma poitrine, je me sentais sourire, d’un sourire qui émanait du plus profond de moi. Il me semblait en cet instant que je n’avais jamais connu l’amère solitude, la perdition, et que je n’avais jamais souffert. C’était comme si toutes mes plaies s’étaient refermées. Je savais que cela ne durerait pas, puisque rien ne pouvait effacer le passé, mais je voulais de ces moments où il n’était plus douloureux, et en vivre plus. Je savais qu’ils n’étaient possibles qu’au côté de personne que j’aimais et qui m’aimait en retour, et Ewan avait en lui ce pouvoir incroyable de me faire sentir réellement heureuse et apaisée. Mesurait-il l’importance que cela avait pour moi, et combien ce sentiment de bonheur qui n’était plus factice était addictif ? Comprenait-il que maintenant, je me sentais lier à lui, comme je ne l’avais jamais été, et que je ne voulais jamais sentir autre chose que notre amour qui faisait battre nos deux cœurs en accord ? Le savait-il ?

Parce qu’au fond, j’ignorais avant, de quoi sa vie était faite, de côté-là. Je savais qu’il n’avait pas eu de petite amie sérieuse, et si d’un côté l’inverse m’aurait rendu jalouse malgré moi, je n’aimais pas non plus l’idée qu’il ait été seul. J’avais besoin de savoir, de comprendre et malgré moi les mots coulèrent d’entre mes lèvres. Je laissais Ewan se redresser, frissonnant de ses doigts qui me caressaient, et j’attrapai son autre main libre, embrasse sa paume avant d’entourer nos doigts.


- Mon oncle et ma tante, et d'ailleurs, ils l'ont toujours fait. Les week-end où j'allais les voir étaient les meilleurs, heureusement qu'ils étaient là. Mais le reste du temps... Tu sais je travaillais beaucoup, et c'était tant mieux, vivre normalement aurait été bizarre, je ne savais pas comment faire. Ces années ont été le pire je crois, j'ai tellement vu mes parents s'éloigner et tout laisser tomber, et puis on ne devait jamais évoquer Jamie alors que moi je ne voulais que ça, et... Je n'en parle jamais parce qu'il n'a rien à dire, j'ai l'impression que ce sont des années entre parenthèses.

Mes sourcils s’étaient froncés malgré moi, et je sentais ma bouche se pincer dans une expression de mécontentement. Je m’en doutais, mais je n’aimais pas l’entendre : il avait été seul. J’étais reconnaissante envers son oncle et tante que, sans les connaître, j’appréciais déjà. J’avais la nette sensation qu’ils étaient les seuls membres de sa famille à le comprendre, à chercher à l’aider. Je me sentais amère tout à coup, et je n’avais pas envie parce que l’instant était merveilleux, mais je ne pouvais pas m’empêcher d’être… Révolter. Pourquoi l’avait-on laissé tout seul ?! Il était celui qui souffrait le plus de cette histoire, peut-être que ses parents avaient perdu un fils, mais Ewan avait perdu son frère jumeau, sa moitié. Il était le seul à réellement sentir une déchirure physique, il lui manquait une moitié de lui, et il avait dû se reconstruire tout seul. Comment pouvait-il même faire son deuil lorsque tout le monde agissait comme si de rien n’était, comme si Jamie n’existait pas ?! Une drôle de vague me prit, quelque chose proche de la violence, mais Ewan l’arrêta d’un simple baiser. Je lui rendis, doucement, toujours légèrement embêtée. Il devait le remarquer, puisqu’il m’embrassa entre mes deux sourcils froncés, et qu’il m’attira contre lui. Il s’était un peu redressé, et j’appuyais mon buste contre le sien, mon visage un peu en contre bas du sien, laissant ses bras me tenir toute entière tandis que mes mains se posaient sur son torse. Le fait que nous soyons tous les deux nus ne me gênaient plus comme avant, à vrai dire, c’était même agréable de sentir la chaleur de sa peau qui déclenchait des frissons sur la mienne.

- Mais tu sais... Tant pis. Je fronçai les sourcils un peu plus. Je n’aimais pas quand il se mettait de côté comme ça, comme s’il ne comptait pas. Ce qui compte, c'est maintenant. Je n'avais aucune idée de ce qui m'attendait en venant à Pré-au-Lard, à part que j'allais enfin avoir la liberté de vivre comme je le voulais. Je crois que je ne m'étais pas rendu compte que c'était difficile à accomplir... Mais tu es arrivée et tout a changé, je le sais maintenant. Je ne sais pas trop ce que j'aurais fait sans toi d'ailleurs, mais je suis sûr que tu m'as sorti de tout ça. Tu as tout changé.

Tu as tout changé.

Je le laissai glisser son visage contre le mien, dans mes cheveux, son souffle effleurant mon oreille, ma nuque. Le mien se faisait étrangement moins régulier, et je restai muette. J’avais vu l’éclat dans ses yeux, j’avais entendu ces quatre mots qui résonnaient encore partout en moi.

Tu as tout changé.

Quelque chose éclata, et je compris tout à coup que je m’étais mise à rire, mais aussi à pleurer. Je sentis Ewan bouger, dégager sa tête de mes boucles, et je me plaquai tout contre lui, embrassant ses lèvres avec fougue, mes mains attrapant son visage, sa nuque, ses épaules. Je m’écartai, lui faisant face, et je réalisai que ses yeux brillaient aussi, j’essuyais les miens, riant toujours, et je passai mon pouce sur l’unique larme qui avait dévalé le long de sa joue. Tout mon cœur s’agitait, je me sentais trembler un peu, et je voulais être encore plus près d’Ewan si c’était possible, sans pouvoir cesser de le regarder. Je détaillais son visage, j’imprimais chaque détail que je ne voulais jamais oublier et je me sentais toujours au bord des larmes, mais un immense sourire sur mes lèvres.

- Excuse-moi, murmurai-je en essuyant mes joues, c’est juste que… Je me mis à sourire encore plus, et je baissai les yeux, un peu gênée. Tu sais, toi aussi tu… J’aurais jamais cru pouvoir vivre ça. Je marquai une pause, et levai mon regard vers le sien. Je penchai vers son visage, pour déposer un long baiser sur ses lèvres. Mais je n’avais pas fini. Le faire, avec quelqu’un qui compte autant, et sentir tout ça, ne pas avoir peur, ajoutai-je à voix basse. Je fermais les yeux, me nichant dans son cou, souriant. Il m’entourait de ses bras, et l’une de mes mains se posa sur la sienne. Merci, murmurai-je doucement. Je repris ma respiration, lentement, avant de m’écarter un peu, et de plonger à nouveau mes yeux dans les pupilles d’Ewan. Les siennes me donnaient de tels frissons… Mais je sentis mes sourcils se froncer. J’avais besoin de clarifier quelque chose. Mais je ne veux plus jamais que tu vives ça, et ça m’énerve, je ne comprends pas pourquoi on t’a laissé comme ça, tout seul. Je sentis dans ma voix une certaine colère, que je tentais tout de même de tempérer, la transformant en autorité. Je… Je veux tout faire pour que tu sois heureux. Je veux tout changer, achevai-je, en reprenant ce qu’il avait dit.

Finalement, je replongeai mon visage dans son cou, et j’aplatis la couverture sur nous, avant de prendre une grande inspiration. Tout ce que j’avais vécu en l’espace d’une soirée me laissait à présent épuisée, et je fermai les yeux, luttant cependant un moment contre le sommeil. Je ne voulais pas que tout ça se termine. Je nouai mes doigts autour de ceux d’Ewan, et déposai un baiser dans sa nuque.

Au fond, ça ne se terminerait jamais vraiment, tout ce que je ressentais, n’est-ce pas ?

THE END

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